423 - Masculinités : entre forces et vulnérabilités

La reconnaissance par la communauté scientifique des bienfaits de l’engagement paternel a généré, depuis le début des années 2000, la mise en œuvre de programmes, d’activités ou d’adaptation de pratiques ayant pour but de mieux les soutenir dans leur rôle parental. Alors que ces efforts ont fait l’objet de plusieurs études dans le milieu communautaire, on en sait peu sur les pratiques permettant de soutenir l’engagement paternel au sein du secteur public des services de santé et des services sociaux. À partir de données recueillies en 2022 auprès de gestionnaires et d’intervenants œuvrant auprès des pères au sein du RSSS dans différentes régions du Québec, nous sommes en mesure de présenter un portrait des pratiques existantes, ainsi que des besoins des gestionnaires et des intervenants pour mieux inclure les pères, notamment pour répondre aux enjeux rencontrés dans l’inclusion des pères en situations de vulnérabilité.

Les politiques publiques représentent un pilier essentiel pouvant mener à une transformation des normes sociales. L’émergence du genre masculin dans ces politiques est cependant un créneau peu exploré. Les travaux d’analyse des politiques publiques menés au cours des dernières années par le Regroupement de la Valorisation de la Paternité (RVP) se sont intéressés à cet angle d’analyse en adoptant l’engagement paternel comme objet d’étude. La communication présente, dans un premier temps, un portrait de l’évolution de la place faite aux pères dans les politiques publiques québécoises. De ce portrait seront énoncés, par la suite, les diverses perspectives d’avenir ainsi que les défis et les enjeux auxquels sont confrontés les instances gouvernementales mais également les milieux de pratique qui souhaitent favoriser l’engagement paternel et soutenir une plus grande égalité de fait entre les femmes et les hommes. 

Des travaux indiquent que l’engagement du père dans le plan d’intervention d’un enfant suivi en protection de la jeunesse (PJ) est lié à plusieurs retombées positives pour l’enfant (p.ex., suivi et placement plus courts). Cependant, peu de pères sont impliqués dans l’intervention et les intervenant.e.s peinent à identifier comment favoriser leur engagement. Le projet Vox papa, réalisé en partenariat avec la Direction de la PJ de la région de la Capitale nationale, vise à donner la parole aux pères afin de mieux comprendre leur perception de leur relation avec les intervenant.e.s en PJ, de leur rôle dans l’intervention, et de ce qui, selon eux, constitue des facteurs favorables à leur engagement dans l’intervention. La présentation abordera les résultats préliminaires issus d’entrevues réalisées avec des pères dont l’enfant est ou a été suivi en PJ, ainsi que des pistes à considérer pour améliorer les pratiques afin de favoriser l’engagement constructif et collaboratif des pères dans l’intervention.

L’historique de traumas interpersonnels en enfance (TIE) des parents (p. ex., agression sexuelle, négligence) est lié à davantage de difficultés de santé mentale (p. ex., problèmes intériorisés) chez leur enfant. Puisqu’il a été démontré que la mentalisation des parents est liée à la psychopathologie chez l’enfant et joue un rôle dans la transmission intergénérationnelle des traumas, elle pourrait agir comme mécanisme dans le lien entre les TIE des parents et la santé mentale de leur enfant. Or, peu d’études ont examiné les relations entre les TIE des parents et les difficultés de santé mentale chez l’enfant, particulièrement chez les pères. Ainsi, cette étude examine, chez 148 pères recrutés aléatoirement à travers le Régime Québécois d’Assurance Parentale et ayant répondu à des questionnaires en ligne, le rôle de la mentalisation dans le lien entre les TIE des pères et la santé mentale de leur enfant. Les résultats d’une analyse de médiation (Macro PROCESS, SPSS) révèlent que les TIE des pères sont associés à une plus faible mentalisation, ce qui en retour est lié à davantage de difficultés de santé mentale chez leur enfant (R² = 29%). Les résultats suggèrent que la mentalisation des pères pourraient agir comme mécanisme dans le lien entre les TIE vécus par les pères et la santé mentale de leur enfant. La mentalisation pourrait ainsi constituer une cible d’intervention clé chez les pères afin de favoriser la santé mentale de leur enfant.

Dans le contexte de la pandémie, l’intervention psychosociale à distance (IPD) s’est imposée rapidement au sein du réseau de la santé et des services sociaux afin de maintenir l’accessibilité des services psychosociaux pour la population et de réduire les risques de transmission du virus de la COVID-19. En outre, l’IPD s’est montrée utile pour intervenir auprès des hommes plus vulnérables sur le plan de la santé et de l’accès aux services psychosociaux (hommes situés dans des régions éloignés des grands centres urbains, hommes à mobilité réduite, etc.). Le recours à l’IPD dans les services de première ligne pour intervenir auprès des hommes soulève toutefois plusieurs questions, entre autres, quant à son efficacité, à l’accessibilité des technologies de l’information et des télécommunications (TIC) utilisées, ainsi qu’aux bonnes pratiques à adopter pour intervenir à distance auprès des clientèles masculines. À partir des résultats d’une recherche récente, cette communication vise à explorer les enjeux importants que soulève l’intervention psychosociale à distance pour les gestionnaires, les intervenants et les utilisateurs de services de première ligne et à offrir des pistes de solutions et des recommandations pour améliorer les pratiques existantes.

Des inégalités en santé affectent les populations autochtones, associées à une sous-utilisation des services socio-sanitaires, surtout chez les hommes. Pourtant, l’accès et le recours des Autochtones à ces services ont surtout été étudié au féminin. Pour pallier ce manque de connaissances, des entrevues ont été réalisées auprès d’hommes membres de trois communautés anicinapek. La confiance envers les services est un thème central qui émerge des entrevues et plusieurs facteurs permettant son émergence ont été identifiés. Du côté des hommes utilisateurs, la bonne connaissance des services, le soutien des proches, l’engagement sur un chemin de guérison, ainsi que des qualités telles que l’autonomie et la persévérance facilitent le recours aux services. Les services pourraient mieux répondre aux besoins des hommes autochtones en bonifiant l’offre en dépendance et en soutien aux hommes victimes d’abus sexuels, ainsi qu’en travaillant à déconstruire les préjugés et en allant à la rencontre des hommes.

L’accompagnement des auteurs de violence fait partie des solutions visant à mettre un terme à la violence conjugale (Gouvernement du Québec, 2018). Au Québec, c’est en 1982 que les premiers programmes d’intervention psychosociale permettant cet accompagnement ont été mis sur pied. En parallèle à l’intervention, un important effort de recherche et d’analyse a été entrepris afin de mieux comprendre la réalité de ces hommes, leur violence et les défis rencontrés dans l’intervention auprès d’eux. Plus de 250 articles, rapports, mémoires ou thèses portant sur ces thèmes ont été recensés à l’aide d’une recherche documentaire. Cette présentation permettra de caractériser ces travaux, notamment sous l’angle de la discipline et du statut des auteurs, des approches méthodologiques utilisées et des principaux thèmes abordés.

La pandémie de COVID-19 a lourdement impacté les hommes en situation d’itinérance (HSI). De façon générale, ces hommes ont peu tendance à arborer des comportements préventifs et à faire confiance aux services publics. Souvent, ils vont prioriser d’autres aspects de leur vie avant la santé. Ce sont des phénomènes plus fortement observables en région éloignée. Notre étude s’est intéressée aux impacts de la pandémie de la COVID-19 sur les HSI au Saguenay-Lac-Saint-Jean (SLSJ), une région québécoise éloignée des grands centres urbains au Canada. Réalisée sous la forme d’un laboratoire vivant (Living Lab), la démarche a rassemblé les acteurs de l’écosystème de l’itinérance au SLSJ (services de santé, services sociaux, organismes communautaires, municipalités, commerces de proximité) dans une cellule ouverte d’innovation. Considérés comme des citoyens-usagers, les HSI ont été placés au cœur de cette démarche où ils ont agi comme producteurs de connaissances. Le processus de co-création a permis d’imaginer, de prototyper et d’expérimenter des solutions innovantes aux problématiques complexes vécues par les HSI durant la COVID-19. L’étude a eu comme retombée principale d’améliorer le bien-être, le santé mentale et physique, le fonctionnement social ainsi que les conditions de vie des HSI, tout en facilitant leur accès aux ressources. Les partenaires y ont aussi créé des liens afin de mieux répondre aux besoins des HSI dans un contexte de crise sanitaire majeure.

En 2017, avait lieu la deuxième enquête sur la santé des populations inuit du Nunavik à la demande de la Régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavik sous le titre Qanuilirpitaa? Cette fois, les leaders régionaux ont demandé d’avoir un portrait plus précis de la santé des hommes en particulier. Ainsi deux rapports thématiques ont été préparés : un premier sur les perceptions des rôles de genre et un deuxième, en préparation, de nature transversale, présentant une analyse des données les plus pertinentes de l’enquête permettant d’avoir un regard plus global sur la santé des hommes Inuit. Les perceptions, en lien avec les rôles de genre qui seront présentées, portent sur trois aspects en particulier : 1) comment les hommes Inuit perçoivent leurs rôles comme hommes de nos jours? 2) leur auto-appréciation de leur réussite en tant qu’hommes et 3) leurs perceptions de leurs relations avec leur conjoint.e et leurs enfants. Les vulnérabilités des populations inuites et des Premières Nations ont été largement mises en évidence aux cours des dernières décennies. Cependant, encore peu de recherche se sont intéressées aux forces et aux facteurs de résilience de ces populations. Ce rapport permet   d’ouvrir des brèches en ce sens en ce qui concerne les hommes Inuit.