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Catherine Bouchard, Agence de la santé publique du Canada

Je suis vétérinaire épidémiologiste à l'Agence de la santé publique du Canada et professeure associée à l'Université de Montréal. Mon terrain de jeu est le domaine des maladies infectieuses à l'interface homme-animal-environnement et plus spécifiquement les maladies transmises par les tiques. Mes travaux de recherche visent à comprendre où sont les tiques aujourd'hui, et où elles seront dans les années à venir, en particulier celles infectées par des agents infectieux d’importance en santé publique, tels que la maladie de Lyme, l’anaplasmose et la babésiose. Depuis 2007, je participe à la recherche, à la surveillance et à l'évaluation de méthodes de prévention et de contrôle de maladies transmises par les tiques dans le contexte des changements climatiques. 

Camille Bouchard
Catherine Bouchard examine ici une pièce de flanelle. Ce tissu imite un peu la fourrure d'un animal et les tiques s'y accrochent quand on les frôle. En quête d'un repas de sang, elles tendent les pattes avant et attendent le passage d'un animal. Elles patientent au sol sur la litière de feuilles mortes ou sur la végétation basse. Au 20 mètres, la chercheuse retourne le tissu flanelle d'un mètre carré, et prélève les piégées. Source : Catherine Bouchard.
Qu’en est-il de votre libido sciendi, soit de votre désir de connaitre? Quels liens avec le désir de transmettre?  

Mon désir de faire de la recherche sur les tiques et les maladies transmises par celles-ci est né de mon intérêt pour la forêt et d’un voyage en Afrique de l’Est. La forêt a pris sa place dans ma vie depuis très longtemps, j’adorais y être, les odeurs, l’apaisement ressenti. J’ai planté des arbres pendant quatre étés dans l’Ouest canadien pour payer en partie mes études vétérinaires et participer à un stage vétérinaire en Afrique de l’Est. Là-bas, au Kenya et en Tanzanie, j’ai rencontré mes premières tiques et compris l’impact des agents infectieux qu’elles pouvaient transmettre chez des animaux ou des humains. Des vaches devenaient littéralement aveugles suite à la piqûre de tiques infectées par un parasite. Après mes études, j’avais toujours ce fort appel de la forêt et là, un projet de doctorat pour chercher les tiques vectrices de la maladie de Lyme dans les forêts de la Montérégie et de l’Estrie m’a trouvé! C’était en 2007. On a repéré à ce moment-là les premières populations de la tique vectrice de la maladie de Lyme au Québec. J’ai eu beaucoup de plaisir à chercher ces tiques dans ces forêts de feuillus et à les retirer de la fourrure des petits rongeurs sauvages et des cerfs. 

Mon désir d’en connaitre plus sur ces petites bestioles s’est ensuite transformé en envie de les faire connaitre aux autres! Je voulais stimuler l’intérêt et la curiosité des gens pour celles-ci. Une personne bien renseignée peut minimiser le risque de s’exposer aux tiques ou de contracter les maladies transmises.

Qu’est-ce qui vous motive dans le geste de transmission des savoirs de recherche? 

Lors de mes travaux de doctorat, je suis devenue maman, petit changement! Avec ma connaissance des tiques, et vivant en Montérégie, je me sentais très apte à prévenir les piqûres pour moi et ma famille, autour de ma maison ou en forêt. Par contre, je sentais une forme d’inéquité envers les autres familles et la population en générale. J’avais eu la chance d’être exposé, de manipuler, de savoir comment retirer ces petits acariens bien accrochés sur la peau des animaux et des humains. Les tiques étaient nouvellement arrivées, et il y avait là un savoir à partager. 

La motivation de transmettre a découlé de ce besoin de donner des moyens au travailleurs et aux citoyens de prévenir le risque de maladies transmises par les tiques. C'est aussi très valorisant d'intéresser les gens au monde des tiques tout en leur apprenant dans ce cas à s’en méfier et à bien gérer leur exposition aux piqûres. 

Comment vos pratiques de transmission ont-elles évolué avec le temps?

Depuis plusieurs années, je donne des entrevues ou participe à des conférences pour démystifier les mythes et la réalité reliés aux tiques et aux maladies transmises. J’essaie de faire comprendre leur comportement, leur biologie et comment nous pouvons poursuivre nos activités de plein air tout en minimisant les risques. Plus récemment, nous avons développé des ateliers de formation dans le cadre d’un projet de recherche universitaire à Bromont, une municipalité durement touchée. Ces ateliers sont très pratiques. On va sur le terrain à la recherche de tiques dans les boisés résidentiels ou dans les parcs à proximité. Les gens ont beaucoup de questions et beaucoup de crainte au début. Lorsque je mets des tiques dans ma main pour leur montrer ce à quoi elles ressemblent, selon leur stade, les gens se sentent privilégiés d’avoir cette expérience. Ils acquièrent la capacité de reconnaître cette petite bestiole de quelques millimètres seulement. Et ça, je crois que c’est la base pour adopter des bons comportements de prévention! Ma pratique de transmission a donc évolué vers des approches de transmission plus proactives, locales et communautaires. Nous essayons de stimuler des citoyens ou des regroupements de travailleurs à prendre et transmettre le flambeau de la connaissance des tiques!

Tiques à 2 stades de développement : Nymphe et adulte
Sur la photographie de gauche, on voit une tique au stade de nymphe. Toute petite, elle passe souvent inaperçue, et de ce fait, elle serait responsable de la majorité des cas de maladie de Lyme!  Elle est active dès le début du printemps, quand il n'y a plus de neige au sol et que la température au dessus de 4 °C, et jusqu'à la fin de l'été. Bref, elle y est quand nous y sommes... 
Sur la photographie de droite, on voit la femelle adulte d'IxodesScapularis.
Crédits : Catherine Bouchard

Note : Pour en savoir plus sur la maladie de Lyme, vous pouvez consulter canada.ca/MaladieDeLyme.


  • Catherine Bouchard
    Agence de la santé publique du Canada

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