La rhétorique à l’égard de l'action paysagère s'est transformée depuis la fin du 20e siècle, faisant passer le paysage d'un objet réservé aux experts à un objet démocratique. Cette tendance s’est accentuée depuis l'adoption, en l’an 2000, de la Convention européenne du paysage (CEP), conduisant les états signataires à l'institutionnalisation de la prise en compte du paysage en aménagement. La situation en est autrement au Québec où les considérations envers le paysage ne s'observent pas systématiquement dans les outils d'aménagement, menant à une variété d'interventions et échelles d'action. L'absence d'un cadre institutionnel forçant l'uniformité permet néanmoins l'émergence d'initiatives innovantes adaptées aux spécificités locales et régionales.
Ainsi, à travers le Québec, des acteurs se rassemblent afin de miser sur la protection et la valorisation des paysages en réponse aux pressions multiples induites, entre autres, par le développement et l'adaptation aux changements climatiques. Certains envisagent de plus l'action paysagère comme une voie de contribution au bien-être des individus et des communautés, en favorisant notamment le sentiment d'appartenance et de fierté. Ces bienfaits découlent de la reconnaissance du caractère relationnel du paysage, qui, pour être documenté, nécessite une compréhension fine des composantes sociales et culturelles en jeu. Les municipalités québécoises sont outillées pour relever les composantes tangibles des paysages (assise biophysique, caractère patrimonial du cadre bâti, etc.). La documentation des valeurs intangibles pose toutefois des défis importants. L'absence de considération à l'égard des aspects intangibles de la demande sociale peut entrainer des conséquences bien réelles au sein des communautés, pouvant conduire à l'émergence de tensions, voire d'épisodes de conflits. Il est dès lors essentiel de réfléchir collectivement aux manières de révéler ces valeurs intangibles pour ensuite les mobiliser dans l'action.