De la direction d'une revue savante : boucler la boucle

Valoriser les sciences de l'éducation

Une des missions de la revue est de faire valoir la synergie entre les chercheurs universitaires et les praticiens de tout ordre d'enseignement afin de mettre en valeur les connaissances issues de la recherche et de l'expérience professionnelle, et ce, pour que tous puissent s'engager dans une démarche de transformation des pratiques. Il s'agit de valoriser les sciences de l'éducation, de valoriser la profession enseignante.

Depuis 2017, c'est 166 articles qui ont été publiés sous les trois différentes rubriques, dont voici un bilan par catégorie :

• 14 éditoriaux ou des synthèses (9% des publications);
• 14 articles scientifiques écrits par des étudiants gradués sous la rubrique Place à la relève (9% des publications);
• 50 articles professionnels de la rubrique Milieu de pratique (33% des publications);
• 73 articles scientifiques de la rubrique Milieu de recherche (49% des publications).

Une grande fierté quant à ce bilan me vient du fort pourcentage de publication d'articles professionnels, soit un tiers des publications, auquel viennent s'ajouter, bien que non comptabilisés ici, des articles de vulgarisation scientifique (nommés articles de retombées) qui accompagnent la majorité des articles scientifiques de la rubrique Milieu de recherche (exemple). Ces 50 articles professionnels marquent le rôle singulier et complémentaire de la RHÉ quant aux publications présentement offertes en sciences de l'éducation.

Vivre au rythme de l'édition

Mon début de carrière professorale a été marqué par ce mandat de direction qui a demandé beaucoup d'investissement d’édition pour tous ces articles édités qui paradoxalement tiennent sur une même petite ligne de mon CV commun canadien. En 2018, après un an, je mentionnais déjà que la direction de revue demande beaucoup de temps, chose qui est, et je me cite, une « denrée rare pour la professeure en début de carrière que je suis ».  Bien que les années aient passé et que les organismes subventionnaires ont statué que je ne suis plus chercheuse en émergence, ce temps m'a toujours fait défaut. J'ai appris, au fils du mandat, à jongler avec une certaine culpabilité, et j'ai compris que la RHÉ était un des éléments du panier et que ma gestion de ce panier de priorités fluctuait en fonction des périodes et des sessions. J'ai dû m'approprier le rythme de l'édition scientifique, en même temps que celui d'une carrière universitaire.

J'ai relu mes articles de 2018 et 2019 dans le présent magazine. La notion de temps revient souvent, celle du libre accès aussi, mais ce qui était récurrent demeure, évidemment, le financement. En 2019, en faisant un parallèle entre la culture artistique et la culture scientifique, j'ai parlé d'argent et de redevances. À la RHÉ, nous sommes privilégiés. Mon institution a soutenu et soutient toujours, et encore plus aujourd'hui, notre plateforme de diffusion des connaissances : la revue est nouvellement accréditée comme une unité de recherche officielle de l'UQAC. De plus, le soutien financier du département des sciences de l'éducation n'a pas failli, s'est ajouté celui du FRQSC lié à une équipe, et au fil des ans, la RHÉ a intégré la plateforme Érudit, ce qui produit des redevances.

L'addition de ces sources de financement a fait en sorte que nous avons toujours pu embaucher des étudiants pour me soutenir dans les travaux d'édition, mais aussi pour contribuer à la revue. En effet, nous avons vécu à quelques reprises des difficultés à « recruter » des articles professionnels pour la rubrique Milieu de pratique. Le financement cumulé de toutes ces sources a permis de mettre en place une solution intéressante, soit celle d'embaucher des étudiants pour rencontrer des praticiens, les interroger et écrire en collaboration avec eux un article professionnel. Cela permet, d'une part, de mettre en lumière ce qui se passe dans les milieux de pratique et d'inspirer les praticiens par ce partage d’initiatives novatrices, mais aussi, d'autre part, d'offrir une opportunité de publication aux étudiants de premier, deuxième et troisième cycle.

De l’autre côté du miroir

Avec cette expérience, je suis passée de l’autre côté du miroir et j’ai maintenant aussi une connaissance de l’envers de l’édition scientifique. C’est une tâche tant chronophage qu’enrichissante. Elle exige une grande discipline professionnelle, tout en stimulant notre curiosité intellectuelle. Elle m’a permis, par exemple, de m’ouvrir à des thématiques de recherche sur lesquels je n’aurais sûrement jamais lu et de faire des rencontres tant inopinées que passionnantes avec une multitude de collègues.

En conclusion, après presque six années d’une tâche exigeante, pensons à la gestion de retour d’évaluations d’articles, et avant de laisser officiellement la direction à mon collègue Stéphane Allaire, je me suis permis un souhait. Je nous invite à la bienveillance, à une rigueur intellectuelle constructive et à une ouverture envers toutes les formes de recherche. Que le processus de révision par les pairs demeure collégial. Célébrons l’approche scientifique et profitons de ces lieux de rencontre que sont d’abord les revues scientifiques pour contribuer le plus largement possible à la valorisation des connaissances issues de la recherche et de la pratique.

Célébrons l’approche scientifique et profitons de ces lieux de rencontre que sont d’abord les revues scientifiques pour contribuer le plus largement possible à la valorisation des connaissances issues de la recherche et de la pratique.