511 - Évaluation, accompagnement et contrôle dans la formation pratique à l'enseignement

Dans un contexte de formation en alternance, les rôles des deux formateurs du stagiaire, quoique distincts et spécifiques aux cultures institutionnelles et professionnelles, devraient se compléter mutuellement (Veal et Rickard, 1998). Ainsi, l'enseignant associé et le superviseur universitaire sont invités à exercer conjointement leurs responsabilités en ce qui concerne, notamment, l'évaluation des apprentissages du stagiaire. Toutefois, l'alternance constitue souvent un terreau de tensions. De nombreux facteurs font obstacle à la collaboration interprofessionnelle entre les deux formateurs évaluateurs et à l'atteinte des objectifs de l'évaluation. Qu'elle soit formative ou certificative, l'évaluation vise avant tout le développement professionnel du futur enseignant (Baillauquès, 2002; Gervais et Correa Molina, 2004).

Une recherche qualitative interprétative ayant comme objectif d'analyser la collaboration interprofessionnelle entre les deux formateurs du stagiaire s'est déroulée en 2010-2011, avec la participation de sept triades. Les entrevues individuelles avec les trois acteurs, dont le stagiaire lui-même, ont mené à l'analyse de leurs points de vue sur le processus d'évaluation. Les résultats mettent en évidence que l'évaluation peut nuire à la formation et que des tensions existent en ce qui concerne les objets d'évaluation, les finalités de la formation et les objectifs de l'évaluation, les cadres de référence et les attentes des acteurs ainsi que leurs rôles respectifs.

Cette communication présente les premiers résultats d'une recherche exploratoire quitente de comprendre l'influence que peuvent avoir des dispositifs d'accompagnement sur la pratique réflexive, et ce en comparant les propos d'étudiants provenant de deux institutions de formation initiale d'enseignants. Si ces institutions proposent des dispositifs d'accompagnement proches, ceux-ci se différencient entre autres par le rôle qu'y joue l'accompagnateur lors de la certification de la pratique. En effet, dans l'IFFP (Institut fédéral des hautes études en formation professionnelle), l'accompagnateur officie comme examinateur alors que, dans la HEP-FR (Haute école pédagogique de Fribourg), le mentor ne joue aucun rôle certificatif.

La collecte de données se base sur des entretiens d'explicitation conduits auprès d'étudiants des deux institutions. L'analyse des discours met en évidence les effets que peut avoir le dispositif d'accompagnement, et plus particulièrement le rôle d'évaluateur de l'accompagnateur, sur la pratique réflexive ainsi que sur la posture et la forme autoévaluatives qu'adoptent les accompagnés.

La Haute Ecole Pédagogie vaudoise (HEPVd) organise les contenus de la formation des enseignants de manière différente des conditions réelles de la pratique professionnelle ce qui engendre des effets sur l'apprentissage de la profession (Vanhulle, 2009).

En tant que formatrice à la HEPVd, nous sommes amenée à évaluer les étudiants durant leurs stages. Les pratiques liées à cette évaluation semblent relativement hétérogènes. Ainsi, il n'est pas rare qu'elles diffèrent entre formateurs qui se positionnent dans des logiques d'accompagnement ou de contrôle (Vial, 2013). Dans la perspective historico-culturelle que nous adopterons, nous considérons l'évaluation comme un processus dynamique et médiateur de la construction des savoirs - savoirs largement catégorisés par la recherche (Barbier, 1996; Bourdoncle, 1993; Hofstetter & Schneuwly, 2009; Tardif & Lessard, 1999; Van der Maren, 1993). En lien, les savoirs en formation sont eux aussi en évolution et leurs statuts sont à clarifier.

Partant de l'hypothèse qu'au travers des usages, nous renseignons les référents et les logiques, la question que nous traiterons dans cette communication est celle de la nature (Clerc, 2013) et des usages des savoirs de référence convoqués par les évaluateurs dans le cadre des visites de stage. Pour y répondre, nous procèderons à une analyse de discours et de contenus d'une vingtaine de rapports écrits à l'intention des étudiants par les formateurs.

Le superviseur de stage occupe une position privilégiée pour favoriser le rapport entre la composante théorique et la composante pratique de la formation à l'enseignement (Boutet, 2002). Il devrait / pourrait agir comme  personne-ressource autant pour les stagiaires que pour les enseignants associés. Plus précisément, la fonction de superviseur universitaire comporte différentes dimensions liées au soutien à apporter aux stagiaires, à leur encadrement et à leur évaluation (MELS, 2008). Cependant, des superviseurs universitaires signalent qu'ils éprouvent une certaine difficulté à intégrer harmonieusement les deux facettes de leur rôle, c'est-à-dire celles d'accompagnement et d'évaluation de la pratique du stagiaire (Tardif, 1997).

Dans une enquête menée auprès de superviseurs de stage de différentes universités, Boudreau et Massey (2013) observent qu'un répondant sur deux n'évolue pas dans une dynamique d'évaluation qu'il considère comme idéale pour lui / elle. De plus, la majorité des répondants ne savent pas qui, des enseignants associés ou d'eux-mêmes, devrait être ultimement responsable de l'évaluation du stagiaire.

Cette communication présentera les actions mises en place dans un programme de formation à l'enseignement pour aider les superviseurs de stage à assumer leur rôle d'évaluateur. ?

Les formateurs de terrain expriment régulièrement la tension qu'ils vivent lorsqu'ils tentent d'articuler leur rôle de formateur avec celui d'évaluateur. Dans une recherche portant sur l'analyse de discours de 248 bilans de formations de praticiens formateurs terminant leur formation de formateurs de terrain, nous avons analysé leurs propos relatifs à l'évaluation des étudiants en stage, et des difficultés qu'ils rencontraient par rapport à cette évaluation. L'objectif était de connaitre les termes de leur problématisation des difficultés rencontrées. Si la tension susmentionnée apparait bien, elle semble cependant subsidiaire à un autre aspect de la configuration de l'évaluation des stages, c'est-à-dire d'une part la confrontation avec des adultes, d'autre part la confrontation à une personne que l'on a côtoyée pendant un semestre, et avec laquelle des liens se sont créés.

Que la source de la tension se trouve prioritairement dans ces deux dimensions de la confrontation plutôt que dans l'articulation contrôle – accompagnement se trouve renforcé par le fait qu'avec leurs élèves, l'articulation contrôle – accompagnement ne se trouve, à notre connaissance, rarement problématisée. Et la différence entre l'évaluation des étudiants en stage et leurs élèves se situe dans le déplacement de la frontière entre éléments symétriques et éléments complémentaires de la relation (Watzlawick, Beavin, Jackson, & Morche, 1972). C'est cette hypothèse que nous présentons.



Dans le cadre de la formation initiale à l'enseignement dans le canton de Vaud (Suisse), le formateur de terrain a la responsabilité tant de la partie formative et diagnostique que de la partie certificative de l'évaluation de la pratique des futurs enseignants. Ceci multiplie les contraintes temporelles qui traversent son activité: contraintes de la formation et de la certification. Perrenoud (2001) aborde de manière générale la question du temps dans ces deux types d'évaluation. L'évaluation formative renvoyant au temps long de la formation et la certification au temps révolu des apprentissages et à celui du jugement.

La question de la contrainte du calendrier (Gell, 1992) est centrale et amène à penser les conflits entre la temporalité des institutions et la temporalité de l'activité réelle des acteurs (Bouquet, 2003).

Il nous importe dans cette communication de comprendre quelle forme le conflit des temporalités institutionnelles et d'activité réelle prend et comment les formateurs de terrain y font face ?

Afin d'explorer ces questions, cette étude présente une analyse du contenu de sept entretiens d'instruction au sosie réalisés en 2012-2013 auprès de formateurs de terrain en charge de la formation et de l'évaluation des compétences des futurs enseignants vaudois d'élèves de 12 à 15 ans.

L'approche par compétences s'est répandue depuis quelques décennies dans divers pays. Le caractère développemental de ces nouveaux objets d'apprentissage requérant un soutien continu (Legendre, 2008), l'évaluation formative retient l'attention pour ses potentiels de régulation en cours d'apprentissage (Allal, 1989). Or, même en relation avec cette fonction, l'évaluation des apprentissages implique nécessairement un rapport à la norme, à des référents (Bourgeault, 2013; Morrissette, 2009) et sous-tend des valorisations (Rey, 2008/2011). C'est ce que nous nous proposons d'examiner en prenant appui sur deux recherches ayant porté sur les manières de faire l'évaluation formative: l'une a été conduite au Sénégal auprès de 14 enseignants de français œuvrant dans un lycée (Diedhiou, 2011-2013), l'autre au Québec auprès de 10 enseignantes du primaire (Morrissette, 2010-2013). À partir d'un partage de pratiques ayant eu lieu lors d'entretiens de groupe conduits sur chacun de ces terrains, nous examinerons comment ces praticiens négocient la tension entre une logique de contrôle, en relation avec une certaine représentation du métier, et une logique d'accompagnement, plus près des visées explicites de l'évaluation formative. Ce faisant, nous éclairerons les « accords pragmatiques » (Pépin, 1994) qu'ils déploient pour négocier cette tension dans le cadre des deux contextes de pratique fort différents. 

Au cours des dernières années un important dispositif de formation de terrain a été mis en place à Luxembourg pour soutenir les futurs enseignants du secondaire à développer des compétences professionnelles et à occuper une posture de praticien réflexif. Dans le cadre d'un tel dispositif d'accompagnement se posent par rapport à la place du tuteur des questions telles: Comment accompagner quelqu'un lors du passage dans le métier d'enseignant ? Quels  sont les discours des tuteurs à ce sujet ? Quelles peuvent être les dysfonctionnements dans un tel accompagnement ? Dans le cadre de plusieurs recherches de type qualitative auprès des tuteurs et auprès des enseignants-stagiaires, nous avons pu découvrir et analyser les souffrances et symptômes du côté des tuteurs et des stagiaires relevant surtout d'une représentation spéculaire, donc plutôt imaginaire du lien entre tuteur et stagiaire. Ce qui m'importe dans cette communication, c'est de relever les conséquences graves que cette position peut avoir au niveau de l'évaluation et ceci pour le stagiaire ainsi que pour le formateur. Pour contrer ces problèmes, une formation de tuteurs a été mise en place. Elle devrait servir comme lieu de médiation en ce qui concerne des relations duelles et comme lieu d'appropriation de l'évaluation par compétences.