223 - Sciences, génie et performances sportives

Cette présentation abordera différents volets de la technologie et des services de biomécanique appliquée développés et déployés à l’Institut national du sport du Québec depuis 2009. Le rôle de scientifique du sport en est un de vulgarisateur et de facilitateur. Il faut développer des partenariats auprès d'experts d'horizons variés afin de mener à bien les différentes initiatives pour répondre aux questions des groupes sportifs.

Mathieu échangera à propos des défis rencontrés lors de tentatives d’implanter des services scientifiques sur le terrain. Des projets récents seront décrits et les perspectives d’avenir seront soulignées.

Le parahockey est une discipline paralympique où des athlètes avec une limitation fonctionnelle aux membres inférieurs pratiquent le hockey sur glace en utilisant une luge, soit une assise reposant sur une structure métallique avec une paire de lames. En compétition, la performance de l’athlète est directement liée aux caractéristiques mécaniques de la luge (ex. : masse et distribution de celle-ci) et à l’interface entre la luge et l’athlète. Cependant, les luges actuelles et plus particulièrement leur assise, sont loin d’être optimales. D’une part, l’assise s’adapte difficilement aux différentes morphologies et déficiences des athlètes (ex. : paraplégie, amputation unilatérale ou bilatérale) ce qui entraîne un déséquilibre médio-latéral, malgré l’ajout de sangles de soutien. D’autre part, il a été démontré que les pressions subies par les athlètes au niveau de l’assise dépassent largement les valeurs cliniquement acceptées, ce qui les met à risque accru de développer des plaies de pression. Dans une volonté d’offrir des équipements répondant davantage aux besoins de leurs athlètes, le comité parahockey de Hockey Québec et l’INS Québec ont collaboré avec INÉDI (CCTT en design industriel) pour développer et évaluer des assises de parahockey personnalisées.

Il aura fallu deux décennies de recherche en laboratoire pour que la réalité étendue s’invite progressivement dans le quotidien des athlètes, ouvrant de nouvelles perspectives en matière de suivi de performance, d’entraînement, de bien-être et de santé. Quelles sont ses applications concrètes pour les athlètes et son apport aux connaissances en sciences du sport ? Quel est son véritable impact sur la performance et quelles en sont les limites actuelles ? Cette présentation dressera un état des lieux des avancées scientifiques et technologiques en réalité étendue appliquée au sport. Nous verrons comment l’essor des technologies immersives, combiné aux progrès de l’intelligence artificielle, peut accélérer son intégration dans le soutien des athlètes. À travers des exemples concrets issus de collaborations avec des athlètes canadiens, nous explorerons les applications les plus prometteuses pour l’évaluation des habiletés perceptivo-motrices, l’acquisition de compétences, la préparation mentale et la prévention des blessures. La présentation examinera également les défis technologiques et méthodologiques à relever afin de maximiser l’impact de ces outils innovants sur la performance sportive.

Cette présentation mettra en lumière nos travaux sur la capture et la synthèse du mouvement pour les avatars virtuels. Je montrerai comment la qualité de la capture de mouvement peut être améliorée en combinant la vision par ordinateur avec l’apprentissage automatique et des modèles physiques du mouvement. De plus, je démontrerai comment des bases de données de mouvements peuvent être exploitées pour générer des animations 3D réalistes et naturelles dans des applications de réalité virtuelle. Enfin, j'aborderai les implications de cette technologie pour les sciences du sport, notamment pour l'entraînement virtuel et d’analyse de la performance.

Les outils numériques transforment l’analyse et l’optimisation du mouvement, notamment en biomécanique sportive. Depuis plus de dix ans, nous développons des outils fondamentaux pour ces analyses. Parmi eux, biorbd permet la modélisation du corps humain et la simulation de ses interactions avec l'environnement, tandis que bioptim exploite la commande optimale pour déterminer des mouvements idéaux dans divers contextes, du geste musical au saut en trampoline. Ces technologies permettent d’explorer des techniques gestuelles innovantes, en optimisant des mouvements difficilement réalisables autrement en raison de leur dangerosité ou de la durée d’apprentissage requise.

En parallèle, nous développons des solutions accessibles, comme l’utilisation de caméras de téléphones intelligents pour capturer et analyser le mouvement. Ces outils à faible coût permettent d’extraire des informations biomécaniques simples, comme le temps de vol, et rendent ces analyses plus accessibles aux entraîneurs et aux athlètes.

En combinant ces approches de haute précision et ces outils accessibles, nous visons à démocratiser l’analyse du geste sportif, à améliorer la compréhension des performances et à optimiser les stratégies d’entraînement. Cette synergie entre technologies avancées et solutions abordables ouvre de nouvelles perspectives pour le sport de haut niveau comme pour le grand public.

Au cours de cette présentation, je détaillerai les différents projets de recherche et innovations que j'ai menés au cours des sept dernières années en collaboration avec différentes équipes sportives de haut niveau. J'aborderai notamment de nouvelles méthodes de mesure de la charge externe en water-polo, rugby, et ski alpin, de l'analyse de performance en para-natation, patinage de vitesse et escalade de vitesse, ainsi de la réduction des risques de blessures en escalade de bloc et en patinage de vitesse.

Le préconditionnement ischémique (IPC) optimise la performance à l’entraînement. Des patineurs élites (n=21) ont participé à cette étude croisée randomisée avec 2 microcycles comprenant 1 séance de force (3 séries de 6 répétitions et 1 série jusqu'à l'échec de squats avec barre hexagonale à ~85% du 1 RM, avec 90 sec de repos entre les séries) et 1 séance d'intervalle de sprint (SIT) 48 heures plus tard (2 séries de 6 sprints all-out de 15 sec sur un vélo, avec 2 min de repos entre les sprints et 4 min entre les séries). La vitesse a été enregistrée avec un appareil Gym Aware (Kinetic Performance Technology, Australie) (force). Les puissances ont été enregistrées à l'aide d'une base Kickr (Wahoo, États-Unis) (SIT). Force et SIT étaient précédées d'IPC (semaine A ; 3 x 5 min à 220 mmHg suivies de 5 min à 0 mmHg, sur chaque cuisse) ou d’un placebo (semaine B ; 3 x 5 min à 20 mmHg). Pour force, le résultat d'intérêt était le nombre de répétitions effectuées à la 4e série et pour SIT, une diminution de puissance (PDecr) a été calculé pour chaque série. Des tests T ont comparé les performances. L'IPC a amélioré le nombre de répétitions jusqu'à l'échec (+2,84 répétitions ; p = 0,015 ; g = 0,21). Aucune différence significative n'a été observée pour la vitesse moyenne pendant cette série (p = 0,126 ; g = 0,07), pour PDecr (Série 1 : p = 0,556 ; g = 0,17 ; Série 2 : p = 0,070 ; g = 0,52). L'IPC améliore la résistance à la fatigue musculaire.

Dans les sports de glisse, les casques sont essentiels pour protéger la tête des traumatismes crânio-cérébraux graves (TCCG). Fabriqués principalement en polystyrène expansé (EPS), leurs coussinets dissipent l'énergie lors d'un impact en se déformant plastiquement, protégeant efficacement contre les TCCG, mais offrant une faible protection contre les commotions cérébrales (CC). Les jeunes pratiquant ces sports étant très vulnérables aux CC, il est aujourd’hui nécessaire d’améliorer ces casques pour offrir une meilleure protection contre ces blessures.

L’objectif de cette étude est de concevoir un casque de ski intégrant une mousse innovante imprimée en 3D et protégeant efficacement des impacts à risque de causer des CC. Douze échantillons fabriqués d’une mousse à surface minimale triplement périodique (TPMS) ont été testés à l’impact et comparés à un échantillon d’EPS classique pour identifier une mousse prometteuse. Un prototype de casque a ensuite été conçu en remplaçant les coussinets d’EPS d’un casque de ski commercial par des coussinets faits de la mousse à TPMS choisie. S’inspirant du protocole STAR (Virginia Tech Helmet Lab), les tests d’évaluation ont montré que le prototype avait une performance similaire à celle du casque de référence. Les recherches futures viseront à optimiser la structure TPMS pour améliorer la protection.

Les performances sportives de haut niveau dépendent de l'intégration de plusieurs facteurs, dont une prise de décision efficace. Toutefois, la méthode la plus optimale pour entraîner cette compétence, particulièrement lorsque les ressources humaines et matérielles sont limitées, reste un sujet de débat. Cette étude a examiné si les séances d’entraînement au bâton contre un lanceur virtuel, ou l’entraînement visuomoteur, pouvaient améliorer la prise de décision. Vingt-huit batteurs de baseball hautement entraînés ont été recrutés et répartis en trois groupes d’entraînement : réalité virtuelle (RV), visuomoteur (VM) et contrôle actif (AC). Les participants ont suivi l’entraînement qui leur était assigné deux fois par semaine pendant six semaines. Les pré-tests et post-tests consistaient en une tâche de reconnaissance de lancer en RV, permettant de mesurer la précision des participants dans l’identification du point de la trajectoire de la balle, du type de lancer et de sa localisation. Les résultats ont montré que le groupe RV avait significativement amélioré la précision de l’évaluation du point d’aboutissement par rapport au groupe AC. Les effets bénéfiques observés dans la condition RV pourraient s’expliquer par le fait que les participants se sont familiarisés avec les cinématiques du lanceur, fournissant ainsi des informations essentielles pour une prise de décision réussie. Ces résultats suggèrent que la RV pourrait constituer une stratégie d’entraînement prometteuse.

Le boccia est un sport paralympique de visée et de précision dans lequel la vision joue potentiellement un rôle crucial. Lors d’une action de visée, l’athlète doit intégrer des informations visuelles pertinentes et ignorer celles qui sont distrayantes afin de coordonner son intention avec le mouvement de lancer. Aucune étude à ce jour n’a objectivement confirmé le rôle des stratégies visuelles lors du lancer en Boccia, ce qui limite la capacité des entraîneurs à fournir des instructions basées sur des données probantes pour améliorer l’exécution des lancers dans ce sport.  Dans d’autres sports, l'analyse des stratégies visuelles à l’aide d’un oculomètre portatif a permis de mettre en évidence des marqueurs d’expertise et d’efficacité tels que le nombre et la durée des fixations qui permettent un meilleur focus de l’attention sur un endroit précis. En particulier, le Quiet Eye (QE), défini comme la dernière fixation visuelle avant l’exécution motrice, semble être un comportement visuel clé pour favoriser la performance. Ce projet vise à caractériser les stratégies visuelles adoptées par les athlètes de Boccia de différents niveaux d'expertise et à déterminer si des marqueurs visuels tels que le QE sont associés à l’expertise et à la performance. 

L’escalade de bloc en salle est une discipline où les athlètes grimpent un mur de trois mètres de haut sans équipement de sécurité et chutent volontairement ou non sur un matelas. Les blessures les plus courantes sont chroniques aux membres supérieurs (notamment aux doigts) et traumatiques aux membres inférieurs, les chutes étant la principale cause de blessures. Des commotions cérébrales légères pourraient également survenir. Malgré la croissance de ce sport au Québec, les études existantes sont majoritairement épidémiologiques et ne permettent pas de comprendre les mécanismes biomécaniques des blessures.  Actuellement, nous collectons des données cinématiques à l’aide de capteurs inertiels placés sur le corps et de caméras enregistrant les chutes. En parallèle, un questionnaire en ligne est utilisé pour identifier les scénarios de blessures les plus fréquents.  Les résultats attendus permettront de formuler des recommandations pour les entraîneurs et les salles d’escalade sur la gestion des chutes et l’aménagement des voies. De plus, les données recueillies pourront être utilisées pour améliorer la conception des matelas de réception, contribuant ainsi à la prévention des blessures. Lors de la présentation, des résultats préliminaires issus des premières analyses de données seront exposés afin d’illustrer les tendances observées et les perspectives du projet.

Cette communication explore l'utilisation de données synthétiques pour améliorer les modèles de classification en vision par ordinateur appliqués aux performances sportives. En exploitant le moteur de rendering 3D de Blender, nous créons des scènes sportives photoréalistes, en introduisant une randomisation contrôlée des paramètres tels que l'éclairage, les angles de caméra, les postures des athlètes et les environnements. Cette approche permet de surmonter les limitations des données réelles, telles que la rareté et les contraintes de confidentialité, en fournissant un ensemble de données riche et diversifié pour l'entraînement des classificateurs. Les résultats préliminaires indiquent une amélioration de la précision des modèles de classification, démontrant l'efficacité de la génération de données synthétiques variées avec pour l'analyse des performances des athlètes de haut niveau dans le context du boxe.

La barre russe est une discipline de cirque mettant en scène un trio d’athlètes de haut niveau, où un voltigeur exécute des sauts acrobatiques sur une barre flexible soutenue sur l'épaule de deux porteurs. Ces derniers subissent des charges asymétriques élevées, générant d’importants efforts intervertébraux, ce qui peut contribuer à l’apparition de douleurs chroniques. Pour mieux répartir ces charges sur les deux épaules des porteurs, un nouveau prototype de barre en fibres composites a été développé. Une comparaison biomécanique entre ce prototype et une barre classique a confirmé une réduction significative des contraintes exercées sur la colonne vertébrale. Ce projet de recherche transdisciplinaire contribue à une meilleure compréhension de la santé et de la performance des artistes de cirque, un domaine encore peu exploré scientifiquement. Il est admis que pour maîtriser leur discipline, les artistes, parfois issus de l’olympisme, se soumettent à des charges de travail similaires à celles de sportifs de très haut niveau. Pourtant cette étude fait partie des premières à utiliser des outils du génie sur cette communauté et ouvre une toute nouvelle voie de recherche.

Les impacts à la tête non commotionnel, dits impacts sous-commotionnels (ISC), semblent anodins. Pourtant, leur répétition, comme au football, montre un potentiel cumulatif lié à des problèmes neurologiques futurs. Le mécanisme lésionnel reste toutefois mal compris, et l'absence d'une définition claire du lien entre les ISC répétés et leurs conséquences complique la prévention et la prise en charge.

Cette étude vise à mettre en lumière le mécanisme lésionnel cumulatif menant à la dégénérescence des tissus cérébraux sous l’effet des ISC répétés chez les joueurs de football universitaire canadien. Après une seule saison, il a été démontré que des altérations asymptomatiques de la substance blanche du cerveau, précurseurs de maladies neurodégénératives, peuvent apparaître.

La méthodologie met en relation les impacts subis sur le terrain durant une saison aux effets observés par imagerie, via un modèle par éléments finis (MÉF). Ce modèle numérique permet d’étudier les déformations cérébrales liées aux ISC. Les résultats préliminaires soulignent l'importance de personnaliser le MÉF selon l'anatomie du joueur, montrant que même des impacts légers peuvent avoir des effets spécifiques à chaque individu. De plus, certaines régions du cerveau semblent systématiquement plus vulnérables, indépendamment du joueur. Cette double découverte permettra d'améliorer la prise en charge des individus vulnérables et de perfectionner les équipements de protection pour mieux cibler ces zones à risque.

Mon projet de maitrise en génie mécanique à l’ETS consiste à concevoir puis tester un prototype de potence de patinage de vitesse courte piste réglable. Il s’agit d’une pièce reliant la lame à la bottine des patins. Jusqu’à présent, les patineurs élites ont utilisé des potences standards dont seule la hauteur est personnalisable. Or, plusieurs d’entre eux ressentent le besoin d’avoir davantage de liberté dans leurs réglages. Un concept de potence réglable a donc été développé. Après avoir finalisé cette conception, l’objectif de mon étude serait d’identifier l’impact de l’orientation de la lame par rapport à la bottine proposée par ce prototype sur la biomécanique des athlètes. Cela permettra d’identifier des tendances globales de réglages favorables à la performance de tous les patineurs mais aussi d’orienter chaque athlète vers des réglages personnalisés. Les essais consisteront à mesurer des variables de performance en patinage de vitesse courte piste (fréquence de patinage, répartition de pression plantaire, dynamique des pas de patinage…) sur des athlètes élites en les faisant patiner avec différents réglages de potence (tangage et/ou inclinaison de la bottine par rapport à la lame). Enfin, il est prévu de proposer des pistes d’améliorations du premier prototype dans le but de concevoir une version améliorée plus durable.