3 - Environnement socioécologique du golfe du Saint-Laurent : sommes-nous prêts pour l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures?

À la conjonction des mondes polaire et subtropical, à l'interface entre la plus grande réserve d'eau potable au monde et l'océan, en transition entre les profondeurs du plateau continental et la zone littorale, le Saint-Laurent est un environnement contrasté, dynamique et caractérisé par une très grande variabilité que nous peinons encore à bien comprendre, observer et modéliser. Motivé à mieux comprendre les impacts de possibles déversements accidentels de polluants, cette présentation vise à brosser un portrait de ce que l'on sait sur la circulation des eaux et de la banquise du Saint-Laurent, du détroit de Cabot à l'Île d'Orléans, et de notre capacité à prévoir le destin de ces polluants et leurs impacts.

L'homme a depuis toujours choisi les berges des cours d'eau pour s'établir. Au Québec, les côtes du Saint-Laurent abritent une large portion de la population. Non seulement les zones côtières sont un lieu de production biologique (naturelle et par l'exploitation), mais elles sont aussi un accès à la nature particulièrement prisé. Du point de vue biologique, les côtes du Saint-Laurent comptent de nombreuses zones d'importance biologique uniques tels les marais et les herbiers. Ces zones contribuent au maintien et au bon fonctionnement des habitats à l'intérieur de l'ensemble de l'écosystème. Une meilleure connaissance de ces zones joue un rôle indéniable dans la gestion et le maintien de l'intégrité et l'efficacité écologique de ces systèmes. Une meilleure compréhension des rôles et des mécanismes qui maintient les écosystèmes en santé doit précéder une exploitation des ressources du Saint-Laurent et non l'inverse. Un déversement d'hydrocarbures affecterait non seulement l'écosystème côtier, mais également des milliers de personnes qui vivent en bordure du Saint-Laurent. Mieux comprendre pour mieux protéger afin que tous les utilisateurs aient un accès privilégié au Saint-Laurent dans un contexte durable.

Dans un contexte global marqué par les changements climatiques, le politique ne peut se permettre trop d'improvisation face aux enjeux d'exploration et d'exploitation des hydrocarbures. Au Québec, nous devons nous interroger sur la manière de traiter ce sujet en considérant, entre autres, les bases scientifiques ou profanes qui sous-tendent cet intérêt. Plus encore, dans l'état des connaissances actuelles, il importe de se demander si nos lectures disciplinaires permettent réellement de comprendre cet enjeu complexe. L'interdisciplinarité revendiquée depuis plus de vingt ans pourrait certainement nous permettre de poser l'enjeu sur un socle plus performant autour de l'idée d'un système socio-écologique. Pour autant, un des premiers défis consiste à développer une grammaire commune à ces concepts polysémiques. Le sens des enjeux de risques, d'état « initial », les notions d'intégration ou d'échelles, d'acceptabilité sociale, voire de gouvernance doit être posé et abordé sans a priori. Exercice particulièrement ardu tant le poids des disciplines et de nos référents acquis de longue date est ancré. Pourtant, si ce travail de grammaire commune peut paraître (trop) chronophage dans une situation caractérisée par l'urgence, il nous semble au contraire essentiel afin de saisir un phénomène social tel l'exploration et de l'exploitation des hydrocarbures afin de progresser efficacement (et plus rapidement) dans les phases ultérieures.

Cette communication entend dégager des leçons pour les communautés du Golfe Saint-Laurent en examinant les impacts sociaux mis au jour pour un type d'activités liées aux hydrocarbures, celle du gaz de schiste. Cette forme d'exploitation des hydrocarbures est en effet très bien documentée par la littérature scientifique. De plus, un examen récent, mené par l'Institut national de santé publique du Québec, a permis de dégager les risques sociaux les plus susceptibles d'être observés au Québec. Dans la présentation, il s'agira de dégager plus particulièrement les impacts sociaux transférables aux zones côtières, et de présenter les facteurs pouvant moduler ces impacts.

La communication reprend les principaux résultats publiés en 2013 (Brisson et al., 2011 et 2014) et faisant appel à la méthode de recension systématique des écrits développée par le National Institute for Health Excellence (NICE, 2009).

Les résultats montrent que les activités associées aux ressources naturelles non-renouvelables, entraînent des risques sociaux (culturels, socioéconomiques, psychologiques, etc.) pour les populations avoisinantes. Les impacts varient selon le profil de la communauté d'accueil, les infrastructures et les services offerts et le niveau de préparation des autorités. Ces résultats amènent à réfléchir pour améliorer la planification des activités industrielles en termes sociaux, et notamment au moment où il convient d'investiguer et de caractériser chaque population concernée.

Selon l'approche traditionnelle, le droit est une discipline interprétative qui fournit une réponse à toutes les déclinaisons de la question « est-ce que c'est légal? ». Cette approche repose sur un postulat de cohérence rationnelle de la Loi et une méthode de recension exhaustive des sources de droit applicables (lois, règlements, jugements,...). Par ailleurs, l'approche du droit comparé permet d'identifier, d'adapter et d'implanter les meilleures pratiques provenant d'autres juridictions. Finalement, le droit adopte aisément une démarche multidisciplinaire parce qu'il a une fonction normative et instrumentale comme vecteur d'intégration et de mise en œuvre des connaissances produites par les autres disciplines.

Cette présentation identifie les sujets de recherche que le droit aborde et traite de la contribution de la discipline à leur égard compte tenu de son approche théorique et méthodologique.

En droit, les sujets de recherche prioritaires sur l'écosystème marin du Saint-Laurent et les aspects socio-économiques de l'exploitation des hydrocarbures sont les suivants : 1) la prévention et la gestion des déversements d'hydrocarbures; 2) la transposition en droit des connaissances issues des sciences océanographiques; 3) les évaluations environnementales, la consultation des populations et les pratiques en matière d'acceptabilité sociale; 4) les droits des Premières Nations; 5) le partage des compétences législatives entre gouvernements; 6) la protection des investissements étrangers.



En 2007, Pêches et Océans Canada a désigné dix zones d'importance écologique et biologique (ZIEB) dans l'estuaire et le golfe du Saint-Laurent. En plus de constituer une étape importante dans la détermination des objectifs pour la gestion intégrée du Saint-Laurent, cet exercice a également permis de cibler les besoins en recherche. Une étude a récemment permis de montrer que l'utilisation des critères de détermination des ZIEB utilisés par le MPO est également appropriée à la zone côtière. À ce jour, les zones d'importance écologique et biologique représentent plus de 30% de l'estuaire et du golfe du Saint-Laurent. Ce territoire joue un rôle indéniable dans le système et la gestion des activités s'y déroulant nécessite une attention particulière. Dans un contexte d'exploration éventuelle en vue d'une exploitation des hydrocarbures, il est d'autant plus urgent d'identifier ces zones d'importance et de se doter d'outils efficaces et appropriés pour leur gestion.

Les pêcheurs commerciaux des trois provinces maritimes, de Terre-Neuve et du Québec pratiquent la pêche dans le Golfe Saint-Laurent. Il existe 3 secteurs de pêche au Québec, soit la Gaspésie, la Côte Nord et les Îles-de-la-Madeleine. Les pêches commerciales ont généré des revenus de $166 M au Québec en 2013. Trois espèces de crustacés dominent largement ($143 M, 86% de la valeur totale) avec en ordre crabe des neiges, homard et crevette. Les poissons de fond constituent le deuxième groupe en importance avec une valeur de $11 M (6%). Les pêches récréatives maritimes ont pour leur part généré $66 M de revenus au Québec en 2013. Les activités de pêche récréative les plus populaires sont la pêche à la mye, au capelan et à la mactre.

L'Institut Maurice-Lamontagne (IML, Pêches et Océans Canada) de Mont-Joli assume la responsabilité scientifique des pêches au Québec, incluant les avis scientifiques sur les quotas et la recherche connexe. Bien que l'IML mène plusieurs relevés d'abondance permettant un suivi des tendances d'abondance des stocks exploités et la recherche en support, il subsiste plusieurs inconnues. L'exposé présentera des exemples de lacunes de connaissances en sciences des pêches dans le Golfe en lien avec l'arrivée appréhendée de l'exploitation des hydrocarbures en mer. Par exemple les sites de fraie de certaines espèces de poisson d'importance commerciale sont mal connus mais seraient situés dans le Chenal Laurentien dans le secteur Old Harry. 

L'école, telle qu'elle est organisée aujourd'hui, ne nous semble pas à même de préparer les jeunes à la prise de décisions concernant des problématiques environnementales telle que l'exploitation des hydrocarbures dans le golfe du Saint-Laurent. Bien que l'école devrait constituer un milieu tout indiqué pour former les jeunes à ce genre de compétence, le découpage disciplinaire des contenus, la décontextualisation des savoirs enseignés, les approches pédagogiques trop prescriptives ainsi que les projets environnementaux prédéfinis par les adultes constituent des freins à l'engagement des jeunes.

La présentation qui suit s'inscrit dans les courants les plus actuels de l'éducation aux sciences, à l'environnement et au développement durable. Nous cherchons à promouvoir un engagement éco-citoyen des jeunes Québécois ancré dans les réalités régionales, favorisant un enrichissement de leurs connaissances scientifiques, de leur implication et de leur intérêt pour ces questions qui font l'objet de débats et de controverses, tant dans la sphère publique que dans la société savante.

Nous vous y présenterons entre autres comment des jeunes nous parlent de leur engagement éco-citoyen, de leurs rapports aux savoirs scientifiques et de leur engagement scolaire et comment certaines pratiques pédagogiques innovantes, encore trop peu présentes dans les écoles, pourraient contribuer à enrichir l'intérêt et l'engagement des jeunes autour de questions socialement vives à caractère environnemental.