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Nous étudions la place qu’occupe la loi islamique dans l’expérience quotidienne de canadiens musulmans et musulmanes, en explorant la manière dont ils conçoivent l’application de la "sharia" en contexte minoritaire ? Quelques études portent sur ce qu'on appelle une "jurisprudence (islamique) des minorités" (fiqh al-aqalliyyât), ou "fiqh de coexistence" (Al Alwani 2007), développée en contextes tant européen (Van Koningsveld 2006 ; Rohe 2007; March 2009; Caeiro 2011, 2013) qu'américain (Quraishi 2004), mais peu de chercheurs se sont penchés sur le contexte canadien (Saris 2005 ; Emon 2008 ; Marzouki 2012). Notre projet (CRSH) sur les musulmans canadiens en ligne s’attarde à cette problématique. Cette communication se penche sur les entrevues menées auprès de cinquante québécois musulmans et musulmanes de 20 à 50 ans de la région de Montréal et de Québec, pour explorer ce qui constitue, aux yeux des participantes, des sources Internet islamiques fiables d’autorité religieuse. Nous leur avons demandé s'ils se préoccupent de jurisprudence (fiqh), si elles sont familières avec la "jurisprudence (fiqh) des minorités" et s'ils font appel (si oui, à quelle fréquence) ou non à ce type particulier de fiqh ? L’approche qualitative (socio-anthropologique) permettra de mettre en exergue diverses compréhensions du fiqh, de son importance et application dans la vie quotidienne de nos participantes, et de soulever, par la même occasion, l’importante individualisation de leurs interprétations

Minorité d’une minorité, les Juifs d’extrême droite en France n’ont guère intéressé la recherche. De l’affaire Dreyfus aux périlleuses années 1930, des Juifs militent pourtant dans des mouvements d’extrême droite. D’autres sont de simples sympathisants. Quelques-uns sont même à l’origine d’une organisation qui s’adresse d’abord aux Juifs. Mais avant de peindre ce paysage, nous nous arrêterons un instant sur la méthodologie employée. Vu le petit nombre de ces personnes et l’absence presque générale de la mention de la confession dans les archives publiques, travailler sur ce sujet n’est en effet pas aisé.

Nos pinceaux affutés, nous chercherons à comprendre le positionnement politique de ces Juifs. Assurément, leur adhésion sympathisante ou militante à des mouvements antisémites ou qui ne tarderont pas à l’être puise à des degrés divers dans « la haine de soi ». Sont-ils antisémites pour autant ? Nous verrons que l’anticommunisme et un patriotisme exacerbé né avec la Grande Guerre peuvent également peser dans ces ralliements. Mais comment ces individus sont-ils intégrés dans les groupements non-juifs ? Plus largement, peut-on établir une typologie des Juifs d’extrême-droite ? Notre propos reprendra la bibliographie existante, qu’il complètera avec des sources archivistiques et imprimées parfois inédites ou oubliées, comme des rapports de police, la presse d’extrême droite et juive, des archives privées. Il s’appuiera sur des parcours individuels et des traces de vies passées.

La spiritualité s'inscrit en Inde dans une tradition de renoncement à la politique, mais le politique y a pourtant parfois recours pour se légitimer face à la société. Ainsi Indira Gandhi (1917-1984), première ministre de l'Inde, eut recours lors de ses deux mandats à de nombreux gurus dont Ma Anandamayi, Krishnamurti et la Française Mirra Alfassa dite "la Mère". Comment comprendre la portée politique de ce recours au "spirituel", peu courant en occident?

Nous nous proposons dans une approche historico-critique s'appuyant sur Jaffrelot de rendre compte de cette interaction du pouvoir politique d’Indira Gandhi avec des gurus en formulant trois explications. La première explication d’ensemble est de considérer que le pouvoir politique démocratique séculier en Inde dépend d'une population très religieuse, donc la reconnaissance du religieux et du spirituel par le pouvoir politique sera très important pour sa légitimation symbolique auprès de ses électeurs: un moyen est de réifier pour cela la figure de souveraineté nationale de Mother India.  Une deuxième piste explicative est que le recours à des gurus conseillers du pouvoir, actualise et renvoie à la tradition du rajguru. Enfin nous réfléchirons en quoi le choix "spirituel" d'Indira Gandhi représentant le parti du Congrès, a pu constituer, en rupture au sécularisme affiché de son père Nehru, une redéfinition stratégique médiatique d’une identité nationale hindoue, à même de contrer l’opposition nationaliste hindoue.

Le cyberespace est l’espace virtuel, mais bien réel, créé par toutes les technologies numériques. Un espace que l’humain investit au XXIe siècle pour communiquer, socialiser, travailler et se divertir. Pourtant, si l’on traite aisément de l’outil numérique et de ses potentialités dans une multitude de disciplines, les recherches tardent à explorer les transformations que le cyberespace implique dans la manière même de penser le temps et l’espace de l’humain et, par conséquent, de faire de la recherche historique.

Cette communication expliquera la transformation de la temporalité et de la spatialité tout en démontrant que la discipline historique doit – et peut – s’adapter à ce contexte contemporain. Notre recherche doctorale au département d’histoire de l’Université de Sherbrooke consiste à dépouiller grâce à un logiciel d’analyse de texte (ATLAS.ti) un corpus entièrement numérique (64 sites Internet). La dimension épistémologique de notre recherche coïncide avec le thème du 86e Congrès de l’Acfas, car sans pensée libre, il nous aurait été difficile de mener une recherche sur l’histoire contemporaine et numérique sans penser à l’extérieure de la boîte historienne et de ses outils conventionnels.

Notre contribution réside, au-delà des résultats de la thèse qui ne sont pas l’objet de cette communication, dans l’approche novatrice d’un objet d’étude qui est sous-exploré, la temporalité et la spatialité dans le cyberespace : le futur du passé de l’homme contemporain.

Le patrimoine culturel immatériel (PCI) du peuple Bouyei est un saphir brillant qui mérite d’être taillé, poli et partagé avec le monde entier. Cette recherche-création se concentrera sur l’élaboration d’une méthode de transmission du PCI Bouyei de génération en génération dans le but d’inciter à la découverte et l’exploration sans en perdre l’essentiel.

Dans un même temps, nous nous efforcerons à déployer une discussion approfondie sur la danse somatique, en particulier le lien et l’influence sur l’héritage de la richesse humaine patrimoniale. À travers le projet 12 tons d’indigo, dans le contexte de l’ère interdisciplinaire et multiculturelle qui suit le rythme de son temps, cette recherche-création incarnera deux dimensions essentielles. D’une part, elle mettra en lumière la culture folklorique et le savoir traditionnel du peuple Bouyei. D'autre part, elle se matérialisera à travers une chorégraphie introspective qui fusionnera la danse folklorique orientale minoritaire avec la pratique somatique.

En utilisant des technologies connexes dans le domaine de l’art numérique, telles que l’art vidéo et la capture de mouvement comme support technique, une application de réalité augmentée sera achevée dans le but de transmettre des messages et des informations sur le PCI Bouyei. 

Enfin, les objectifs de cette thèse seront atteints en présentant et en interprétant la transmission de ce PCI Bouyei à travers l'art numérique et la danse somatique.

De nos jours, l’idée voulant que l’économie du savoir soit le moteur des sociétés globales est un lieu commun. Par contre, la question sur comment les dites sociétés du savoir encouragent l’ignorance demeure un sujet moins exploré. À partir de résultats d’une étude empirique sur le phénomène de la Do-it-yourself bio (DIYbio), cette présentation a pour objectif de mettre en lumière comment la culture technoscientifique explore l’ignorance alors même qu’elle tient des discours et promeut des pratiques autour de la notion de « science ouverte ». Ancrée dans le domaine des études sur la science, l’étude se base sur l’analyse de discours de sources documentaires et d’entretiens avec des membres du réseau DIYbio. Après avoir mis en relief de la pluralité des cultures animant le phénomène de la DIYbio (la biologie synthétique, le hacking et le DIY/Maker), j'esquisserai la relation complexe que la DIYbio entretien à l’égard du savoir. On verra que cette relation combine tout à la fois des valeurs d’instrumentalité, de positivisme et d’ignorance. Tout en montrant que le savoir y est valorisé dans la mesure où il permet d’explorer des possibles biotechnologiques, ou de légitimer les produits issus du génie génétique, je discuterai comment une telle attitude à l’égard du savoir s’imbrique à la construction de l’ignorance comme une faculté en elle-même. La conclusion fera ressortir la solidarité d’un tel rapport au savoir avec le régime néolibéral.

Le présent travail fait une analyse des différents moyens de sauvegarde et d’exposition du patrimoine culturel immatériel (PCI) dans certains musées du monde. L’intérêt de cette recherche est lié au déséquilibre entre les pays du Sud et ceux du Nord en matière de PCI. La convention de 2003 de l’UNESCO a été accueillie avec plus d’engouement dans les pays du Sud que du Nord; en témoigne le nombre de pays africains ayant ratifié la convention. L’un des moyens de sauvegarde que recommande l’ICOM (Conseil International des musées) est l’introduction du PCI dans les musées.

Cependant, force est de constater que les pays du Sud n’en font pas vraiment pratique, et que les pays du Nord sont plus déterminés dans ce domaine. Qu’est-ce qui explique alors la position des pays du Sud face à l’introduction du PCI dans les musées? Afin de répondre à cette question, la lecture des documents physiques et numériques est la principale méthode. La consultation des sites internet de certains musées dans différents espaces géographiques et des documents rédigés à leurs propos, n’est pas du reste.

La recherche nous permet de découvrir que les pays du Sud n’introduisent pas assez leurs PCI dans les musées car ils pensent qu’étant dans un musée, le PCI est coupé de ses communautés d’origine et par conséquent ne peut pas se recréer. Elle permet ainsi de   comprendre que la sauvegarde du patrimoine immatérielle dans les musées est fonction des réalités culturelles de chaque communauté.

Les documents en langue française paraissent essentiels dans le domaine des études ottomanes, notamment pour celles s'adressant au XIXe siècle. Le Bulletin de l'Académie de Médecine (BAM) nous fournit ainsi une image précise et détaillée de la médecine ottomane à travers le regard de son homologue française dans la seconde moitié de ce siècle.  Nous avons choisi d’examiner quelques échantillons du matériel disponible dans cette source, en rapport avec le système de santé ottoman depuis 1850 jusqu’au tout début du XXe siècle. On attendait ainsi de la médecine ottomane qu’elle devînt un interlocuteur et un partenaire-clé, fiable et efficace sur des questions cruciales telles que la lutte contre la survenue et l’extension de maladies infectieuses dont le choléra est pris ici comme exemple. Les autorités de santé ottomanes se voyaient attribuer le rôle d’un véritable verrou sanitaire devant empêcher de telles épidémies – dont on estimait généralement qu’elles émanaient d’Orient, notamment des Indes – de se répandre dans l’Empire ottoman pour gagner ensuite l’Europe orientale puis occidentale. La Turquie se signalait ainsi déjà comme une passerelle entre Orient et Occident. En outre, il y a 150 ans, ces préoccupations en matière de santé renvoient aux crises sanitaires internationales vécues très récemment (SRAS, grippe H1N1...).

Mots-clés : médecine ottomane, Empire ottoman, choléra, épidémies, Turquie, histoire de la médecine, médecine islamique, la santé dans le monde.



La philosophie de l’information vise à fournir les bases d’une réflexion critique sur cette notion polysémique qu’est l’information. Depuis les travaux de Shannon (1948), Bar-Hillel & Carnap (1953), et Wiener (1961), nous avons divers moyens de quantifier l’information (entropie de Shannon) en terme de fonction de probabilité. Or ces moyens émanent d’une théorie mathématique de la communication et aucune définition universelle de l’information n’y est incluse. Dans son article de 2004, Luciano Floridi propose un programme, sous la forme de dix-huit questions ouvertes, qui a pour objectif d’aiguiller les recherches en philosophie de l’information autour de quatre grands axes. L’un d’entre eux concerne la possibilité d’une théorie générale de l’information (TGI). L’ouvrage de Mark Burgin (2010) Theory of Information, constitue précisément une tentative d’élaboration d’une telle théorie générale de l’information. Tout d’abord, j’exposerai comment cette théorie s’inscrit dans la tradition philosophique des approches dynamiques de l’information (Drestke 1981 ; Barwise & Seligman 1997). Ensuite, je montrerai en quoi la théorie de Burgin permet, à travers sa distinction entre principes ontologiques et principes axiologiques, de fournir une définition philosophiquement adéquate de l’information, de résoudre le paradoxe de Bar-Hillel-Carnap et de rendre compte de l’aspect subjectif de l’acquisition d’information en théorie de la décision.

Cette présentation portera sur les résultats d’une recherche menée dans le cadre d’une cotutelle internationale de thèse, en sociologie et en sciences des religions, basée sur les récits de vie de personnes issues de la communauté catholique laotienne de Montréal. Elle tentera d’analyser le problème de la transmission intergénérationnelle de la mémoire d’exil que l’on retrouve au sein des familles composant cette communauté. La recherche a permis de faire ressortir que les membres de cette dernière qui ont fui le Laos suite à l’implantation d’un régime communiste dans ce pays en 1975 ont peu parlé des circonstances et des raisons de leur exil à leurs enfants. La présentation sera divisée en trois parties. Dans un premier temps, nous ferons un bref survol historique de la trajectoire de ces immigrés laotiens, de l’arrivée du communisme au Laos à leur installation au Québec. Dans un deuxième temps, nous aborderons la question du silence que gardent ces exilés relativement à leur mémoire d’exil, ses motifs et ses effets sur leurs enfants. Enfin, dans un troisième temps, nous verrons que ce silence ne demeure jamais absolu : il comporte des brèches, de telle sorte qu’il y a toujours, malgré tout, une certaine transmission intergénérationnelle qui s’opère de manière subtile, ce qui tend à démontrer que dans toute expérience ou mémoire « de souffrance », il y a quelque chose qui cherche à se dire et qui se refuse ainsi à être complètement oublié.

Exploration de l’impact d’internet sur les représentations musulmanes de l’"autre" lors du passage en ligne de fatwas sur les juifs ou le judaïsme. Produits, et productrices d’un certain regard musulman sur l’altérité, ces "fatwas juives" demeurent des constructions particulières, situées dans le temps et l’espace. Mais lors de leur passage en ligne, ces représentations sont mises à l’épreuve, à la merci de nouvelles logiques communicationnelles et des pratiques qui en découlent. Analyser le contenu d’une centaine de fatwas d’IslamOnline.net pour en relever les éléments tant jurisprudentiels (traditionnels) que ceux ancrées dans des réalités contemporaines. Ces constructions dynamiques de l’altérité juive en ligne s’inscrivent dans des relations de pouvoir, implicites ou explicites, établis ou ébranlées. Certains contenus relèveront, en partie, du positionnement des autorités auxquelles ces fatwas font appel : chercheurs d’IslamOnline.net, individus-expert provenant de différents pays, organisations transnationale ou nationale, certaines fatwas ayant même deux sources d’autorité ou plus. De surcroît, ces fatwas présentent des horizons d’interprétations normatifs "dé-localisés" (Echchaibi) et 'dé-territorialisés" (Roy) qu’infléchissent de nouveaux réseaux transnationaux (Mandaville) de collaborateurs-producteurs de fatwas. La migration en ligne de ces fatwas et des pratiques qui y sont associées opère un infléchissement de ces représentations musulmanes de
l’altérité juive.

Pour cette communication, nous nous penchons sur l’expérience d’appartenance à la «oumma» (communauté musulmane) de canadiens musulmans et musulmanes à l’ère des nouveaux médias socionumériques. Nous analysons les entrevues menées auprès de cinquante québécois musulmans et musulmanes de 20 à 50 ans de la région de Montréal et de Québec (projet CNRS), pour explorer leurs expériences vécus de ces deux modes distincts – présentiel et virtuel – d’être-ensemble (Campbell 2010) au sein de communautés «imaginées» (Anderson 1991) réelles ou virtuelles (Rheinigold 2000) et électives (Castells 2001). Alors que les médias socionumériques jouent un rôle important dans le maintien de réseaux locaux, régionaux, nationaux ou internationaux (Moghissi 2006), surtout pour les musulmans depuis le 11 sept. 2001 (Hirji 2006), ces médias facilitent à la fois le rétablissement d'affiliations avec les communautés du pays d’origine mais surtout l’établissement de nouvelles affiliations et appartenances (Guyot 2006). Nous nous penchons sur les rapports des participants avec les groupes qu’ils fréquentent (communauté de foi, mosquée, association des étudiants musulmans, groupes soufis, etc.) – en ligne et hors ligne –, sur les activités auxquelles elles participent, et sur les nouveaux rôles que prennent les médias socionumériques, s’intéressant particulièrement à la nature et la fréquence de l’interactivité (horizontal vs. vertical) pour le développement de leur sens d’appartenance (Campbell 2012).

Pourquoi et comment la controverse janséniste autour de Saint-Médard s’est trouvée à s’exprimer par la comédie et comment cet usage du théâtre peut-il nous renseigner sur la querelle janséniste des Lumières ?La comédie du père jésuite Guillaume-Hyacinthe Bougeant, Le saint Déniché ou la banqueroute des marchands de miracles (mai 1732) et celle d’un janséniste, qui est une réplique directe, Arlequin esprit folet (juillet 1732), permettent de parcourir une voie jamais empruntée pour rejoindre l’histoire de la polémique autour du jansénisme convulsionnaire à Paris. Elles ont surtout l’avantage de faire voir, selon le parti, une représentation de l’adversaire suivant une conception caricaturée et polémique de l’altérité. Faire voir au public, par une lecture comique, le danger de l’autre selon un dessein grossier de celui-ci. Les échos littéraires de la querelle janséniste révèlent un déplacement des modalités habituelles d’affrontements ainsi qu’une modification du contenu discuté. 

Le cadre méthodologique que Roger Chartier a développé en ce qui concerne l’analyse des sources imprimées se révèle tout à fait pertinent pour mon analyse. Il se résume dans ce triptyque : œuvre, support, réception. 

L’originalité historiographique réside véritablement en ce que ces comédies ne firent jamais l’objet de recherches systématiques. Le résultat de nos recherches participe, à sa mesure, à un meilleur savoir sur le jansénisme convulsionnaire et, donc, sur la France religieuse moderne.

Le rapport à l’autre a été au cœur de la construction et de la (re)définition de l’identité hindoue au cours des XIXe et XXe siècles en Inde. Durant cette période de profondes mutations qui ébranlent les dimensions religieuse, sociale et politique de l’Inde, l’autre prend des formes inédites et les discours sur celui-ci se multiplient. La littérature indienne offre une vitrine saisissante de la façon dont la confrontation à l’autre, réelle ou imaginée, a été partie prenante des stratégies qui ont alors permis à l’hindouisme de se réinventer. Les romans et les nouvelles de l’écrivain nord-indien Premchand (1880-1936) foisonnent d’images de l’autre, mis en scène à travers une série d’oppositions autour desquelles s’organise l’intrigue de ses histoires : riches et pauvres, citadins et villageois, brahmanes et intouchables, hindous et musulmans, hindous et chrétiens, Britanniques et Indiens. L’examen de certains textes marquants de ce romancier, devenu une figure incontournable de la littérature indienne contemporaine, devrait faire émerger quelques pistes permettant de réfléchir à la façon de concevoir l’altérité dans le néo-hindouisme.

Depuis 2008, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, plus de la moitié de la population mondiale habitent dans les centres urbains. Le Japon est confronté à ce nouveau paradigme. La campagne japonaise est sévèrement affectée par l’exode rural. La réalité de ceux qui percévèrent en ces lieux est très peu documentée. Une étude de cas, celle de la vallée d’Iya, une région isolée du Japon, porteuse de traditions vernaculaires ancestrales, mettra en lumière l’arrivée et la manifestation de la  modernisation puis l’impact de l’exode rural qui s’ensuit sur son patrimoine culturel. En raison de sa réalité territoriale et du modèle d’établissement particulier, cette étude est abordée, du point de vue de la géographie-culturelle et de sa lecture du paysage telle qu’entrevue par J.B Jackson. Ainsi, à travers la lecture du milieu naturel et la façon dont il est habité, l’ampleur des changements survenus par l’arrivée de la modernité est identifié. Aujourd’hui, avec une population vieillissante constamment à la baisse et un territoire marqué par l’arrivée de la modernité, son héritage culturel est en péril. Les mesures entreprises pour revitaliser la région sont à ce jour inefficaces. Un avenir est difficilement envisageable.  Aucune publication en langue française ou anglaise n’est disponible sur cette région méconnue. Cette présentation offrira un autre regard sur le Japon contemporain : celui du monde rural; une facette occultée dans l'image du Japon moderne. 

 

 

Dans le cadre de cet exposé, je procède à une étude comparative entre trois destinations touristiques (Québec, Barcelone et Venise), classées selon les phases d’une « infection touristophobique » provoquée par le tourisme de masse. En guise d’introduction, un survol de la problématique abordée dans le cadre de l’école d’été 2018 de l’Institut du patrimoine culturel (IPAC) de l’Université Laval est proposé. Il est ensuite introduit la définition ainsi qu’un bref constat en ce qui concerne la Barcelomania et la touristophobie à Barcelone, avant d’insister sur le fait que ces enjeux, à degrés variables, touchent également d’autres destinations touristiques dans le monde et sont le produit d’une mauvaise gestion de « l’altérité touristique ». Deux tendances, à savoir la muséification et la muséalisation, seront utilisées pour éclairer sur des processus de, respectivement, fixation et mise en musée du patrimoine culturel des destinations. Ces deux forces antagonistes exercent une influence indiscutable au sein des villes à l’étude, agissent en tant que modèle de cohésion ou tension sociale et peuvent représenter un moyen de compréhension et dialogue entre les communautés locales et les visiteurs culturophages. Enfin, les enjeux reliés à la problématique seront soulevés, pour ensuite proposer des solutions pour l’avenir.

Matérialisation des principes de la « science ouverte » et de l’« innovation ouverte », le phénomène de la Do-it-yourself bio (DIYbio) vise à libérer la biologie moléculaire et les outils biotechnologiques de l’emprise politique, sociale et normative qu’y exercent les institutions de recherche. La DIYbio œuvre à mettre les outils biotechnologiques entre les mains du public de manière à ce que les individus puissent se les approprier et en faire un usage autonome. Par là, la DIYbio imbrique l’idéal politique d’autonomie, typiquement démocratique, avec des pratiques d’innovation en biologie. Cette présentation propose de décortiquer les principes et les implications sociales, culturelles, éthiques et politiques d’un tel enchevêtrement à partir de résultats d’une étude empirique sur le phénomène de la DIYbio. Ancrée dans le domaine des études sur la science, l’étude se base sur l’analyse de discours de sources documentaires et d’entretiens avec des membres du réseau DIYbio. En esquissant les rapports qu’entretiennent les communautés DIYbio nord-américaines à l’État, à l’éthique, aux droits de propriété intellectuelle, et à l’opposition sociale au génie génétique, la communication montrera que l’engagement envers la bio-innovation tend à aller de pair avec une sacralisation de la liberté individuelle. En conclusion, on verra en quoi ces éléments dessinent un modèle néolibéral de démocratie des biotechnologies.   

Cette présentation, vise à nuancer la lecture du néolibéralisme comme étant un hyperindividualisme. Prenant l’exemple des pratiques de beauté pendant et après la grossesse, pratiques ici appréhendées comme relevant d’un entrepreneuriat de l’esthétique s’inscrivant dans une idéologie néolibérale, je montre que cette appréhension du néolibéralisme ne sied pas au contexte taiwanais. Basée sur une ethnographie de près de trois ans à Taipei, cette présentation analyse le travail esthétique entourant la grossesse et participant du nouveau phénomène de la « yummy mummy». Je montre comment rester désirable durant la grossesse et « retrouver la taille » après, implique une dimension transindividuelle importante. Retrouvant rapidement leur silhouette, les femmes, non seulement, flattent l’égo de l’époux et honore la famille, mais la reconnaissance des autres qu’elles s’attirent ainsi est un facteur décisif de leur quête de beauté. Cette reconnaissance, provenant du mari, des membres de la famille, voire d’inconnus, est constitutive de la satisfaction de soi des femmes, gains immatériels ultimes de cet entrepreneuriat de l’esthétique. En conclusion, l’activité entrepreneuriale d’apparence individuelle, comme les pratiques de beauté, ne peut pas être appréhendée en faisant « abnégation du social »; en effet, l’analyse montre qu’une gestion attentive des relations sociales est un travail immatériel s’inscrivant dans l’entrepreneuriat de l’esthétique.

Le but de ma
réflexion est d’aborder la question de la tradition vivante au sein d’un peuple
contextuellement situé. Son objet est l’Évangile, qui, sous l’action de
l’Esprit, est transmis de manière ininterrompue d’une génération à une autre,
donc du passé au présent de l’acte de foi de chacun. L’idée
de base est celle-ci : dès lors qu’on partage la même foi, mais sur fond
d’un enracinement historico-culturel irrécusable, aucune formule voulue unique
ne suffira à exprimer la foi dans sa plénitude. Il me paraît alors
possible d’avoir au sein de l’Église catholique une pluralité et diversité des
formules doctrinales sans mettre en danger l’unité de la foi. En effet, la catholica elle-même, est un
tissu complexe de traditions culturelles d’origines très diverses avec de
nombreuses visions du monde. 

Ma réflexion
a pour pivot le juste rapport à adopter vis-à-vis de la tradition. Le corpus de
référence est constitué de Dei Verbum,
Ad Gentes et Gaudium et Spes du concile Vatican II, pour réfléchir
théologiquement à une herméneutique de la tradition, et de Vérité et Méthode de H.-G. Gadamer pour le versant de
l’herméneutique philosophique.

Voici mon hypothèse: une cohérente conception de la tradition ne
devrait-elle pas promouvoir et maintenir une fécondité mutuelle entre
l’Évangile et le contexte ?

La pensée de Gadamer soulève des enjeux
herméneutiques et théologiques pour la théologie catholique et promet l’herméneutique
doctrinale à une reconfiguration encore inédite.

Les éditathons sont une rencontre de wikipédiens et de non wikipédiens au sein d’un équipement culturel. Ceux-ci écrivent, enrichissent des articles de l’encyclopédie Wikipédia, en relation avec la collection ou l’exposition de l’équipement culturel dans un temps donné. Les ateliers d’écriture des associations locales de wikipédia, expériences transmédiatiques sont questionnés du point de vue de la co-construction des contributeurs comme une réinvention de la transmission. Il est interrogé le coefficient de capacitation des publics de ce dispositif de médiation qui s’étend du web, aux espaces de documentation, aux salles d’exposition des équipements culturels. Quelles sont les relations entre les contributeurs entre eux ? Quelles sont les conditions de possibilité a minima de la participation  (engagement, adhésion) ? La méthodologie de cette enquête repose à la fois sur une description graphique du réseau que cet événement peut tisser entre les contributeurs, la portée spatio-temporelle de celle-ci, le type de contributions des contributeurs présents à l'événement, puis d'une redocumentarisation ethnographique de ces premières descriptions. L’apport des visualisations de données pour la recherche en sciences humaines et sociales sera discuté. L’objectif de cette recherche est de relever des indicateurs pour évaluer le coefficient de capacitation des publics au sein de ce type de médiations.

Au Québec, le vécu des pratiquants du bouddhisme tibétain est peu connu et encore moins, la pratique bouddhiste tibétaine. De nos jours, des pratiquants Occidentaux et des bouddhistes tibétains partagent non seulement des lieux communs, mais aussi à certains égards, une pratique bouddhiste commune. Dans cette ère moderne où des personnes d’origines différentes se côtoient, il est à propos de vouloir comprendre comment la diversité culturelle se dessine et s’accommode dans le cadre d’une pratique culturelle particulière. Nous nous intéressons aux transformations tant personnelles, sociales que culturelles qui surviennent au contact du bouddhisme tibétain. Une analyse du vécu et du discours portant sur les pratiques bouddhistes des participants à l’étude, nous permettra de mieux interpréter la signification accordée à la culture du temple tibétain. Les pratiques individuelles des pratiquants de trois origines différentes : tibétaine, vietnamienne et québécoise, seront analysées. La comparaison des groupes nous permettra de faire émerger les particularités des pratiques de chacun des groupes et ainsi nous aider à mieux comprendre la culture commune au temple.

Nombre de travaux qui s’inscrivent aujourd’hui dans une ère « post-multiculturelle » s’interrogent sur les effets néfastes d’une reconnaissance des spécificités culturelles sur une culture publique commune. Le débat semble aussi se déplacer progressivement sur les notions de pluralisme et de cosmopolitisme où l’accent est mis dorénavant sur l’individu et sa propension à rencontrer l’autre, plutôt que sur le multiculturalisme qui consiste en une simple juxtaposition de réalités hétérogènes. La notion de gouvernance de la diversité culturelle implique cette conversation entre les cultures. Mais de quelle gouvernance parle t-on ? Sur un plan strictement théorique, la question de la gouvernance en matière d’inclusion et de relations entre citoyens de toutes origines illustre la nécessité mais aussi la difficulté à délimiter des valeurs collectives qui sont véritablement au centre du dialogue démocratique. Sur un plan pratique, la gouvernance s’incarne dans les actions multiples engagées notamment par les différents acteurs des organismes communautaires et des associations qui orientent les immigrants vers diverses institutions et les initient aux valeurs culturelles et civiques locales mais qui, face au retrait progressif de l’Etat, doivent sans cesse être renouvelées, en particulier pour pallier les difficultés d’intégration vécues par les nouveaux arrivants. Notre communication se proposera d'explorer les deux acceptions de cette gouvernance de la diversité culturelle au Québec

Vers la fin du 20e siècle, de nombreuses communautés autochtones au Brésil ont réalisé l’importance de leur apparence externe dans la perception de l’authenticité de l’autochtonie pour appuyer leurs revendications. Le port d’accessoires de plumes colorées et de peintures corporelles est alors devenu plus fréquent. Dans ce contexte, les concours de Miss et Mister Terena ont connu une popularité grandissante dans le Centre-Sud du Brésil. Plusieurs de ces concours visent à montrer la beauté de leur culture, à se donner à voir dans un contexte sans violence en plus de stimuler la participation et l’intérêt des jeunes vis-à-vis de leur culture. Comment ces concours ont-ils contribué à des transformations spécifiquement en lien avec l’utilisation des peintures corporelles? Cette présentation examinera ces transformations, les pressions externes et internes qui les influencent ainsi que les significations qu’elles détiennent pour les Terena aujourd’hui. Ces résultats préliminaires sont issus d’une ethnographie de 8 mois au sein de communautés Terena où j’ai observé, filmé et photographié 14 concours et conduit 54 entrevues qualitatives avec les membres de l’organisation, des artisans et des candidats. Analyser ces concours expose l’agentivité des Autochtones dans la définition de leur culture ainsi que le rôle qu’endossent aujourd’hui les jeunes, à la fois créateurs de particularité culturelle et médiateurs de plus en plus habiles entre leur groupe et la société nationale.

La recherche opérationnelle, aujourd’hui associée à l’optimisation mathématique des processus, est une discipline scientifique qui est apparue au Royaume-Uni à l'aube de la Seconde Guerre mondiale. Ce concept était alors beaucoup plus large, englobant toutes les disciplines scientifiques, en sciences humaines autant qu’en sciences exactes. Désirant miser sur son capital académique, le gouvernement britannique voulait associer à l’effort de guerre les meilleurs chercheurs du pays en les motivant à laisser de côté la recherche fondamentale pour se consacrer à la résolution de problèmes concrets, d'ordre "opérationnel".

 

L’historiographie sur le sujet traite surtout de l’interaction entre les personnalités marquantes du domaine et sur leurs réalisations les plus spectaculaires. Allant au-delà de cette “Big Science” nous avons étudié les travaux moins connus. Comme tous les secteurs militaires ont eu recours à la recherche opérationnelle, nous avons limité notre étude au cas du Bomber Command, car les bombardements des villes allemandes que cette unité a effectués sont un aspect de la Seconde Guerre mondiale qui est considéré par plusieurs historiens comme le plus typique du concept de la "guerre totale" en vertu duquel la frontière entre civils et militaires est effacée. Notre étude démontre que la recherche opérationnelle telle que pratiquée au Bomber Command visait en priorité à maximiser l’offensive plutôt qu’à minimiser les pertes humaines et matérielles. 

Le dernier quart du 19e siècle marque l’apogée, en Amérique du Nord, d’une Révolution industrielle en quête d’une main-d’œuvre capable de supporter la demande, que la population locale ne pouvait satisfaire. L’apport de migrants chinois à cette nouvelle réalité économique ne s’est toutefois pas fait sans ressentiments sociaux et politiques. L’Exclusion Act de 1882 aux États-Unis, et le Chinese Immigration Act de 1885 au Canada en sont des exemples probants. Les exilés chinois, qui fuyaient, entre autres, les tumultes politiques en Chine et la crise agricole dans la région du Guangdong, voyaient pourtant dans l’Amérique une avenue intéressante. Depuis les années 1960, nombreux sont les travaux qui s’intéressent à la problématique des migrants et à la construction diasporale. Toutefois, des recherches récentes, dont celles de Dirk Hoerder et Huping Ling, tendent à critiquer certaines connaissances scientifiques sur les valeurs, motivations et perceptions de la diaspora chinoise. Selon cette approche, « l’espace » occupé par la diaspora délaisse le concept de géographie physique pour emprunter la représentation d’une perspective culturelle et sociale, méritant ainsi une analyse approfondie de sa problématique. Dans cette communication, nous proposerons un regard sur cette référence spatiale de la diaspora chinoise sous forme de démarche historiographique exploratoire qui mènera, dans une étape successive, à une connaissance plus juste de la réalité diasporique sino-montréalaise.