Il existe actuellement un engouement en recherche pour la "mémoire collective". Des études portent par exemple sur des évènements précis comme la marche du pain et des roses ayant précédé le mouvement social à l'origine de l'adoption de la loi de lutte contre la pauvreté au Québec (Dufour, 2003). D’autres s’intéressent aux traces mémorielles d’évènements marquants comme mai 68 (Guilhaumou, 2010) ou le printemps érable (Roy, 2016). D’autres étudient la « communautarisation » ou l’affrontement des mémoires comme Stora (2021) sur la décolonisation. Des recherches analysent également la mémoire dans les mouvements et ainsi, la transmission des savoirs militants de générations en générations (Lamy, 2018; Mathieu, 2007). Globalement, les principaux travaux portent sur des mouvements sociaux d’ampleur, visibles dans l’espace public (Daphi et Zamponi, 2019). Force est de constater un déficit de connaissances sur les différents mouvements et pratiques en ce qui concerne la lutte contre la pauvreté. Le travail de mémoire est un long processus de réflexion et d'appropriation collective qui sert à interpréter le présent (Kubal et Becerra, 2014). Il est souvent attaché à une démarche de recherche-action ou d’immersion qui nécessite un long investissement de la part de tous les participants, un travail de recherche documentaire conséquent et, une réflexion sur les stratégies de mobilisation des connaissances. En matière de lutte contre la pauvreté, plusieurs éléments de contexte peuvent expliquer cette absence de traces : l'histoire du mouvement et son rejet de la théorisation, l'éclatement des luttes contemporaines, la criminalisation de la pauvreté qui empêche parfois de recueillir les témoignages des premiers concernés, la pénurie de main d'œuvre, le vieillissement de figures marquantes et le manque de relève, entre autres. Ce colloque s’inscrit donc dans une démarche d’état des connaissances sur la mémoire collective des mouvements et des pratiques de lutte.
Le vendredi 9 mai 2025