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Le primat de l'intention et le rejet de la responsabilité criminelle absolue sont à la base du droit criminel d'origine anglo-saxonne. Il n'y a point de crime sans intention de le commettre, puisque l'homme est doté d'un libre arbitre, postulé ex nihilo, qui le rend à même de distinguer le bien du mal, et de fuir le mal. L'avènement des neurosciences est venu nuancer de beaucoup ce « truisme » séculaire, en inscrivant le phénomène des troubles mentaux et la « conscience » même de notre volonté  dans l'ordre des déterminismes génétiques, environnementaux et neurologiques. Alors que plusieurs militent pour un abandon pur et simple de la responsabilité individuelle ou du moins une réévaluation des objectifs (de dissuasion ou de réhabilitation) de détermination de la peine, le présent texte plaide la défense du statu quo, en ce que les mécanismes existants suffisent déjà à opérer un équilibre adéquat entre le maintien de la paix sociale et les « accommodements raisonnables » d'inégalités neurobiologiques individuelles.

En tant que témoignages de première main et d’outre-tombe, les lettres d’adieu suscitent depuis fort longtemps l’intérêt de romanciers, de dramaturges et de chercheurs. Les lettres d’adieu constituent en effet un matériau unique pour à la fois pour accéder à l’état d’esprit du suicidé et pour espérer prévenir de futurs passages à l’acte.

Pour nous, une lettre d’adieu permet aussi au suicidé de communiquer sur son rapport à soi, aux autres et au monde. En d’autres mots, elle n'éclaire pas seulement le passé et le présent, elle éclaire aussi le futur puisque son rédacteur pense déjà au moment post-mortem.

C’est dans cette optique que nous avons analysé 138 lettres d’adieu provenant des Archives du Coroner du district judiciaire de Montréal laissées par 72 Québécois.e.s âgé.e.s entre 20 et 30 ans durant la période 1940-1970.

Dans le cadre de cette conférence, nous mettrons en lumière les différents sens du message (introspectif ou dyadique) laissé par son auteur sur son rapport au passage à l’acte suicidaire. Nous mettrons ainsi en évidence le foisonnement et la multidirectionnalité des thèmes que les individus investissent pour établir leur moi posthume. Nos verrons également que le genre joue un rôle indéniable tant dans le message communiqué que dans la manière dont il est communiqué. 

Les guides de pratiques recommandent le soutien à l’autogestion dans le traitement des troubles de santé mentale courants. Toutefois, le rôle de l’autogestion dans le rétablissement a été peu examiné empiriquement (Houle et al., 2013) à défaut de disposer d’un instrument de mesure valide. L’étude a pour objectifs de concevoir un questionnaire mesurant l’autogestion et de vérifier ses propriétés psychométriques. Dans une première phase qualitative, les participants (n=50) ont relevé 85 stratégies qu’ils utilisent pour se rétablir de leur trouble de santé mentale courant. Ces stratégies s’inscrivent dans l’approche dimensionnelle du rétablissement de Whitley et Drake (2010). Lors d’une deuxième phase, 14 experts en rétablissement se sont prononcés sur des énoncés conçus par l’équipe de recherche pour mesurer chacune des stratégies. L’indice de validité de contenu de Lynn (1986) a permis de retenir les items les plus pertinents. La troisième phase est une étude quantitative transversale qui vise à valider le questionnaire. Les items sont administrés à 210 participants ayant un trouble anxieux, dépressif ou bipolaire par le biais d’un logiciel de sondage en ligne. Les résultats d’analyse de fiabilité et de validité (alpha, analyse en composantes principales, r test-retest) seront présentés. Ce questionnaire permettra de mieux comprendre l’influence des stratégies d’autogestion dans le rétablissement en santé mentale pour ainsi améliorer les pratiques de soutien à l’autogestion.

Dans un contexte national où la prévalence de la maltraitance et de la négligence n’est plus à démontrer (Trocmé, 2005), développer de nouvelles alternatives dans l’intervention spécialisée auprès de famille en difficulté est un enjeu d’actualité (MSSS, 2004). Les résultats préliminaires d’une recherche-action qualitative visant l’implantation du génogramme libre (Santelices, 1999) – soit la représentation dynamique et associative de la famille sur au moins trois générations – dans l’intervention communautaire auprès de jeunes parents en difficulté (18 à 30 ans), révèlent à la fois le potentiel thérapeutique de cet outil, mais également les risques cliniques qui sont inhérents aux modalités de sa passation. Des extraits de génogrammes et d’entrevues illustreront ainsi comment le dispositif spécifique du génogramme libre invite le parent à « projeter » certains aspects des problématiques intergénérationnelles, qui témoignent de difficultés dans les liens qui l’unissent à l’enfant et aux autres membres de sa famille (Tuil, 2005). Néanmoins, nous verrons dans quelles mesures ce dévoilement projectif peut parfois s’accompagner de réactions défensives de la part du parent (p.ex. : inhibition, perte de consistance du discours), particulièrement lorsque le clinicien s’engage dans une activité interprétative outrancière des éléments représentés dans le génogramme, dans le but de proposer des moyens pour prévenir ces risques cliniques.

Le concept d’engagement est apparu formellement au début des années 1960, quasi simultanément dans plusieurs disciplines des sciences humaines. Son influence persiste toutefois jusqu’à nos jours, et elle apparaît aux fondements des phénomènes de négociations internationales en sciences politiques, de la sociologie de la coopération et de la communication dans les petits groupes, de la théorie de l’intentionalité en philosophie de l’esprit, de la pragmatique des actes de langage en linguistique, des phénomènes d’influence et de persuasion en psychologie sociale, de la coordination au sein des systèmes multi-agents en intelligence artificielle distribuée, de la modélisation des émotions et des processus affectifs en psychologie cognitive et en robotique appliquée. L’idée sous-jacente en est que la coordination des rapports sociaux repose, même implicitement, sur une base contractuelle qui relie les agents entre eux et commande une régulation des activités de coopération. Malgré des différences importantes entre les domaines d’applications du concept, de nombreuses convergences sont identifiables, notamment sur le caractère intensément motivationnel des engagements, sur leur lien avec la gestion des ressources et sur leur rôle dans la structuration des intentions. La communication présentera la définition et les principales applications du concept dans les diverses disciplines ciblées, puis tentera d’en abstraire les éléments communs afin d’en proposer une définition générique.

Cette communication portera sur les résultats partiels de la recherche menée au long de l'année 2022 auprès de treize femmes immigrées d’origine philippine travailleuses du care au Québec (centré à Montréal). Il s'agit de comprendre, dans le contexte mondial de la crise du care, comment les femmes immigrées dédiées au travail subalterne trouvent le sens du travail et de la permanence dans le pays d'accueil, malgré les relations asymétriques et inégales dues aux conditions d'immigrantes? Comment, en payant un coût élevé de quitter leur pays, elles organisent et gèrent leur projet familial ou de vie? La recherche s'est appuyée sur la méthodologie qualitative en sociologie, notamment sur les analyses biographiques (Denzin, 1989; Dubar et Demazière, 2007) basées sur les entretiens semi-directives complétée par l'observation participante (dans les espaces de sociabilité de ces femmes, comme les centres d'entraide, églises, rassemblements politiques, fêtes, etc.). Pour comprendre leur trajectoire, nous avons parcouru les conditions prémigratoires aux Philippines et post-migratoires au Québec, en intégrant aussi les perspectives de la vie après retraite. La durée de la permanence joue à leur faveur lorsqu'elles arrivent à obtenir la citoyenneté canadienne, rassembler leur famille et jouir de la sécurité sociomédicale. De l'autre côté, elles pâtissent des perspectives d'insécurité économique et d'absence de soin pour leur vieillesse : who will take care of the caregivers?

Cette recherche porte sur la passion sportive des entraineurs de niveau universitaire. Le terme « passion » fait partie du vocabulaire sportif depuis toujours, mais peu d’entraineurs et d’athlètes sont conscients de son développement et de son maintien dans le temps. En effet, rares sont les recherches (Mageau et Vallerand, 2003; Vallerand et al, 2006, 2008)  qui ont tenté de cerner la passion de l’entraineur et l’impact que celle-ci peut avoir sur lui-même et son équipe. Les objectifs de l’étude consistent à définir la passion de l’entraineur et à découvrir comment elle se développe et se maintient pendant plusieurs saisons. Le modèle de la passion harmonieuse et obsessive de Vallerand (2008, 2012) a servi de cadre théorique à cette étude. La méthodologie utilisée a été de type qualitatif/interprétatif, et des entrevues semi-structurées ont permis à dix entraineurs universitaires de s’exprimer à ce sujet. Une analyse inductive des données selon les critères de Blais et Martineau (2006) a été effectuée et elle a permis de définir la passion des entraineurs comme étant : « le fait de redonner au sport ce que le sport a donné à l’entraineur en s’impliquant à fond, entre autres, en y consacrant énormément de temps ainsi qu’en faisant profiter les autres de son expertise et de ses connaissances ». Enfin, il semble que le développement et le maintien de la passion puissent être développés par les besoins de compétence, d’autonomie et d’appartenance.

Le renouvellement des pratiques d’intervention sociale est l’objet d’un affrontement idéologique entre la mouvance démocratique et néolibérale. Alors que les valeurs démocratiques font consensus et qu’une pluralité d’approches et de pratiques traduisent sur le terrain des finalités sociales hybrides, des clarifications théoriques et idéologiques paraissent nécessaires afin de lever ces ambigüités axiologiques. Les balises théoriques de la mouvance démocratique sont d’abord définies. À l’aide d’une méthode généalogique, nous reconstruisons ensuite le réseau discursif ayant historiquement produit l’approche de réduction des méfaits afin d’en dégager l’assemblage idéologique global. Nous constatons que la réduction des méfaits s’inscrit dans le sillon de la rationalité biopolitique néolibérale.

L’étude du désistement assisté cherche à comprendre la place que peut prendre l’assistance à travers le processus de désistement du crime. En ce sens, des publications récentes ont montré que les interventions offertes dans le contexte du système judiciaire et carcéral peuvent avoir un impact positif en soutenant les individus à travers leur processus de changement menant à la fin de leur carrière criminelle. Toutefois, ces travaux ne cherchent généralement pas à contextualiser la réceptivité à ces interventions, eut égard entre autres aux caractéristiques de l’implication criminelle. Ainsi, l’objectif de la présente étude est de s’intéresser à l’effet des interventions formelles sur le processus de désistement du crime d’individus impliqués essentiellement dans une criminalité lucrative.  Sur la base de récits narratifs (n=27), les résultats réitèrent d’abord l’intérêt du désistement assisté dans la compréhension du processus qui mène à la cessation des activités criminelles. Les analyses réalisées mettent également en évidence l’aspect dynamique derrière la réceptivité à l’assistance qui dépend notamment des caractéristiques de l’individus, des circonstances de vie et des détails de l’implication criminelle. Les conclusions de cette recherche sont susceptibles d’avoir des contributions pratiques pour l’intervention auprès de ce type de population, la criminalité lucrative étant d’ailleurs prépondérante dans nos sociétés.

Le modèle théorique de Patterson et Capaldi (1990) propose que les problèmes de comportement extériorisés (PCE) chez les enfants conduisent à une exposition aux échecs sociaux (hostilité parentale, victimisation par les pairs, conflit avec l’enseignant) et aux difficultés scolaires qui, à leur tour, augmentent le risque de dépression. Ce modèle n’a toutefois été testé qu’auprès de garçons de milieu à risque et n’ayant pas nécessairement de PCE. Cette étude propose 1- d’établir la contribution des échecs sociaux et scolaires aux symptômes dépressifs 3 ans plus tard chez des enfants ayant des PCE à l’entrée dans l’étude (T0) et 2- de déterminer l’effet modérateur du genre. L’échantillon comprend 281 enfants recrutés parmi ceux suivis au début du primaire pour des PCE et ayant des problèmes de niveau clinique. Mesures. PCE et symptômes dépressifs : échelles DSM (Achenbach et Rescorla; 2001); hostilité parentale : PARQ (Rohner 1991); victimisation: DIAS inversées (Bjorkqvist et al., 1992); conflit avec enseignant (Pianta 2001); difficultés scolaires (DuPaul et al., 1991). Les résultats de la régression hiérarchique linéaire montrent qu’au-delà des symptômes dépressifs et de l’âge au T0, seules les difficultés scolaires prédisent une hausse du score dépressif 3 ans plus tard.  Ce lien n’est pas modéré par le sexe. Ces résultats suggèrent d’accorder une importance à la réussite scolaire des garçons et des filles qui ont des PCE pour prévenir l’augmentation des symptômes dépressifs.

Différents enjeux entourent l’intervention auprès des personnes ayant un trouble lié à l’usage d’une substance psychoactive (TUS) en traitement sous contraintes judiciaires. Ce contexte coercitif de traitement a une influence notable sur la motivation ainsi que sur l’alliance thérapeutique (AT). Les recherches démontrent que l’AT serait une des plus importantes variables prédictives des résultats d’un traitement pour le TUS et de la rétention en traitement. Néanmoins, il est reconnu que ces personnes sous contraintes légales présentent davantage de motivations externes, sont moins engagées et plus résistantes au traitement. Considérant ces caractéristiques, le contexte de contraintes ainsi que la nature punitive du système judiciaire, il faut se demander si une telle alliance peut se développer. Comme peu de traitements pour le TUS sont offerts spécifiquement à cette clientèle, il importe d’enrichir les connaissances afin d’améliorer la pratique. Cette recherche, réalisée dans le cadre d’un mémoire, vise à documenter qualitativement les motivations de ces personnes à intégrer un traitement ainsi qu’à comprendre les facteurs qui contribuent à l’AT. Des entrevues ont été menées auprès d’hommes en traitement sous mesures judiciaires dans différentes ressources d’hébergement en toxicomanie. Les résultats détaillent plusieurs attitudes et comportements des intervenants contribuant à l’AT et soulignent la présence de plusieurs motivations internalisées chez les contrevenants.

Au sortir de près de deux décennies de guerre, le Cambodge vit de profondes transformations sociales. Sur le plan artistique, les conséquences de l’ère khmère rouge sont encore tangibles sachant qu’environ 90 % des artistes y ont péri. Depuis les années 2000, une nouvelle génération d’artistes née après cette période bénéficie de l’ouverture grandissante du pays et se taille peu à peu une place sur les scènes artistiques locale et internationale. Cette génération est porteuse de changements dans les pratiques artistiques et dans la conception de ce qu’est l’artiste. Un regard sur la communauté artistique de Battambang, deuxième ville en importance au Cambodge, est nécessaire, car celle-ci se présente progressivement comme un pôle artistique nouveau.

Seront présentés les résultats préliminaires de mon terrain de maîtrise réalisé à Battambang en 2012 lors duquel j’ai participé à la vie artistique de la ville et rencontré plusieurs jeunes artistes. L’objectif de ma recherche est de comprendre ce que signifie pour eux « être artiste » et de quelle(s) manière(s) ceux-ci expriment leur subjectivité à travers leur art. À travers ma présentation, je propose ainsi des réflexions quant à mes résultats qui laissent entrevoir que plusieurs personnes rencontrées ne s’identifient pas d’emblée comme artiste préférant insister sur les qualités humaines et morales que nécessite leur pratique artistique ainsi que sur les apports particuliers de leur art à la société cambodgienne actuelle.

Le toucher est un mode de communication important entre une mère et son enfant. Certaines recherches ont examiné le rôle communicatif du toucher de la mère et celui de l’enfant mais à notre connaissance, il n’y a pas de recherche qui considère le toucher mutuel qui se produit simultanément entre une dyade mère-enfant. Cette étude a pour but (1) d’examiner les fonctions communicatives du toucher mutuel et (2) d’analyser leurs relations avec l’affect du nourrisson durant une interaction face-à-face mère-nourrisson. Le toucher a été mesuré auprès de 39 dyades mère-enfant à l’aide d’une échelle de codification (Functions of Mother-Infant Mutual Touch Scale) appliquée à deux périodes d’interaction face-à-face séparées par une période où la mère regarde son nourrisson (5½ mois) avec une expression neutre (Still-Face; Tronick et al., 1978). Les résultats indiquent d’abord que le toucher mutuel « actifs et stimulants » est plus fréquent lors des périodes d’interaction normales. Le toucher « régulateur » est plus présent durant la deuxième période normale tandis que le toucher ayant pour but d’attirer l’attention était moins présent. Le toucher « actifs et stimulants » était associé aux sourires du nourrisson tandis que les touchers « régulateur » et « déséquilibré » étaient corrélés avec l’agitation de ce dernier. Ainsi, le toucher mutuel constitue une forme de communication mutuelle entre la mère et son nourrisson qui s’adapte en fonction du contexte.

Situé au croisement du politique et du social, le milieu communautaire a subi de profondes transformations au cours des dernières années. Austérité et néolibéralisme ont amené au foisonnement d’une logique comptable – où tout doit être statistiquement appuyé – reléguant le travail qualitatif au second plan. Ces transformations s’arriment aussi avec le développement des pratiques d’accompagnement. Avec elles, un nouveau paradigme de l’intervention sociale se dessine, soutenu par des injonctions balisant la posture professionnelle des intervenant·e·s.

Cette présentation sera l’occasion de discuter des résultats d’une enquête réalisée auprès de trois organismes communautaires ayant adopté ces pratiques. À partir de l’expérience du sentiment d’impuissance, je rends compte des moyens utilisés par les intervenant·e·s afin d’y faire face et de répondre aux nouvelles exigences de l’accompagnement. Inspirée des travaux de Hochschild (1983) et de Fernandez (2014) sur le travail émotionnel et le travail moral, je relève les mécanismes de gestion émotionnelle et de gestion morale que l’intervenant·e effectue sur lui-même, sur les usager·e·s et auprès de ses collègues afin de maintenir une posture professionnelle dans un emploi émotionnellement exigeant. Ces mécanismes n’opèrent pas de la même façon selon qu’il agit sur une émotion ou sur une valeur, laissant entrevoir que des économies émotionnelles et morales, œuvrant en parallèle, peuvent être dégagées de l’accompagnement.

Problématique :

Les individus sont de plus en plus isolés sur le plan politique et, pourtant, sont aussi de plus en plus dépendants des nouvelles technologies concernant l’information qui est mise à leur disposition et le traitement de celle-ci. En partant de ce constat, j’amène l’idée de particularisation, à savoir un double mouvement d’isolation et de dépendance. Ce concept permet de rendre compte de la réalité du capitalisme numérique, là où des termes tels que paupérisation, prolétariat et néoprolétariat ou encore aliénation manquent souvent le côté changeant et propre au numérique. Aussi, je propose une réflexion théorique qui pourrait servir de base à de futures recherches empiriques.

Contribution :

Pour appuyer ce concept, je me base sur une étude sur un temps long de l’évolution de la société capitaliste en la classifiant en trois périodes à savoir : l’ère des foules, des masses et des nuées, chacune avec des particularisations différentes (Han, 2015). En effet, Han constate les changements du numérique et, sans le dire aussi explicitement, distingue une société basée sur la foule, d’une société basée sur la masse, puis d'une société basée sur la « nuée » (Han, 2015 : 24). Dans la nuée, les individus ne sont pas seulement isolés, ou atomisés, mais aussi rendus dépendants. C’est en ce double sens inspiré de Stiegler (2015a : 78), Dewey (dans Stiegler, 2019 : 121) et Hegel (2020 : 155 & 158) que j’utilise l’idée de particularisation : à la fois isoler et rendre dépendant.

La présente étude examine les origines développementales de la préférence pour apprendre d’individus démontrant de l’assurance. Des enfants appartenant à deux groupes d’âge, soit 18 mois (N=36; moyenne = 18 mois 20 jours) et 24 mois (N=37; moyenne = 24 mois 19 jours), observent une expérimentatrice faire la démonstration d’actions avec assurance (hochement de tête, expression faciale suggérant la satisfaction) ou en manquant d’assurance (haussement d’épaules, expression confuse). Les enfants peuvent ensuite choisir d’imiter les actions. Par la suite, l’expérimentatrice démontre des actions additionnelles avec une expression faciale neutre. Le nombre d’actions imitées est soumis à une analyse de la variance, qui révèle une interaction significative entre la manifestation d’assurance et l’âge (voir Figure 1). Les enfants de 18 mois imitent autant l’expérimentatrice que son comportement soit assuré ou non (t(34)=-0,13, ns). À 24 mois, les enfants imitent plus fréquemment une expérimentatrice assurée que non assurée (t(35)=3,50, p=0,001). Cette préférence chez les enfants de 24 mois persiste pour la première action démontrée avec expression neutre (test exact de Fisher: p=0,008) mais disparaît pour la deuxième action (p=1,00, ns). Ces résultats démontrent que l’imitation préférentielle en fonction des indices d’assurance est présente à 24 mois, ce qui correspond au plus jeune âge auquel cette compréhension ait été démontrée.

L’un des troubles de santé mentale le plus prévalent à l'adolescence est la dépression, d'où l'importance d’étudier les potentiels facteurs de risque, tel que l'adversité familiale (Lansford et al.,2017). Plusieurs études ont montré une association significative entre l'adversité familiale et les symptômes dépressifs, sans pour autant considérer la façon dont les différents facteurs protecteurs pourraient affecter cette relation. Cette étude s'intéressera donc à savoir si l’activité physique (AP) organisée et non organisée réduit les symptômes dépressifs chez les jeunes adolescents exposés à l’adversité familiale.

À l’aide de l'étude longitudinale du développement des enfants du Québec (ELDEQ), cette recherche testera l’association entre l'adversité familiale à 10 ans et les symptômes dépressifs à 12 ans à l'aide de régression linéaire, en contrôlant pour les troubles émotifs initiaux (N = 1332). L'AP organisée et non organisée sera testée comme modérateur.

Les résultats montrent une association significative entre l'adversité familiale et les symptômes dépressifs (b =0,546, p<0,01). Or, seul l'AP non organisée modère l’association entre l'adversité familiale et les symptômes dépressifs (b=-0,487,p<0,01). Il n’y a pas d’interaction significative entre l’adversité familiale et l’AP organisée (b=0,09,p=0,126).

Cela suggère que la participation à l’AP non organisée représente une stratégie pour améliorer la résilience et la capacité d’adaptation des adolescents.

Dans cette communication, nous traitons des inégalités de genre dans l’action climatique au Québec. Il nous apparaît important d’examiner dans quelle mesure le genre (l’ensemble des rôles sociaux associés à la féminité et à la masculinité) influence les discours et les comportements de lutte à la crise climatique, afin de s’assurer qu’ils ne participent pas à de l’injustice sociale.

Notre étude s’inscrit dans le projet du Baromètre de l’action climatique, un sondage sur les croyances, attitudes et comportements de la population québécoise envers l’action climatique. La notion d’écart écologique entre les genres et la façon dont cette notion est conceptualisée et opérationnalisée peuvent être utiles pour discuter des inégalités de genre dans l’action climatique, ainsi que de la façon dont elles se manifestent dans la population québécoise. 

Cette communication est le résultat d’une revue de portée (une centaine d'articles, publiés entre 1992 et 2022) sur la façon dont est définie et traitée la notion d’écart écologique entre les genres dans la littérature scientifique multidisciplinaire. Ces résultats ont fait l’objet d’une analyse critique de genre puis ont été croisés avec les données empiriques de l'enquête en ligne de l’édition 2022 du Baromètre de l’action climatique (n=2 000, échantillon représentatif de la population québécoise adulte).

Le village de Colombier est une communauté rurale, de la région de la Côte-Nord qui fait face à des problématiques qui nuisent à son développement. Elles sont relatives à : la rareté d’emplois locaux, le vieillissement de sa population, son isolement et la pauvreté. À l’origine, il s’agissait d’une colonisation de type agroforestier. L’objectif était d’y établir des chômeurs des milieux urbains. Ces derniers y défrichaient une terre, tout en y exploitant les ressources de la forêt. Par contre, la rigueur du climat et la pauvreté du sol ont amené un abandon de ces activités. Malgré leur isolement, ses résidents ont été amenés à devoir trouver des emplois dans les communautés voisines. Face à ce constat peu reluisant, le travail acharné des acteurs locaux a permis de créer quelques initiatives sociales et économiques des plus astucieuses. Ces dernières permettent de développer des techniques adaptées au climat du Moyen-Nord québécois, de créer des emplois locaux, de favoriser une sécurité alimentaire, de stimuler le commerce dans le village et de créer un projet qui se rattache aux origines mêmes de Colombier. À tout ceci s’ajoute le dynamisme des divers comités municipaux et la bienveillance des organismes locaux qui voient au bien-être de sa population. Confrontés à des défis majeurs, les Colombiens ont su faire preuve de résilience et de détermination. 

Les mécanismes sous-jacents à l’apprentissage social sélectif (ASS) sont débattus dans la documentation scientifique. Certaines études suggèrent que la capacité qu’ont les enfants d’apprendre d’autrui de manière sélective requiert des fonctions spécialisées telle que la théorie de l’esprit. D’autres suggèrent plutôt que ceci repose sur des capacités plus générales comme l’apprentissage statistique. Ainsi, cette étude vise à clarifier cette controverse en considérant la théorie de l’esprit et l’apprentissage statistique comme mécanismes possibles. Les participants (N=66), âgés de 18 mois, furent assignés de manière aléatoire à une condition fiable ou non fiable dans lesquelles des objets familiers étaient nommés correctement ou incorrectement. Pour chaque condition, une tâche d’apprentissage de mot évaluait leur aptitude à apprendre sélectivement des autres. De plus, les mécanismes étaient évalués grâce à deux épreuves de théorie de l’esprit (croyance erronée et connaissances) et une épreuve d’apprentissage statistique. Les résultats démontrent que les enfants ayant atteint un niveau supérieur de théorie de l’esprit telle que mesurée par leur inférence des connaissances d’autrui étaient significativement moins enclin à apprendre d’une personne non fiable. Ainsi, puisqu’aucun lien n’a été établi entre l’apprentissage statistique et l’ASS, les résultats fournissent des données préliminaires indiquant que des mécanismes spécialisés sous-tendent l’ASS dans la petite enfance.

Les recherches sur les enfants adoptés à l’étranger mettent de plus en plus en évidence la diversité des facteurs qui peuvent influencer leur adaptation à leur nouveau milieu de vie. La présente étude a pour objectif de mieux documenter les facteurs associés à la trajectoire développementale de ces enfants dans les premières années suivant leur adoption. 

L’échantillon comprend 123 enfants adoptés avant l’âge de 18 mois (M = 10,55) de Chine, de Russie et d’autres pays d’Asie. Afin d’obtenir des indices de leurs conditions de vie avant l’adoption, l’état de santé des enfants a été examiné peu après leur arrivée au Québec et leur développement cognitif, moteur et comportemental évalué à l’aide des échelles de Bayley. Les mêmes échelles ont été utilisées à 2 ans et 3 ans. Les parents ont, de plus, complété des questionnaires sur leurs caractéristiques sociodémographiques, leur degré de stress parental et leurs pratiques éducatives. 

Les retards de développement notés à l’arrivée des enfants dans leur famille adoptive se résorbent après l’adoption. Des modèles hiérarchiques linéaires révèlent que le pays d’origine, les signes d’atteinte neurologique et le rapport taille/âge des enfants au moment de l’adoption ainsi que le revenu de leurs familles adoptives constituent les plus importants prédicteurs des progrès développementaux observés à 2 ans et 3 ans. La discussion portera sur l’influence des milieux pré et post adoption sur le développement des enfants après l’adoption.      

L’endométriose est une maladie chronique parfois sévère touchant une personne assigné-e femme à la naissance sur dix. Elle est historiquement sous-étudiée et sous-diagnostiquée et n’est abordée par le prisme de la santé publique que depuis récemment dans les pays occidentaux. En France, depuis dix ans, cette maladie se politise, se médiatise et mobilise une diversité d’acteurs — associations, chercheur-e-s, soignant-e-s et figures politiques. La production et la diffusion de connaissances sur l’endométriose deviennent ainsi des enjeux centraux à examiner dans la question de sa reconnaissance en tant que problème d’intérêt public. Dans ce contexte, je montrerai que les groupes qui détiennent la parole et l’expertise reconnues socialement appartiennent au monde biomédical, malgré le fait que cette maladie ait été rendue visible par une mobilisation citoyenne de personnes atteintes. Toutefois, il sera possible de voir que savoirs et perspectives profanes sont incorporés au modèle dominant et renouvellent certaines compréhensions de la maladie. Cette analyse est tirée d’une ethnographie en Île-de-France qui a permis une immersion dans le réseau d’acteurs au centre duquel l’endométriose est continuellement négociée et réinterprétée. Cette étude d’anthropologie médicale enrichit la recherche sociale sur l’endométriose, encore rare dans la francophonie, et met en lumière des processus à l’intersection de l’épistémologie des sciences et de l’étude de la santé publique.

Plusieurs études ont montré que les enfants retirés socialement ont tendance à éviter les interactions avec leurs pairs, ce qui peut nuire à l’estime de soi chez certains. De plus, le niveau d'acceptation ou de rejet d’un comportement par les pairs, qui reflète la norme injonctive du groupe, varie d’une classe à l’autre. La variation des normes pourrait donc aider à expliquer les variations de l'estime de soi chez les enfants retirés. Le but de cette étude était donc de vérifier si le niveau de retrait des enfants prédit des changements dans leur estime de soi de l’automne (T1) au printemps (T2) de la même année scolaire, et si ce lien est modéré par les normes injonctives dans leur classe. L'échantillon comprenait 1 152 enfants de 67 classes (4e à 6e année) à Montréal. Les régressions multi-niveaux révèlent que les normes injonctives modèrent le lien entre le retrait social au T1 et les changements dans l'estime de soi globale des enfants du T1 au T2: le retrait social au T1 prédit une baisse de l’estime de soi globale si les normes sont défavorables (retrait jugé inacceptable) (β=-0,13, p<0,01), mais pas si les normes sont favorables (retrait jugé acceptable) (β=0,01, p=0,77). Lorsque les pairs jugent le retrait social comme étant inacceptable, les enfants retirés socialement peuvent être rejetés, s’isoler davantage, et cela entrave leur estime de soi. Si les pairs jugent le retrait comme étant acceptable, l'estime de soi de ces enfants demeure stable.

La loi française du 5 mars 2007, portant réforme de la protection juridique des majeurs, a consacré la protection de la personne tout autant que celle de ses biens et la promotion et la garantie de la liberté et la dignité des personnes. Elle organise ainsi un droit commun de la protection de la personne en posant le principe du respect de l’autonomie dont celle-ci est capable. Ce principe (art. 459 C. civ.), conduit à une détermination plus précise du rôle du protecteur légal.Dans ce contexte, il existait déjà des dispositions spécifiques (L. du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale et médico-sociale, L. du 4 mars 2002 sur les droits des malades). Leur articulation avec le droit commun des personnes suscite des difficultés. Par cette multiplication de règles, le droit a construit plusieurs catégories (« le malade », « l’usager » « le protégé ») qui peuvent se superposer, manifestant ainsi une complexification des « qualifications » des personnes. La loi du 5 mars 2007 impose par ailleurs aux structures tutélaires de mettre en œuvre les exigences posées par la loi du 2 janvier 2002 en mettant en place différents outils en vue d’assurer l’effectivité des droits des usagers. Les résultats d'une recherche en cours financée par l'Agence Nationale de la Recherche (France) seront exposés ici : elle vise à étudier la mise en oeuvre de ces règles par les juges français et leur articulation dans les parcours de vie des personnes du grand âge.

La sphère intime a progressivement évolué et s’est détraditionnalisée durant les dernières décennies, notamment par l’influence des mouvements queer et féministes. Si l’exclusivité reste une norme structurante des relations intimes, des formes alternatives au modèle monogame ont progressivement gagné en visibilité. Parmi celles-ci, nous nous intéresserons particulièrement aux modes relationnels incluant une pluralité théorique de partenaires et dans lesquels l’ensemble des personnes impliquées donnent leur accord à une ouverture de la relation. Cependant une question se pose : comment nommer ces pluralités relationnelles et sur la base de quels critères? Au-delà de la simple dénomination de pratiques en rien nouvelles, ces divisions nous renseignent sur les rapports qu’entretiennent les individus avec l’intimité. Définir convenablement celles-ci est également nécessaire afin de bien cibler les études, de plus en plus nombreuses, qui s’intéressent à ces pluralités relationnelles. Cet exposé sera l’occasion de nous pencher sur ces divisions, d’éclairer les débats académiques autour de la définition des relations plurielles ainsi que de replacer l’intime dans l’expérience de la condition sociale moderne. Comprendre les manières de nommer ces pluralités est primordial pour saisir ce qui se joue à travers elles, montrer la diversité des pratiques intimes et réimaginer des relations plus libres et égalitaires à l’aune des bouleversements sociaux des dernières décennies.