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Christelle Pelbois, Université du Québec à Trois-Rivières, Marek Blottière, Institut national de la recherche scientifique, Geneviève Dupéré, Université du Québec à Montréal, Benoît Corsini, Université de technologie d'Eindhoven (Pays-Bas)

Un parcours aux études supérieures s'ouvre sur un vaste territoire. Il y a mille chemins possibles, de multiples manières de s'y orienter, maints embranchements où s'égarer. Il y a cependant un but, sortir un jour du labyrinthe, idéalement avec le papier officialisant qu'on a bien complété le jeu [ceci dit, je suis sortie du parcours doctoral après deux ans de scolarité, et j'y ai fait des apprentissages qui m'habitent encore]. Mais qu'est-il possible d'apprendre aux études supérieures? Voici quatre récits de chercheuses et chercheurs qui ont répondu à notre invitation, comme autant de coups d'oeil sur différentes boussoles.

  • Johanne Lebel, rédactrice en chef

Un éloge du « savoir faire des choix »

Christelle Pelbois, communication sociale
Université du Québec à Trois-Rivières

Mes études supérieures m’apprennent que l’expression consacrée selon laquelle la meilleure thèse est celle qui est terminée ne fait pas uniquement l’éloge de la persévérance. C’est aussi, ou surtout, l’éloge de savoir faire des choix et d’accepter les coûts d’opportunité qui les influencent :

  • le choix relatif à la direction de la thèse qui conditionne l’accompagnement dont le doctorant bénéficiera pendant son long parcours;
  • le choix du sujet et de l’objet de la recherche qui mobiliseront beaucoup… parfois trop peut-être, son temps, son énergie, son quotidien, voire même celui de son entourage;
  • ou encore, le choix de la méthodologie appropriée…

Tous ces choix, bien qu’emblématiques ne sont que la partie émergée de l’iceberg du parcours doctoral. Submergé par le flot continu d’articles scientifiques pertinents à sa recherche, quel doctorant n’a pas été tenté d’ajouter une énième phrase, une dernière nuance ou une ultime précision à un article rédigé et qu’il croyait jusque-là suffisamment abouti? À quelles perspectives doit-il renoncer pour en embrasser d’autres? À quels coûts d’opportunités le doctorant est-il confronté face au choix de citer certains auteurs pertinents à sa recherche, mais pas tous ? Quelles collaborations prioriser et auxquelles renoncer ?

Et si finalement, le plus important des choix n’était-il pas celui d’accepter d’appréhender son parcours doctoral, comme une expérience d’apprentissage unique, avec un début et une fin, même si celle-ci semble d’abord lointaine, et permettant non seulement de répondre temporairement et toujours incomplètement à certaines questions d’intérêt; mais aussi de revisiter constamment sa disposition à questionner son système de pensée et ses ambitions et limites disciplinaires?

Et si finalement, le plus important des choix n’était-il pas celui d’accepter d’appréhender son parcours doctoral comme une expérience d’apprentissage unique, avec un début et une fin...

 

Expérience d’un (premier) colloque

Marek Blottière, sociologie
INRS

Il est déjà 18h 55 quand j’arrive à Québec, le mardi 10 mai 2022.

Plus qu’une nuit et je serai devant eux. Une fois installé dans la petite chambre de l’hôtel Sainte-Anne, l’anxiété commence à monter. Demain, je donnerai ma première conférence sur les transformations des médias en lien avec le numérique, lors du congrès de l’Acfas (en fait, mon premier panel, mais à ce moment-là, conférence ou intervention dans un panel, c’est pareil).

Quelques mois plus tôt, alors que je travaillais sur le système médiatique canadien et québécois pour le projet de recherche Shaping AI, j’ai contacté Colette Brin, directrice du Centre d’études sur les médias, qui terminait un chapitre sur la responsabilité des médias canadiens. Je lui mentionnai que j’étais intéressé à consulter son chapitre. Cela faisait plus d’un an que je travaillais sur ma recherche, et j'avais déjà fait l’analyse des 14 entrevues réalisées avec des journalistes. Colette Brin accepta de me transmettre le manuscrit et me proposa dans le même temps de participer à ce panel.

Il est 19 h 40 lorsque je décide d’aller voir la salle où je présenterai demain.

Je me dis que ça réduira un peu mon stress. Par chance, la porte est ouverte. Je rentre et m’imprègne des lieux. J’essaie différents sièges et j'imagine mes proches dans la salle. Ça me rassure. Je me sens prêt.

En commençant mes études supérieures, j’ai eu l’impression de sauter dans le vide. Le contexte pandémique n’a pas aidé et souvent, ça a été un parcours assez solitaire. Pourtant, à chacune de ses étapes, j’ai été accompagné d’une manière ou d’une autre, que ce soit en contactant mes pairs ou en imaginant mes proches. Briser la solitude et communiquer, cela a été pour moi l’un des plus importants apprentissages de ce cheminement.

Briser la solitude et communiquer, cela a été pour moi l’un des plus importants apprentissages de ce cheminement.

 

Une marée de connaissances et d’interdépendances

Geneviève Dupéré, études et pratiques des arts, recherche-création maritime
Université du Québec à Montréal

Mes études supérieures m’ont appris à décortiquer des appâts, identifier des rorquals bleus, déployer des filets de zooplancton, relever des casiers de crabes des neiges, observer des opérations de déglaçage de la voie maritime, assister à un chargement portuaire de minerai de fer.

Est-ce que les arts du cirque peuvent me permettre d’explorer la complexité de l’écosystème du Saint-Laurent et transposer sur scène la profondeur de ce qui nous y relie? Mon doctorat en recherche-création maritime m’a appris à ramer pour traverser du fleuve à la scène.

En 2017, je pars à la découverte du Saint-Laurent. Du fleuve au golfe, je rencontre plus de 300 acteurs de cet écosystème, venant des sciences marines et des eaux douces, de la pêche et de l’industrie maritime et portuaire. Je navigue à bord de navires de recherche, brise-glace, barques, traversiers. De ce sillage, émerge écH2osystème dont le processus de recherche-création maritime s’empreint de connaissances scientifiques et sectorielles, de savoir-faire, de liens tissés et de milliers de mémoires qui s’amoncellent.

À travers les échos des collaborateurs, écH2osystème ne cherche pas à expliquer, mais à évoquer la complexité du Saint-Laurent. Cette approche de collaboration, de transmission et de coconstruction cherche, au moyen des arts vivants, à transposer la complexité d’un écosystème dont nous faisons partie à une échelle qui nous interpelle. Je croise alors les codes acrobatiques et maritimes, en imaginant un appareil novateur. Deux acrobates à son bord, le O d’écH2osystème s’accroche à une grue sur les berges, de sorte que le fleuve rythme le récit en temps réel.

Mes études supérieures m’ont non seulement permis d’explorer à quel point les écosystèmes nous rallient à travers une marée de connaissances et d’interdépendances, mais elles m’ont aussi appris à repenser les arts vivants selon un modèle qui puisse porter cette marée du fleuve au spectateur.

Pour en savoir plus :

Mes études supérieures m’ont non seulement permis d’explorer à quel point les écosystèmes nous rallient à travers une marée de connaissances et d’interdépendances, mais elles m’ont aussi appris à repenser les arts vivants selon un modèle qui puisse porter cette marée du fleuve au spectateur.

 

Partager sa recherche et sa passion

Benoit Corsini, mathématiques
Université de technologie d'Eindhoven (Pays-Bas)

J’ai toujours été passionné par les mathématiques, par les problèmes qu’elles posaient, et par les problèmes que je les pensais capable de résoudre. Durant des années, celles-ci me semblaient avoir des possibilités infinies d’application, mais on continuait à me répéter qu’elles ne servaient à rien dans « la vraie vie »; en effet, ce n’est pas tous les jours que l’on a besoin d’appliquer les règles de la trigonométrie ou le théorème de Pythagore.

Cependant, au cours de mes études supérieures, j’ai commencé à découvrir de plus en plus de domaines où les mathématiques jouaient un rôle primordial et ai ainsi pu me rendre compte que, dans les faits, nous utilisons tous les mathématiques au quotidien. Que ce soit du fait de leur rôle dans le domaine de la physique, ou bien de par leur relation intrinsèque avec l’informatique, il se trouve qu’un geste aussi simple que d’utiliser son téléphone cellulaire fait appel à plus de concepts mathématiques que je ne pourrais citer.

Partant de cette observation, j’ai depuis quelques années cherché à partager ma recherche et ma passion pour les mathématiques avec un public aussi large que je le pouvais, afin de montrer que celles-ci sont plus intéressantes et utiles qu’on ne le laisse croire. Ceci m’a amené à développer un ensemble de compétences que je pense très importantes pour un chercheur : synthétiser mon travail, m’adapter face à un nouveau public, et globalement améliorer ma prise de parole. Ces différentes expériences de présentation m’ont déjà permis de partager mon travail et de collaborer avec des acteurs dans différents domaines.

Je ne suis aujourd’hui qu’au début de ma carrière, mais j’ai déjà pu apprécier l’importance d’une bonne communication, et je pense qu’il est utile de développer ces compétences afin de rendre notre travail, souvent complexe, plus accessible, afin de donner nos travaux en partage...

Je ne suis aujourd’hui qu’au début de ma carrière, mais j’ai déjà pu apprécier l’importance d’une bonne communication, et je pense qu’il est utile de développer ces compétences afin de rendre notre travail, souvent complexe, plus accessible, afin de donner nos travaux en partage...


  • Christelle Pelbois
    Université du Québec à Trois-Rivières

    Titulaire d'une maîtrise en administration, Christelle Pelbois est candidate au doctorat en communication sociale à l'Université du Québec à Trois-Rivières. Son parcours professionnel en gestion, d'abord dans le milieu de la santé, puis celui de l'enseignement supérieur, l'ont conduite à s'intéresser aux humanités numériques et au développement et à la gouvernance du paysage universitaire.

  • Marek Blottière
    Institut national de la recherche scientifique

    Marek Blottiere est étudiant-chercheur en Science Technologie et Société (STS). Il s'intéresse, dans le cadre de ses recherches pour le projet Shaping AI, au développement de l'intelligence artificielle au Canada. Il est présentement en dernière année de maîtrise à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), et il est boursier du Fond de recherche du Québec - Société et Culture. Il étudie l'écosystème médiatique canadien, et la façon dont il façonne la politique culturelle de l'IA.

  • Geneviève Dupéré
    Université du Québec à Montréal

    Vingt années en arts de la scène ont mené Geneviève Dupéré aux cérémonies Olympiques et Paralympiques (Compagnia Finzi Pasca), Cirque du Soleil (Luzia, Amaluna), 375e anniversaire de Montréal (Avudo, Finzi Pasca), Unikkaaqtuat (7 Doigts, Artcirq), comme sur divers opéras, créations et tournées à travers le monde. En 2017, elle amarine son parcours. Doctorante, elle imagine la recherche-création maritime. Son projet écH2osystème investigue du fleuve au golfe pour naviguer du fleuve à la scène. Professeure depuis 2014 (École nationale de théâtre), chercheuse depuis 2019 (École nationale de cirque), présidente du comité cirque depuis 2021 (Conseil des arts de Montréal) et chargée de cours depuis 2022 (mobilisation des connaissances, environnement et développement durable, Université de Montréal), elle vise approfondir ses travaux des Grands Lacs à l’Arctique.

  • Benoît Corsini
    Université de technologie d'Eindhoven (Pays-Bas)

    Benoît Corsini est un chercheur en mathématiques qui vient récemment de terminer son doctorat à l’université McGill. Il étudie les propriétés des réseaux aléatoires, souvent utilisés pour modéliser les réseaux routiers, les réseaux sociaux, ou encore les réseaux téléphoniques. Sa recherche s’intéresse à certaines propriétés structurelles de ces réseaux, telles que la distance entre deux éléments (ex : nombre de routes entre la maison et le bureau), les liens entre structures locales et globales (ex : cercle d’amis/ensemble des utilisateurs d’un réseau social), ou leur connectivité (ex : si tout le monde est à proximité ou non d’une antenne téléphonique).

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