J’invite les chercheurs à engager la conversation avec leurs bibliothécaires et à explorer avec eux comment ceux-ci peuvent contribuer à l'atteinte des objectifs de recherche. Le partenariat entre la recherche et les bibliothèques ne peut que faire des gagnants pour nos institutions.
Peut-on considérer les bibliothèques universitaires comme des « infrastructures de recherche »? Oui, absolument! Tout projet de recherche démarre par un recensement des écrits et les bibliothèques, dépositaires de riches patrimoines documentaires, en sont la source principale.
Cette notion est maintenant bien intégrée par les organismes subventionnaires, dont la Fondation canadienne pour l’innovation (FCI). Citons pour exemple le Projet canadien de licences de sites nationales (PCLSN), projet de 50 M$ sur trois ans, démarré en 2000 et financé à hauteur de 20 M$ par la FCI. L’objectif du projet était d’augmenter les collections savantes des bibliothèques universitaires dans les domaines des sciences, du génie et de la médecine. Soixante-quatre universités canadiennes ainsi que les gouvernements provinciaux ont contribué au projet. Au début de 2007, la FCI a de nouveau financé 67 % d’un projet de 28,6 M$ d’infrastructure de contenu numérique, mais cette fois-ci en sciences humaines et sociales. Par ces deux projets, les bibliothèques universitaires ont démontré non seulement que l’accès aux publications de recherche est une composante essentielle de l’infrastructure de recherche, mais également que cet accès devrait être ouvert à tous les chercheurs et chercheuses quels que soient la taille et le niveau de financement de leur université.
Outre cette reconnaissance de la FCI, le Programme des coûts indirects du gouvernement fédéral considère également les bibliothèques comme des ressources de recherche. Une partie des fonds du Programme peut donc être consacrée à l’entretien des bibliothèques ainsi qu’à l’achat et au maintien des collections de revues électroniques.
Une étude récente (2011) du Research Information Network illustre bien comment les services, les collections et les locaux des bibliothèques universitaires contribuent à faire avancer la recherche.Bien que l’étude ait eu lieu au Royaume-Uni, ses résultats s’appliquent tout à fait à la situation canadienne. Parmi les messages clés qui en ressortent, j’aimerais en souligner quatre :
1. « Les bibliothèques aident les institutions à recruter et à retenir les meilleurs chercheurs. Plusieurs facteurs contribuent à la réputation d’une institution : les classements nationaux et internationaux, la productivité de sa recherche, son corps professoral, son niveau de financement. La bibliothèque contribue également, positivement ou négativement, à cette perception. La qualité, la nature, l’étendue de ses collections, son personnel, ses services et ses locaux sont extrêmement importants. »
2. « Les bibliothèques aident les chercheurs à obtenir des subventions et des contrats de recherche. Le soutien à la présentation de demandes de subventions peut prendre plusieurs formes : des conseils sur la collection, l’aide à la recherche de références à intégrer aux demandes et l’accès direct à des articles et documents numériques. » Dans un papier publié en 2010, Carol Tenopir a démontré que chez les chercheurs actifs, 57 % des articles consultés en format numérique proviennent des bibliothèques.
3. « Les bibliothèques fournissent une vitrine à la recherche grâce aux dépôts institutionnels, qui accroissent la visibilité de l’institution et valorisent son profil de recherche. » Ces dépôts archivant les documents produits par l’institution tels les articles de recherche, les thèses et mémoires, sont dans la majorité des cas mis en place et gérés par les bibliothèques. Celles-ci assurent l’organisation du dépôt, le repérage de son contenu, sa conservation à long terme et sa promotion.
4. « Le personnel spécialisé des bibliothèques travaille en partenariat avec les équipes et les chercheurs. Les bibliothécaires, qui sont à la fois spécialistes d’un sujet et de l’information, sont des partenaires naturels de la recherche. » En tant que conseillers, ils peuvent s’intégrer à des équipes de recherche afin de les aider à repérer et à organiser l’information tout en fournissant de la formation sur demande.
L’étude souligne que « la contribution la plus profonde, et cependant la plus insaisissable, qu’apportent les bibliothèques, est une manifestation physique de la culture et du savoir, qui rappelle que les universités existent pour transmettre et préserver ces notions».
Les bibliothèques pourraient aller plus loin dans leur rôle-conseil si leur implication et le type de services disponibles étaient mieux connus. Afin de recréer les liens, elles auraient avantage à se rapprocher des équipes de recherche et de leurs partenaires, comme les Bureaux de la recherche, afin de mieux comprendre l’environnement où évoluent leurs clientèles. D’autant que cet environnement désormais très numérique est en constante mutation.
J’invite les chercheurs à engager la conversation avec leurs bibliothécaires et à explorer avec eux comment ceux-ci peuvent contribuer à l'atteinte des objectifs de recherche. Le partenariat entre la recherche et les bibliothèques ne peut que faire des gagnants pour nos institutions.
Références :
- The value of libraries for research and researchers: a RIN and RLUK report. Research Libraries UK, Research information network, March 2011.
- Traduction en français par l’Association des directeurs et personnels de direction des bibliothèques universitaires et de la documentation : La valeur des bibliothèques pour la recherche et les chercheurs. [PDF]
- TENOPIR, Carol, et autres (2010). « Measuring value and return on investment of academic libraries », Serials, vol. 23, no 3, novembre 2010, pp. 182-190.
- Sylvie Belzile
Université de Sherbrooke
Sylvie Belzile est directrice générale du Service des bibliothèques et archives de l’Université de Sherbrooke depuis 1999. Elle s’intéresse particulièrement au développement de nouveaux indicateurs de performance des services des bibliothèques universitaires. Elle détient une maîtrise en océanographie de l’UQAR, une maîtrise en bibliothéconomie de l’Université McGill ainsi qu’un MBA de HEC-Montréal.
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