Informations générales
Événement : 89e Congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Enjeux de la recherche
Description :Le 15 juin 1923, l’Acfas est fondée par la réunion de 13 sociétés savantes, un regroupement multidisciplinaire dès son origine. L’intention est de contribuer à la création des « conditions institutionnelles et sociales propices au développement de la recherche » (Gingras, Histoire de l’Acfas, 1992). Cette fondation se situe dans une décennie qui voit s’institutionnaliser la recherche scientifique au Québec francophone, entre autres par la création de facultés de sciences, tant à l’Université Laval qu’à l’Université de Montréal.
La recherche scientifique a connu depuis un tel développement qu’il est difficile d’en mesurer la signification autant pour les conditions de la recherche elle-même que pour les transformations sociales engendrées. Le présent colloque est l’occasion de revenir sur quelques héritages d’un siècle de recherches réalisées dans tous les domaines de la connaissance, au Québec et dans la francophonie canadienne.
Sous cet éclairage évolutif, ce sera aussi l’occasion de réfléchir au présent et à l’avenir : les réalisations à maintenir comme les nouvelles routes à prendre.
Date :- Jean-Philippe Warren (Université Concordia)
- Félix Mathieu (The University of Winnipeg)
- Johanne Lebel (Acfas - Association francophone pour le savoir)
Programme
Accueil et mot d’introduction
Recherche, épistémologie, éthique et méthodes
Les 100 dernières années ont vu se transformer les protocoles de recherche, le rapport à l’éthique, alors que dans le même temps diverses avancées méthodologiques ont été rendues possibles. Comment votre communauté savante a-t-elle évolué quant à ces dimensions?
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Communication orale
L’accès aux savoirs au coeur de la rechercheIsabelle Laforest-Lapointe (UdeS - Université de Sherbrooke)
Initiatives de sciences communautaires, vulgarisation scientifique, multiplication des médias de communication et accès libre aux articles scientifiques, la recherche semble plus que jamais amenée à transmettre ses retombées au grand public. Cette exigence se serait accrue dans les dix dernières années, tant pour les personnes dirigeant les recherches que pour les personnes étudiantes aux cycles supérieurs. On s’attend désormais à ce que les spécialistes soient également de grandes communicatrices et communicateurs charismatiques. S’il est vrai que la communauté a tout à gagner d’une science plus accessible, cette demande accentue la pression sur les scientifiques. Néanmoins, les initiatives de communication grand public se multiplient et fleurissent permettant ainsi une meilleure compréhension générale de concepts avancés, une conjecture particulièrement pertinente dans un contexte pandémique. Malgré l’effort supplémentaire nécessaire pour vulgariser la science, il semble plus que jamais primordial d’impliquer le grand public pour maintenir sa confiance envers le milieu scientifique.
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Communication orale
Distances académiques contre épistémologie autochtoneNicolas Renaud (Université Concordia)
La recherche sur des sujets autochtones a connu une croissance au cours des dernières décennies, concordant avec une visibilité accrue dans le forum public. Si cela a certes appelé des révisions et innovations éthiques et méthodologiques chez les chercheurs non-autochtones, il ne semble pas encore que la réflexion critique sur la fracture épistémologique avec le monde autochtone soit suffisamment engagée, et menée dans la pratique au bout de ses conséquences. De l’autre côté, les Autochtones ont développé certaines formes de « résistance à la recherche », puis ré-articulent, dans et hors le monde académique, un savoir et un langage fondés sur une épistémologie autochtone, sur d’autres visions des relations, de la créativité, de la subjectivité, et de la charge politique de leur propre existence.
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Communication orale
L'héritage gréco-romain, entre tradition et modernité : regard sur la recherche en histoire ancienne au Canada et en Amérique du NordPierre-Luc Brisson
La recherche en histoire ancienne, tant au Canada que dans le reste de l’Amérique du Nord, n’est pas demeurée imperméable aux mouvements qui animent les campus des institutions d’enseignement et de recherche. Or, si aujourd’hui l’héritage de la civilisation gréco-romaine est parfois durement remis en cause en tant qu’il est considéré comme un « vestige » du passé colonial occidental, ce phénomène n’en est pas pour autant nouveau. Il témoigne du fait que les études anciennes sont demeurées – parfois malgré elle, dans le cas présent – en phase avec l’évolution de la société nord-américaine et des courants épistémologiques qui ont traversé les sciences sociales. Des gender studies à l'histoire nouvelle des émotions, les travaux des historiens antiquisants ont su se renouveler et jeter un nouvel éclairage sur les sociétés du passé, que l'on croirait à tort figées dans le temps, à l'image des marbres des vestiges antiques. Cette présentation veut ainsi offrir un panorama des évolutions de la recherche en histoire ancienne, tout en offrant une réflexion sur ses enjeux actuels et ses perspectives.
Recherche, valeurs et mouvement sociaux
Les 100 dernières années ont vu se modifier les valeurs et les sociétés, et se transformer les récits qui font d’un groupe, un corps politique ou social. Comment la recherche a-t-elle évolué face à ces grands enjeux?
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Communication orale
50 ans de recherche sur la culture : regards les mouvements d'un écosystèmeChantal Savoie (UQAM - Université du Québec à Montréal)
À partir d’exemples puisés à des grands travaux portant sur la littérature et la culture au Québec au cours des cinquante dernières années, j’entends montrer que si les développements de la recherche sur la culture prennent acte de nouveaux corpus (production artistique des femmes, genres et formats populaires, diversité sous toutes ses formes) ils invitent également les chercheuses et les chercheurs à relever de nombreux défis et à innover sur une multitude de plans pour rendre compte de cet écosystème culturel mouvant. Allant des questions épistémologiques aux réalités très pragmatiques du travail de terrain, en passant par le recours aux outils numériques et aux enjeux des formats diffusion, l’évolution des paramètres qui agissent sur la production des récits que nous nous faisons de notre culture méritent qu’on s’y intéresse.
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Communication orale
« Toute histoire est contemporaine » : réflexions sur le savoir historiographique mis en situationMartin Pâquet (Université Laval)
Il y a plus d’un siècle, le philosophe italien Benedetto Croce mentionnait, dans une formule saisissante, que « Ogni vera storia è storia contemporanea ». Sans verser dans le relativisme, B. Croce soulignait que le savoir issu de l’opération historiographique est situé. Ce savoir s’inscrit dans un espace-temps donné, celui d’un champ social. Immergé dans des rapports de force, sous le jeu de l’heuristique et de la critique, il participe d’une relation dialogique avec la communauté savante d’abord, la communauté politique ensuite. Sa production reflète ainsi les enjeux contemporains. Dès lors, le savoir historiographique se situe aussi au croisement de deux axes : celui de l’idéal de vérité, celui de la pertinence sociale. En s’appuyant sur les avancées en histoire politique et en histoire culturelle, cette intervention explore des arcanes du savoir historiographique mis en situation.
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Communication orale
Recherche en études littéraires et épistémologie féministeMarie-Andrée Bergeron (University of Calgary)
On sait que la littérature a joué un rôle crucial dans le développement de la pensée féministe au Québec, notamment en ce qu’elle a permis de révéler les rapports de forces et le pouvoir symbolique associés aux échanges linguistiques et interdiscursifs. Or, ce sont justement les études littéraires (l’histoire littéraire des femmes, les études culturelles et la sociocritique, la recherche revuiste, notamment) qui ont permis de comprendre par quels mécanismes et stratégies les textes féministes ont tenté de subvertir les codes littéraires et médiatiques de la représentation admis en régime patriarcal. Cette intervention vise à effectuer une synthèse critique de la manière dont la recherche en études littéraires a contribué à une épistémologie féministe, en plaçant la littérature et les discours médiatiques au cœur de l’action militante des féministes.
Dîner
Recherche, crises et mouvements de fond
Les 100 dernières années ont été traversées par des mouvements de fond – croissance tous azimuts, transformation de l’économie, évolution des communautés linguistique – et par des crises – 2e Guerre mondiale, Révolution tranquille, changements climatiques. Comment la recherche a-t-elle évolué face à ces grands enjeux?
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Communication orale
À la recherche des communautés minoritaires francophonesLinda Cardinal (Université d’Ottawa)
Témoin privilégiée du développement de la recherche sur les communautés minoritaires francophones au Canada depuis 35 ans, celle-ci est liée intimement à la transformation du pays depuis la Deuxième Guerre mondiale. Cette recherche a été marquée par les débats à l’époque de la Révolution tranquille dans les années 1960 et 1970. Dans les années 1980 et 1990, elle est à la remorque des crises constitutionnelles. Depuis les années 2000, cette recherche continue de répondre à des enjeux politiques liés à la possibilité d’un Canada où le français peut s’épanouir partout au pays. La communication servira à montrer comment, dans selon les époques, la recherche sur les communautés minoritaires francophones se constitue en un champ de recherche particulier comprenant ses propres règles, stratégies de production et de diffusion des savoirs.
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Communication orale
Un siècle de domination des organisationsFrançois L'italien (Université Laval)
Réfléchir sociologiquement sur les tendances de fond qui ont marqué les cent dernières années conduit immanquablement à l'analyse de ce "fait social total" que constitue l'essor des grandes organisations capitalistes sur les sociétés. Que ce soit sur le plan de l'économie, de la politique, des modes de vie, de l'identité et aujourd'hui des "communications", ces organisations ont joué et continuent de jouer un rôle primordial dans la définition de ce que nous faisons et de ce que nous pouvons faire. Un rôle qui a été normalisé au point où, malgré la catastrophe écologique en cours, nous renonçons à remettre en question leur position faîtière et continuons d'adhérer à leurs exigences. Ces organisations se comportent ainsi comme des créatures indépendantes des sociétés dont elles sont pourtant la création, ce qui donne l'exacte mesure de l'efficacité de leur domination.
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Communication orale
Pour une recherche à la hauteur de l’urgence climatiqueAlain Webster (UdeS - Université de Sherbrooke)
La recherche scientifique a été centrale dans la gouvernance climatique internationale. Dans ce domaine, la communauté scientifique aura été, est et sera encore plus interpellée à contribuer à la conception de ces voies d’avenir. Ainsi, l’Union européenne consacre 35 % de son budget Horizon Europe dans la recherche et l'innovation pour lutter contre le changement climatique. Et il faut souhaiter que la nouvelle politique de recherche et d’innovation du Québec soit, elle aussi, à la hauteur de cette urgence climatique. Cette mobilisation de la communauté scientifique est bien sûr insuffisante pour relever, seule, cette transformation de nos sociétés. Mais elle est centrale à toutes actions. Face à cette menace existentielle, promouvoir des démarches basées sur la science qui alimenteront le débat démocratique ne peut que maximiser nos chances de définir adéquatement ces étroites voies de transition nous menant, en trois petites décennies, à des sociétés neutres en carbone et résilientes.
Recherche et institutions
Les 100 dernières années ont vu se former les institutions de recherche qui forment aujourd’hui un vaste de réseau de production, de financement et transfert. Quelles réflexions tirer de cette coévolution entre institutions et recherche?
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Communication orale
Histoire et transformation des universités : un équilibre précaire entre recherche et enseignementKarine Hébert (UQAR - Université du Québec à Rimouski)
La recherche est une composante fondamentale des institutions universitaires depuis la révolution humboldtienne au 19e siècle, celle-ci associant désormais le développement des connaissances à leur enseignement et leur transmission. La réalité universitaire québécoise n’échappe pas aux tensions inhérentes à cette recherche d’équilibre.
À travers ce mouvement où la recherche gagne en importance, les acteurs se multiplient, s’influencent et se confrontent : l’État, particulièrement avec le déploiement du réseau de l’Université du Québec et avec la multiplication de programmes subventionnaires parfois contraignants; le privé comme collaborateur ou grand argentier ; les milieux communautaires ; les corps étudiant et professoral en augmentation, etc. Avec pour résultat la situation actuelle où la vitalité universitaire se comptabilise en subventions de recherche et où l’équilibre entre l’enseignement et la recherche se rompt parfois au profit de cette dernière.
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Communication orale
La recherche collégiale : par qui, pour qui et vers quoi?Sylvain Poirier (Fédération des Cégeps)
De la création des cégeps en 1967 à la création des centres collégiaux de transfert de technologie en 1982 et jusqu’à aujourd’hui, le parcours de la recherche collégiale est ponctué d’expérimentations et d’innovations couvrant des horizons multiples. Par des exemples concrets de projets réalisés ou en cours, cette communication présente une recherche collégiale qui soutient l’avancement, l’application et le transfert scientifique. Ouverte et connectée au milieu universitaire autant qu’à la vitalité économique régionale, la recherche collégiale occupe une position centrale dans un continuum de recherche-développement ayant le potentiel de contribuer au développement socio-économique durable du Québec ainsi qu’à la formation de la relève.
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Communication orale
Liberté académique : quelle reconnaissance et protection dans les universités québécoises, tant pour la recherche que l'enseignement?Aline Niyubahwe (UQAT - Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue), Chantal Pouliot (Université Laval)
Jusqu’au début du 19e siècle, l’université avait pour seule mission l’enseignement. Toutefois, depuis la création de l’Université de Berlin en 1810 jusqu’à aujourd’hui, sa mission a évolué vers la transmission et la production de connaissances par des activités de recherche, d’enseignement et de services à la collectivité. À cet égard, l’université doit être un lieu de libre discussion, d’argumentation basée sur des faits, de logique et d’exercice de l’esprit critique. La liberté académique est ainsi une condition sine qua non à l’accomplissement de la mission universitaire. Or, même si la majorité des universités québécoises reconnaissent que le corps professoral doit jouir de cette liberté, force est de constater que la reconnaissance et la protection de la liberté académique varient d’une université à l’autre. Cette communication fait état de la situation dans les universités québécoises et propose des pistes d’actions pour qu’elle puisse être garantie à tous ses bénéficiaires.