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Voyage léger de Mélissa Verreault (2011) et Carnets de naufrage de Guillaume Vigneault (2000) possèdent une histoire similaire : à la suite d’une rupture amoureuse, les personnages principaux sont déroutés et décident de quitter leur milieu respectif pour trouver un sens à leur existence. La fin des oeuvres coïncide avec le retour des personnages sur les lieux qu’ils avaient initialement quittés. Chez Verreault et Vigneault, la résolution de l’histoire ne se limite pas à un retour « géographique » des personnages, il s’agit également d’un retour « physique » du personnage principal dans le roman. Plus précisément, ces fictions se concluent sur la reconstitution des protagonistes. Au début, ils étaient des êtres évanescents, passifs dont la voix et les pensées étaient fragmentaires. Au fil de leurs tribulations, les éléments extérieurs modulent leur rapport au monde. Lors de la résolution de l’histoire, ils sont devenus des personnages « à part entière » capables de poser des actions concrètes. Pour plusieurs théoriciens du personnage, dont Michel Erman, un héros se doit de poser des actions. « Il n’y a pas de roman sans actions, il ne peut y avoir d’action sans personnage. » (Michel Erman) Pourtant, dans ces deux oeuvres, c’est l’histoire qui construit le personnage. Ainsi, Voyage léger et Carnets de naufrage permettent d’observer une construction inversée du protagoniste; construction qui s’avère nouvelle dans les romans québécois contemporains.

La nudité peut être troublante, dérangeante, excitante et fascinante. Bien sûr, elle a été réfléchie et éprouvée de façon différente selon les époques et les contextes. Mais qu’advient-il lorsque celle-ci est multipliée par dizaine, par centaine, par millier? Vanessa Beecroft et Spencer Tunick, deux artistes contemporains reconnus internationalement, nous donnent à voir ce genre de nudité; ils exposent, dans des contextes bien différents, des corps dénudés qui posent la question de la multiplicité. Étonnamment, les œuvres performatives de ces artistes nous montrent des corps dénudés dont l’érotisme semble presque complètement neutralisé, comme si l’œil du spectateur glissait sur un mur de peau et que l’excitation n’arrivait pas à le traverser.

L’objectif de cette communication est de positionner l’état de nudité des corps mis en scène par Beecroft et Tunick, tant dans leur rapport à l’histoire de l’art qu’aux problématiques contemporaines. Cette question présente certaines difficultés, puisque ces corps n’entrent dans aucune des catégories hégémoniques de la représentation – que ce soit celle qui oppose le nu et la nudité, la pornographie et l’érotisme ou le corps utopique et le corps «topique», selon le terme de Foucault. À partir de la théorie sur l’ouverture des corps de Georges Didi-Huberman et des stratégies formelles utilisées par Beecroft et Tunick, nous démontrerons que ces deux artistes proposent une nouvelle forme de nudité, dont les enjeux sont tout à fait actuels.

La « critique des traductions » fait partie des sous-disciplines de la traductologie depuis que James Holmes a publié une première cartographie du domaine en 1972. Dès lors, le nombre de théories sur le sujet ne fait qu’augmenter, tandis que les études sur le champ montrent qu’il existe un véritable fossé entre les propos critiques des spécialistes et ceux du lectorat moyen (Audet 2009; Doyle 2018; Desai 2020). Le Canada est un cas particulier en traductologie : en plus de disposer de deux prix nationaux en traduction, l’État finance chaque année la traduction de plusieurs dizaines d’œuvres. Pourtant, on en sait peu sur le processus évaluatif qui précède la remise de ces prix, et les rétroactions des jurys n’ont jamais été soumis à une étude approfondie.

Dans cette communication, une lacune historique est d'abord comblée en présentant le contexte qui a mené à la création du Prix de traduction John-Glassco et de la catégorie Traduction des Prix littéraires du Gouverneur général. Une analyse des critères d’admissibilité à ces prix et des quelques rares « directives » d’évaluation rédigées par certains membres du jury pour coter les traductions gagnantes est ensuite proposée. Les documents d’archives ainsi examinés témoignent de l’étonnante diversité qui caractérise les critères d’évaluation utilisés, même parmi les experts canadiens, et renseignent les lecteurs, les traducteurs et les critiques sur les présupposés que nous détenons tous sur la traduction littéraire (Vanderschelden 2000).

Cette communication sera l’occasion de présenter les axes de réflexions qui nourrissent mon mémoire de maitrise portant sur l’identité du sujet racé dans l’œuvre de Nadine Gordimer, auteure sud-africaine blanche et lauréate du prix Nobel de littérature de 1991. Il s’agira de rendre compte de la recherche d’un espace interstitiel (Bhabha, 1994), qui rend possible la rencontre entre Noirs et Blancs dans deux romans, La fille de Burger (Gordimer, 1981), Ceux de July (Gordimer, 1979). Les contextes de ségrégation, comme celui de l’apartheid, exacerbent l’importance de la notion de race, qui, dans les faits, relève d’une fiction maintenue en place au moyen de lois coercitives. Nous arguerons que les représentations du lieu physique ne permettent pas de véritables rencontres entre Noirs et Blancs, qu’elles sont tout au plus le théâtre d’un contact impossible ou violent. Écrire dans ces lieux chargés des violences raciales, c’est adopter une position de l’entre-deux ; c'est-à-dire éviter d’être confiné au territoire du maitre en reproduisant sa voix ou en s’y opposant de façon directe. En contexte d’oppression, il s’agit plutôt de trouver un espace autre dans lequel la race perd ce pouvoir discriminatoire ; un chez-soi (home) à l’intérieur de la maison du maitre (Morrison, 1997). Ainsi, c’est l’énonciation qui permet d’investir la frontière et de faire de la marge un lieu discursif où la rencontre de l’autre est possible. 

Il s'agit des actions politiques employées pendant le consulat de Napoléon Bonaparte, liées au processus de colonisation française de Saint-Domingue, aujourd'hui Haïti, qui a débuté dans la première moitié du XVIIe siècle. Et les stratégies développées par les protagonistes Toussaint Louverture et Jean Jacques Dessalines, anciens esclaves qui ont vaincu le système esclavagiste en général et les troupes expéditionnaires françaises en particulier. En France, en 1799, toujours dans le contexte politique tumultueux de la révolution de 1789, l'ère napoléonienne introduite par le consulat a été mise en place. Parallèlement à ces événements, le scénario n'était pas différent dans la plus importante colonie française d'Amérique. Le contexte sociopolitique a fourni de multiples défis et ambitions diverses dans cette partie de l'île, surtout avec la montée en puissance de dirigeants noirs qui sont devenus des agents conscients de leur histoire, actifs et capables de remettre en question l'ordre dominant. Opposés aux politiques coloniales françaises, ils ont utilisé des stratégies politiques et des mécanismes juridiques importants pour affronter à la fois le consulat et le gouvernement impérial français. Dans cette optique, ce travail de thèse propose, à travers d'analyse de documents, d'étudier les actes et les décisions politiques de ces protagonistes et leurs contributions à la scène coloniale, de la fin du XVIIIe siècle au début du XIXe siècle.

L’ISOMORPHISME DES SIGNES DES ESPACES SACRÉS DANS L’IMAGINAIRE COLLECTIF

Le monument à Staline à Prague, le monument Atatürk à Izmir et le parlement hongrois à Budapest de formes et d’architectures variées possèdent tous d’éléments importants de sens communs importants.

L'étude proposée analyse les traits communs des espaces sacrés et cherche à comprendre les causes et les modalités de leur présence. Pour ce faire, il sera fait appel aux études de Gaston Bachelard dans La Poétique de l’espace. Si la méthode de Bachelard est bien connue, nous en proposons des critiques et des compléments, apportés par nous-mêmes et d’autres, et les appliquerons à un corpus inédit. De plus, nous la croiserons avec la théorie de l’analyse sémique de François Rastier. Enfin, nous fonderons notre analyse sur l’hypothèse de Régis Debray, qui trouve l’origine du sacré dans l’interdiction.

La domination, la force, l’inaccessibilité, le vide et la profondeur sont parmi les sèmes que possèdent les espaces sacrés pour « dialoguer » avec leurs destinataires. Debray considère également le sacré comme intouchable. C’est ainsi que la poétique de l’interdiction dans les espaces sacrés définit une limite, dans l’imaginaire commun, qui ne doit pas être franchie.

Nous convoquerons les représentations du sacré dans l’architecture et l’« ambiance » de certains espaces et de certains édifices sacrés disséminés dans plusieurs pays et érigés au cours de l’histoire.

Depuis ces dernières années, on observe un engouement grandissant pour les paysages industriels et leur représentation photographique. Étant au départ l’apanage des artistes, les territoires issus de l'industrialisation obtiennent maintenant de plus en plus d’intérêt de la part des photographes amateurs. On semble ainsi porter un nouveau regard sur des territoires que l’on a longtemps refusé de considérer comme esthétiques. Curiosité nouvelle que l’on pourrait croire un phénomène isolé, la photographie de paysages industriels abonde sur les sites web de partage de photographies (tel Flickr). Cette présentation vise une meilleure compréhension de la façon dont s’est effectué le changement de regard sur le paysage industriel et du rôle que peut avoir eu le partage de photographies en ligne dans la naissance de cette nouvelle sensibilité. Il faudra tout d’abord tenter de voir ce qui, dans le contexte postindustriel présent, permet que l’on perçoive différemment le territoire industriel. Une brève étude d’images en circulation représentant le paysage industriel servira à illustrer ce passage de territoire à paysage. Le phénomène social de partage de photographies sera ensuite analysé afin de voir de quelle façon il a pu participer à l’attribution de nouvelles valeurs et significations aux paysages de l’industrie. L'étude de ce nouveau regard porté sur le paysage industriel permettra de mieux comprendre la qualité des rapports sociaux et culturels se développant envers lui.     

Quelle hypermédialité du cinéma (ou "environnement médiatique global") se dessine dans les documents et le parcours du cinéaste Herménégilde Lavoie ? Les archives de la BaNQ donnent une idée précise des activités du cinéaste (la façon dont il organisait son travail et dont il communiquait avec ses collaborateurs, la nature de ses projets, la date de leur réalisation, le matériel et les techniques utilisés, etc.) et des réseaux de création et de production (Club des habitants, réseaux des Sœurs, etc.) dans lesquels il s’est impliqué de 1940 à 1972. Plus de trente années de carrière ont ainsi amené Herménégilde Lavoie à travailler pour l’ONF, à devenir le directeur d’une revue intitulée La Belle Province et à diriger son entreprise de « Réalisation de films cinématographiques sonores » à la fois industriels, touristiques, religieux ou éducationnels : Les Documentaires Lavoie. Il est frappant de voir comment des projets cinématographiques de nature très différente, en apparence du moins, sont en fait interreliés et répondent à un impératif que le cinéaste aura à cœur toute sa carrière durant : l’ « embellissement » de la province québécoise, la mise en valeur de son patrimoine, du savoir-faire et du savoir-vivre de ses habitants. Les films des Documentaires Lavoie deviennent un des supports de ce message philanthropique et/ou humaniste.

« L'idée d'une "autodéfinition de l'individu" et de son "autonomisation" par rapport à la société relève largement du fantasme. » (Heinich citée par Chenet 2008, p. 36) Prépondérant dans le champ culturel, ce discours teinte l’entrée littéraire de Mikella Nicol, qui signe en 2014 Les filles bleues de l'été, premier roman générant un discours médiatique luxuriant. Inéluctable, le lien entre Nicol et son père, l'écrivain Patrick Nicol, est évoqué systématiquement par les médias, qui transposent dans la sphère privée l’impossible « autodéfinition de l’individu ». Comment ces deux réalités distinctes se conjuguent-elles lorsque l'identité d'un nouvel auteur trahit des liens préexistants avec le domaine littéraire ?

À la lumière de trois entrevues accordées par Mikella Nicol au sujet de son premier roman, je propose de confronter le discours des instances de réception (Plus on est de fous, plus on lit !, La Presse et ARTV) à la posture auctoriale de l’écrivaine. Tandis que Nicol projette une image gouvernée par un principe d'autonomie filiale, les critiques et journalistes accusent un mouvement de va-et-vient incessant entre les mérites de l'auteure et les rapports, autant familiaux que littéraires, qui orientent sa position dans le champ littéraire.

CHENET, Éric. « Question d'identité : une entrevue avec Nathalie Heinich », ETC, [En ligne], n°82, juin 2008, p. 36-38, https://www.erudit.org/fr/revues/etc/2008-n82-etc1134672/34600ac/ (Page consultée le 11 avril 2019).

Les données statistiques compilées par l’OIM (2007), OECD (2009), Banque Mondiale (2006 et 2008) et la CEPAL (2000 et 2010) montrent que la Colombie se classe parmi les cinq principaux pays d’immigration en l’Amérique Latine et les Caraïbes. Le Canada est devenu, depuis le début des années 1980, l’une des principales destinations des émigrants colombiens dans le monde. Le Québec est, au Canada, la deuxième province accueillant le plus grand nombre d’immigrants colombiens au pays. Nous nous sommes penchés sur cet aspect à partir de la perspective historique, dans le but d’identifier et d’analyser les causes qui ont donné origine à ce flux migratoire.

 

Ce travail cherchait à donner des réponses à une série de questions, dont les suivantes : le flux migratoire des Colombiens vers le Québec est-il un événement qui a sa propre dynamique ou est-il une prolongation du flux migratoire des Colombiens vers les États-Unis depuis les années 1960?Quel impact a eu la législation canadienne sur l’immigration et les réfugiés en ce qui concerne la venue des Colombiens au Québec?

 

Pour répondre à ces questions, nous avons mené notre enquête en utilisant des sources primaires et secondaires, notamment  la consultation de la documentation de l’Archive historique nationale de la Colombie, l’analyse des sources journalistiques, statistiques. Nous avons aussi utilisé des sources orales.

La figure du rat est emblématique dans la littérature et l’imaginaire social. Elle est souvent associée à l’idée de bas-fonds, à la souillure, voire à la déshumanisation. La littérature traitant de la Grande Guerre la convoque fréquemment pour illustrer certaines conditions d’existence des poilus ou encore pour déshumaniser le soldat allemand. Une lecture attentive des journaux de tranchées, forme médiatique parodique, qui se joue des codes de la presse quotidienne, permet de déceler l’importance de la figure du rat au sein de ses discours, souvent humoristiques, et d’en déterminer les nombreux usages. Cette communication propose d’étudier ce motif à travers un corpus composé de quatre journaux du front : Le BochofageLe Canard du BoyauL’Écho des Guitounes et Le Tuyau de la Roulante, afin de déterminer dans quelles mesures le poilu s’identifie au rat, et dans quels cas il se détache de sa figure pour la projeter sur l’autre et le déshumaniser. Fréquemment convoqué lorsqu’il s’agit de décrire la précarité de la vie au front, le rat est aussi utilisé pour atténuer l’empathie que pourrait ressentir le soldat face à son vis-à-vis allemand par le procédé de pseudo-spéciation. Ce procédé sera étudié en détail à l’aide de la figure du rat, puisqu'il est un des fondements de la fabrication du consentement à tuer. Le rat, motif récurrent, ambivalent et paradoxal de ce type de littérature militaire, permet de saisir comment les poilus appréhendaient le microcosme de la tranchée.

La soustraction additive en art contemporain

En 1953, Robert Rauschenberg achète un dessin à l’artiste Willem de Kooning, l’efface puis l’expose. Il lui donnera alors le titre évocateur Erased De Kooning Drawing. Aujourd’hui encore, de nombreuses pratiques artistiques se situent dans la lignée de cette action. Paradoxalement, l’effacement ajoute quelque chose à l’image et atteindre véritablement l’ « absence » semble impossible. Quelle serait donc la nature de ce « reste » et comment en produire l’analyse sémiotique ?

Tout d’abord, nous étudierons le travail de trois artistes : Erased De Kooning Drawing (1953) de Robert Rauschenberg, A Void (2009) de Joseph Havel et Au-delà des signes (2015) de Mathieu Grenier. Ces trois artistes ont un mode opératoire commun : s’approprier un objet symbolique et en modifier la nature par une soustraction additive. Par la suite, on analysera la médiation culturelle de ces œuvres et son enjeu. On verra comment leur déplacement sémantique est généré et l’importance de leur aspect discursif. Pour ce faire, on utilisera la trichotomie du signe de C.S. Peirce (1978) et nous approfondirons la catégorie de l’interprétant à l’aide du modèle d’Erving Goffman (1991).

La soustraction additive change profondément la nature de l’œuvre d’art. Premièrement, elle détruit le fantasme de la création ex nihilo, et deuxièmement, elle nous force à analyser l’interdépendance des facteurs sémiotiques et non plus simplement des œuvres isolées.

Dès son invention, le cinéma s’est défini en tant que mode d’expression essentiellement masculin. Or, depuis une vingtaine d’années, les femmes se font de plus en plus présentes à la réalisation et nombreuses sont celles qui placent le corps féminin au centre de leur oeuvre : sexualité crue et désincarnée, réification, mutilation, expérience trouble de la maternité, etc. Considérant que la femme entretient un rapport culturellement et biologiquement singulier vis-à-vis de son corps, je propose une lecture féministe du cinéma féminin contemporain. Prenant comme exemples Anatomie de l’enfer (Catherine Breillat, France, 2004), Sleeping Beauty (Julia Leigh, Australie, 2011) et Klip (Maja Milos, Serbie, 2012), j’analyserai comment ces réalisatrices usent du corps féminin afin de déjouer les mécaniques érotiques traditionnelles. Au point de vue méthodologique, le corpus sera examiné à la lumière des concepts de pudeur (Jodelet, 2007), des pôles activité/passivité (masculin/féminin) et du rapport spectatoriel au cinéma (Mulvey, 1975).Ceux-ci s'inscrivent dans une tendance à la subversion observable dans les pratiques féministes contemporaines (Attwood, 2007). Ainsi, je démontrerai qu’en exacerbant les codes érotiques et pornographiques conventionnels, ces cinéastes soulignent l’incohérence et la désuétude de ces mécaniques et, ce faisant, déconcertent le spectateur, lequel se voit alors privé d’une expérience érotique.

L’analyse du rythme dans la musique post-tonale peut être très complexe, surtout si l’on considère la possibilité d’analyser ce répertoire sous l’angle de structure métrique. Certains chercheurs, tels que Morris (1987), Hyde (1984), Forte (1980) et Babbitt (1972), analysent le rythme comme un objet fixe dans la musique post-tonale, alors que Roeder (1994) nous propose un modèle basé sur des accents afin de confirmer un réseau de « pulse streams » dans la musique de Schoenberg. Même si ces études nous offrent d’excellents outils pour analyser un répertoire post-tonal, il est également possible de considérer des structures métriques et hypermétriques dans le contexte de ce répertoire si l’on est flexible avec le concept du temps de mesure. Hasty (1997) argumente que les structures métriques ne sont pas nécessairement des structures fixes et qu’elles peuvent être aussi flexibles que le rythme d’une œuvre. Lorsque le temps de mesure n’arrive pas au temps attendu, soit trop tôt ou trop tard, il interprète ce phénomène comme une accélération ou un ralentissement dans le contexte du temps de mesure. « Ambiant V » de la compositrice québécoise Ana Sokolovic peut être analysé non seulement dans le contexte d’une structure métrique, mais aussi une structure hypermétrique, en adoptant cette flexibilité. Ceci nous permet d’interpréter le rythme de l’œuvre, ainsi que d’apprécier la richesse que nous offre la compositrice par sa musique.

Comme les recherches de Germain Lacasse le démontrent, le cinéma québécois peut être décrit en fonction de son oralité. Cette analyse concorde avec l’influence du conte oral au Québec. Cependant, le caractère surnaturel du conte détonne avec la supposition que le cinéma québécois est ancré dans une tradition fortement réaliste, qui, jusqu’à récemment, eut tendance à diminuer le fantastique. D’autre part, Walter Benjamin, lui, suggère l’indissociabilité du surnaturel et de l’oralité. La présente communication propose d’explorer les contradictions d’une stratégie communicative au Québec dominée par l’oralité, mais qui marginalise simultanément le surnaturel.

J’aborderai les perspectives locales et globales du surnaturel et du conte dans le cinéma québécois. En commençant par les adaptations des contes de Fred Pellerin par Luc Picard, je considérerai la spécificité locale de cette œuvre avant de la comparer à deux films où convergent les fonctions du surnaturel et du conteur dans un contexte global, soit Le violon rouge (F. Girard, 1998) et Maelström (D. Villeneuve, 2000). Tout en faisant appel au célèbre essai « Le conteur » de Benjamin, j’espère illustrer comment le surnaturel s’imbrique dans les structures orales du cinéma québécois. Cette hypothèse me mène à avancer que ce cinéma est ainsi doté de qualités consonantes avec la mélancolie et la hantise qui communiquent un malaise postcolonial refoulé et qui incitent un questionnement d’ordre éthique.

Dans le guide créé par le YouTube Creator Academy, les intervenants suggèrent diverses stratégies pour attirer et retenir de nouveaux spectateurs. Comme ils le soulignent dans la série intitulée « Développez votre chaîne de jeux vidéo », la mise en place d’une relation à long terme entre un producteur et sa communauté est bénéfique pour les deux parties. La formation d’une image de marque est favorisée lorsque les créateurs proposent des sujets, thèmes et structures plutôt homogènes au sein de leurs chaînes.

Dans cette présentation, nous proposons d’analyser les enjeux liés à sérialisation des contenus qui mettent de l’avant les jeux vidéo sur YouTube. Nous exposerons les outils disponibles sur cette plateforme de partage de vidéos et leurs influences directes dans la manière de penser les créations en fonction de mises en séries. Par exemple, la planification des prochaines vidéos à travers une grille horaire est apparentée aux structures épisodiques que l’on retrouve à la télévision. D’autres outils tels que les listes de lecture et les moyens d’organisation des chaînes permettent des mises en séries des vidéos.

Des types de vidéos bien établis tels que les critiques, les let’s plays ou les longplays encouragent la publication de vidéos aux structures similaires. De plus, les créateurs sont encouragés à utiliser les métadonnées (étiquettes, titres, jeux populaires). L’intégration de ces codes, mots-clés et tendances pointe vers une logique sérielle des vidéos de jeux vidéo.

La poétique peut se définit à la fois comme une théorie descriptive et interprétative. Elle est une discipline à part entière plurielle, spécifique : elle se préoccupe d’étudier la littérarité d’un texte. Son caractère pluriel trouve ses fondements dans plusieurs facteurs dont la langue et la culture.

Si nous partons du principe selon lequel « la poétique [est une] discipline analysant les usages et les formes du discours littéraire en général tout en s’intéressant à des poétiques particulières — celle d’une écrivaine ou d’une école » — nous apercevons que ceci répond en écho au deuxième versant de la poétique, selon Todorov et Ducrot (1972), qui est d’interpréter ou d’analyser l’œuvre littéraire créée. Ainsi, s’agit-il d’une méthode qui a pour essence, à partir de l’interprétation, de donner un sens à une œuvre donnée. L’entreprise du poéticien a pour finalité de dégager les marques de littérarité ou de poéticité ainsi que leur fonctionnement, eu égard au contexte de l’œuvre.

C’est un tel projet qui sera mis en application dans l’analyse que nous ferons du recueil de poèmes de Noël X. Ebony intitulé Déjà vu. Il a pour objectif d’étudier, à partir de la poétique, entendue comme manifestation des caractères littéraires d’une œuvre, ce qui fonde sa littérarité. En l’occurrence, nous mettrons en exergue l’analyse du thème du souvenir dans ses déclinaisons dans l’œuvre poétique de Noël X. Ebony. L’acception théorique de Todorov et Ducrot fondera et orientera notre analyse.

 

Dans la planche Atlas, issue du livre La conquête de l’espace. Atlas à l’usage des artistes et des militaires (1975), Marcel Broodthaers transforme la feuille non-coupée de l’édition en affiche. Par ailleurs, dans L'image écrite ou la déraison graphique (1995), Anne-Marie Christin observe que l’écriture, qui avait perdu avec l’invention de l’alphabet, ses attaches sémiotiques à son support, les retrouve à travers la description géographique.

Pour aborder cette problématique, j'adopterai une analyse intermédiale focalisée sur l'idée d'une secondarité dans la littérature et l'art contemporain. Je me situe ainsi dans le sillage d’Aby Warburg qui dans « Divination païenne et antique dans les écrits et les images à l’époque de Luther » (1990, [1920]), met  en lumière la réadaptation des « pathosformeln » de l’Antiquité à la Renaissance.

Changer le format des objets – tel que Broodthaers le fait dans Atlas et La conquête de l’espace…, c’est bouleverser de l’intérieur, l’ordre du texte, tout en problématisant la transmission de l’expérience devant la perte d’autorité de la parole littéraire dans la contre-culture des années 1960.

Ainsi l’histoire de la sensibilité de l’homme contemporain peut être complétée avec une étude de l'apparition et de l'évolution de la cartographie, en relation avec la transmission des « pathosformeln » de l'Antiquité par les différents supports des écrits et des images, tel qu’illustré dans Atlas et La conquête de l’espace… de Broodthaers.

 

 

 

Une des différences les plus notables entre l'ouvrage majeur de John Rawls, Théorie de la Justice, et son Libéralisme politique est la grande importance qu'accorde ce dernier au contexte historico-politique d'où il s'élabore. Vue sous cet angle, l'on peut dire qu'il tente alors de concilier l'approche de Théorie de la justice, dans lequel les principes de justice sont légitimés par une procédure rationnelle et neutre, à une justification des principes qui découlent de la congruence de ceux-ci avec une compréhension plus profonde de nous-mêmes. Se voulant politique plutôt que métaphysique, cette compréhension est à tirer de la culture publique, de l'histoire et de la tradition de nos démocraties occidentales. 

En se focalisant sur Libéralisme politique, l'on dénotera d'abord le lieu d'une absence. En effet, bien que la dimension interprétative y occupe une place centrale, les notions théoriques fondamentales étant définies à partir de cette compréhension politique de nous-mêmes, elle n'y est pourtant jamais thématisée comme telle. Une fois cela relevé, l'on constatera que la théorie rawlsienne ne peut plus se permettre d'éluder la question herméneutique, celle qui exige de rendre compte de ce moment interprétatif initial, surtout en vertu d'enjeux de justice actuels comme celui de l'environnement. Car, ce qui se joue en cette compréhension, c'est la pertinence même de la théorie en regard des aléas de l'histoire et des défis inédits qu'ils ne cessent de poser à la justice.

L’Internet est un média qui diffuse toutes sortes de formats se déclinant en plusieurs genres (des textes, des images, de l’audio, des images animés) ayant diverses origines. Parfois certains documents sont conçus pour d’autres médias, par exemple la télévision, et s’importent sur le web, et d’autres sont conçus pour être diffusés et consommés sur le web et rayonnent ensuite dans un autre média. Certaines œuvres tentent même d’être interactives, par exemple une forme hybride entre l’image en mouvement et le jeu vidéo. Cette multitude d’objets audiovisuels se trouvant sur Internet évoque le problème de leur définition et de leurs caractéristiques. Comment les différencier les uns des autres? De nombreux vidéos forment une série, mais sont-ils tous des webséries? Le terme websérie est présentement utilisé pour englober plusieurs types d’oeuvres qui sont un peu fictionnelles, un peu documentaires et un peu d’autres choses. Il est important de relever les caractéristiques de la websérie et de tenter une première définition d’un nouveau genre. En comparant différentes webséries québécoises avec des genres établis au cinéma (saga, feuilleton) et à la télévision (sitcom, série lourde), il est possible de faire ressortir certaines caractéristiques de la websérie. Cette analyse s’appuie sur les travaux de Barrette (2010), de Jost (2011) et d’Arsenault (2011).

La notion de non-public se définit principalement par contraste ou en opposition avec celle de public (Jacobi et Luckerhoff, 2010). Cette notion qui a servi à identifier les individus qu’on ne compte pas parmi les publics de la culture cultivée a contribué à confirmer l’existence d’une hiérarchie des pratiques, des institutions et des habitus en fonction de leur légitimité (Le Marec, Schiele, Luckerhoff, 2021). Cette perspective négligeait le fait qu’un même individu puisse appartenir au public de la culture légitimée tout en s’adonnant à des pratiques peu légitimées. Considérant qu’il n’existe pas de réelle frontière entre le public et le non-public, des chercheurs ont refusé de définir les non-publics dans une perspective essentialiste – qui reviendrait à essayer de cerner qui ils sont – pour embrasser le projet de caractériser, tant par l’observation que par la cueillette et l’analyse de témoignages, ce qu’ils font (Lapointe et Luckerhoff, 2021). Il est possible pour des acteurs d’être plus ou moins publics et plus ou moins non-publics. Nous avons analysé 210 publications scientifiques portant sur les non-publics afin de dégager les nombreuses raisons d’être non-publics. Nous nous sommes intéressés à mieux comprendre les raisons du désintérêt chez différentes catégories de non-publics de même qu’à saisir la manière dont l’acte de réception positionne l’individu sur le continuum se déployant entre les pôles public et non-public.

En mai 1968 s’est amorcée, à l’Université de Dakar, la grève étudiante la plus marquante de l’histoire du Sénégal. Une analyse historique de ces événements permet de comprendre les liens qu’il peut y avoir entre différents cas de luttes étudiantes, non seulement en ce qui a trait au processus contestataire, mais également en ce qui concerne la critique et la répression auxquelles celui-ci doit souvent faire face. Pour les étudiants dakarois de 1968, « sortir des sentiers battus » signifiait de choisir la mobilisation, la contestation et « la rue », en s’opposant au « Palais » et en s’exposant aux conséquences que ce choix pouvait amener. Devant un mouvement de cette ampleur, et devant son extension vers d’autres groupes de la société, de quelle façon l’État a-t-il réagi? Plus particulièrement, quelle stratégie a été mise en œuvre par le gouvernement de l’époque, celui de Senghor, pour gérer ce bouillonnement social; quel discours en est-il ressorti? C’est à la fois au contexte et au déroulement de ces événements marquants de l’espace social et culturel du Sénégal que nous nous intéresserons.

Au Québec, le nombre de livres électroniques (LN) vendus a oscillé entre 505 657 en 2014 et 583 693 en 2022 (OCCQ, 2023). Bon an mal an, ce marché demeure relativement restreint. Le nombre de LN empruntés dans les bibliothèques est cependant en hausse alors que les emprunts de livres papier (LP) sont en baisse (Lapointe, Luckerhoff et Niort, 2023). 

Nous avons voulu connaître les raisons qui expliquent le passage du LP au LN chez des lecteurs. Nous avons animé des entretiens individuels et de groupe avec plus de 70 personnes dans une démarche qualitative (Luckerhoff, Guillemette et Lalancette, 2023) inductive (Germain, Guillemette, Luckerhoff, 2023) et nous les avons analysés selon les principes des approches inductives (Guillemette et Luckerhoff, 2023a, Guillemette et Luckerhoff, 2023b). Nous avons créé un échantillon théorique diversifié, notamment sur les plans sociodémographiques et des profils en lien avec la lecture.

Des participants trouvent qu’il est plus aisé de lire au format numérique, notamment en raison de la possibilité de grossir les caractères et de la légèreté de la liseuse. D’autres évoquent la possibilité d’avoir plusieurs livres à lire dans un seul dispositif, les coûts moins élevés et la facilité à se procurer des livres en ligne. Nos résultats de recherche permettent aussi d’identifier des changements dans les habitudes d’emprunt et d’achat et de mieux comprendre comment les lecteurs de LN découvrent des titres et des auteurs dans ce contexte.

La prostituée, la vitrine et la ville.

Nous proposons de faire une analyse de la ville et de son espace pour mettre en évidence sa méthode de construction tenant en compte de la présence de la prostituée et de la vitrine comme dispositif. Après la révolution industrielle et avec l’urbanisation de masse dans les grandes villes, on a pu constater un grand changement dans l’organisation de la structure sociale urbaine. En effet, beaucoup de personnages de cette urbanisation qui étaient déjà présents ont été soit plus (in)visibles soit se sont transformés en sans-abris. Les prostitués faisaient partie de ces personnages. La ville, avec toute son organisation sociale, va déplacer tout ce qui n’a pas de place en son sein, tout ce qui dérange comme toute sa propreté morale ou physique, vers des endroits isolés, excentrés, loin des regards raffinés de la population métropolitaine. C’est dans ces espaces quasi-autres, dans « les-bas-fonds » que l’on parque et délocalisent ce qui est non désirable dans l’espace public. C’est dans cet espace qu’a été reléguée, dès le début de la ville moderne, la figure mythique de la prostituée.

Le pouvoir soviétique cherche à inculquer à ses citoyens, à l’aide de divers outils propagandistes, une conception du temps de l’histoire en accord avec son idéologie et ses politiques. Critère ordonnant la vision historique de l’État-parti, cette conception du temps de l’histoire est un instrument étatique imposant aux Soviétiques une façon de considérer le passé et de vivre le temps présent, permettant un contrôle maximal de l’activité symbolique et sociale dans le futur. Les téléastes de la station locale de la Républiques Soviétique Socialiste moldave (RSSM), tout comme d’autres catégories de producteurs culturels soviétiques, sont tenus de mettre en représentation la conception officielle du temps de l’histoire. Annexée à l'URSS pendant la Deuxième guerre mondiale, la Moldavie, ce territoire de litige entre la Roumanie et l’État soviétique, requiert un discours propagandiste qui prenne en compte son expérience historique et ses particularités culturelles. Dès lors, les téléastes moldaves refaçonnent, au moyen des procédés discursifs, audiovisuels et narratifs, les catégories de la continuité et de la rupture historiques ainsi que les instances temporelles de façon à appuyer une version soviétique de l’histoire de la Moldavie. L'historiographie officielle participe d’une politique identitaire de l’État-parti visant à construire une nation moldave soviétique supposément apparentée aux populations slaves et différente de la nation roumaine.