Informations générales
Événement : 85e Congrès de l'Acfas
Type : Domaine
Section : Section 300 - Lettres, arts et sciences humaines
Description :Six grandes thématiques se dégagent des 38 communications dans le domaine « Arts, littérature et société ». La première adopte le point de vue féminin ou féministe et porte sur des objets liés aux traditions ou aux révolutions sexuelles à différentes époques; la deuxième met l’accent sur la dimension éthique propre au domaine de l’art, qu’il s’agisse de la représentation animale dans la peinture au 18e siècle ou d’initiatives toutes récentes favorisant l’inclusion d’hommes itinérants par l’entremise de projets liés à la photographie; la troisième porte sur l’histoire culturelle du Québec dans les œuvres littéraires ou les journaux, mais aussi à partir de la question de la transmission culturelle chez les femmes autochtones; la quatrième regroupe de nouvelles approches du cinéma et de séries télévisées; la cinquième s’ouvre à divers questionnements sur l’espace et les différentes manières d’habiter le territoire dans la littérature, l’art ou l’architecture; la dernière étudie des expériences esthétiques variées, qui vont de l’aménagement urbain à la réalité virtuelle en passant par la soustraction additive en art contemporain.
Dates :- Michel Biron
Programme
Habiter le territoire
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Communication orale
Mises en fiction de soi : lecture parallèle de Michel Houellebecq et de J.M. CoetzeeFlavie Saint-Laurent-Sénécal (UdeM - Université de Montréal)
Devenue un des genres phare de la littérature contemporaine et ultra-contemporaine, légitimée et privilégiée par de nombreux écrivains, l’autofiction emprunte des formes variées. Michel Houellebecq, dans La carte et le territoire (2010), et J.M. Coetzee, dans L’été de la vie (titre original : Summertime, 2009), explorent une voie originale de la mise en fiction de soi : l’autofiction spéculaire (Colonna, 2004). Élevés au rang de personnages dans leurs récits, Houellebecq et Coetzee recourent à deux procédés rares. D’abord, la fiction de soi se fait à la troisième personne. Ils sont représentés à travers le regard de personnages fictifs. Puis, ils mettent en scène leur propre mort (Houellebecq en plein cœur de son roman et Coetzee dans un temps précédant le début du récit). Ils adoptent ainsi une écriture autofictionnelle moins rétrospective qu’exploratoire qui ambitionne une « recréation romanesque de soi », pour reprendre les termes de P. Vilain (L'autofiction en théorie, 2009). Leur portrait, loin d’être flatteur, s’éloigne de la représentation convenue. Houellebecq et Coetzee élaborent un jeu par lequel ils cherchent, non sans ironie et par le biais de la fiction, à recréer leur image dans les médias et, par-delà, dans le champ littéraire.
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Communication orale
Stratégies de déstabilisation de l’autorité narrative dans Le ciel de Bay City, de Catherine MavrikakisStéphanie Proulx (UdeM - Université de Montréal)
Le Ciel de Bay City de Catherine Mavrikakis est un roman qui procède à une remise en cause de l’autorité narrative. Comme cette déstabilisation s’opère, entre autres, au moyen de la mise en scène d’une narratrice dont la fiabilité est presque d’emblée contestée, nous nous proposons de nous pencher sur cette figure ainsi que sur les stratégies utilisées pour ébranler sa crédibilité. Nous postulons, ainsi, que la tension qui s’installe entre le discours de la narratrice et celui des autres figures d’influence du roman contribue à la déstabilisation de l’autorité narrative, déjà minée par les accrocs à la vraisemblance qui parsèment le texte et bouleversent le cadre de référence établi. Ceci étant dit, dans le cadre de notre communication, nous analyserons plus particulièrement l’impact, sur la crédibilité de la narratrice, du discours en partie intériorisé de la mère et celui, rapporté, des spécialistes (médecins, psychiatres, pompiers) qui interviennent dans le roman. Pour ce faire, nous nous appuierons sur les travaux de Frances Fortier et Andrée Mercier sur le concept d’autorité narrative. Au terme de notre étude, nous souhaitons être en mesure de montrer que les mécanismes de contestation de l’autorité narrative mis en place exigent du lecteur une participation accrue dans le processus d’interprétation et permettent de jeter un nouvel éclairage sur la notion de pacte romanesque.
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Communication orale
De l’errance au nomadisme : une lecture géopoétique climatique de l’« autobiographie américaine » de Dany LaferrièreJoannie Bélisle (Université du Québec à Montréal)
La littérature migrante occupe aujourd’hui une place de plus en plus importante dans le corpus québécois. Les auteurs haïtiens ont su se démarquer sur la scène littéraire montréalaise, voire mondiale. Dans cette diaspora haïtienne, l’œuvre de Laferrière propose un parcours empreint d’errance et de nomadisme. Or, si le thème de l’exil a maintes fois été abordé, nous proposons plutôt de l’observer, à travers le prisme de l’approche géopoétique, sous le mode de l’habiter. Comment l’Amérique de Nord et ses espaces nordiques – et plus précisément Montréal – sont-ils investis et perçus par cet auteur du « Sud »? Et comment cette posture d’errance, marquée par une dérive sur le continent américain, se résout-elle par un retour au pays natal, rappelant ainsi la circularité du mode de vie nomade (Deleuze et Guattari)?
Ce que nous proposons ici est en quelque sorte une géopoétique « climatique ». Comparant le sud au nord (Glissant), il est possible d’observer comment le climat influence notre façon d’habiter l’espace. En plus d’invoquer la mémoire des lieux (Bachelard), nous utiliserons, pour y parvenir, des notions de parcours et de paysage (Collot). Afin d’observer et d’analyser l’influence que le passage d’Haïti à Montréal exerce sur le protagoniste, nous étudierons quatre des romans de « l’autobiographie américaine » laferrienne soit : L’odeur du café, Chronique de la dérive douce, Cette grenade dans la main du jeune nègre est-elle une arme ou un fruit? et Pays sans chapeau.
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Communication orale
L’isomorphisme des signes des espaces sacrés dans l’imaginaire collectifSeyed Behdad Ostowan (UQAR - Université du Québec à Rimouski)
L’ISOMORPHISME DES SIGNES DES ESPACES SACRÉS DANS L’IMAGINAIRE COLLECTIF
Le monument à Staline à Prague, le monument Atatürk à Izmir et le parlement hongrois à Budapest de formes et d’architectures variées possèdent tous d’éléments importants de sens communs importants.
L'étude proposée analyse les traits communs des espaces sacrés et cherche à comprendre les causes et les modalités de leur présence. Pour ce faire, il sera fait appel aux études de Gaston Bachelard dans La Poétique de l’espace. Si la méthode de Bachelard est bien connue, nous en proposons des critiques et des compléments, apportés par nous-mêmes et d’autres, et les appliquerons à un corpus inédit. De plus, nous la croiserons avec la théorie de l’analyse sémique de François Rastier. Enfin, nous fonderons notre analyse sur l’hypothèse de Régis Debray, qui trouve l’origine du sacré dans l’interdiction.
La domination, la force, l’inaccessibilité, le vide et la profondeur sont parmi les sèmes que possèdent les espaces sacrés pour « dialoguer » avec leurs destinataires. Debray considère également le sacré comme intouchable. C’est ainsi que la poétique de l’interdiction dans les espaces sacrés définit une limite, dans l’imaginaire commun, qui ne doit pas être franchie.
Nous convoquerons les représentations du sacré dans l’architecture et l’« ambiance » de certains espaces et de certains édifices sacrés disséminés dans plusieurs pays et érigés au cours de l’histoire.
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Communication orale
Richesses réelles versus richesses virtuelles : sur la signification des ressources naturelles dans l’art contemporain latino-américainRaphaelle Occhietti (UdeM - Université de Montréal)
Bois, café, maïs, chou, pamplemousse, sucre. Les matières premières sont légion dans les œuvres latino-américaines depuis au moins les années 1970. Généralement associées à la création d’une identité territoriale locale ou d’une identité panaméricaine, il est toutefois possible de renouveler l’interprétation de la présence de ces matières premières dans les œuvres d’art contemporaines de l’Amérique Latine.
En effet, le contexte d’utilisation de la matière première varie d’un artiste à l’autre, comme chez Rodrigo Braga ou Vik Muniz, et dépasse le cadre strict du local ou du latino-américain. Quelle interprétation du fonctionnement de l’économie mondiale les œuvres qui emploient des ressources naturelles fournissent-elles ?
Cette présentation montrera comment la performance Payer la dette externe de l’Argentine avec du maïs, l’or latino-américain (1985), de l’artiste argentine Marta Minjín, peut être considérée comme le point de départ dans l’art latino-américain d’une utilisation plus critique de la matière première dans les œuvres. Ainsi, l’utilisation des ressources naturelles dans les œuvres s’insère dans un commentaire plus large sur la place de ces ressources dans une économie financiarisée.
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Communication orale
La casetta in Canadà : vies privées et vies publiques des Italiennes récemment arrivées à MontréalChiara Vigliano (UdeM - Université de Montréal)
La casetta in Canadà[1]
Cette communication entend examiner les histoires de vie d’une trentaine d’Italiennes immigrées à Montréal depuis les années 1990 et qui sont au cœur de ma recherche doctorale. Les femmes auxquelles je m’intéresse et que j’ai interviewées sont des intellectuelles, enseignantes, chercheuses, artistes et écrivaines, ayant une formation universitaire. Après une courte présentation du projet et une brève discussion des enjeux méthodologiques relatifs à l’utilisation des sources orales en histoire, la communication se concentrera sur les premiers résultats d’analyse concernant les trente entrevues réalisées depuis le début de l’enquête. Dans un premier temps, il s’agira de dessiner un portrait individuel et collectif de ces Italiennes qui ont dernièrement choisi le Québec pour vivre, étudier, travailler et, parfois, fonder une nouvelle famille. Par la suite, on s’attardera à trois points névralgiques caractérisant leur expérience migratoire, à savoir : les défis de la migration et la fierté de la réussite, les parcours labyrinthiques de leurs vies privées ainsi que professionnelles et, en conclusion, le discours identitaire, à savoir les formes hybrides d’identification caractérisant les vies de ces femmes dans une perspective future.
[1] La casetta in Canadà est le titre d’une chanson italienne des années ‘50 concernant la migration des Italien/ne/s au Canada après la Deuxième Guerre mondiale.
Traditions et révolutions sexuelles
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Communication orale
Reconduction de la tradition ou émancipation libératrice? La représentation des pratiques sexuelles véhiculée par les arts visuels durant la « Révolution sexuelle »Verushka Lieutenant-Duval (Université Concordia)
Depuis la « Révolution sexuelle », bien que des études se soient intéressées au portrait de la sexualité « libérée » présenté par la culture visuelle occidentale en pleine effervescence, les efforts des chercheurs et des chercheuses ne ciblèrent pas précisément la représentation des actes sexuels en eux-mêmes; une figuration pourtant construite de toutes pièces et possiblement d’après les mêmes conventions qui régissaient cette « nouvelle » sexualité. Dans cette communication, je propose de synthétiser les résultats de l’étude empirique que j’ai menée dans le cadre de mon doctorat en Sciences humaines (PhD in Humanities, Fine Arts) à l’Université Concordia (Montréal) et qui porte sur la représentation des pratiques sexuelles telles qu’elles apparaissent dans un large échantillonnage de documents visuels diffusés en Occident de la fin des années 1950 à 1979. Plus précisément, je présenterai le portrait thématique du contenu sexuel des 872 images isolées dans 18 livres sur l’art au contenu sexuel et des 367 scènes sexuelles visibles dans une collection de 55 longs métrages de fiction commerciaux. À l’aide d’images et de graphiques, je résumerai mes constats en ce qui concerne la nature à la fois « libérée » et « conservatrice » du portrait révélé et de ses possibles conséquences sur ses spectateurs et spectatrices.
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Communication orale
De fille à jeune femme : ethnocritique du mariage comme rite de passage dans Cendrillon de Perrault et GrimmMarion Gingras-Gagné (Université du Québec à Montréal)
Considérant le conte classique Cendrillon comme une représentation de la «traversée difficile de l’état de petite fille à l’état de jeune fille prête pour le mariage» (Belmont, 2007) et considérant l’importance des motifs évoquant le mariage qui le constituent, il nous est possible d’analyser le conte comme étant la réalisation d’un rite de passage matrimonial permettant à la jeune fille de passer d’une communauté de filles à celle des femmes mariées. En proposant la séparation du conte en trois parties distinctes (l’enfermement domestique, le bal et l’agrégation par le mariage), nous procéderons à l’analyse de trois principaux éléments symboliques qui, chacun relié à une période du rite, permettent de reconstituer la logique globale du rite de passage. Dans un premier lieu, nous analyserons la symbolique de la cendre, élément qui, en plus de participer à la nomination de l’héroïne, signifie l’attachement de Cendrillon au foyer paternel. Le bal, quant à lui, sera vu comme une période de marge dans laquelle s’opèrent transformations et changements de statut, puis la figure du soulier comme un objet essentiel à l’agrégation de la jeune fille ainsi que nécessaire au rite de séduction. À partir d'une étude ethnocritique du conte, ces observations permettront une «reculturation» des éléments clés de l'histoire ainsi qu'une reconfiguration du personnage de Cendrillon dans un rôle actif, symbolique et social.
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Communication orale
Guerrière de la Justice : iconographie de la forme féminine armurée en culture populaire contemporaineFanie Demeule (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Comme le démontre les travaux de Marina Warner, l'association entre femme et Justice est une paire symbolique fortement récurrente à travers l'imaginaire occidental. C’est pourquoi, en retenant cette compréhension de la symbolisation de la forme féminine, nous avançons que la figure guerrière de la culture populaire contemporaine représenterait un signe s’intégrant dans un discours plus vaste sur la légitimité de la violence. Parce que ces guerrières incarnent la courroie de transmission d’un questionnement diégétique sur les rapports de pouvoir et les inégalités sociales, nous proposons une compréhension des œuvres en tant que discours articulant une ontologie de la violence, une remise en question de ses fondements et de ses expressions. Dans le cadre de cette communication, nous observerons le cas de Brienne of Tarth, combattante issue de la franchise Game of Thrones. Notre méthodologie entend que le discours de l’œuvre consiste en une production conjointe d’un texte et d’un intertexte imagé. Dans ses versions littéraire et télévisuelle, nous verrons donc comment l’iconographie du personnage véhicule l’idée d’une guerre juste et vertueuse, principe même gouvernant la quête de Brienne à travers le récit. Nous examinerons précisément en quoi sa représentation du corps féminin armuré de pied en cap, un corps imperméabilisé et solidifié, convoque une allégorie visuelle classique de la Justice contribuant à soutenir le propos du texte.
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Communication orale
Genre et performances parodiques : lecture féministe et queer de la figure du « Fool » dans The Realm of the Elderlings de Robin HobbPascale Laplante-Dubé (UQAM - Université du Québec à Montréal)
The Realm of the Elderlings, de l’auteure Robin Hobb, est une série de fantasy employant des stratégies d’écriture féministes et postmodernes pour déstabiliser l’hétéronormativité. Notamment, cette remise en question de la norme hétérosexuelle se manifeste par l’intermédiaire du personnage du «Fool», lequel génère un brouillement entre le féminin et le masculin et met à mal les savoirs accumulés sur lui en incarnant tant des femmes que des hommes. Ainsi, cette figure sera au centre de notre communication, de même que le décentrement postmoderne du langage et de l’interprétation dont elle serait à l’origine. Nous postulerons que les performances et mascarades du personnage, de même que la subversion des substantifs contribuent à créer son illisibilité identitaire en brouillant les codes et les signes associés aux genres féminin et masculin. Parmi ces dispositifs, nous nous attarderons à un exemple précis, celui des performances parodiques, qui devrait permettre, en déstabilisant le genre, de dévoiler que celui-ci est une construction discursive. Pour ce faire, nous aurons recours à la performance de genre (Judith Butler), au concept d’excentré (Linda Hutcheon) et à l’emploi de la parodie comme stratégie d’écriture (Linda Hutcheon). En analysant dans une perspective queer et postmoderne cette figure plutôt que de tenter de la cloîtrer dans une catégorie prédéfinie, notre étude éclairera donc un aspect inédit du «Fool».
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Communication orale
Quand le jupon dépasse du stéréotype : sur un personnage de The Alexandria QuartetWalid Romani (UQAM - Université du Québec à Montréal)
The Alexandria Quartet de Lawrence Durrell joue sur les stéréotypes par l’intermédiaire des interprétations que font les personnages des actions d’autrui. Les stéréotypes donnent chacun « une impression de clarté, d'univocité, et accélèrent ainsi le rythme de la lecture » (Amossy, Les discours du cliché, 1982). Ils stimulent aussi la réaction passive du lecteur en agissant «[comme] des signaux génériques, ils orientent l’attention du lecteur vers des horizons de sens familiers» (idem.). Or, ces sens sont systématiquement déconstruits dans le Quartet : au fur et à mesure de son développement, la narration propose des perspectives nouvelles sur l’identité des personnages, lesquelles remettent en question l'interprétation initiale, la maintenant dans un état perpétuel d’indétermination. Lorsque certains éléments manquent au répertoire du lecteur, celui-ci est contraint de se lancer à la recherche de nouvelles configurations sémantiques. Le lecteur est appelé à revoir une idée préconçue. Par exemple, la description que fait Darley d’un policier et ancien marin dans le premier volume met de l’avant sa masculinité donnée pour traditionnelle. Suivant la lecture de Darley, le corsaire tout d’un bloc se révèle avoir été un travesti affublé d’un Dolly Varden. Dans le cadre de cette communication, nous analyserons la constitution des stéréotypes dans le Quartet et la façon dont ils interviennent pour produire un effet d’indétermination identitaire sur des personnages tels que Scobie.
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Communication orale
La maison itinérante : identité féminine dans la nouvelle Night Women de l’écrivaine haïtienne Edwidge DanticatDavid Hoyos García (Université McGill)
La chercheuse italienne Giuliana Bruno a défini dans son ouvrage Atlas of Emotion (2002) que le corps féminin peut être représenté à travers du concept de maison itinérante. Ce concept donne des lumières à la possibilité de bâtir un nouveau territoire comme espace de représentation de la mémoire des femmes qui sont sorties de ses pays natals pour plusieurs raisons. Ces enjeux de territoire, corps et mémoire peuvent être trouvés dans la littérature de l’écrivaine haïtienne E. Danticat, qui comprend des chroniques, des nouvelles et des romans sur la femme, la diaspora et l’exil. Dans ses ouvres, c’est possible de trouver des signes qui dénoncent comment les femmes sont considérées comme des entités soumises à l’obéissance, à la passivité, à la répression et à la négation du corps.
Dans ce contexte, est-ce que le territoire de narration de Danticat devient un point de convergence de la mémoire? Si oui, est-ce qu’il y a une redéfinition de la subjectivité féminine?
Pour répondre partiellement à ces questions, un dialogue entre la nouvelle Night Women apparue sur son livre Krik? Krak! (1996) et le concept de maison itinérante de Bruno a été établi. De façon générale, ce dialogue permet une analyse qui confirme que ce récit de Danticat donne de la valeur à la subjectivité féminine à travers un discours qui valorise le corps d’une femme comme territoire de mémoire et de discontinuité; contrairement à la structure symbolique patriarcale imposée par l’ordre social.
L’art et la littérature face à l’éthique
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Communication orale
Textualité de l’idéologie dite « islamiste » dans la littérature francophone : langue, discours et récit de l’« islamisme » dans Le dernier été de la raison, de Tahar DjaoutKarim Zakaria Nini (UdeM - Université de Montréal)
La dissolution de l’Empire Ottoman et l’abolition du Califat, système politique ayant régi et rassemblé les pays à majorité musulmane pendant plus d’un millénaire, ont été vécus dans cette région du monde comme une défaite et une humiliation. Cet événement retentissant fut à l’origine de l’apparition d’une idéologie politique qui est à l’aube du XXIème siècle au centre de l’actualité mondiale. En 1928 en Egypte et dans un contexte colonial est créé le mouvement des Frères Musulmans, une organisation politique dont les objectifs sont entre autres la restauration du Califat et la protection des sociétés musulmanes de « l’occidentalisation » en prônant une application stricte des textes religieux. L’idéologie de cette organisation a parcouru depuis sa création un long chemin pour évoluer et passer d’un phénomène sociopolitique égyptien à un phénomène de société international et multiculturel.
Nous proposons ainsi dans notre communication d’étudier les premières apparitions dans la littérature francophone contemporaine du thème de « l’islamisme ». Nous étudierons pour cela l’inscription de cette idéologie dans le roman posthume de l’écrivain francophone algérien Tahar Djaout Le Dernier été de la raison. Nous tâcherons de montrer comment s’articule dans le texte littéraire francophone cette idéologie politique en nous aidant des recherches de théoriciens comme Marc Angenot ou encore Hannah Arendt sur les grandes idéologies politiques du XXème siècle.
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Communication orale
La mystérieuse provenance du retable oublié de Jan de Beer à MontréalMarie-Pier Auger (UdeM - Université de Montréal)
Suite au vol de 1972, le Musée des Beaux-Arts de Montréal (MBAM) achète à Zurich en 1975 un triptyque religieux de Jan de Beer. L’œuvre revêt un caractère important puisqu’elle fut de passage en 1937 à une vente aux enchères par Théodor Fischer, bras droit d’Adolf Hitler et Hermann Goering et apparait sur la liste d’œuvres du MBAM présentant une provenance nébuleuse entre 1933 et 1945. Notre recherche porte sur ce tableau encore jamais étudié, ni même par le spécialiste du peintre (Ewing : 1978, 2016). De plus, la provenance de cette œuvre demeura inexplorée jusqu’à notre présente étude. Sous un angle méthodologique, nous avons travaillé en archives ainsi qu’en collaboration avec Orsolya Bubryák Ph.D, unique spécialiste ayant accès aux archives des Erdődy, anciens possesseurs (Bubryák : 2013). À l’ACFAS, nous présentons les résultats de l’historique de provenance et nous abordons la légitimité de la vente de 1937. Nos recherches ont démontré que le retable fut vendu par une famille aristocratique de Hongrie, résidant au château Galgóz. Cependant, aucune inscription de l’œuvre apparait dans les inventaires restants. Toutefois, la visite d’une collection privée hongroise a permis de retrouver l’impensable : le contrat de vente de Vilmos Erdődy et Fischer de 1934. Nous nous questionnons sur la possibilité d’une vente forcée. Dans ce cas, l’une des peintures les mieux conservées de la collection ancienne du MBAM pourrait faire face à une demande de restitution.
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Communication orale
Peindre à bride abattue : George Stubbs (1724-1806), le « peintre des chevaux »Valérie Bienvenue (UdeM - Université de Montréal)
George Stubbs est considéré d’emblée par plusieurs membres de la communauté historienne de l’art comme ayant été un peintre équestre important, sinon, le plus important d’Europe. Encore aujourd’hui, bien qu’elles se conservent difficilement, ses multiples toiles représentant le cheval enchantent et appellent un regard admiratif. Dans cette étude interdisciplinaire le corpus de Stubbs se voit passé au crible des animal studies pour révéler une problématique importante : sur quels critères l’histoire de l’art s’est-elle basée pour « consacrer » jusqu’à aujourd’hui les représentations équines de Stubbs? En effet, l’examen attentif de son art démontre de sérieuses économies dans sa façon de travailler qui problématisent son lien avec le cheval-sujet. Poussé à créer rapidement par une élite gourmande qui voit en ses portraits de champions de course un moyen de faire briller la flamme d’une fierté nationaliste, l’éthique de l’artiste envers l’animal s’en voit troublée. Par cette étude, certains mythes qui circulent actuellement au sein de l’histoire de l’art concernant l’exactitude et le réalisme de Stubbs en tant que peintre équestre seront donc remis en question. Ainsi, seront réfléchis les préceptes qui organisent et justifient les jugements de valeur de la tradition historienne occidentale dans son appréhension de ce que constitue des représentations équines de qualité dans l’art animalier en général et, plus spécifiquement, chez Stubbs.
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Communication orale
Les techniques du Théâtre de l’opprimé : de Boal à aujourd'huiAnne Larcher (Université Laval)
Nous proposons de dresser un état de l'évolution du Théâtre de l’Opprimé (Boal, 1974) en dégageant les principes théâtraux différant de ses fondamentaux et le contexte social de chaque adaptation. Le premier écart majeur est de ne pas limiter le spect-acteur au seul remplacement de l'Opprimé, le faisant essayer le rôle d'agent de transformation sociale dans sa communauté. Allant plus loin, certaines troupes ne traitent plus du rapport d'«oppression» prévalant au départ chez Boal, mais d'une problématique systémique communautaire. Au Canada, Diamond a ainsi développé la méthode Theatre for Living (2007) en travaillant avec les autochtones. De plus, dans une approche adaptée à l'univers technologique actuel, plusieurs professionnels ont expérimenté le transfert de ces techniques au virtuel. Ainsi, Caravane-théâtre (Besnard, 2014) et Theatre for Living (Diamond, 2007) prennent des consignes de spectateurs distants pour les porter à la scène qu'ils visionnent via le WEB. Cavallo (2008) a conçu le système éducatif Virtual Forum Theater dans lequel les élèves créent une pièce qui prend la forme d'un film d'animation sur laquelle ils interviennent, altérant son cours. En Europe, le projet ISOLAT (2015) utilise un dispositif scénique combinant sur un écran les images, du spect-acteur et des acteurs, situés dans des salles de deux pays différents. Ces initiatives amorcent une nouvelle phase pour le Théâtre de l'Opprimé; nous en anticiperons également les développements potentiels.
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Communication orale
Stratégies affectives du théâtre intimiste antillais : Les immortels de Pascale AninTanya Déry-Obin (Vanier College)
Dans son Discours antillais, Édouard Glissant élabore le concept de non-histoire : à la Caraïbe française, le passé non intégré à la pensée collective hante le présent en tant que réminiscence fantomatique. La littérature antillaise tente de figurer cette absence de la mémoire collective. Au sein d’une tendance contemporaine de cette dramaturgie, l’espace intimiste instauré au cœur du rapport scène-salle apparaît comme une pierre angulaire du travail de mémoire. Chez l’auteure dramatique martiniquaise Pascale Anin, la mise en drame du passé fait revivre le traumatisme. Sa pièce Les Immortels (2009) rejoue un épisode traumatique individuel dont le poids symbolique résonne avec le passé collectif. La présence fantomatique d’un enfant noyé permet de mettre en scène la hantise d’un passé traumatisé tout en redéfinissant le schéma d’une communication théâtrale triangulaire où le spectateur est impliqué au sein du travail de réparation.
Appuyée par les théories de l’affect et du traumatisme, cette communication proposera une analyse dramaturgique de la pièce Les Immortels afin de mettre en lumière un dispositif où lequel les personnages n’ont pas directement accès à leur mémoire traumatisée, si ce n’est qu’à l’aide du travail émotif d’un autre, spectateur. L’analyse permettra de comprendre de quelles manières l’expérience affective du spectateur permet que le théâtre soit, selon les mots de Glissant, « l'acte par lequel la conscience collective se voit » (Le Discours antillais 85).
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Communication orale
Identification d’approches artistiques et pédagogiques favorisant l’inclusion sociale d’hommes en situation d’itinérance (déambulation urbaine, photographie et dialogue)Andrée Sophie Cabot (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Aider les personnes en situation d'itinérance à se réinsérer socialement nécessite plus que trouver un logement et une source de revenus. Les préjugés à leur égard et leur isolement sont des embuches. Se réinsérer nécessite de réapprendre à créer des liens. Dans ce contexte, est-ce qu'un projet d'art peut favoriser leur inclusion sociale? Le refuge pour hommes sans-abri, Mission Old Brewery, et des collaborateurs (CHUM-UQAM) ont proposé la réalisation d'ateliers artistiques à l'intérieur de leurs murs dans le but d'offrir une expérience positive aux participants. Trois séries d'ateliers combinant des approches artistiques et pédagogiques, dont la photographie, les déambulations urbaines, le dialogue et le contact avec des oeuvres d'art, furent réalisées. Une recherche-action qualitative a permis d'identifier lesquelles des approches adoptées par l'artiste favorisaient un mieux-être, une autonomie et la participation sociale des hommes. Nous avons observé que les créations individuelles (photographies et dessins), lorsqu'elles sont combinées à des expériences en groupe (déambulations urbaines et échanges sur l'art), favorisent la réalisation d'une création collective (vidéos, installation photographique). Ce processus devient propice pour tisser de nouveaux liens. La présentation finale du projet devant un public devient un moment significatif, car ces personnes apparaissent dans leur individualité, c'est-à-dire au-delà de leur condition de souffrance.
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Communication orale
« Ils vécurent heureux… » : déconstruction du mariage comme rite social dans les contes contemporains pour la jeunesseMarion Gingras-Gagné (Université du Québec à Montréal)
Si les motifs symboliques du conte se transforment au fil des époques pour «s’adapter» à l’imaginaire collectif contemporain (Belmont, 2007), il apparaît que les différentes métamorphoses du conte, qui révèlent les mutations importantes de notre époque, ne remettent pas en question la fin, c’est-à-dire le mariage, comme processus d’agrégation. Ce motif matrimonial particulièrement récurrent, et l’attachement qu’on y perçoit dans les albums illustrés pour la jeunesse, encourage, selon nous, certains types de stéréotypes, ainsi que des pratiques «attendues» de la jeune fille ou du jeune garçon d’aujourd’hui. Lu dès le plus jeune âge par les enfants et leurs parents, le conte construit très tôt un certain type d’imaginaire et réitère, par cela, un certain modèle du mariage hétéronormatif comme norme sociale. Ainsi, nous verrons que si les réécritures contemporaines ne peuvent plus répondre à l’appellation de contes dans la mesure où elles ne constituent plus un vecteur d’apprentissage culturel et social au même titre que les contes classiques et populaires (Amalvi, 2008), la prégnance du mariage dans les albums pour la jeunesse questionne cette affirmation en proposant, au contraire, que le conte serait plutôt, toujours et encore, au cœur de pratiques rituelles sociales et surtout, qu’il en marquerait son importance.
Nouvelles approches du cinéma
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Communication orale
Cadrage antidramatique dans le cinéma d’Ingmar Bergman : une nouvelle pensée en imageLeila Montazeri (L'Université Azad Islamique de Téhéran)
Par l’étude du cadrage comme élément le plus subtil de l’esthétique filmique, nous analyserons dans cet article les matériaux du sentiment formel; ce qui décrit à travers l’étude de l’espace, le style anti-dramatique de Bergman.
Comment peut-on relier la notion de pensée au cadrage ?
Qu’en est-il du rapport entre le cadrage et le trame narrative ?
Pourquoi le cinéaste envahit-il le cadrage par le silence, la distance et l’absence ?
Quelle est la part du cadrage dans le renouvellement des modes d’expression que propose son image?
Quel est le but final du conflit entre son style formel et sa pensée existentielle-chrétienne?
« Le sujet de Persona tourne précisément autour des efforts que fait un cinéaste pour saisir, clarifier et communiquer les images qui déclenchent l’écriture d'un scénario »[1]. Bergman a donc des images à montrer plutôt qu’un message à délivrer. Comme José Moure confronte le cadrage à la dimension du vide, de l’hétérogène et du non-raccord, Bergman montrent une transformation de l’horreur de l’absence vers une autre façon d’appréhender l’invisible, voire l’infilmable.
L’approche formaliste nous amène à analyser le cadrage. Les corps bloqués, les visages décadrés, les figures bouleversées ou à contre-jour, les regards déconnectés, les trois quarts arrière, tous conduisent les bords du cadre à susciter une attente, une quête.
[1]. Steene, Birgitta et Michaels, Lloyd (2000), Ingmar Bergman’s Persona, Cambridge, Cambridge University Press, p. 29-30.
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Communication orale
Refaire le film : pratiques et enjeux du remakeMaxime Labrecque (UdeM - Université de Montréal)
La pratique courante du remake s'avère fascinante. Dans sa plus simple conception, il s’agit d’une adaptation cinématographique qui s’opère au sein du même médium. Diverses raisons motivent cette pratique, que ce soit pour moderniser une histoire (ex: Psycho de Gus Van Sant), la transposer dans un contexte socioculturel différent (ex : Death at a Funeral de Neil LaBute), l’adapter pour un public différent (ex: Mixed Nuts de Nora Ephron d’après le film Le Père Noël est une ordure) ou pour revisiter une œuvre culte (ex : King Kong de Peter Jackson). Parfois, comme ce fut le cas avec Hitchcock ou Haneke, un réalisateur décide de refaire un de ses films, mais différemment. Comme le souligne l'auteure Raphaëlle Moine, il y a une différence à faire entre remake et nouvelle adaptation, surtout en ce qui concerne l’achat des droits. On n’a qu’à penser au débat autour du film Diabolique (1996) de Chechik. Celui-ci était-il un remake du film Les diaboliques (1955) de Clouzot ou une nouvelle adaptation du roman de Boileau-Narcejac ? En opérant une analyse du processus d’adaptation et en soulignant la spécificité du remake, nous tâcherons de lever le voile sur cette pratique à la fois populaire et problématique.
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Communication orale
L’image-mouvement au cinéma : de la chronophotographie à la performance captureMeriam Ouertani (UQAM - Université du Québec à Montréal)
À ses origines, l’image-mouvement (Deleuze, 1983) au cinéma serait définie comme étant une succession mécanique d’instantanés caractérisée essentiellement par l’équidistance. La succession mécanique du mouvement par un codage serait intrinsèque à l'agencement dans l’image-mouvement. La problématique de l’image-mouvement réside dans l’idée selon laquelle la perception du mouvement à l'aide d'une succession de poses et la perception du mouvement par l’intermédiaire de dispositifs, réduisent l’interprétation du mouvement à un temps uniforme. À quel point cela va contraindre à saisir l’essentiel du mouvement, à savoir les micromouvements qui entrent dans ce régime de l’image-mouvement intensif et qui échappent à la mesurabilité de même qu'à l’agencement. Dans ce cas précis, la question serait de savoir non pas comment un mouvement succède à un autre mouvement, mais plutôt comment un mouvement donné se continue dans le mouvement suivant? Nos objectifs seront de comprendre le processus de l’analyse du mouvement en commençant par les travaux chronophotographiques à la capture du mouvement numérique. Nous entamerons une catégorisation de l’image-mouvement par le biais de la capture du mouvement numérique transférée sur les personnages en images de synthèse du film Avatar. Si plusieurs études portent sur l’analyse du mouvement au cinéma, aucune n'a encore considéré une classification qui éclaire le rapport d’individuation avec certaines catégories de l’image-mouvement.
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Communication orale
La dématérialisation du personnage dans Videodrome et Cosmopolis de David CronenbergJean-François Normand (Université Laval)
Suivant la réalisation du film eXistenZ, les années 2000 marquent un tournant dans le style de David Cronenberg. Cette production exclut toute appartenance au genre de l’horreur et au fantastique, comme en témoigne l’absence manifeste de mutations corporelles et de la figure du scientifique victime de sa propre création. Le genre « body-horror » est mis à mal dans une production désormais axée sur le « drame réaliste ». Bien que son cinéma ait subi des mutations sous différents aspects du genre, il n’en demeure pas moins que la question liée à la subjectivité masculine demeure une constante dans la poétique et la mise en scène du cinéaste. Nous proposons dans cette communication une étude comparative entre deux personnages issus de la cinématographie de Cronenberg, soit Eric Packer du film Cosmopolis, réalisé en 2012, et Max Renn dans Videodrome, réalisé en 1983. À partir de ces deux œuvres, il sera possible de mettre en rapport la manière dont l’identité se construit dans un régime technologique, qu’elle soit explicite dans Videodrome (la nouvelle chair qui s’unit à l’ancienne) ou implicite dans Cosmopolis (par désappropriation de tous ses biens). La question de la dématérialisation du sujet dans son environnement fait partie de la question identitaire chez le cinéaste canadien. Cette comparaison entre ces deux personnages permettra d’établir la continuité dans la construction du personnage cronenbergien, un aspect souvent négligé dans les études critiques sur ses œuvres.
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Communication orale
Tolkien et les Y : une lecture existentialiste du Seigneur des anneaux à l’usage des milléniauxAntonin Marquis (UdeS - Université de Sherbrooke)
D’abord, je montrerai comment la mythologie créée par Tolkien dans son roman Le seigneur des anneaux, mais aussi dans le Silmarilion et les Contes et légendes inachevés, ne révèle toute sa profondeur que si on la considère d’un angle existentialiste. Pour ce faire, je comparerai certains passages de Tolkien concernant la création des Humains, race unique dans son univers, avec des textes de Sartre et de Camus. La comparaison de ces auteurs qui écrivaient à la même époque montrera l’étrange parenté qui les unit.
Ensuite, je brosserai un rapide portrait de la génération Y, très marquée par la sortie en salle de la trilogie de Peter Jackson au début des années 2000. Caractérisée entre autres par une anxiété généralisée et une puissante nostalgie du monde sécuritaire de l’enfance, cette génération éprouve beaucoup de difficulté à choisir comment mener sa vie, et selon quelles valeurs orienter ses choix. On verra alors que le roman de Tolkien propose une solution à l’angoisse qui paralyse les membres de ma génération, à la fois la plus libre et la plus déprimée de l’histoire.
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Communication orale
Citoyens imaginés : les séries télévisées du Bicentenaire de l’indépendance de l’Amérique latine comme fictions fondatrices et lieux de mémoireMary Oviedo (Université McGill)
Cette présentation porte sur la représentation symbolique des problématiques sociaux et politiques contemporains dans trois fictions historiques télévisées: La Pola (Colombie), Martín Rivas (Chili) et Lo que el tiempo nos dejó (Argentine), toutes diffusées en 2010 lors de la célébration du Bicentenaire de l'Indépendance dans ces pays. Le but est de présenter quelques résultats de ma thèse de doctorat en explorant comment ces fictions télévisées servent de médiateurs aux préoccupations et aux valeurs culturelles du citoyen contemporain, comment son contexte de production influence la fiction historique et les conséquences idéologiques et politiques qui en découlent. Je propose une interprétation et une interpellation des citoyens imaginés de chaque pays, dont la narration provient d’une intertextualité et intermédialité, dans certains cas, entre l’histoire «officielle», la littérature, le cinéma, les médias et les conflits sociaux encore non résolus dans le présent. Dans le cadre fictionnel des téléséries, le passé de chaque société est représenté pour justifier un présent collectif. À travers les propositions sur le mélodrame de Peter Brooks, Jesús Martín-Barbero et Carlos Monsiváis ainsi que le concept des lieux de mémoire de Pierre Nora, j’analyserai comment cette représentations «ne constitue pas une forme fictionnelle ou médiocre mais une tentative pour répondre aux changements sociaux en cours».
Histoire culturelle du Québec
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Communication orale
Les limites de la liberté de presse au Québec dans le cadre de l’affaire Blanche Garneau, 1920-1922Jordane Labarussias (Université du Québec à Montréal)
Le meurtre irrésolu de la jeune Blanche Garneau, survenu à Québec en 1920, donne lieu à une affaire judiciaire et politique pleine de rebondissements, du genre dont raffolent tant les journaux de l’époque. L’un de ceux-ci va plus loin que les autres dans ses critiques de l’administration de la justice, valant à son éditeur d’être poursuivi deux fois plutôt qu’une : par la justice pénale et, exceptionnellement, par l’Assemblée législative pour « violation des privilèges de la Chambre ».
Cette affaire est alors le lieu d’un débat, bref, mais important, sur la liberté de la presse au Québec. Ce sujet étant peu exploré dans l’historiographie de la presse, notre travail propose de mieux comprendre les limites rencontrées par les journaux dans leur couverture médiatique, particulièrement en ce qui a trait aux critiques envers l’État. À cette fin, les sources d’archives judiciaires et les périodiques nous offrent une fenêtre sur les pratiques journalistiques, surtout celles, plus provocatrices, des journaux à sensation, ainsi que sur les réactions des autorités.
Nos recherches permettent de mieux cerner ces limites à travers l’étude de cas de l’affaire Blanche Garneau, par une analyse de ses dimensions médiatiques et politiques. Nous concluons que cet épisode fut l’occasion d’une renégociation des limites de la liberté de la presse au Québec, à laquelle prirent part les journaux, la justice, la législature et la société civile.
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Communication orale
Et si François Marois n’était pas le docteur L’Indienne? Enquête d’après les sources littéraires et documentairesGrégory Madore (Université Laval)
Le 19 août 1829, le corps du colporteur François-Xavier Guillemet est retrouvé tout près de Saint-Jean-Port-Joli. Un dénommé François Marois – connu sous plusieurs pseudonymes, est rapidement arrêté. Marois avait déjà été condamné au pilori et emprisonné quelques années auparavant pour avoir battu un homme de Lévis. Accusé du meurtre, il est reconnu coupable et exécuté devant la prison de Québec le 29 septembre suivant.
D’abord, nous présenterons le crime de François Marois et l’importante couverture médiatique qu’il a suscité. Nous verrons comment cette première manifestation littéraire du personnage du Docteur l’Indienne a influencé sa représentation dans de nombreux ouvrages.
Nous aborderons, ensuite, le thème de la transfictionnalité suivant la définition qu’en donne Richard Saint-Gelais dans son texte « Contours de la transfictionnalité » (La fiction : suites et variations, 2007, p. 5-25.), c’est-à-dire un personnage qui est capable de : « […] transcender le texte qui l’a instauré ». Richard Saint-Gelais souligne que la transfictionnalité propose : « […] des entités qui ne sont ni tout à fait autre, ni tout à fait mêmes ». C'est-à-dire qu’elles sont ambivalentes, voire évanescentes. Nous tenterons de démontrer que le Docteur l’Indienne est une figure définitivement mouvante. Si bien, qu’il est possible de s'interroger sur la véracité de la filiation entre François Marois et le Docteur l’Indienne telle qu’assumée par les contributeurs à l’état de la recherche de nos jours.
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Communication orale
« Les veillées du bon vieux temps » : le folklore comme porteur de l’identité canadienne-française au début du 20e siècleLaura Risk (Université McGill)
De 1919 à 1921, la Société de Folklore d’Amérique, Section du Québec, organisa des « Veillées du bon vieux temps » à Montréal. It s’agit de la mise en scène d’une veillée rurale idéalisée. Les buts : susciter l’intérêt du public à l’égard du folklore et inciter les compositeurs à créer une nouvelle musique « nationale » (Barbeau et Massicotte, 1920 ; Willis et Kallmann, 2007).
Cette communication démontre les liens entre ces « Veillées » et des courants littéraires et linguistiques par les trois propositions suivantes:
1. Au début du XXe siècle, le répertoire du folklore se définirent comme suit: des chansons, des légendes et des contes, de la musique instrumentale (surtout au violon), et de la danse (sets carrés et/ou gigue). Le folklore lui-même se définirent comme porteur des survivances culturelles de la Nouvelle France.
2. Par contre, au milieu du XIXe siècle, seulement les formes d’expression textuelle (chansons, légendes) se servaient de synecdoques pour l’identité canadienne-française. La musique instrumentale et la danse s’y ajoutaient au tournant du XXe siècle, comme en témoignent plusieurs essais, romans et poèmes (Faucher de Saint-Maurice, 1879 ; Legendre, 1887).
3. La présentation du répertoire folklorique aux « Veillées » trouve son parallèle dans la présentation littéraire des expressions régionales au début du XXe siècle, y inclus dans les publications de la Société du parler français au Canada et dans la littérature régionaliste (Mercier, 2002 ; Hayward, 2006).
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Communication orale
La transmission de la culture chez des femmes autochtones au QuébecLucie Ève-Marie Bourque (Université du Québec à Trois-Rivières)
Avec quelles voix symboliques des femmes autochtones au Québec cherchent-elles à revitaliser la transmission de leur culture ? Deux cadres de référence, soit le blanc (culture euro-occidentale) et le rouge (autochtone), animés par le concept de contexte enchâssé (C. Goodwin), entament un «dialogue». Les pressions de ruptures convoyées par le cadre blanc sont nommées : perte du lien à la nature, changement du rapport au temps et à l’espace, perte de la tradition (G. Balandier). Cette recherche examine le sens d’œuvres de Joséphine Bacon, Natasha Kanapé Fontaine (poésie), Nadia Myre, Ellen Gabriel, Eruoma Awashish (arts multidisciplinaires) et Alanis Obomsawin (documentaire). Ces femmes autochtones nous convient, par la médiation de leurs œuvres, à un véritable dialogue, empreint des valeurs de paix et de respect. Le rapport au monde traditionnel (cosmogonie) réverbéré révèle un rapport sacré à la terre. Ainsi, la force de leurs traditions participerait à relever le sort de la transmission, le fondement même de toute culture.
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Communication orale
Une traduction fantôme de La vallée Houdou de Gabrielle RoyJane Everett (Université McGill)
La première version de la nouvelle de Gabrielle Roy intitulée «La vallée Houdou» est lue à la radio française de Radio-Canada le 8 août 1944. Elle sera publiée dans la revue Amérique française en février 1945, quatre mois avant la parution de Bonheur d’occasion. Puis elle «disparaîtra» jusqu’à son inclusion (sous une forme passablement remaniée) dans le recueil Un jardin au bout du monde (1975). Garden in the Wind, la traduction anglaise d’Alan Brown, sera publiée en 1977. Dans cette version, la nouvelle s’intitule «Hoodoo Valley». Parmi les documents constituant le dossier génétique du recueil se trouve un manuscrit dactylographié de 12 pages rédigé en anglais et portant le titre de «Hoodoo Hollow». Annoté de la main de Roy et de celle d’une tierce personne, ce texte semble se baser sur les versions françaises de 1944-1945, mais n’en est pas une traduction exacte, car il contient quelques passages additionnels, qui ne se retrouvent pourtant pas dans les versions finales française et anglaise. Rien n’indique qui a écrit le texte, ni de quand il date ni à quel usage il était destiné. Dans cette communication je tenterai de jeter un peu de lumière sur ce «mystère». À cette fin, je confronterai le manuscrit aux différents états des deux versions. Il s’agira de dégager les ressemblances et les différences matérielles, stylistiques et thématiques permettant de mieux situer le texte par rapport à l’évolution génétique de l’original français et à celle de la traduction anglaise.
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Communication orale
Dialogisme et conflictualité de la conscience dans Kamouraska d’Anne HébertNao Sasaki (Université Meiji)
L’univers du roman Kamouraska d’Anne Hébert, publié au Seuil en 1970, est complexe, conflictuel et labyrinthique. Une femme, liée par les conventions sociales, tente de trouver son bonheur, coûte que coûte. Pour y accéder, elle complote avec son amant le meurtre de son premier mari. Bien que les événements ne se déroulent pas comme prévus, l’héroïne emploie fréquemment des expressions de certitude, telles que « je suis sûre que », qui marquent son manque de lucidité sur le réel. Sa conscience est ainsi lourdement ébranlée et ses certitudes n’ont plus aucun sens. Si, dans la perspective sociocritique, c’est un roman moderne dans lequel un individu remet en question le rôle social qui lui est imposé, il y est également question de la pluralité des consciences, dans la mesure où les personnages ne partagent pas la même vision du monde. Il s’agira de caractériser l’expression « je suis sûre que » par le dialogisme et la conflictualité de la conscience et de l’affirmation de soi, en fonction des théories de Bakhtine (Problèmes de la poétique de Dostoïevski, 1970). Notre communication a donc pour objectif de montrer comment, à travers cette énonciation dialogique, Hébert crée « l’interférence de deux voix à l’intérieur d’une seule » (ibid.) pour faire ressortir les crises de conscience du personnage d’Elisabeth. Kamouraska peut ainsi se lire comme un récit de la multiplication des consciences.
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Communication orale
Du « pays » de Vigneault à celui d’Ivy : déplacement intertextuel et jeux langagiers pour peindre un Québec désenchantéSarah Abd El-Salam (UdeM - Université de Montréal)
Composé en 1964, « Mon pays » de Gilles Vigneault est considéré comme l’un des hymnes emblématiques du Québec. Métaphorisant par l’hiver la beauté et parfois l’arduité de la nation, le texte de Vigneault se présente comme un panégyrique d’un Québec encore en devenir, mais mu par un amour et un nationalisme profonds. Plus de cinquante ans plus tard, l’influence de ce texte ne tarit toujours pas, ce qu’atteste la sortie de S’armer de patience d’Ivy, figure centrale du slam montréalais. En effet, la piste liminaire de cet album, s’intitulant à son tour « Mon pays », ne reprend pas uniquement le titre de Vigneault, mais agit, à la manière d’un palimpseste, comme sa réécriture. En empruntant des formules phares de son prédécesseur, Ivy détourne le traitement apologique du pays vigneaultien pour le teinter de nuances beaucoup plus dysphoriques. Il s’agira dans cette communication d’analyser, selon une approche poétique et stylistique, les procédés qu’Ivy déploie dans son texte pour brosser le tableau d’un Québec désenchanté, critique dont l’efficacité réside dans le déplacement cynique de son intertexte. Au-delà de cette visée plus ponctuelle, mon propos cherchera, par ricochet, à inscrire le discours d’Ivy dans un mouvement plus englobant, celui de la poésie orale contemporaine contestataire. Enfin, malgré son importance incontestable pour le slam québécois, la production d’Ivy a encore peu rejoint la critique savante, d’où, en partie, l’originalité de cette contribution.
Expériences esthétiques
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Communication orale
« Un concert comme il les aime » : la présence audible et inaudible d’Éliane Radigue au festival Sigma de BordeauxEmanuelle Majeau-Bettez (Université McGill)
Cet exposé nous ramène en 1967, au Festival Sigma de Bordeaux, où la compositrice Éliane Radigue assiste Pierre Henry pour un concert où les auditeurs sont invités à se coucher pour écouter la Messe de Liverpool. De son poste d’assistante et sans que rien n’y paraisse, Radigue, profitant de la précarité offerte par le contexte d’une performance, décide de changer complètement l’œuvre de Henry : ce qui était censé être une pièce bien définie par des sections de silences devient tout à coup une pièce en continu, sans coupure. Ce geste, qui « brise les silences » et avec lequel Radigue devient « audible », est rendu « inaudible » par l’absence totale de commentaire de la part de Henry : pour les années à venir, le public qui assiste à l’événement et la presse qui en fait la couverture ne peuvent se douter que Henry ait perdu le contrôle de son œuvre, et que cette musique surprenante ait quelque chose à voir avec la petite assistante. M’appuyant sur mes propres rencontres avec la compositrice, je m’intéresse à la double présence – audible/inaudible, visible/cachée – de Radigue au sein du festival Stigma, et à ce que cette dualité indique sur le pouls d’un festival qui se veut provocateur et d’avant garde. Portant ainsi une attention particulière au contexte historique et social du festival, je propose de comprendre l’intervention de Radigue comme étant motivée par un désir esthétique profond plutôt que par une envie de contester la position secondaire à laquelle est reléguée.
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Communication orale
La soustraction additive en art contemporainAlban Loosli (UQAM - Université du Québec à Montréal)
La soustraction additive en art contemporain
En 1953, Robert Rauschenberg achète un dessin à l’artiste Willem de Kooning, l’efface puis l’expose. Il lui donnera alors le titre évocateur Erased De Kooning Drawing. Aujourd’hui encore, de nombreuses pratiques artistiques se situent dans la lignée de cette action. Paradoxalement, l’effacement ajoute quelque chose à l’image et atteindre véritablement l’ « absence » semble impossible. Quelle serait donc la nature de ce « reste » et comment en produire l’analyse sémiotique ?
Tout d’abord, nous étudierons le travail de trois artistes : Erased De Kooning Drawing (1953) de Robert Rauschenberg, A Void (2009) de Joseph Havel et Au-delà des signes (2015) de Mathieu Grenier. Ces trois artistes ont un mode opératoire commun : s’approprier un objet symbolique et en modifier la nature par une soustraction additive. Par la suite, on analysera la médiation culturelle de ces œuvres et son enjeu. On verra comment leur déplacement sémantique est généré et l’importance de leur aspect discursif. Pour ce faire, on utilisera la trichotomie du signe de C.S. Peirce (1978) et nous approfondirons la catégorie de l’interprétant à l’aide du modèle d’Erving Goffman (1991).
La soustraction additive change profondément la nature de l’œuvre d’art. Premièrement, elle détruit le fantasme de la création ex nihilo, et deuxièmement, elle nous force à analyser l’interdépendance des facteurs sémiotiques et non plus simplement des œuvres isolées.
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Communication orale
La genèse des Soirées de Barcelone : réconcilier deux récits contradictoiresJudy-Ann Desrosiers (UdeM - Université de Montréal)
Dans un article de 1981, Calum MacDonald relate la genèse du ballet Soirées de Barcelone (1936-1939) du compositeur catalan Roberto Gerhard (1896-1970). Il raconte que l’œuvre est issue d’un séjour dans la ville de Berga dans les Pyrénées lors de la nuit de la St-Jean. Or, cette version est contredite par Joaquin Homs, élève de Gerhard, dans un ouvrage de 1991 où il soutient plutôt que ce sont les festivités de la Patum de Berga, une autre fête catalane, qui ont inspirées l’œuvre. MacDonald et Homs omettent tous deux de citer la source de leur récit, mais c’est celle de MacDonald qui est reprise dans la littérature musicologique récente.
Nous proposons de faire la lumière sur les deux versions de cette anecdote brumeuse qui s’est répandue dans la littérature sans faire l’objet d’un examen attentif. Nous montrerons que Soirées de Barcelone témoigne des influences des deux fêtes citées, mais de manière distincte. En effet, les festivités de la St-Jean sont présentes dans le scénario du ballet de Ventura Gassol, par les références aux rituels de fécondité entourant la célébration du solstice d’été. En revanche, l’univers sonore du ballet renvoie à la Patum de Berga, par l’emploi de mélodies folkloriques spécifiques à cette fête telle que La danse de l’aigle. Gerhard n’aurait pas pu représenter de manière aussi précise une musique de tradition orale sans l’avoir d’abord entendue, ce qui porte à croire qu’en ce qui concerne la musique, c’est la version de Homs qui est véridique.
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Communication orale
Pygmalion et le théâtre québécois : pour une perspective postcolonialeAileen Ruane (Université Laval)
Depuis les années 70, l’approche postcoloniale met en lumière les structures coloniales et leurs effets sur la littérature, mais l’usage de cette approche théorique reste controversé quand elle s’applique aux communautés non-traditionnelles, aux Irlandais colonisés par l’Empire britannique, par exemple. Néanmoins, de nombreux théoriciens s’appuient sur cette approche pour examiner le rapport entre l’Irlande et l’Angleterre, surtout en ce qui concerne l’identité littéraire de la première. Grâce leurs histoires parallèles et à une présence démographique au Québec depuis 200 ans, l’Irlande et les Irlandais présentent une opportunité par laquelle nous pourrons examiner le fonctionnement de l’approche postcoloniale. Le théâtre en tant qu’évènement social et public entretient un rapport avec l’identité et la notion de nationhood. En guise d’introduction, ce projet abordera la traduction du théâtre irlandais au Québec à travers l’approche théorique postcoloniale dans ses deux voies, post-structurale et marxiste. Dans la mesure où cela ouvrira un vaste champ d’étude, nous nous concentrerons sur la pièce Pygmalion de Bernard Shaw, traduite par Éloi de Grandmont en 1968, afin de démontrer l’efficacité de cette approche ainsi que l’effet subversif de la réappropriation du français et de l’anglais. L’usage du joual et du français standard dans cette pièce favorise la contestation des normes langagières et souligne la double hybridité de l’identité québécoise.
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Communication orale
Le paysage de la réforme : l’expérience esthétique comme remède à la crise urbaine dans les travaux de Frederick Law OlmstedÉtienne Morasse-Choquette (Université du Québec à Montréal)
En 1863, dans une lettre adressée au jardinier en chef de Central Park, l’architecte paysagiste Frederick Law Olmsted relate avec enthousiasme un moment fort de sa traversée du Panama. Sensible aux paysages tropicaux, Olmsted dit avoir été saisi d’une émotion que la littérature actuelle désignerait comme une expérience esthétique au sens fort d’un vécu cognitivement et affectivement marquant (Schaeffer, 2015). Olmsted n’hésite pas quant à lui à qualifier ce sentiment de « moral » et à le rattacher à certains traits du paysage panaméen. Cette expérience est si marquante qu’il décide d’effectuer de mémoire une analyse formelle du paysage, et ce dans le but d’en reproduire les effets à son retour à Central Park.
Cet épisode nous donne un aperçu de la particularité de l’approche réformiste chez le célèbre architecte paysagiste. Car bien que la littérature existante ait souligné la visée hygiéniste de ses parcs (autant d’un point de vue psychologique que physiologique), peu ont cherché à analyser son approche d’un point de vue esthétique. Construit autour d’une étude de Prospect Park, cette présentation vise à démontrer comment cette expérience influença la conception du parc de Brooklyn (plus que de Central Park qui était déjà construit), tout en démontrant comment la sensibilité esthétique d’Olmsted s’inscrivait de façon plus large dans un courant de pensée au cœur duquel la relation esthétique fut envisagée comme une expérience d’abord émotionnelle et moralement forte.
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Communication orale
Réalité virtuelle, spatialisation sonore et futur de l’ethnomusicologie : le Music Legacy ProjectOns Barnat (Université d'Ottawa)
Depuis l’édition 2014 de SXSW (South by Southwest, à Austin, Texas) et la présentation de "Strangers with Patrick Watson", réalisé par les studios montréalais Felix & Paul, les enregistrements cinématographiques en 3D et à 360° sont sur le point de devenir une réalité majeure pour l’industrie de la musique et des jeux vidéos. Avec la commercialisation programmée de visiocasques de réalité virtuelle (Oculus Rift, Samsung Gear VR, Sony Morpheus...), la demande pour du contenu créatif destiné à ce nouveau moyen de consommer des performances musicales ouvre la boite de Pandore aussi bien pour les créateurs de musique que pour les ethnographes.
En nous plongeant au centre d’une expérience totalement immersive, cette technologie offre de nouvelles avenues pour conserver le patrimoine musical et culturel de l’humanité. Du côté de la recherche, comment ce changement paradigmatique peut-il influencer notre façon de faire de l’ethnographie musicale?
Cette conférence présentera nos premières données ethnomusicologiques collectées à l’aide d’un dispositif de captation audiovisuel 3D à 360° – ce qui nous permettra d’estimer le rôle de l’enregistrement omnibinaural dans la « restitution » en réalité virtuelle. Cette présentation abordera également quelques unes des problématiques méthodologiques, technologiques et épistémologiques soulevées par l’utilisation d’un tel dispositif, au demeurant expérimental.
Session d’affiches
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Communication par affiche
Étude des interactions dans l’apprentissage du travail de partenaires au moyen d’un enseignement somatique de l’acroyoga dans la formation collégiale en danseLucie Beaudry (UQAM), Caroline Charbonneau (UQAM - Université du Québec à Montréal), Caroline Raymond (UQAM)
Dans le travail de partenaires en danse, « les danseurs dépendent physiquement l’un de l’autre » (Lafortune, 2010, p.13) et échangent leur poids. Il s’agit d’une composante majeure de la création chorégraphique actuelle, mais son apprentissage est peu documenté et souvent absent des formations collégiales en danse (ibid., p.16-24), malgré son importance dans la dynamique interactionnelle des danseurs. Instaurer une telle dynamique positive et efficace en travail de partenaires requiert des habiletés spécifiques. Ces habiletés sont au cœur de l’acroyoga1. Fondée sur un enseignement somatique2 de l’acroyoga dans la formation collégiale en danse, ma recherche vise à comprendre les phénomènes d’interaction en jeu dans l’apprentissage du travail de partenaires. J’ai donc conçu des cours d’acroyoga que j’ai enseignés à 3 groupes d’étudiants en danse dans 2 cégeps (chaque cours comprenait un questionnaire écrit suivi d’une discussion de groupe) et mené 6 entretiens individuels. L’enseignement somatique de l’acroyoga développe communications verbale et non verbale, présence et coopération – habiletés utiles dans la pratique de la danse et dans toute situation d’interaction – ce que suggèrent les résultats préliminaires. Ce projet cherche à nourrir la recherche en danse du point de vue inusité du novice et à contribuer aux discussions sur la relation interactions/apprentissages.
1 Fusion du partenariat acrobatique et du yoga.
2 Axé sur la conscience du corps en mouvement dans l’espace.
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Communication par affiche
Un autre espace : l’art participatif pour comprendre mes interactions symboliques avec des Inuits dans le milieu de la santé à MontréalMélissa Sokoloff (UdeM - Université de Montréal)
En anthropologie et en sciences de la santé, le racisme systémique envers les Inuit a été relevé dans le milieu de la santé de plusieurs villes canadiennes. Comment rendre la rencontre avec le système plus positive pour chacun, intervenant ou chercheur non-inuit et patient inuit ? L’autoethnographie et la recherche-création permettent d’aborder cette question sensible à travers l'introspection et la pratique réflexive. Les objectifs de la recherche ont été d’identifier les conditions contextuelles, historiques, socioculturelles et biographiques qui m’ont influencée comme non-Inuit dans mes rencontres avec des Inuit venant à Montréal pour leurs soins de santé. Pour ce faire, j’ai animé des ateliers d’arts visuels et d’artisanat pendant six mois au Module du Nord québécois, qui offre l’hébergement et des services de liaison dans le système de la santé entre Montréal et le Nunavik. De plus, j’ai réalisé une création participative à l’université pour mieux comprendre mon expérience culturelle. Les résultats préliminaires émergeant de mes notes de terrain indiquent que l’attention sur l’activité semble plus efficace pour la rencontre humaine comparativement à une interaction centrée sur des objectifs à atteindre. L’interactionnisme symbolique de Erving Goffman ainsi que des éléments des épistémologies autochtones et artistiques complèteront l’analyse. Ce projet, financé par le CRSH, contribuera à l’élan vers la réconciliation en éducation et en intervention interculturelle.