Il était une fois... le recyclage des contes

Une tendance actuelle tend à fusionner les mondes et les personnages qui ont marqué la littérature jeunesse. Tout se recycle, même les héros de contes de fées.

Domaine de recherche 301 - Arts, littérature et société

L'univers du conte à la cote. Blanche Neige et Cendrillon ont eu leur lot de nouvelles versions ces dernières années. Ces classiques des siècles passés ont été remis au goût du jour.

Mais que se passe-t-il si on mélange le tout à grand coup de merveilleux? Une tendance actuelle tend à fusionner les mondes et les personnages qui ont marqué la littérature jeunesse. Tout se recycle, même les héros de contes de fées.

Les films d'animation Shrek sont l'illustration parfaite de ce genre. Les trois petits cochons, Pinocchio et les princesses cohabitent pour le meilleur et pour le pire. En études littéraires, on nomme ce phénomène transfictionnalité. Divers mondes ou personnages imaginés par différents auteurs prennent place dans un univers commun, comme dans le livre Il était une fois au pays des contes, de Delphine Godard, qui s'adresse aux lecteurs de moins de 10 ans.

« Ce type de littérature donne l'impression au lecteur que les personnages continuent d'exister après l’histoire, en dehors de leur conte », explique Maryse Durocher qui étudie ce courant de littérature. Le genre n'est pas nouveau : on peut remonter à Alice au pays des merveilles, publié en 1865, pour le voir apparaître, dit l'étudiante à la maîtrise de l'Université d'Ottawa. De fait, Lewis Caroll a inséré dans son histoire des personnages inspirés d'expressions populaires britanniques ou de comptines de l'époque, tel Humpty Dumpty, dans la suite des aventures d’Alice De l'autre côté du miroir, paru en 1872.

Maryse Durocher mentionne que certaines œuvres qui utilisent la transfictionnalité modifient des éléments clés, détournent le lecteur du récit original, au risque de déplaire. Mais le renouvellement d'une œuvre peut aussi être bénéfique. Certains stéréotypes peuvent être balayés par des valeurs modernes, souligne la chercheuse. Le méchant loup développe des remords, la fée  est prise dans des élans d'égocentrisme, le prince a perdu ses charmes. Pour la Franco-Ontarienne, ces œuvres ont un réel pouvoir de transmission : « Je crois que cela incite les lecteurs, les jeunes, à réellement lire les œuvres originales, ces classiques qui pourraient finir oubliés du grand public. »

« Les histoires aux univers transfictionnels se comprennent d'elles-mêmes, mais lire les histoires originales peut aider à mieux saisir les nuances des personnages »

Il était une fois au pays des contes, de Delphine Godard, sorte de grimoire, facilite cette approche en y insérant des minilivres des contes classiques. En parallèle de l'histoire principale, les enfants peuvent donc se renseigner sur les personnages dont il est question. « Les histoires aux univers transfictionnels se comprennent d'elles-mêmes, mais lire les histoires originales peut aider à mieux saisir les nuances des personnages », lance-t-elle.

Est-ce qu'Harry Potter sera un jour le colocataire de Merlin l'enchanteur? « Je crois qu'il faut attendre quelques années pour voir si ce genre de héros va passer le test du temps », souligne la jeune chercheuse. Mais pour elle, recycler des contes pour créer des univers encore plus inusités est une façon de faire renaître des héros, d'assurer l'immortalité des classiques et de parfaire les connaissances littéraires des plus jeunes.