Qui dit plumes dit oiseaux? Non, sur le plan chronologique, qui dit plumes dit... dinosaures! Qui dit plumes dit animaux volants? Non plus! François Therrien y voit plutôt des atours impliqués dans le comportement de reproduction.
[Colloque 206 - La paléontologie existe-t-elle encore?]
Qui dit plumes dit oiseaux? Non, sur le plan chronologique, qui dit plumes dit... dinosaures! Bien avant les oiseaux modernes, qui sont leurs seuls descendants, les dinosaures arboraient duvet et plumages, bien loin des clichés hollywoodiens des animaux écailleux. Cette nouvelle représentation est établie par les scientifiques depuis la fin des années 1990 et, à ce jour, plus de 30 espèces à plumes ont été découvertes un peu partout dans le monde.
Qui dit plumes dit animaux volants? Non plus! François Therrien, paléontologue au Royal Tyrrell Museum, y voit plutôt des atours impliqués dans le comportement de reproduction. Parades amoureuses et protection des petits, les premières ailes avaient toutes autres fonctions que le vol, qui se serait développé beaucoup plus tard au cours de l'évolution.
Il y a quelques années, on expliquait l'apparition des ailes chez les dinosaures par trois hypothèses, toutes impliquant le vol :
- à force de faire des bonds, s'était ouverte la voie des airs;
- des dinosaures réalisaient des sauts à partir des arbres;
- battre des ailes aurait aidé à gravir de fortes pentes.
Dans les trois cas, les jeunes devaient impérativement, pour leur survie, disposer de ces ailes très tôt, comme c'est le cas chez les oiseaux modernes.
« Si les ailes étaient apparues, c'était avec une fonction tout autre que le vol. »
Ces hypothèses n'ont pas tenu. La faute en incombe à trois fossiles découverts en Alberta entre 1995 et 2009, trois représentants – un bébé et deux adultes – d'une sorte de dinosaure-autruche de 3 à 4 mètres de long, trop grosse pour voler. Les trois spécimens avaient du duvet sur le corps, mais seuls les adultes portaient des plumes à tiges rigides sur les avant-bras. En évaluant que chez ces ornithomimidés, il fallait au moins un an, si ce n'est plus, avant que les juvéniles aient des ailes, François Therrien et ses collègues en sont arrivés à la conclusion suivante : si les ailes étaient apparues, c'était avec une fonction tout autre que le vol.
Pourtant, le chercheur croyait en ces trois hypothèses originales, estimant qu'elles avaient du sens. « Cette découverte m'a réellement surpris. Nous avons dû réfléchir à ce qui en découlait, et nous en sommes arrivés à cette l'hypothèse qui en fait s'imposait », raconte-t-il. C'est ainsi qu'est apparue l'idée des ailes impliquées dans les parades amoureuses et la protection des petits. François Therrien dresse le parallèle avec la crinière du lion ou la trompe de l'éléphant de mer, qui sont toutes deux des structures secondaires sexuelles. Le crinière léonienne se développe entre l'âge de un an et demi à cinq ans, et l'appendice éléphantesque, de quatre à neuf ans. Le paléontologue rappelle d'ailleurs que chez les dinosaures, les structures secondaires sexuelles ne sont pas rares, comme la crête chez les dinosaures à bec, ou encore les cornes et collerettes.
Le plus surprenant de l'histoire est que cette découverte s'est fait presque par accident pour le Québécois qui travaille en Alberta : « On ne s'attendait à rien de nouveau avec ce fossile, raconte François Therrien. Et en enlevant un morceau de roche autour du squelette, je me suis aperçu qu'il y avait des empreintes laissées par des plumes dans la roche, ce qui a mené à dénicher les marques des plumes à tiges rigides sur l'os ». Selon lui, des scientifiques du 20e et 21e siècles sont certainement « passés à côté » de plusieurs cas semblables au sien.
- Amélie Cléroux, journaliste
Marion Montaigne, illustratricePrésentation de la journalisteAmélie Cléroux est finissante du baccalauréat en journalisme à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Pour elle, le journalisme est un métier extraordinaire qui permet des découvertes et des rencontres enrichissantes. Elle se sent privilégiée de nourrir sa curiosité et d’apprendre tous les jours. Le stage à l’Acfas fait partie de ses premiers pas comme journaliste professionnelle et lui permet enfin d’explorer la vulgarisation scientifique, un univers fascinant, mais qu’elle n’a pas eu la chance de découvrir pendant sa formation.
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