Environ 20 % des Canadiens ont vécu un problème de santé mentale ou de dépendance au cours des 12 derniers mois (Commission de la santé mentale du Canada, 2011). Près de 90 % des individus morts par suicide présentaient un trouble mental ou un trouble lié aux substances psychoactives (TUS) au moment de leur décès (Arsenault-Lapierre et coll., 2004). Les conduites suicidaires et les TUS méritent une attention particulière, car leur concomitance avec d’autres troubles mentaux exacerbe la morbidité, complique la prise en charge et contribue à la surmortalité.
Or, seulement 58 % des Québécois présentant un trouble anxiodépressif ont eu recours à des soins de santé lors des 12 derniers mois, et ce taux diminue à 21 % pour les TUS, et ce, bien que des services sociosanitaires de qualité permettent de contrer les conséquences de ces troubles (Institut de la statistique du Québec, 2015). De plus, les besoins en psychothérapie ne sont comblés que pour 65 % de ceux rapportant un besoin de services en santé mentale (Sunderland et Findlay, 2013). De plus, le fait que la moitié des Québécois morts par suicide s’étaient présentés à l’urgence dans l’année précédant leur décès révèle les déficits de coordination entre l’urgence et les services spécialisés en santé mentale et en dépendance. Comme ces troubles sont identifiés et traités en majorité en soins primaires, améliorer la détection et le traitement en collaboration avec les secteurs spécialisés s’avère nécessaire. Cette forte prévalence de troubles mentaux couplée à un faible recours aux services suggère la présence d’une lacune importante dans l’offre de soins pour cette population vulnérable.
Par le passé, les études épidémiologiques et cliniques ont apporté un éclairage substantiel à notre compréhension des troubles mentaux et des TUS. L’utilisation récente des banques de données administratives (BDA) jumelées a été rendue possible par la capacité technologique accrue de l’informatique et des statistiques. Dans le milieu de la santé et des services sociaux, ces BDA constituent un outil significatif afin d’accroître nos connaissances des individus ayant des troubles mentaux ou des TUS. En comparaison avec les études épidémiologiques et cliniques, ces ressources rendent possible la constitution, à moindre coût, de vastes cohortes et l’élaboration de devis longitudinaux incluant des périodes pouvant même s’étendre sur des générations entières, tout en mettant à disposition des données actuelles sur la population.
À partir de BDA jusqu’à maintenant peu exploitées dans la recherche en santé mentale, les projets présentés durant ce colloque analysent les données relatives aux individus ayant un trouble mental, des conduites suicidaires ou un TUS et examinent l’utilisation des ressources médicales au Québec au cours des dernières décennies. La détermination de certaines des lacunes du réseau sociosanitaire permettra de trouver des pistes d’amélioration de la qualité des services.