Depuis les années 1990, sous l’influence du mouvement de professionnalisation de l’enseignement et de l’américanisation des politiques éducatives, on assiste au Québec comme partout ailleurs à une réduction significative de la place des sciences sociales et des traditions critiques dans les formations à l’enseignement (Tardif, 2013). Plus spécifiquement, les traditions et théories critiques sont de moins en moins explorées et utilisées pour décrire, analyser et penser l’éducation et l’activité enseignante. Pourtant, comme représentants d’une profession intellectuelle (Simard et Mellouki, 2005) située au cœur de multiples enjeux sociaux, culturels et éducatifs, le corps enseignant et les chercheurs en éducation ne sauraient se passer d’une mise à distance critique, d’une confrontation des points de vue et d’une analyse des rapports de domination et d’inégalité qui structurent l’école contemporaine (Bourgeault, 2002).
L’objectif de ce colloque est ainsi de dresser un état des lieux de la place accordée aux traditions et aux théories critiques en sciences sociales dans les formations à l’enseignement. Tant sur le plan des programmes de formation que sur le plan des pratiques enseignantes ou de la recherche en sciences de l’éducation, quelles tensions et enjeux sont sous-jacents au phénomène de diminution du rôle et de l’importance accordés aux théories critiques et aux traditions des sciences sociales? Après 20 ans de réformes, quel bilan pouvons-nous dresser quant au caractère critique des pratiques et des recherches en éducation? Savons-nous mieux former les enseignants à la démarche critique? Quelles répercussions un tel phénomène peut-il avoir sur la portée sociale de l’éducation et de l’activité enseignante, dans un contexte aussi pluriel et fragmenté que la société contemporaine? La posture critique reste-t-elle une voix d’accès théorique privilégiée pour analyser et comprendre l’enseignement? Telles sont les questions qui nourriront ce colloque, organisé en partenariat avec le CRIFPE (www.crifpe.ca).