L’évolution des savoirs de nature historiographique repose en bonne partie sur l’élection de nouveaux objets liés à un travail archivistique (voire archéologique) qui provoque l’émergence de nouvelles problématiques et la configuration de nouveaux récits. Les travaux sur la vie culturelle québécoise ne font pas exception. Ainsi, l’exhumation de pratiques scripturaires féminines invite à penser un peu autrement la littérature québécoise, en lui incorporant un corpus faisant place à l’intime; la découverte, dans les journaux du début du 20e siècle, de discours sur le cinéma ou le théâtre, invalide les topoï relatifs à une modernité qui ne serait advenue qu’à partir de la Révolution tranquille. A contrario, les historiens et les sociologues nous ont montré que cette révolution était profondément nourrie par des mouvements catholiques, pourtant jugés comme des adversaires de la modernité. Choisis parmi d’autres, ces deux exemples montrent le rôle cardinal de l’exhumation d’objets culturels « oubliés » dans la compréhension des enjeux sociétaux. Ce type d’étude touche toutes les disciplines, à la fois celles qui étudient la culture (histoire de l’art, danse, littérature, musique, cinéma, architecture, etc.) et celles qui relèvent des sciences humaines au sens large (philosophie, histoire, géographie, etc.). Le présent colloque vise à rassembler des chercheurs de diverses disciplines, intéressés, de manière ponctuelle ou systématique, à l’étude d’objets culturels « oubliés ». Au-delà de l’examen de divers cas d’exhumation, il s’agira d’étudier les conditions et les mécanismes de l’oubli dans leur variété (« verrous » critiques, fragilité des supports ou faiblesse de la conservation, définition péjorative des objets antérieurement à leur analyse, prééminence de stéréotypes, etc.), afin de les contrer. Nous faisons le pari que ces échanges permettront d’esquisser des pratiques propres à désenclaver les nouveaux savoirs en études québécoises.
Remerciements
Ce colloque s'inscrit dans la programmation de l'équipe de recherche en formation « Les “lieuxˮ de la culture québécoise : collections, “oubliésˮ et lieux communs ». Nous remercions de leur soutien le Centre interuniversitaire sur la littérature et la culture québécoises (CRILCQ), le Groupe de recherches et d'études sur le livre au Québec (GRÉLQ) et l'équipe La vie littéraire au Québec (VLQ).