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- d'un producteur de métaux de haute technologie
- d'un scientifique de données
Racontez-nous votre parcours, de vos études supérieures à votre occupation actuelle?
Les discours économiques destinés au grand public sont-ils bien balancés? Poser la question c’est y répondre comme le dit si bien l’adage. Dans l’espace médiatique québécois, nous retrouvons une situation de déséquilibre permanent entre les intervenants marqués à droite et ceux qui mettent de l’avant des perspectives critiques. Non pas que les débats soient impossibles ou que la rencontre de points de vue divergents ne survient jamais. Seulement, quand vient le temps de débattre de politiques économiques, de commenter les chiffres sur la croissance ou encore de se questionner sur l’efficacité du système fiscal québécois, il est encore trop fréquent que l’on « donne le micro » aux seuls analystes issus du monde des affaires. C’est alors notre capacité collective à débattre, à discuter et à orienter les grands choix gouvernementaux qui en souffre.
Pour participer à contrer cette tendance néfaste, j’ai commencé à m’impliquer en 2006 au sein du collectif qu’est l’Institut de recherche et d’informations socio-économiques. Mieux connu par notre acronyme d’IRIS, ce milieu de recherche s’organise sur quelques principes simples : l’autogestion de l’organisation par ses membres, l’adhésion de ceux-ci à des valeurs de gauche et la volonté de développer et de diffuser un contre-discours économique.
On le devine, nous avons affaire à un milieu de recherche bien particulier. Non parce qu’il ne s’y réaliserait pas un travail de recherche sérieux, mais parce qu’il s’agit d’un cadre au sein duquel la recherche doit répondre à des impératifs précis : la rapidité dans la production (pour être en phase avec l’actualité), l’intégration d’éléments d’analyse capables de répondre aux multiples niveaux d’intervention de l’organisation (contre-discours, vulgarisation, avancées scientifiques, etc.) et la capacité à répondre dans l’instant aux différentes sollicitations provenant des médias.
Bref, il s’agit d’un milieu de recherche assez unique auquel s'ajoutent, outre l'avancement des connaissances, les objectifs d'étendre au maximum notre capacité de diffusion et d'inscrire la conjoncture politique au cœur de nos travaux.
Parlez-nous de votre passage d’une formation en recherche à une profession en dehors du milieu universitaire?
J’œuvre à l’IRIS depuis un certain temps. Lors de la rédaction de ma première publication, je débutais tout juste ma scolarité de second cycle. C’est donc dire que, pour moi, il est assez difficile de départager la recherche intra et extra- muros, puisque j’ai appris le travail de chercheur en ayant la chance d’avoir toujours un pied dans ces « deux mondes ».
Cette chance qui fut la mienne m’amène à vouloir insister sur deux défis importants à souligner afin de bien situer mon parcours dans une discussion sur la recherche à l’extérieur des universités.
Le premier concerne la tension inhérente qui existe entre les objectifs organisationnels et le travail d’un chercheur. Pour chacun des dossiers de recherche dans lequel je suis impliqué, je dois identifier les limites de mon action, qu’il soit question de contraintes de financement ou encore d’intérêts divergents des principaux acteurs de la gauche québécoise. Avoir conscience des limites de son environnement ne doit pas pour autant nous amener à renoncer à la rigueur intellectuelle attendue d’un chercheur : il est tout à fait possible, par exemple, que j’en vienne à contredire un partenaire ou même un bailleur de fonds sur un dossier précis. L’important, et c’est là que réside le nœud de ce premier défi, est de savoir le faire (donc de protéger son autonomie et son indépendance) sans nuire à de futures collaborations ou, plus important encore, sans défaire des rapports de confiance avec des acteurs indispensables à la poursuite de mes travaux.
Le second défi n’est pas propre à la recherche « hors les murs »; il concerne toute démarche de recherche engagée et militante. Chaque fois qu’on présente un résultat, tout probant qu’il soit, il se trouvera des défenseurs du statu quo pour en saper la crédibilité sur le seul motif de son inscription dans une démarche à teneur citoyenne. Prouvant souvent un manque d’imagination, ce genre de critique n’est au fond qu’un moyen de faire taire les voix discordantes. Il reste donc, à celui qui croit au rôle d’une recherche contribuant à la transformation sociale, à contrer ce présupposé.
- Philippe Hurteau
Institut de recherche et d'informations socioéconomiques
Philippe Hurteau est politologue et complète actuellement un doctorat à l’Université d’Ottawa en pensée politique. Ces dernières années, il a produit une trentaine de rapports de recherche en plus de rédiger une quinzaine d’articles ou de chapitres de livre et a donné plus d'une centaine de conférences à travers le Québec. Ses travaux s’attardent à mieux comprendre les transformations néolibérales de l’État et du marché du travail.
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