Le corps avant tout

Sans pour autant décrier l’importance du recul pour l’intervenant, le chercheur Vincent Cousin pour sa part plaide pour une approche de l’accompagnement plus incarnée.

Qui n’a jamais eu affaire à un professionnel de la santé ou à un travailleur social plutôt froid, assez détaché et un peu mécanique? Sans pour autant décrier l’importance du recul pour l’intervenant, le chercheur Vincent Cousin pour sa part plaide pour une approche de l’accompagnement plus incarnée. « La tête, le cognitif, la théorie, certes il en faut, lance-t-il. Mais il doit également faire place à son expérience et aux ressentis des corps. »

C’est cette combinaison qui est la colonne vertébrale de l’approche dite « somato-pédagogique » que promeut Vincent Cousin, étudiant à la maîtrise en psychosociologie à l’Université du Québec à Rimouski (UQAR). Développée et formalisée au sein du GRASPA (Groupe de recherche en approche somato-pédagogique de l’accompagnement) à l’UQAR, cette approche préconise, entre autres, l’usage de la thérapie manuelle et de la communication attentive comme modalités d’accompagnement. Pour le jeune chercheur, cette approche rend possible l’adoption de diverses « postures de collaboration » avec ces êtres complexes que sont les humains. L’intervenant peut se faire animateur, médiateur, accompagnateur, selon les situations.

«C’est seulement en étant alerte à ce que vous ressentez que vous serez en mesure de bien accompagner», Vincent Cousin.

Lui-même intervenant auprès d’organismes communautaires, Vincent Cousin a pu en constater l’efficacité à maintes reprises. Il se rappelle le jour où, dans un moment qu’il sentait opportun, le simple fait de poser sa main sur l’épaule d’une participante qui lui était particulièrement hostile a complètement désamorcé les tensions et insufflé une nouvelle dynamique.

Autre exemple, un peu moins glorieux celui-là : le moment où il a interagit chez des toxicomanes en pleine réinsertion sociale. Son intervention, trop cérébrale et calculée, n’a pas su produire les effets recherchés. Avec le recul, le chercheur se rend bien compte de son erreur. « Le jeune naïf que j’étais n’avait pas bien saisie à qui il s’adressait », se souvient-il en rétrospective.

L’approche somato-pédagogique est peu appliquée à l’extérieur de quelques cercles d’initiés. Comment l’amener à prendre de l’ampleur et – pourquoi pas – à se répandre dans tous les métiers d’accompagnement? Ce sont précisément ces questions qui se situent au cœur des travaux de l’étudiant à la maîtrise. Bien qu’il n’ait pas encore complété ses recherches, Vincent Cousin tire déjà des enseignements des entretiens réalisés. Ainsi, les intentions de l’intervention somato-pédagogique doivent être claires pour l’intervenant . « Si elle n’est pas bien définie, l’accompagnateur ne sera pas en mesure de saisir ce qui émerge en lui », précise-t-il.

Aux accompagnateurs désireux d’améliorer la qualité de leurs interventions, Vincent Cousin conseille une seule chose : « Trouvez le médium qui vous permet de connecter à vous-même. Peu importe que ce soit de la danse, du chant ou de l’activité physique, l’important, c’est que vous ayez le goût de votre vie. Car, poursuit-il, c’est seulement en étant alerte à ce que vous ressentez que vous serez en mesure de bien accompagner ».