En partant du phénomène contemporain de l’affluence d’archives privées qui s'intègrent à une mémoire de type public, auquel se réfère Pierre Nora dans Lieux de mémoire (1992), j’envisage de définir le statut d’archive de deux œuvres hybrides de Christian Boltanski, composées des mots et des images sur des supports variés, Les Suisses morts et La vie impossible de Christian Boltanski, et de les repenser en tant que « lieux » de mémoire artificielle, en fonction des différentes formes d’enregistrement matériel et en tant que littérature.
La transformation de l’archive en œuvre est un phénomène fréquent dans le monde littéraire et artistique contemporain, qui peut être étudié dans une perspective intermédiale.Tout en problématisant le geste d’archiver de Boltanski, je questionnerai d’un côté, son pouvoir de stabilisation de l’archive et d’un autre côté, son pouvoir de la modifier, par la création de l’amnésie.
La grande archive inachevée qu'est l'œuvre entière de Boltanski fonctionne selon les règles de la caducité, qui considèrent l’espace en tant que dispositif réutilisable et le temps, en tant qu'artefact malléable, le livre ouvert, aux pages noires, de La vie impossible, en étant le principe organisateur.
Cette recherche se propose d'intégrer Boltanski dans une perspective littéraire, dont l'auteur se revendique à travers ses textes, qui représentent les noyaux de sens de ses œuvres, et en même temps dans une continuité de pensée qui devance l'apparition du web.