523 - État de l’avancement des connaissances et des pratiques innovantes issues de la recherche en orthopédagogie

La compensation en lecture permet à certains élèves en difficulté de comprendre un texte lu de manière autonome, malgré un déficit des processus spécifiques d’identification des mots écrits. Ces lecteurs, appelés ici les « lecteurs compensateurs » (LC), représentent un défi pour l’évaluation orthopédagogique puisque leurs difficultés ne sont pas toujours apparentes (Etmanskie et al., 2016). Cette communication présente les résultats d’une recherche qui vise à décrire en partie le mécanisme de compensation en lecture au niveau des mots écrits, plus particulièrement le rôle de la sémantique lexicale dans cette compensation. S’appuyant sur l’effet de contexte (Stanovich, 2000), une tâche d’amorçage sémantique avec décision lexicale a été proposée à 14 LC et 15 lecteurs contrôles (CT). La précision et le temps de réponse ont été mesurés, ainsi que les amplitudes et latences de deux composantes connues de l’électroencéphalographie (EEG), la P200 et la N400. Les résultats montrent une plus grande sensibilité à la sémantique chez les LC, même si le temps de présentation des mots est très court (150 ms). Par ailleurs, les données d’EEG indiquent que les LC recourent plus tôt que les CT à la sémantique lexicale ; seuls les LC présentent un effet de la sémantique 200 ms après la présentation du mot à lire. Les impacts de ces résultats concernent l’évaluation orthopédagogique, ainsi que les modèles cognitifs connexionnistes d’identification des mots écrits (Plaut et al., 1996).

Les interventions spécialisées en orthopédagogie constituent le moyen privilégié d’accompagner les élèves en difficulté dans une visée inclusive. Or les pratiques des orthopédagogues varient beaucoup malgré l’assise théorique commune de la pédagogie de projet (Danancier, 2011 ; Montreuil et Magerotte, 2014 ; Vianin, 2016)[1]. Nous montrerons, lors de notre présentation, comment les enseignant.es d’appui aident concrètement les élèves en difficulté et quelles sont les pistes permettant d’améliorer le dispositif de l’appui.

Dans notre étude (devis qualitatif), nous avons comparé, en interrogeant des orthopédagogues, les pratiques effectives avec les directives officielles et les démarches proposées dans la littérature. Nos résultats montrent que les enseignant.es spécialisé.es développent une vision globale de la problématique de leurs élèves, mais qu’ils engagent très souvent un travail de « rattrapage », en centrant leurs interventions exclusivement sur les difficultés scolaires (en français et en maths). L’aide ne correspond donc pas à la démarche de Projet pédagogique individuel (PPI), telle que préconisée dans les directives valaisannes.

Nous proposons plusieurs pistes permettant d’améliorer le dispositif de l’appui. Lors du colloque, nous développerons celle qui nous parait la plus intéressante pour le travail de l’orthopédagogue : la focalisation sur une priorité d’intervention (le « point nodal »).

La structure universitaire élaborée en silos disciplinaires (Policard, 2014) prépare peu à l’exercice de l’interprofessionnalité nécessaire aux réalités du marché du travail, notamment en éducation (CSE, 2017, 2020). Ainsi, la formation initiale en orthopédagogie, grâce aux cliniques universitaires, se doit de devenir pionnière quant au développement d’une culture de collaboration misant sur l’éthique professionnelle et le partage d’expertise nécessaire au développement des futurs orthopédagogues. Afin de permettre le développement de compétences propres à la collaboration interprofessionnelle (CPIS, 2010), un projet d’intervention interprofessionnel a été mis sur pied à l’UQAC. Pendant 3 mois, les étudiants et les professeurs des cliniques universitaires en orthopédagogie et en travail social ont travaillé ensemble afin d’intervenir auprès d’élèves et de familles. Les données qualitatives et quantitatives collectées auprès des étudiants lors de deux questionnaires (prétest et posttest) et d’un focus groupe final ont permis de mettre de l’avant, à l’instar de la littérature (Baron et al., 2023), l’importance d’avoir une structure dédiant temps et espace, afin de faciliter la collaboration interprofessionnelle et le développement professionnel. Les enjeux soulevés mettent en exergue les difficultés communicationnelles, celles liées à la connaissance des rôles et responsabilités de chacun, ainsi que certains enjeux éthiques liés à la confidentialité en contexte collaboratif.

La présentation portera sur le développement de la fluidité en lecture auprès d’élèves à risque et en difficulté d’apprentissage (HDAA) de la 2^e à la 4^e année. Plusieurs chercheurs s’entendent pour dire que les deux éléments essentiels au bon développement de la fluidité en lecture sont le décodage et la reconnaissance automatique de mots, comme c'est le cas dans la théorie de l’automaticité de Laberge et Samuels (1974).  D’autres chercheurs dont Hudson, Lane et Pullen,(2005), Kuhn, (2005) Kuhn et Stahl, (2003), Dowhower, (1991) et Allington,(1983) mentionnent que la définition devrait maintenant inclure la notion de prosodie ou l’expression.  La recherche quasi-expérimentale menée par une orthopédagogue-chercheuse a pour objectif spécifique d’évaluer les effets de la mise à l’essai d’un programme d’activités pédagogiques sur la fluidité en lecture d'élèves HDAA aux paliers 2 et 3 du modèle de la RàI. Nous avons évalué individuellement la fluidité de 260 élèves, de la 2^e à la 4^e année, en prétest et posttest, en tenant compte des trois composantes de la fluidité (rapidité, exactitude et prosodie). Lors de notre collecte de données, nous avons utilisé trois grilles d’analyse en plus d’effectuer des analyses descriptives des données. Nos résultats relèvent, entre autres, des gains significatifs quant à l’exactitude chez les élèves de 2^e et 4^e année du primaire. Les résultats obtenus illustrent les effets positifs de la mise à l’essai du programme d’activités pédagogiques.

Selon un large spectre de définitions, la collaboration est parfois considérée comme une compétence personnelle du 21^e siècle et, plus largement, comme faisant partie intégrante d’une culture, élément clé d’une éducation équitable (Griffiths et al., 2020). Selon la Politique de la réussite éducative, la collaboration est caractéristique d’une culture d’un système éducatif – d’équipe-école et un vecteur de « meilleures pratiques sur les plans pédagogique, organisationnel et communicationnel » (MEQ, 2017, p. 32). Or, cette collaboration a été au cœur de recherches-actions menées en partenariat avec deux équipes - écoles ayant comme visée l’amélioration de leurs pratiques d’enseignement en littératie auprès d’élèves ayant des difficultés persistantes d’apprentissage de langage. La méthodologie intègre plus de six ans de collectes de données qualitatives (p. ex. plans de développement professionnels coconstruits, entretiens individuels et de groupe, synthèses de rencontres) en contexte de recherches participatives auprès de personnels de ces deux écoles (enseignants spécialisés, éducateurs, direction et professionnels). L’analyse thématique montre une diversité de facteurs liés à la collaboration d’ordre relationnel, organisationnel, temporel, matériel, entre autres. La discussion permettra de dégager les éléments clés ayant favorisé l’établissement d’une culture de collaboration entre enseignants spécialisés ou orthopédagogues et les autres acteurs de ces équipes-écoles.

Les rôles et les fonctions de l’orthopédagogue se sont transformés au gré de la pénurie de personnel et du contexte pandémique. Cette modulation s’est répercutée dans l’organisation des services scolaires et a généré des tensions de rôles (Royal et Brassard, 2010). L’objectif de cette recherche visait à mieux comprendre les attentes formulées à l'égard des orthopédagogues et ce qu’ils mettent en place au quotidien. Pour ce faire, un questionnaire a été administré à 136 orthopédagogues (Granger et al., 2021). En vue de préciser certaines informations, des entretiens semi-directifs ont été réalisés auprès de 12 orthopédagogues, 4 formateurs et 5 directions (Fontaine et al., 2022). Des analyses quantitatives et qualitatives ont été réalisées afin de clarifier la réalité vécue par les orthopédagogues.  Cette communication présente les résultats de cette recherche mixte descriptive et tisse des liens entre les deux prises de données. Le croisement des résultats avec des recherches antérieures sur les facteurs associés à leur évolution (Galloway et Lesaux, 2014) et à leur développement professionnel (Duchaîne et al., 2021) permet de comprendre les changements souhaités et vécus par les orthopédagogues et d’en préciser des aspects caractéristiques. Les résultats montrent que la mission des orthopédagogues n’est pas toujours en phase avec les besoins, ce qui les amène à revoir l’organisation des services et à souhaiter une collaboration accrue. Des pistes de solution sont discutées.

Afin de soutenir les élèves en situation de handicap ou en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage (HDAA), les centres de services scolaires se dotent d’une politique d’organisation des services éducatifs, notamment les services d’orthopédagogie (Gouvernement du Québec, 2020). Pour que ces services contribuent efficacement à la réussite éducative des élèves, les pratiques collaboratives de l’orthopédagogue avec les acteurs scolaires (enseignants, directions, professionnels et parents) sont essentielles (Rousseau et Point, 2014). Les quelques études portant sur la collaboration se sont intéressées au primaire ou, lorsque le niveau secondaire est étudié, les résultats ne permettent pas d’établir un portrait clair des pratiques collaboratives (Boily, 2019; Granger et al., 2021). L’objectif de cette communication est de décrire les pratiques collaboratives adoptées par les orthopédagogues et les différents acteurs scolaires à l’égard des services offerts aux élèves HDAA au secondaire. Au total, deux groupes de six orthopédagogues du secondaire ont pris part à une discussion semi dirigée, qui a ensuite fait l’objet d’une analyse qualitative. Les résultats présentent une diversité des pratiques collaboratives adoptées par les orthopédagogues et les différents acteurs scolaires ainsi que les facilitateurs et les obstacles à la collaboration. En réponse à ces résultats, la discussion aborde le rôle de l’orthopédagogue quant à la collaboration avec les autres acteurs scolaires.

Le système scolaire québécois comprend deux secteurs d’enseignement, un public et un privé. Ces secteurs se distinguent, notamment, quant au financement et à la sélection des élèves (Gouvernement du Québec, 2020). Au regard de ces différences, il est possible de croire que le rôle des intervenants, dont celui de l’orthopédagogue, diffère aussi entre les écoles publiques et les écoles privées. En fait, McLaughlin (2018) explique que la tâche de l’orthopédagogue varie d’un milieu à l’autre, ce qui pourrait également être observable entre les deux secteurs. Bien que des études aient porté sur la description des fonctions et des modalités de services orthopédagogiques au secondaire, les résultats n’ont pas été explicités selon le secteur de travail (Ruberto et al., soumis). La visée de cette communication est de décrire les fonctions et les modalités de services des orthopédagogues du secondaire selon leur secteur de travail. En s’appuyant sur des groupes de discussion composés de 12 orthopédagogues (Ruberto et al., 2021), un questionnaire en ligne a été conçu pour collecter les données. Au total, 135 orthopédagogues du secondaire, dont 89 du public et 46 du privé, ont répondu à 51 questions. Les résultats indiquent qu’il y a des ressemblances et des différences quant aux fonctions et aux modalités de service déployées par les orthopédagogues selon leur secteur de travail. Les retombées de ce projet, tant sur le plan scientifique que sur le plan de la pratique, seront discutées.

En orthopédagogie, les mathématiques sont souvent délaissées au profit du français. Les élèves rencontrent tout de même des difficultés dans cette matière, notamment en arithmétique. Le développement du raisonnement multiplicatif représente un enjeu conceptuel important. Les causeries mathématiques (CM) constituent un dispositif d’enseignement innovant permettant de travailler différents concepts mathématiques par le dialogue et la réflexion en classe. Pour le recours à ce dispositif, la mise en place d’un projet collaboratif où la personne enseignante et la personne orthopédagogue sont impliquées offre des avantages considérables. Les CM ont été utilisé et une séquence a été conçue pour soutenir le développement du raisonnement multiplicatif des élèves d’une classe multiniveau du 2e cycle du primaire. La séquence de 6 semaines totalisant 22 causeries mathématiques a été planifiée et mise en œuvre en collaboration avec une enseignante, alors que j’agissais comme orthopédagogue. Dans cette communication, nous présenterons l’organisation et les modalités du projet ayant favorisé la collaboration entre les deux personnes impliquées et le soutien de la personne enseignante impliquée auprès des élèves à risque ou en difficulté. Puis, nous allons nommer les caractéristiques d’une séquence ainsi que les constats qui ont découlé de l’expérimentation. Finalement, nous allons préciser de quelle façon les CM peuvent contribuer à la prévention des difficultés en mathématique.