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Joseph Moisan-De Serres, Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ)

 

Cette photographie présente une abeille du genre Melissodes en train de butiner une fleur de tournesol "Ring of fire". Elle illustre avec flamboyance l’incroyable relation de mutualisme qui unit ces deux organismes si différents, en plus d’exposer une des adaptations morphologiques fascinantes de l’insecte, acquise au fil des millénaires pour la récolte du pollen. Il s’agit d’une abeille solitaire femelle récoltant l’abondant pollen produit par le tournesol pour nourrir ses larves.

#MagAcfas - Découvrir : Les pollinisateurs : les connaître pour les défendre, par Joseph Moisan-De Serres, Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ)Pour cette plante florifère, voilà un véhicule de choix pour transporter ses gamètes vers d’autres fleurs, un processus de fécondation immémorial qui rendra possible la reproduction de l’espèce. Et pour l’abeille, ce pollen est une précieuse ressource qui constituera les réserves de nourriture pour sa progéniture, bien à l’abri d’un nid souterrain construit expressément pour elle.

Le corps de cette abeille est tout simplement taillé pour ce travail. En effet, les tibias de ses pattes postérieures supportent une structure très complexe, nommée scopa, lui permettant de transporter des dizaines de milliers de grains de pollen à chacun des allers-retours entre son nid et les fleurs qu’elle visite. Le mâle (FIGURE 2), quant à lui,  ne possède pas de scopa, puisqu’il ne visite les fleurs que pour combler ses besoins alimentaires personnels et non pour nourrir ses larves. Les mâles Melissodes présentent par contre eux aussi une morphologie particulière, notamment en ce qui a trait à leurs antennes, qui sont étonnamment longues. Au cours de l'évolution complexe et fragile des insectes, bien peu d’éléments ont été sélectionnés sans présenter un avantage. Toutefois, à ce jour, le rôle de ces appendices démesurés demeure plus ou  moins élucidé...

L’histoire

L’un des sujets environnementaux ayant fait couler le plus d’encre au cours des dernières années est sans nul doute le rôle des insectes pollinisateurs ainsi que la menace qui pèse  sur eux. Ces fragiles et minuscules organismes se révèlent des moteurs essentiels du maintien de la biodiversité végétale et des acteurs particulièrement importants dans la production alimentaire nécessaire à la survie de l’espèce humaine. En effet, on évalue que 70 % des principales cultures produites à l’échelle mondiale doivent bénéficier de l’activité des insectes pollinisateurs, ce qui n’est pas peu dire! De plus, entre un quart et un tiers de notre alimentation est dépendante de façon directe ou indirecte de la pollinisation par les insectes. Ces constats démontrent donc l’importance de ces organismes non seulement pour notre alimentation, mais aussi pour l’économie mondiale.

 

Péril en la demeure

Bien que leur rôle soit de plus en plus reconnu, les insectes pollinisateurs et les services écosystémiques qu’ils rendent sont en décroissance dans plusieurs régions du monde, et ce, principalement à cause de l’activité humaine. Plusieurs éléments sont mis en cause pour expliquer la diminution des populations de pollinisateurs, dont les abeilles domestiques (Apis mellifera L.) sont les représentants les plus connus. On trouve entre autres la destruction des habitats propices au maintien et à l’accroissement de leurs populations, l’utilisation intensive de pesticides, la diminution de la diversité florale ainsi que la prolifération d’organismes pathogènes. Peu importe la, ou plus vraisemblablement, les causes influençant négativement ces organismes primordiaux, il est plus que nécessaire, désormais, d’agir et d’informer.

De l’information en français, s’il vous plaît?

Un nombre croissant d’ouvrages portant sur ces organismes bénéfiques a été publié au cours des dernières années en Amérique du Nord et dans le reste du monde. Cependant, jusqu’à tout récemment, aucun ouvrage nord-américain francophone n'identifiait bien les insectes pollinisateurs et les plantes d’intérêt pour eux. C’est pourquoi le Guide d'identification et de gestion - Pollinisateurs et plantes mellifères a vu le jour à l’hiver 2014. L’idée était de susciter l’intérêt des producteurs agricoles et de la population en général face aux insectes pollinisateurs, tout en les aidant à identifier ces derniers et à en favoriser la présence.

Plusieurs mois de recherche exhaustive sur les mœurs et les milieux propices aux pollinisateurs et aux plantes d’intérêt, de chasse à l’insecte et de prise de photos sur le vif ont conduit à la parution de ce guide. 

Largement imagé par des photographies macroscopiques d’insectes aux agencements de couleurs parfois invraisemblables, mais toujours élégants, le guide présente plus d’une quarantaine de familles, de genres ou d’espèces d’insectes appartenant à des taxons aussi diversifiés que les hyménoptères, les diptères, les lépidoptères et les coléoptères. Ces insectes, si différents soient-ils les uns des autres, contribuent tous à la pollinisation de nos fruits, légumes et légumineuses.

Après un tour d’horizon des principaux pollinisateurs d’importance, les lecteurs pourront en apprendre davantage sur une centaine d’espèces de plantes indigènes, introduites ou horticoles, qui présentent un intérêt pour les pollinisateurs et qui pourraient être intégrées  à leurs jardins ou plates-bandes. Enfin, l’ouvrage décrit différentes méthodes de gestion et de pratiques agricoles qui peuvent être adoptées, ou évitées, pour parvenir à freiner la perte de ces petits travailleurs de l’ombre et leur fournir des milieux accueillants dans notre entourage agricole et urbain.

 

 


  • Joseph Moisan-De Serres
    Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ)

    Joseph Moisan-De Serres est détenteur d’un baccalauréat en biologie et d’une maîtrise en biologie végétale de l’Université Laval. Il est présentement à l’emploi du laboratoire de diagnostic en phytoprotection du Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ) où il travaille à l’identification des arthropodes ravageurs et bénéfiques des cultures. Dans le cadre de ses fonctions, il participe au développement du site web IRIIS phytoprotection, une banque d’images documentées sur les ennemis et les alliés des cultures. Il est coauteur du Guide d’identification et de gestion - Pollinisateurs et plantes mellifères, édité par le Centre de référence en agriculture et agroalimentaire du Québec (CRAAQ).

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