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L'actualité récente soulève des questions quant à l'incidence sur le travail policier des droits fondamentaux protégeant la participation citoyenne. Le concept de profilage politique constitue une proposition émergente en sciences sociales, bien qu'encore peu d'études empiriques viennent l'appuyer. Depuis 2012, la notion de profilage n'est plus étrangère au droit québécois car le Tribunal des droits de la personne a reconnu que le pouvoir discrétionnaire des policiers est encadré par une interdiction de tout traitement différencié ou inhabituel sur la base d'un motif illicite de discrimination énuméré à l'article 10 de la Charte québécoise. La définition de ce qui pourrait constituer du profilage politique en droit demeure tout de même en suspend puisque le motif convictions politiques n'a pas encore fait l'objet d'une interprétation. Nous nous demandons donc : est-ce que l'utilisation de leur pouvoir discrétionnaire par des agents du Service de police de la Ville de Montréal dans leurs relations avec les contestataires étudiants au printemps 2012 permet de constater des cas de traitements différenciés ou inhabituels pouvant indiquer des pratiques de profilage politique tel que pourrait le concevoir le droit? Pour y répondre, nous mobilisons une approche de sociologie juridique basée sur des études de cas issues d'entretiens semi-dirigés effectués avec des contestataires étudiants.

Depuis 20 ans, dans l’Alt Empordà (Catalogne, Espagne), des citoyens, des associations et des municipalités luttent pour freiner les projets éoliens qui se multiplient sur ce territoire dont l’écosystème fragile et le paysage sont le fruit d’un attachement historique tout autant qu’une source de revenus pour les industries touristique et agricole régionales. Par le passé, des luttes semblables ont mené à l’abandon des nombreux projets éoliens. Cependant, la recrudescence et l’intensification des propositions de projets éoliens se voient propulsées par une loi récente sur les mesures urgentes contre la crise climatique, les objectifs étatiques en matière de transition énergétique ainsi les fonds d’investissement de L’UE qui créent des circonstances législatives et politiques favorables.

Cette communication propose de réfléchir aux préoccupations et aux aspirations concernant la nature et l’environnement dans un contexte de mobilisation contre ces projets éoliens. Des entretiens avec des citoyens et l’analyse de littérature grise laissent paraître une critique du modèle énergétique centralisateur et du manque de consultation et planification territoriale, parallèlement à la promotion d’une production énergétique de petite échelle qui favoriserait l’autoconsommation. Enfin, cette communication permettra de réfléchir aux implications sociales et politiques de la transition énergétique; préoccupations au centre des questionnements de l’anthropologie de l’environnement.

Il s’agit de présenter des résultats de recherche préliminaires de notre projet de thèse. La thèse s’intéresse notamment aux rôle et devoir des États d’assurer la protection in situ de la biodiversité dans un contexte de développement minier. Partant du constat de la superposition croissante des zones minières sur les aires protégées et de la gamme d’impacts générée, nous nous sommes interrogés dans un premier temps sur l’existence d’une obligation pour les États d’assurer la protection in situ de la biodiversité et sur les composantes d’une telle obligation. La première partie de la thèse vise à répondre à cette question. Nous y avons procédé à une analyse positiviste des principaux régimes internationaux de protection de la biodiversité qui a permis : 1) d’établir l’existence d’une obligation pour les États d’assurer la protection in situ de la biodiversité, découlant d’une longue tradition de protection de la nature, des engagements internationaux pris et des responsabilités indissociables des droits souverains sur les ressources naturelles ; 2) de préciser les composantes de l’obligation de protéger qui se décline en principes substantifs et procéduraux comme les principes d'équité ou de précaution, mais dont la valeur juridique demeure relative. La communication contribuera à l’avancement des connaissances juridiques sur la protection in situ de la biodiversité.

Problématique : Adoptées dans l’objectif de réduire l’utilisation de la force par les policiers et d’offrir une plus grande transparence aux organisations policières, les caméras portatives permettent aussi de recueillir, par leurs images, des éléments de preuve pour les causes criminelles ou pénales. Alors que de nombreux chercheurs s’intéressent aux effets du port de caméras sur les interactions entre policiers et citoyens, peu d’études empiriques ont étudié leur utilisation lors du traitement des dossiers judiciaires. Cette recherche visait donc à mettre en lumière les perceptions des acteurs judiciaires du rôle des enregistrements de caméras portatives comme preuves ainsi que leurs expériences avec ce type de preuve. Méthodologie : Des entretiens semi-directifs auprès d’une vingtaine de procureurs et d’avocats de la défense impliqués dans des dossiers où a été déposé un enregistrement de caméra portative ont été menés. Résultats : Les résultats indiquent qu’une forte valeur probante est associée à la preuve vidéo, laquelle est généralement perçue comme objective et démontrant la vérité. Cependant, les réalités pratiques du tribunal, mais aussi du travail policier, ne seraient pas sans influence sur l’exploitation réelle de ces éléments de preuve. Pertinence : Dans un contexte où le port de caméras par les policiers est de plus en plus réclamé, cette recherche contribue à une meilleure compréhension de l'apport potentiel de ces appareils au processus judiciaire.

Les coroners jouaient un rôle particulier dans le système judiciaire. Ils devaient enquêter en cas de morts « soudaines » ou « suspectes » relevant d’un large éventail de situations: accidents, suicides, morts naturelles et homicides. Leurs archives permettent d’étudier de concert deux questions essentielles en histoire sociale: la violence interpersonnelle, qui se traduisait parfois par des meurtres, et la précarité expérimentée par les gens d’autrefois, alors que de piètres conditions de travail et d’existence rendaient la vie assez « fragile ». La présente communication propose une étude quantitative et qualitative des enquêtes menées par les coroners entre 1914 et 1950 dans le district judiciaire de Trois-Rivières. D’une part, en quoi ces enquêtes sont-elles symptomatiques de la précarité sociale et des risques encourus par la population à l’époque? D’autre part, comment caractériser le travail du coroner en termes de régulation sociale, alors que ce personnage agit en contact étroit avec les acteurs sociaux ordinaires, tout en ayant à mettre en œuvre des normes juridiques/étatiques, normes qui, au demeurant, sont marquées par une présence de plus en plus grande de l’expertise scientifique? Les activités professionnelles du coroner permettent donc d’aborder la problématique des rapports entre droit et société. En outre, une étude approfondie de l’exercice de certaines fonctions judiciaires, comme celle que je propose, reste très rare en histoire de la justice au Québec.

Les réseaux normatifs sont formés par plusieurs acteurs et se présentent sous diverses formes. La gouvernance internationale - face à l'absence d'un gouvernement mondial - se définit comme l'ensemble de règles et de coutumes définies et mises en pratique par des états, des organisations internationales et - de plus en plus fréquemment - par des agences régulatrices qui coopèrent et produisent du droit mou.

La progressive insertion des pays émergents dans un marché mondial compétitif exige d'eux l'adoption des pratiques de gouvernance et des règles harmonisées, définies surtout par les pays industrialisés, par entremise des greffes juridiques. En renonçant partiellement à leur souveraineté, ces pays simplifient, harmonisent et réduisent les coûts des transactions visant à attirer l'épargne étrangère pour financer leur prospérité et leur modernisation.

Par contre, l'adoption des règles importées, voire imposées à des sociétés qui ne sont pas à leur origine, peut causer des effets néfastes de nature juridique, économique et sociétale.

Le Brésil a présenté sa candidature et avance rapidement ses compromis formels dans le but de devenir membre de l'OCDE. Son engagement exige des ajustements profonds dans son système légal et de gouvernance.

Ma communication vise à visiter les fondements théoriques en droit de cette adhésion, offrant une projection des impacts et des conséquences positives et négatives pour son peuple. Ceci fait partie de ma recherche doctorale sur la régulation comparée.

Depuis plus d’une décennie maintenant, le Mali tente d’impulser la participation  citoyenne à travers les textes législatifs régissant la décentralisation. En principe, les autorités municipales sont tenues d’informer et de consulter les citoyens dans le processus de prise de décision concernant la gestion de leur collectivité.

A partir d’expériences et d’études de participation menées ailleurs, nous formulons deux hypothèses sur le renforcement de la participation des citoyens de la commune urbaine de Bandiagara à la gestion de leur municipalité : d’une part, la réussite d’un mécanisme de participation des citoyens à la gestion municipale est favorisée par des conditions allant au-delà des textes législatifs, d’autre part, la faiblesse de la participation  des citoyens de Bandiagara à la gestion de leur municipalité est liée à cette limite des pratiques. En effet, nous avons identifié dans la littérature certaines  conditions jugées nécessaires au succès  des mécanismes de participation. Cela nous a amené à constater que les pratiques appliquées à Bandiagara ne tiennent pas compte de ces conditions faisant le succès du système ailleurs. Ces résultats révèlent la faiblesse du niveau de participation des citoyens de Bandiagara à la gestion de leur ville et nous invitent à identifier des mécanismes d’amélioration de la participation citoyenne.  De ce fait, l’étude propose une révision du nouveau dispositif en place qui, nous espérons, contribuera à son renforcement.

« Le seuil culturel comme entre-deux ; en tant que lieux de rencontres, les seuils ouvrent un espace singulier, constituant en quelque sorte des contenant de pensée, des espaces où il est possible de comprendre l’étrangeté de l’autre sans en être effrayé ».

À l’époque où les États africains obtiennent leur indépendance, l’établissement d’un ordre constitutionnel national a souvent exigé l’importation de normes, sinon de modèles, inspirés des anciennes métropoles. On réalise alors la part de référents culturels transporté relayée par la normativité juridique. Les versions successives de ces constitutions ont toujours profité d’une forme transitivité des normes. L’expérience juridique et politique particulière des États africains démontre cependant la difficulté qui accompagne ces emprunts. Ils ont souvent conduit à des greffes improbables d’un ordre juridique vers l’autre. Des acteurs s’y rencontrent au seuil du droit, inspirés par les principes et des normes constitutionnelles reconnues au plan international, par les contraintes du contexte politique et des rapports de force du moment et par les cadres juridiques et les institutions politique déjà établies. Le droit constitutionnel devient dès lors le lieu d’une négociation culturelle complexe, à la jonction des orientations inspirées par les États « du Nord » et réinterprété par ceux « du Sud ». Seuil d’une discussion continue, le débat constitutionnel est un lieu d’altérité.

Dans trois villages des îles du Saloum un projet de développement a été mené pour lutter contre la pauvreté des populations en améliorant les capacités d’adaptation des groupes de femmes aux changements climatiques qui affectent la dynamique des écosystèmes de mangrove et réduisent la production de coquillages et de poissons. L’objectif était d’amener les Groupements d’Intérêts Économiques à s’approprier de nouvelles façons de faire pour améliorer leur économie, assurer la sécurité alimentaire et maintenir le rôle et la position des femmes dans les collectivités locales. Les résultats concrets des interventions permettent d’élaborer des hypothèses sur de l’impact de l’entreprenariat féminin comme moyen pour pérenniser les activités de productions socio-économiques en contexte de vulnérabilité. Nous mettrons l’accent sur les interventions gagnantes et les limites à cette approche.



La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) est un pilier clé de l'Union européenne (UE), jouant un rôle vital dans la construction de la communauté de droits européenne. Elle influence des aspects cruciaux de la vie des Européens, tels que la protection des salariés, la libre circulation des travailleurs et des étudiants, ainsi que l'accès aux soins de santé. Cette étude explore la relation entre la CJUE et les citoyens, ainsi que la place des droits européens dans leur vision de l'UE. Nous examinons cette question sous deux angles : la perspective de la CJUE en tant qu'arbitre du droit européen et celle des individus. Nous analysons également comment les citoyens intègrent les droits européens dans leur récit de l'UE. Nous commençons par une revue de la littérature sur les droits de l'UE pour ses citoyens et la confiance entre les institutions européennes et les citoyens. Ensuite, nous utilisons des données d'opinion récentes sur la CJUE dans l'UE des 28 pour tester ces dynamiques. Enfin, nous examinons en détail comment les individus intègrent la CJUE dans leurs discussions sur l'UE en tant que communauté de droits, en utilisant des données qualitatives provenant d'entretiens collectifs dans quatre villes européennes.

L’universalité des droits de l’Homme, voilà une question qui ne cesse de revenir au devant de la scène politique, nationale et internationale. Malgré une Déclaration universelle des droits de l’Homme présente depuis plus de soixante ans, le dossier des droits de l’Homme, celui de la portée universelle des obligations qui en découlent demeure au centre de tourmentes, de dénonciations et d’accusations impliquant aussi bien des États que des groupes non-étatiques. Cette situation fait s’affronter deux approches antagonistes : l’universalisme et le relativisme. Et par delà ces deux camps, il y a ceux qui se veulent centristes, une voix dont les Third World Approaches to International Law («TWAIL») semblent se réclamer. Comment les penseurs d'un courant qui se veut critique, post-colonial, centré sur les besoins des peuples du Tiers-monde se positionnent-ils et analysent-ils le caractère universel des droits de l’Homme dans les combats qu’ils mènent ? Notre problématique s’articule autour des interrogations suivantes : le fait que les TWAIL et le relativisme culturel aient en partage certains de leurs objets d’études tels que la culture, l’identité et le rapport à l’« autre » les fait-il aborder la question de l’universalité des droits de l’Homme de la même façon ? Quelle légitimité accordent-ils à l'universalité actuelle? En d’autres termes, interroger le droit à la lumière de la culture et de la construction identitaire mène-t-il forcément à un raisonnement relativiste ?

La position occupée par les villes secondaires dans les mobilités et les migrations provisoires ou pendulaires est essentielle, en particulier dans les migrations circulaires : stades vers la grande ville, mais aussi asiles et recours au moment des crises.

Les villes petites et moyennes sont plus que jamais fournisseuses de plusieurs activités publiques et privées, principalement en rapport avec les activités campagnardes (agricoles ou non agricoles). Les branches de services comme les transports, les services financiers et de crédits impliquent en même temps les citoyens des villes et des campagnes limitrophes.

Dans le cadre moderne de métropolisation, de libéralisation et de reconversion des économies agricoles, le poids des villes secondaires dans les systèmes relationnels combinant villes et campagnes se rattache plus que jamais des politiques des divers acteurs engagés. Au sein de ces derniers, les petits entrepreneurs locaux sont intéressants à examiner pour démontrer les logiques d’adaptation aux mutations tant endogènes qu’exogènes. Une étude de cas de petites villes de la région de la Kabylie permet d’examiner la situation de ces petits entrepreneurs.

Pour la méthode, il s’agit d’effectuer, pour les villes d’enquête (Tizi-Ouzou et Alger), des enquêtes de terrain auprès d’un échantillon de migrants interurbains, ruraux et régionaux, permettant de saisir les questions d’interférence (relais ou intermédiation), du rayonnement et le niveau d’attraction de ces villes.

Durant les années 1980, les employés du secteur public suédois ont vu leurs conditions de travail changer radicalement. D’un système de négociation centralisé où les salaires étaient fixés à partir de caractéristiques comme l’ancienneté, le modèle s’est décentralisé et les salaires sont maintenant individualisés, différenciés et possédant des primes à la performance. Comment expliquer un tel changement et l’appui des puissantes centrales syndicales, alors que cette réforme affaiblit pourtant le rapport de force des puissantes centrales syndicales suédoises suite à la décentralisation des négociations et à l’individualisation des conditions de travail? À l’aide du cadre d’analyse de Peter Hall sur les changements de paradigmes, nous expliquons dans cet article les transformations du paysage syndical suédois entre 1960 et 1980, alors que les syndicats de cols blancs prennent une place de plus en plus importante dans la société. Les syndicats suédois avaient des intérêts divergents et la perte progressive d’influence du syndicat des cols bleus, LO, au profit de syndicats de cols blancs comme TCO et SACO expliquent pourquoi une réforme de cette ampleur a été possible dans le contexte plus global de réforme de l’État. De plus, cette communication se terminera avec une ouverture face aux possibilités d’application de cette réforme au Québec.

Les agences de notation sont des acteurs centraux dans le développement de la finance, le secteur microfinancier n’échappe pas à cette particularité. Parce qu’elles produisent et diffusent des informations sur les risques et les bénéfices potentiels, ces agences conçoivent leur rôle en tant que fournisseurs d’opinions objectives destinées aux épargnants, aux investisseurs, aux débiteurs et aux régulateurs. Dans les marchés microfinanciers, elles estiment ainsi qu’elles procurent aux institutions de microfinance (IMF) et aux investisseurs « uniquement des opinions, jamais de conseils ». Ce que les IMF mettent en oeuvre une fois qu’elles ont reçu cette opinion relèverait donc d’un autre domaine, celui des services de consultants et des choix de gouvernance stratégiques des gestionnaires. En explorant le cas de la microfinance péruvienne, cette communication démontre toutefois que les utilisateurs ne perçoivent pas l'utilité des rapports de notation de manière univoque, les IMF les utilisant partiellement comme une source de conseils et de connaissances crédibles pour identifier leurs forces et leurs faiblesses organisationnelles. Cette communication s’intéresse aux interrelations entre l’auto-conception des agences de notation et l’utilisation de leurs rapports par les IMF et les firmes d’investissements. Elle révèle une transmutation dans l’utilisation du savoir qui est non prévue, inconsciente et réfutée par les acteurs à la source de la production de ces connaissances.  

Quelle est la part du droit dans la survenance d’un facteur risque ? Comment la norme juridique peut-elle se trouver impliquée dans la source d’un risque ? Le risque peut-il être la manifestation du préjudice potentiel généré par la norme ? Peut-on évaluer le degré d’incertitude juridique ? Ces interrogations sont aujourd’hui au cœur de la recherche consacrée aux rapports entre le risque et le droit.

Si le droit, paré de ses vertus classiques de régulation et de protection, continue de s’affirmer aux yeux de tous comme un instrument d’anticipation et de gestion des risques, la notion de risque juridique demeure quant à elle largement inexplorée et faiblement traitée par la recherche juridique fondamentale. Pourtant, il n’est plus contesté que le droit, lui-aussi, « piège » et peut apparaitre lui-même comme source d’insécurité ou d’incertitude, tant dans son édiction que lors de son application.

Il est ainsi nécessaire d’étudier de façon spécifique le risque juridique, ses sources et ses manifestations, en vue d’élaborer une théorie qui le prenne pour objet autonome. La présente communication propose de mettre en débat cette orientation scientifique inédite, d’en discuter les prolégomènes et les enjeux, et d’en présenter les premiers résultats. Elle s’inscrit dans un dialogue ouvert non seulement avec les chercheurs francophones et les pratiques comparées, mais aussi plus fondamentalement entre la science et la société tant il s’agit aussi d’y (ré)interroger la place du droit.

La notion de handicap mental fait allusion à une condition neurocognitive qui diffère de ce qui est perçu comme la norme, mais qui n'est génératrice de détresse que dans la mesure où elle est confrontée aux contraintes imposées par la société. Dans l'arrêt Auton rendu par la Cour suprême du Canada, la Cour a refusé d'ordonner le financement public d'un service de thérapie cognitive comportementale qui aurait eu pour effet d'améliorer les habiletés sociales d'un groupe d'enfants autistes, citant notamment la souveraineté du gouvernement pour ce qui est des questions budgétaires. Cette décision de la Cour suprême met en relief la réticence des tribunaux de mettre en œuvre des obligations positives devant incomber à l'État, même en présence d'une violation d'un droit fondamental garanti par la Charte canadienne. L'étude qui suit propose une analyse des motifs pour lesquels les tribunaux devraient se montrer plus interventionnistes en la matière lorsqu'il est question des personnes aux prises avec un handicap mental. L'interaction entre d'une part, la doctrine de l'égalité des ressources et  l'approche des capabilités, et d'autre part la doctrine des droits économiques et sociaux en droit international sera explorée, avant d'être mise en interaction avec le droit à l'égalité selon la Charte canadienne. Nous parviendrons à la conclusion que, bien les tribunaux devraient davantage intervenir en matière d'allocation de ressources, cette intervention devrait demeurer procédurale.

Depuis la première controverse publique suscitée par la commercialisation des OGM, plusieurs acteurs soulignent que certaines insuffisances grèvent nos modes traditionnels de gouvernance au regard des enjeux soulevés par la technoscience. Plus précisément, ces insuffisances concernent l’inadéquation de l’encadrement normatif actuel face au développement rapide de différentes technologies. Par exemple, la lenteur du Droit à prendre en charge les multiples enjeux générés par le développement et l'interaction des biotechnologies et des nanotechnologies est souvent dénoncée et a justifié le recours à des propositions alternatives, tel le principe de précaution. Il apparaît dès lors important de se demander pourquoi le Droit semble inadéquat à assurer une prise en charge et un encadrement cohérents des enjeux provenant du développement technoscientifique. Dans cette optique, il sera d’abord question d’analyser comment s’articule la structure de gouvernance juridique mise en place dans le contexte du développement technoscientifique au sein des sociétés québécoise et canadienne. Par la suite, nous analyserons l'effectivité et la légitimité de cette structure de gouvernance, en référant à diverses tentatives élaborées pour déjouer ces insuffisances, tels le principe de précaution ou le débat public. Ceci nous permettra enfin de dresser un constat de l'état actuel de la situation et de proposer certaines pistes de solution.

Grâce aux plateformes numériques, le savoir des citoyens peut être mis à contribution pour réaliser des activités traditionnellement réservées aux experts.  La collaboration citoyenne intéresse de plus en plus les institutions culturelles (archives, bibliothèques, musées et galeries) au fur et à mesure que celles-ci numérisent leurs œuvres et les publient en ligne dans un contexte de ressources limitées. Dans la présente communication, les chercheurs présenteront, dans un premier temps, les résultats d’une veille sur des initiatives de collaboration citoyenne visant l’enrichissement de fonds d’archives institutionnels et privés. Ils exposeront, dans un deuxième temps, les résultats préliminaires de l’expérimentation d’une plateforme de collaboration permettant à des citoyens de taguer, de catégoriser, de dater, de situer et de commenter des images à valeur patrimoniale provenant de centres d’archives et de groupes de citoyens.  Cette étude vise à rendre compte de 3 aspects émergents de la gestion des documents numériques à valeur patrimoniale, à savoir la démocratisation des pratiques en archivistique, la qualité des contributions des citoyens au patrimoine documentaire et l’intégration de ces contributions dans le fonctionnement des institutions culturelles. La collecte et l’analyse des matériaux reposent sur deux principales sources d’information : les sites Web d’institutions culturelles issus de la veille et les contributions des participants dans la plateforme.

Au Québec, l’approche judiciaire actuelle en matière de diffamation consiste à concilier, d'une part, le droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa réputation et, d'autre part, la liberté d’expression, respectivement garantis par les articles 4 et 3 de la Charte des droits et libertés de la personne, à travers le prisme du droit civil. Dans le contexte d’un recours devant les tribunaux, la partie demanderesse doit, conformément à l’article 1457 du Code civil du Québec, établir l’existence d’une faute, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre ceux-ci pour obtenir des dommages compensatoires. Une telle démarche est problématique à plusieurs égards. Elle a notamment pour effet de soumettre hiérarchiquement la Charte québécoise, loi pourtant qualifiée de quasi constitutionnelle, aux règles de la responsabilité civile de droit commun. Le libellé de l’article 49 de la Charte québécoise, disposition qui prévoit qu'une atteinte illicite à un droit ou à une liberté confère à la victime le droit d’obtenir la cessation de cette atteinte et la réparation du préjudice qui en résulte, ouvre la porte à une interprétation différente de celle qui est préconisée actuellement. Cette communication vise donc à discuter du cadre d’analyse employé en matière de diffamation et des réformes dont il pourrait faire l’objet conformément aux exigences spécifiques de la Charte des droits et libertés de la personne.

Dans la foulée de la mutation et de la réorganisation de l’État qui rétrécit, des diminutions des protections sociale et civile, la Nouvelle gestion publique s’impose dans différentes sphères du social. Les organismes communautaires n’en sont pas épargnés. Les logiques de processus (sens et temporalité) et les impératifs de gestions (performance et rentabilité) imposés par la logique managériale sont en tension et soulèvent des enjeux éthiques et de pouvoir autour de la définition des problèmes et des actions politiques pour y remédier. Selon un regard constructiviste permettant de comprendre la réalité à partir des interactions sociales entre les individus, les institutions et la société, l’étude qualitative et évaluative pose un regard critique sur la production des rapports d’activités comme outil de reddition de compte et de valorisation de l’action communautaire des organismes en santé et services sociaux et met en lumière les impacts et le sens donné par les acteurs à la réorganisation de l’État sur les organismes. Il ressort donc de la recherche – analyse de contenu de près de 200 rapports d’activités, 7 groupes de discussion, un entretien avec le bailleur de fonds – une typologie qualitative représentant les actions communautaires et les enjeux émanant du rapport de pouvoir entre l’État et le mouvement communautaire représenté par une pluralité de points de vue qui se confrontent, s’alimentent et se transforment.

Cette présentation résulte d'une recherche collaborative.  En partenariat avec le Conseil de la Nation atikamekw nous avons travaillé à l’établissement d’une aire protégée atikamekw: Masko Cimakanic Aski.  Depuis plus de 10 ans, des membres de la communauté de Wemotaci ont réfléchi à un projet d’autonomie politique visant la protection de leurs terres ancestrales et la résurgence de traditions atikamekw. C'est donc en conjoncture avec l'engagement du gouvernement provincial à protéger l'environnement, que ces volontés se sont articulées autour d'un projet d'aire protégée. Or, Masko Cimakanic Aski ne correspond à aucune catégorie d’aires protégées actuellement reconnue par le gouvernement du Québec. Ainsi, la présente Loi sur la conservation du patrimoine naturelle n’admet pas un rôle en matière de gouvernance ou de gestion de ces aires protégées par les communautés locales, qui n’ont qu'un rôle en aval du processus. Il demeure donc encore difficile de mettre de l'avant une gestion locale, autonome et autochtone. Le microcosme des aires protégées  se voit ainsi comme le reflet de toute relation avec l’entreprise étatique où son caractère colonial tend à reproduire les mêmes rapports de force. Cette présentation a pour objectif d'exposer ce projet qui élabore une gestion territoriale proprement atikamekw. L'exemplarité de ce cas met en lumière l'enchevêtrement des questions de santé environnementale, culturelle et humaine, devant aujourd'hui être réfléchies sous un même joug. 

Les approches multi-partenariales et intersectorielles sont privilégiées pour décloisonner les différents espaces de prise décision. Ce type d’approche mise sur l’action collective en mobilisant des acteurs dans des domaines d’intervention administrativement isolé, tels que la santé, l’aménagement, le développement économique et social. La densité et la cohésion du réseau sociotechnique sont des facteurs permettant de qualifier la capacité d’agir collectivement sur des enjeux complexes. Suite à plusieurs essais et erreurs qui ont tenté d’occuper un espace institutionnel vacant durant la période 1990-2015, une initiative para-municipale à adopter une approche multi-partenariale et intersectorielle pour ‘mieux  gouverner’ le système alimentaire montréalais. Cette recherche se base sur une pluralité méthodologique, considérant une année et demi d’observation participante, un sondage en ligne et des entrevues ciblées. Nous présenterons les résultats préliminaires d’une démarche d’évaluation qui tente notamment, via l’analyse des réseaux sociaux, de visualiser la dynamique partenariale. Par ce biais, cette communication espère contribuer au dialogue sur l’institutionnalisation de nouvelles modalités des gouvernances de l’alimentation, l’agriculture et la santé publique au Québec.

La criminalistique est devenue un élément récurrent de la fiction policière et des reportages journalistiques sur le monde judiciaire. Désormais confrontés à maintes reprises à la représentation populaire de la discipline dans les médias, plusieurs citoyens se considéreraient familiers avec les grandes lignes de l’investigation scientifique d’une scène de crime et auraient développés des attentes quant à l’intervention des services d’identité judiciaire. Cependant, le fossé énorme qui persiste entre l’exploitation des traces matérielles telle qu’elle est présentée dans les médias de masse et le réel travail des techniciens en identité judiciaire et des scientifiques criminalistes œuvrant dans les organisations policières et les laboratoires forensiques rend ces attentes démesurées. Face à un tel constat, la présente recherche s’inscrit dans la perspective de la dramaturgie policière et cherche à observer si les corps policiers modernes ont adapté leurs stratégies en matière de déploiement des ressources forensiques. S’appuyant sur 18 entrevues semi-dirigées réalisées auprès de cadres policiers du Québec de niveaux opérationnel et stratégique, cette étude exploratoire souligne que le soutien au sentiment de sécurité et la promotion de la légitimité de l’organisation policière sont des éléments désormais pris en considération lors de la distribution des ressources humaines et financières destinées aux services d’identité judiciaire dans plusieurs corps policiers québécois.

Quels sont les attributs de qualité et de performance d’une institution à la fois régulateur économique, surveillant et arbitre dans un secteur économique ? Pour répondre à cette question, nous avons produit une grille d’analyse combinant à la fois les perspectives de la justice administrative, de la régulation et de l’économie néo-institutionnelle. Sous l’angle de sa fonction de règlement des litiges, nous appliquons cette grille à la gouvernance de la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec, intervenant dans le domaine réglementé de la mise en marché collective des produits agricoles. Notre examen de l’efficacité de la gouvernance de cette institution s’est fait au travers les perceptions et interprétations des acteurs au cœur de ses activités, offrant une perspective « vivante » de la RMAAQ. Notre contribution est de synthétiser un portrait-diagnostic actuel de la RMAAQ et de la résolution des litiges, en ciblant les points forts et faibles de sa gouvernance L’analyse des dix-sept entretiens démontre que la RMAAQ, comme institution, est perçue comme légitime, crédible et acceptée par les intervenants. Cependant, la performance de la gouvernance semble négativement affectée par certaines forces endogènes et exogènes au domaine réglementé qui nuisent aux coûts, aux délais et à la préparation aux arbitrages entre les parties. Une meilleure compréhension de ces forces permet d’assurer la pérennité de son rôle et de son importance, méconnus du grand public.

En 2013, les parlementaires indiens ont voté une Loi sur la sécurité alimentaire nationale (NFSA), qui établit les devoirs biopolitiques de l'État en matière de sécurité alimentaire, c’est-à-dire l'amélioration du bien-être nutritionnel des populations sous sa gouverne. En plus de sécuriser l’accès aux rations pour près de 800 millions d’Indiens, cette loi réforme le système de distribution de rations en numérisant certains instruments bureaucratiques déployés de manière à mieux contrôler l'échange de rations, et ainsi réduire la corruption. Dans cette communication, j’explore les effets de cette numérisation. J'examine, de manière ethnographique, les tactiques déployées par les populations ciblées pour surmonter les obstacles liés à la numérisation du système de rationnement indien. M’appuyant sur l’argumentaire d’Akhil Gupta (2012), et plus particulièrement sa conceptualisation de la production de l’arbitraire, j’analyse comment un projet de développement comme la NFSA et la numérisation du système de rationnement, qui visent pourtant à améliorer le sort des populations ciblées, parviennent tout de même à en exclure certaines de manière arbitraire. Je démontre donc qu’à l’ère de la gouvernementalité numérique, le succès de la biopolitique repose sur la capacité et l'habileté des populations ciblées à surmonter ces obstacles, notamment par la mise en place de liens avec des acteurs non étatiques, pour ainsi accéder aux droits qui sont les leurs.