L’intérêt pour le développement de la compétence argumentative à l’école a connu un grand essor au cours des dernières décennies, en s’inspirant notamment des travaux philosophiques et psychologiques (Rapanta, 2013). Elle est considérée en recherche dans divers champs, notamment comme compétence nécessaire à la construction d’une vision du monde et à l’exercice d’une citoyenneté éclairée.
D’une part, l’argumentation est vue comme une approche d’enseignement-apprentissage dans plusieurs disciplines scolaires. Par exemple, puisque les pratiques argumentatives font partie du fonctionnement des communautés disciplinaires de référence dans les domaines des sciences, de l’histoire, des langues ou des mathématiques, on s’attend à ce que leur introduction en classe engage les élèves dans des démarches de recherche favorisant l’apprentissage des processus et des concepts dans ces disciplines (Bisault et Le Bourgeois, 2006). D’autre part, dans une perspective citoyenne qui mobilise ou non les savoirs disciplinaires, c’est l’apprentissage de l’argumentation elle-même qui est au cœur de certaines approches qui font appel, par exemple, au dialogue philosophique (Gagnon et Yergeau, 2016), à l’analyse des médias numérique, à l’étude des controverses socioscientifiques (comme les controverses entourant certains vaccins ou le changement climatique) (Dawson et Carson, 2020) ou des sujets sensibles comme le racisme ou l’identité de genre (Moisan, et al, 2022). Ainsi, si aucun domaine de recherche ne peut prétendre avoir le monopole de l’argumentation (Michelli, 2011), des questions importantes méritent d’être posées et discutées : que nous apprennent les recherches réalisées dans la francophonie sur l’argumentation dans les différents champs? Peut-on en dégager des spécificités disciplinaires et des dimensions transversales de l’argumentation? Quelles sont les possibilités et les défis de croiser les approches théoriques et méthodologiques, dans une perspective interdisciplinaire?