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Guy Drouin, Université d'Ottawa
Le génotype frugal inclurait les gènes produisant de l'insuline en abondance et ceux nous amenant à préférer les aliments calorifiques, comme les sucres et les graisses. Après tout, on entend souvent des gens dire qu'ils ont une rage de chocolat, mais jamais une rage de fibres!

Le diabète est la condition qui résulte d’une trop grande quantité de sucre (glucose) dans le sang. L’insuline, elle, est l’hormone qui fait passer le sucre du sang vers les cellules. Une fois dans nos cellules, le sucre est soit utilisé rapidement pour produire de l’énergie, soit entreposé sous forme de graisse pour utilisation future. Si cette hormone fait défaut, le sang se sature de glucose et vous voilà diabétique. L’ensemble du corps devient peu à peu affecté par cette surdose : lésions à la rétine et aux reins, maladies coronariennes, etc.

Deux mécanismes mènent au diabète : un pancréas ne produisant pas assez d’insuline (type 1) ou des cellules devenues insensibles à l’insuline (type 2).

Dans le cas du diabète de type 1 (diabète juvénile), le système immunitaire détruit les cellules du pancréas, productrices de l’hormone. Ce diabète se traite à l’aide d’insuline; environ 10 % des diabétiques sont de ce type.

Le diabète de type 2 affecte les 90 % restants. Ce diabète, dit « de l’âge mûr » et lié au surplus de poids, touche désormais un nombre grandissant d’adolescents, voire d’enfants. Pour emmagasiner les graisses, les diabétiques de type 2 ont produit des quantités importantes d’insuline et leurs cellules y sont devenues insensibles. On traite ces personnes avec des suppléments d’insuline dont la dose va croissant. (Un troisième type de diabète, le diabète de grossesse, touche de 1 à 10 % des femmes enceintes, mais il disparaît généralement après la naissance du bébé.)

En des temps plus maigres

Les hautes fréquences de diabète sont généralement observées dans les pays industrialisés, où il y a une surabondance de nourriture. Par contre, on note aussi ces fréquences chez des populations plus frugales de plusieurs îles du Pacifique. De plus, on n’observe presque jamais d’animaux sauvages obèses malgré des conditions d’abondance parfois très marquées. Comment peut-on expliquer ces trois constats?

Une hypothèse, toujours la plus répandue dans la littérature scientifique, a été proposée par le généticien James Neel en 1962. C’est celle du génotype frugal. La libération rapide d’insuline (par notre pancréas) dans le cas d’un surplus de sucre aurait été favorisée par la sélection naturelle, une adaptation sélectionnée au cours des millions d’années qui nous ont précédés. Cette caractéristique, en effet, aurait permis à nos ancêtres d’accumuler des réserves sous forme de graisse lorsque la nourriture était abondante, pour aller y puiser en périodes de disette quand la chasse et la cueillette ne suffisaient pas.

Nos ancêtres ayant les gènes qui leur permettaient d’accumuler une plus grande quantité de graisses ont donc laissé plus de descendants. Cette sélection est similaire chez les animaux  « hibernateurs », tels les marmottes et les ours.

Un héritage encombrant

Le génotype frugal inclurait les gènes produisant de l’insuline en abondance et ceux nous amenant à préférer les aliments calorifiques, comme les sucres et les graisses. Après tout, on entend souvent des gens dire qu’ils ont une rage de chocolat, mais jamais une rage de fibres!

Maintenant que la nourriture est toujours abondante dans nos pays et qu’on ne puise plus dans les réserves, la libération régulière d’insuline et l’accumulation des graisses sont devenues désavantageuses. En d’autres mots, les gènes que nous avons hérités de nos ancêtres ne sont pas adaptés à notre environnement actuel.

Les problèmes d’hypertension chez les Africains-Américains sont un autre exemple d’adaptation devenue embêtante. En Afrique, traditionnellement, les individus avaient une diète pauvre en sel et, de plus, ils en perdaient beaucoup à travers leur transpiration. Ceux qui avaient des gènes leur assurant une meilleure rétention du sel ont donc eu un meilleur taux de reproduction. Par contre, pour qui vit aux États-Unis aujourd’hui, pays de la malbouffe, cette capacité de rétention se traduit en hypertension.

Étant donné qu’on ne peut pas changer nos gènes, la seule solution possible est de modifier notre environnement. Nous devons réaliser que la surconsommation de nourriture et le manque d’exercice nous sont néfastes et changer nos habitudes en conséquence. Il faut évoluer vers le plaisir de la frugalité...

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  • Guy Drouin
    Université d'Ottawa

    Guy Drouin est professeur titulaire à l’Université d’Ottawa depuis 1990. Il détient un doctorat en génétique de l’Université de Cambridge, et il a poursuivi ses études postdoctorales à l’Université Harvard. Ses recherches portent sur l’évolution des gènes et des génomes. Il enseigne la génétique, l’évolution moléculaire et la génétique évolutive des humains. Il s’intéresse aussi à l’enseignement des sciences en milieu minoritaire.

     

    Note de la rédaction : Les textes publiés et les opinions exprimées dans Découvrir n'engagent que les auteurs, et ne représentent pas nécessairement les positions de l’Acfas.

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