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Depuis 2017, Geneviève Dupéré explore le Saint-Laurent. Elle est conceptrice du projet écH2osystème, chercheure au CRITAC (Centre de recherche, de l’École nationale de cirque), professeure à l’École nationale de théâtre et titulaire d'un doctorat en études et pratiques des arts à l’UQAM. Depuis 2022, elle enseigne également  le cours Mobilisation des connaissances, à la maîtrise en environnement et développement durable à l’Universié de Montréal.

Avec ses statuts multiples, elle traverse du fleuve à la scène. Par la recherche collaborative intersectorielle, elle s’intéresse à la complexité de la dynamique de cet écosystème dont nous faisons partie, à la confluence des sciences, des pêcheries et de l’industrie maritime et portuaire. Du projet écH2osystème, a découlé un modèle de recherche-création socio-écologique, le modèle écH2osystémique. Ce modèle invite à partir de la complexité d'une problématique environnementale ou d'un écosystème, à travailler de concert avec les acteurs et actrices des milieux de pratique et de la recherche scientifique afin de chercher à évoquer cette complexité dont nous faisons partie. 

En 2022, elle est invitée à faire partie du pôle des artistes de la Semaine des Océans du Canada dans le cadre de la Décennie des océans des Nations Unies. Ses premiers travaux de recherche-création sur la maritimité du Saint-Laurent remontent à 2015, en tant que directrice du contenu historique et artistique d’Avudo, projet phare du 375eanniversaire de Montréal. (2017, Compagnia Finzi Pasca) En amont, elle parcourt le monde durant vingt années sur des projets allant du cirque à l’opéra et des spectacles de grande envergure dont le Cirque du Soleil et deux cérémonies olympiques avec la Compagnia Finzi Pasca.

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Est-ce que par les arts du cirque, il serait possible d’explorer la complexité de l’écosystème du Saint-Laurent et de transposer sur scène ce qui nous y relie ?

écH2osystème est un projet de recherche-création sur le fleuve Saint-Laurent. Il évolue au gré de la vitalité de cet écosystème et d’une démarche collaborative intersectorielle qui permet de transposer les connaissances au moyen des arts vivants.

Le modèle écH2osystémique qui découle de ce projet, se destine à l'enseignement tant en arts qu'en sciences. Depuis deux ans, ce modèle est introduit et appliqué tant par des étudiants et des étudiantes de l'École nationale de théâtre que par des étudiants et étudiantes en sciences, à la maîtrise en environnement et développement durable à l'université de Montréal (EDD6005, Mobilisation des connaissances). Ce modèle aborde la recherche-création tel un mode d’exploration et de transposition d’une forme dynamique de la connaissance à partir d’un écosystème ou d'un problématique environnementale dont nous faisons partie pour chercher à s'adresser au grand public.

En 2017, je pars à la découverte du Saint-Laurent. J’assiste au décorticage des appâts, à la photo-dentification des rorquals, au déploiement des filets de zooplancton, à la relève des casiers de crabes des neiges, au déglaçage de la voie maritime, à un chargement portuaire de minerai de fer, aux manœuvres de pilotage sur le tronçon fluvial. Du fleuve au golfe, je rencontre plus de 300 acteurs et actrices de cet écosystème, venant des sciences marines et des eaux douces, de la pêche et de l’industrie maritime et portuaire. Je navigue à bord de navires de recherche, brise-glace, barges, barques, remorqueurs, traversiers, vraquiers. De ce sillage, émerge écH2osystème dont le processus de recherche-création maritime s’empreint de connaissances scientifiques et sectorielles, de savoir-faire et de milliers de mémoires qui s’amoncellent.

À même le pont des navires, des liens se tissent, devenant à la fois les fils conducteurs du récit et les mailles d’un langage acrobatique maritime qui se tisse. Pour traverser du fleuve à la scène, je croise les codes pour imaginer des manœuvres circassiennes et maritimes, à travers un appareil novateur. Deux artistes de cirque à son bord, le O d’écH2osystème s’accroche à une grue sur les berges, de sorte que le fleuve rythme le récit en temps réel, au son d’un paysage sonore mettant en scène les échos des collaborateurs et collaboratrices du fleuve au golfe. En suivant ce fil, l’approche de collaboration et de cocréation émergeant de ce projet, questionne le rôle possible des arts comme mode de connaissances à partir d’un écosystème, vu tel un système d’interrelations complexes dont l’humain fait partie. (Dansereau, 1973, p.81)

Pour l’écologiste et biologiste Pierre Dansereau, les arts éclairent les découvertes en mettant les processus scientifiques sous les projecteurs.  (1973, p.58) En ce sens, écH2osystème est un projet qui ne cherche pas à expliquer, mais à mettre en lumière la dynamique du Saint-Laurent, omniprésente dans nos vies comme dans nos sociétés. Cette approche intersectorielle se trouve cœur de la démarche d’écH2osystème qui cherche à explorer l’écosystème du Saint-Laurent dans toute sa complexité, à saisir les potentiels stratégiques de la recherche-création comme mode de connaissance collaboratif et à nous interpeller sur un écosystème « dans lequel nous vivons, non pas au titre de spectateurs, mais au titre de participants. » (Berleant, cité dans Afeissa, 2015, p. 104)