« J’aimerais qu'on écoute davantage les personnes victimes et qu'elles soient mieux prises en charge dans tous les domaines : sur les plans judiciaire, psychologique et médical », explique Oriane Simion, lauréate France des prix de thèse en cotutelle France-Québec 2023, parrainé par le Consulat général de France à Québec.
Oriane Simion a mené les travaux de sa thèse de doctorat en cotutelle entre l'Université de Lille et l'Université McGill. Sa recherche visait à mieux comprendre et évaluer les symptômes du trouble de stress post-traumatique complexe (TSPTC), notamment d’un point de vue physiologique.
Après son master, Oriane a obtenu un diplôme universitaire en psychotraumatologie à l’Université Paris Cité en 2017, puis un diplôme de psychothérapeute praticienne en thérapie cognitivo-comportementale (TCC) à l’Association française de thérapie comportementale et cognitive en 2019. Cette chercheuse soutenant la cause féministe a été bénévole auprès de femmes victimes d’agressions sexuelles et a pratiqué pendant deux ans la profession de psychologue clinicienne spécialisée en psychotraumatologie. Animée par ses convictions politiques, Oriane a étudié la caractérisation physiologique des symptômes du TSPTC dans le but d’améliorer le diagnostic et la prise en charge des victimes. Ce travail lui a valu le prix 2023 de thèse en cotutelle France-Québec.
Contrairement au trouble de stress post-traumatique, qui se déclenche après un évènement traumatique unique, le TSPTC se développe à la suite d’un vécu traumatique répété, prolongé et souvent de nature interpersonnelle. « Du coup, la symptomatologie est beaucoup plus globale et affecte tous les domaines de la vie du patient ou de la patiente », souligne Oriane Simion. Les symptômes s’apparentent à ceux du trouble de stress post-traumatique « classique », mais s’y ajoutent des difficultés interpersonnelles, des difficultés à réguler ses émotions et une perception de soi très négative. Ce trouble peut toucher les victimes de violences intrafamiliales, telles que les violences conjugales et l’inceste.
Contrairement au trouble de stress post-traumatique, qui se déclenche après un évènement traumatique unique, le [trouble de stress post-traumatique complexe (TSPTC)] se développe à la suite d’un vécu traumatique répété, prolongé et souvent de nature interpersonnelle.
« L'objectif de ma thèse était de mieux reconnaître le vécu des personnes qui ont subi des violences répétées, et principalement celui des femmes victimes de violences conjugales et sexuelles, qui étaient particulièrement représentées dans les échantillons des participants à ce projet », explique la chercheuse. Le manque de reconnaissance du TSPTC chez les victimes a de graves conséquences – entre autres, en nuisant à leur prise en charge judiciaire au moment de porter plainte. « Il arrive que les policiers pensent que la victime ment, notamment parce qu’elle paraît coupée de ses émotions en racontant son récit traumatique. Or, la dissociation fait partie des symptômes du TSPTC », précise Oriane Simion.
À cause de sa nature complexe – comme son nom l’indique –, il arrive souvent que le trouble de stress post-traumatique complexe soit mal diagnostiqué. « Dans ma pratique clinique, j'ai vu des situations où certaines personnes vivaient une sorte d'errance thérapeutique pendant des années, raconte la chercheuse. Si ces personnes-là avaient été mieux diagnostiquées et que l’origine traumatique avait été identifiée, elles auraient pu avoir une meilleure prise en charge, beaucoup plus adaptée et plus précoce. »
Oriane Simion a réalisé ses travaux sous la direction de Delphine Collin-Vézina de l’Université McGill et de Stéphane Rusinek de l’Université de Lille. « La formation à McGill se complétait bien avec celle de Lille parce qu’il s’agit d’un programme en travail social et que je suis psychologue à la base, ajoute la lauréate. J’ai pu ainsi me familiariser avec une autre façon de travailler. Et surtout, j’ai eu la chance de découvrir le Canada… J’ai adoré! »
« Dans ma pratique clinique, j'ai vu des situations où certaines personnes vivaient une sorte d'errance thérapeutique pendant des années, raconte la chercheuse. Si ces personnes-là avaient été mieux diagnostiquées et que l’origine traumatique avait été identifiée, elles auraient pu avoir une meilleure prise en charge, beaucoup plus adaptée et plus précoce. »
- Simone Caron
journaliste scientifique
Simone Caron a étudié à l’Université de Montréal, où elle a obtenu une maîtrise et un baccalauréat en géographie environnementale ainsi qu’un certificat en biologie. En 2022, elle a remporté la bourse Fernand-Seguin, ce qui l’a propulsée dans le monde du journalisme scientifique. Son objectif: faire le pont entre la science et la société.
Vous aimez cet article?
Soutenez l’importance de la recherche en devenant membre de l’Acfas.
Devenir membreCommentaires
Articles suggérés
-
Un nouveau regard sur la guerre de Sept Ans : les travaux de Jacinthe De Montigny -
Entre droit occidental et droit autochtone : l’étude de la représentation politique de Fannie Duverger -
Sondage - La responsabilité sociale de la communauté de la recherche : la perception des chercheuses et des chercheurs
Infolettre