504 - « Éduquer par l’art » en lien avec les enjeux sociétaux : réflexions théoriques, expériences et perspectives, à l’école et au-delà (6e édition)

Les politiques éducatives actuelles mettent en avant la priorité qu’il faudrait donner à ce qu’elles appellent les « apprentissages fondamentaux », présentés comme les bases d’un parcours scolaire réussi. Mais le risque est de réduire ces fondamentaux à des apprentissages « de surface », limités aux compétences scolaires élémentaires, et d’oublier l’essentiel. Il est donc important de rappeler qu’un parcours éducatif réussi vise en outre, dès le plus jeune âge, des apprentissages plus fondamentaux encore, parce qu’ils sont les conditions de réussite des premiers. Parmi ces fondamentaux plus fondamentaux, il y a ce qui s’apprend uniquement dans la longue durée d’une éducation aux arts (dont la littérature, bien sûr), par les arts, et à la culture, dont la conférence essaiera d’identifier les apports irremplaçables au curriculum. L’un d’entre eux pourrait être une « éducation au sensible », une éducation esthétique, dans un sens profond où le sensible n’est pas seulement récréatif, mais un mode de relation aux autres et au monde. Soit non seulement une source d’émotions susceptibles de produire durablement attachement et engagement, mais aussi une manière d’assurer l’incorporation de valeurs essentielles pour être-au-monde, un mode de connaissance par l’expérience qui s’articule étroitement avec la connaissance conceptuelle, et l’initiation à des formes de transaction et de traduction qui ne trouvent pas ailleurs d’équivalents. Des exemples seront donnés qui ne se limiteront pas au seul domaine des arts, pour montrer que la dimension esthétique du projet éducatif global intéresse toutes les disciplines scolaires, et au-delà.

Les préoccupations éducatives à l’égard des enjeux sociétaux invitent les personnes enseignantes à aborder des sujets qui mettent en lumière les injustices et les inégalités qui continuent d’exister dans les sociétés pluralistes et démocratiques comme le Québec et le Canada. En classe, ces enjeux prennent la forme d’objets controversés (Hess, 2004) ou difficiles (Garrett et Alvey, 2021), de questions socialement vives (QSV) (Legardez 2006), ou de thèmes sensibles (Hirsch et al. 2023) riches en apprentissages. Toutefois, ces enjeux peuvent aussi faire place à des débordement, des émotions ou des imprévus (Hirsch, Moisan, Bélanger, 2022). Afin de permettre aux participant.e.s de ce colloque de mieux comprendre la complexité de l’enseignement de tels thèmes, cette communication propose de dresser le portrait de ces concepts apparentés (QSV, les objets controversés ou difficiles et des thèmes sensibles. Il s’agira de les définir et des les distinguer pour mieux saisir leur apport respectif à la formation des élèves. Ces éléments permettront d’ouvrir une réflexion sur la posture des personnes enseignantes du domaine des arts qui sont appelées à porter un regard critique et aller au-delà des frontières de leur discipline dans le contexte de l’enseignement d’un thème sensible.

La lecture littéraire et historienne d’un récit mémoriel conjointement à l’usage des arts visuels peut-elle donner sens au fragment d’une vie et ouvrir à des réflexions sur des enjeux sociétaux actuels ? C’est là ce que nous examinerons, sur la base de l’hypothèse que, grâce à une lecture didactiquement organisée articulant subjectivité et distanciation, on peut explorer le présent de manière critique à la lumière du passé, et sensibiliser les élèves aux diverses manifestations et conséquences de l’antisémitisme et aux manières d’y résister (Hirsch et Moisan, 2022). Cette exploration permettrait d’humaniser la découverte du passé, d’offrir au jeune lectorat un contact plus personnel et authentique avec l’acte de lire que celui qu’établissent les textes d’un manuel scolaire (Bélanger et coll., 2022), et de donner à voir la perspective d’actrices historiques méconnues.

Notre communication présentera la phase d’analyse-exploration d’une recherche design en éducation (McKenney et Reeves, 2019). Ce projet s’enracine dans le partenariat développé avec l’artiste peintre-collagiste Adèle Blais, qui a aussi donné lieu à la création du portrait de Muguette Myers, survivante de l’Holocauste. L’objectif général de ce projet est d’explorer les potentialités d’un maillage entre arts visuels, culture et éducation, de manière à incarner l’approche culturelle de l’enseignement (Côté et Simard, 2007) dans un dispositif de formation interdisciplinaire conçu par Bélanger (2022).

Lecture littéraire, lecture historienne, arts visuels, dispositif didactique, approche culturelle de l’enseignement

Cette proposition s'inscrit dans un contexte de crise sociale où de nombreuses personnes se trouvent en situation de grande vulnérabilité, en raison de problèmes liés à la violence intra-familiale, la santé mentale, la toxicomanie, la précarité résidentielle ou l'itinérance. Cette recherche qualitative comprend des ateliers de création, des visites d’expositions et implique trois partenaires l’Écomusée du fier monde, le CHUM par ses Services de Psychiatrie et de Médecine des Toxicomanie, et l’Hôpital Notre-Dame par ses Services de Psychiatrie Urbaine et Médecine des Toxicomanie.  Les trois recherches action poursuivent trois objectifs communs : a) mettre en place et analyser des pratiques artistiques et muséologiques adaptées aux participant·es; b) comprendre le rôle possible de l’art dans leur rétablissement (CSM, 2015) et leur participation citoyenne (Poirier, 2017); c) contribuer à la pérennisation de ces pratiques dans les milieux communautaires et de soins leur offrant des services. Les stratégies de collecte des données sont plurielles : questionnaires sociodémographiques, observations directes et groupes de discussion. Tisser nos vies est la thématique retenue pour les ateliers en arts visuels et en théâtre sur trois sites. La communication portera spécifiquement sur les ateliers de création en arts visuels qui se déroulent dans une maison d’hébergement pour femmes...

L’engagement esthétique et l’esthétique relationnelle offrent deux perspectives complémentaires pour penser l’expérience artistique en éducation. L’engagement esthétique, selon Berleant (2005), implique une interaction critique et sensible avec l’œuvre, où l’individu mobilise ses émotions et sa réflexion. L’esthétique relationnelle, telle que développée par Bourriaud (1998), conçoit l’art comme un espace d’échanges intersubjectifs, où l’œuvre devient un support de relations humaines.

Cette étude vise à analyser comment l’art collaboratif, en articulant ces deux approches, peut favoriser la reconnaissance et la compréhension de l’altérité culturelle en milieu éducatif. Par une méthodologie analytique et exploratoire, elle s’appuie sur l’examen d’expériences pédagogiques intégrant des pratiques artistiques collaboratives. L’hypothèse centrale est que l’interaction esthétique active contribue à une meilleure appréhension des différences culturelles, en créant des espaces de dialogue et de co-construction du sens. L’étude envisage ainsi montrer que l’intégration d’une démarche artistique participative en éducation peut renforcer la sensibilisation à l’altérité et encourager une approche plus inclusive des relations interculturelles.