Le profilage de stupéfiants dans les eaux usées est assez précis pour restreindre le champ d’investigation à un pâté d’une quinzaine de maisons.
- Colloque 206 - Pollution diffuse : outils, défis et enjeux
- Communication : De la chimie environnementale traditionnelle à la chimie environnementale forensique
Les eaux usées laissent leurs empreintes. C’est pourquoi l’équipe d’André Lajeunesse peut, à partir de ces traces, remonter jusqu'aux laboratoires clandestins de fabrication de drogue de synthèse. Si vous êtes en train d’imaginer Walt White, de la série
Breaking Bad, cuisinant de la meth, vous êtes en plein dans le mille!
André Lajeunesse, chercheur de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) travaillant sur différents projets touchant la chimie criminalistique, développe de nouvelles stratégies pour traquer les contaminants dans l’environnement. Mais il a particulièrement le flair pour y trouver des stupéfiants. Des labos sous la loupeLorsque des enquêteurs auront des soupçons sur la présence d’un laboratoire clandestin produisant de la méthamphétamine, l’amphétamine et l’ecstasy, ils pourront compter sur l’aide du chercheur du Centre international de criminologie comparée, et de son équipe. Le scientifique mentionne que : « le profilage de stupéfiants dans les eaux usées est assez fine pour restreindre le champ d’investigation à des secteurs bien précis d’une ville. » Pas moyen de se cacher! Par ses analyses chimiques, André Lajeunesse recherche les ingrédients de base de la recette d’une drogue. Les résidus du produit finis ne s’y retrouvent pas puisqu’ils sont déjà bien loin, en possession des revendeurs. Ce sont les produits précurseurs et les produits intermédiaires qui trahissent souvent les fabricants. Les laboratoires clandestins laissent de précieux indices quand on trouve dans les résidus de synthèse des traces chimiques exploitables. »Des outils de pointeLe criminaliste chimiste désire créer à long terme une « mémoire », soit une banque de données fiable pour faciliter les futures investigations. Il espère ensuite obtenir une collaboration avec les forces de l’ordre pour générer ce qu’il appelle l’
intelligence forensique qui mène ultimement au renseignement criminalistique. Pour collecter ces informations, son équipe et lui développent des outils permettant de capter des traces de polluants ou de stupéfiants dans l’environnement. C’est tout un défi puisqu’elles sont difficiles à observer : « Des traces, c’est l’équivalent de détecter quelques pincées de sel dans une piscine olympique. » Les capteurs chimiques sur lesquels planchent André Lajeunesse, son étudiante de maîtrise Laurence Paradis-Tanguay et son collaborateur le professeur Bruno Chabot de l’UQTR permettront de choisir la trace particulière dont on désire connaître la quantité. Les capteurs électrofilés forment un genre de tapis et agissent comme un nanofiltre. Ils sont composés d’un polymère organique naturel, le chitosane, composé d’extraits de carapaces de crustacés qui par une manipulation chimique peut s’adapter à la reconnaissance d’un composé. Comme ils sélectionnent que les traces jugées pertinentes, ces capteurs pourraient être utilisés pour détecter des activités illégales sous forme de tests présomptifs, c’est-à-dire des dispositifs terrain permettant de savoir rapidement si un élément se trouve dans l’environnement. Les outils d’investigation proposés par le Dr. Lajeunesse permettent aussi d’en savoir plus sur la consommation de stupéfiants des habitants autour d’un lac ou des citoyens d’un quartier partageant le même égout. Pour le chercheur, « l’amélioration des connaissances sur cet enjeux de santé publique permettra de mettre sur pied une prévention plus ciblée. »