Une population mécontente pèse lourd. Tellement lourd que l'enjeu est devenu incontournable pour les industries minières. Question de logistique, de tensions sociales, mais aussi de coûts.
[Colloque 645 - L’acceptabilité sociale des projets miniers : du Québec au reste du monde]
Les projets miniers ne font pas consensus au Québec. Quelques exemples : le Plan Nord, la mine Arnaud de Sept-Îles qui s'est récemment attiré les foudres du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE) ou encore les polémiques autour de l'exploitation des ressources naturelles en général et des gaz de schiste en particulier.
Une population mécontente pèse lourd. Tellement lourd que l'enjeu est devenu incontournable pour les industries minières. Question de logistique, de tensions sociales, mais aussi de coûts. « La question des frais liés à l'arrêt des travaux, suite à un conflit avec la communauté, est plutôt tabou, mais est bien présente », mentionne Kristina Maud Bergeron, agente de recherche à la Chaire en entrepreneuriat minier UQAT-UQAM. Pour des travaux d'exploration avancée, il en coûte ainsi 50 000 dollars américains par jour aux compagnies minières, selon une étude parue en mai par le Centre pour la responsabilité sociale dans l'industrie minière (CSRM) de l'Université du Queensland en Australie et de la Harvard Kennedy School aux États-Unis.
Le poids de l'opinion publique face aux projets miniers, l'« acceptabilité sociale » de ces derniers, est aussi la cible d'études pour les chercheurs. Une équipe multidisciplinaire, formée entre autres d'experts en anthropologie, sciences politiques et sciences de la terre et dont fait partie Katrina Maud Bergeron, travaille présentement sur ce phénomène.
Cependant, pour ces chercheurs, le terme « acceptabilité » est trop unidimensionnel, ne laissant qu'une alternative à la population : accepter le projet ou s'y opposer. Le responsable scientifique de ces travaux de recherche, Michel Jébrak, professeur à l'UQAM, propose plutôt le terme de « risque social ».
En plus du mécontentement de la communauté, cette appellation renvoie aussi au risque qu'un projet, accepté au préalable par les gens, s'avère désastreux pour la communauté. Le risque social c'est également l'impact que les polémiques et tensions sociales ont sur les employés des compagnies minières ou sur la réputation des partenaires financiers.
«Cet indice du risque social permettra de dire aux industries minières ce que pense la population avant d'aller trop loin.»
Au-delà de la terminologie, cette équipe estime qu'à l'heure actuelle l'évaluation de l'acceptabilité sociale d'un projet minier se fait trop tard. Les actions pour remédier aux situations de tensions sociales s'en trouvent limitées. Elle veut donc créer un outil préventif à rendre public pendant l'exploration avancée des projets miniers, lorsque le forage est bien entamé, mais avant les audiences du BAPE. « Cet indice du risque social permettra de dire aux industries minières ce que pense la population avant d'aller trop loin, mais aussi d’aider les gens à comprendre ce qu'est le projet. Et à le juger », explique Kristina Maud Bergeron qui participe à la coordination du projet.
L'équipe de chercheurs travaille à concrétiser cet indice afin de livrer un outil disponible pour tous, dès le printemps 2015. Pour ce faire, il reste entre autres à démêler la complexité des facteurs à prendre en compte. Ces facteurs, comme la taille, le type de mine (souterrain ou à ciel ouvert), ses visées d'exportations (locales ou internationales), la toxicité des rejets (réelle ou perçue par les gens), la proximité avec les sites environnementaux ou avec la population, peuvent changer la donne sur le caractère « acceptable » d'un projet minier.
- Amélie Cléroux
JournalistePrésentation de la journalisteAmélie Cléroux est finissante du baccalauréat en journalisme à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Pour elle, le journalisme est un métier extraordinaire qui permet des découvertes et des rencontres enrichissantes. Elle se sent privilégiée de nourrir sa curiosité et d’apprendre tous les jours. Le stage à l’Acfas fait partie de ses premiers pas comme journaliste professionnelle et lui permet enfin d’explorer la vulgarisation scientifique, un univers fascinant, mais qu’elle n’a pas eu la chance de découvrir pendant sa formation.
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