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Informations générales

Événement : 83e Congrès de l'Acfas

Type : Colloque

Section : Section 300 - Lettres, arts et sciences humaines

Description :

Au début des années 1960, Lévi-Strauss prédisait que l’anthropologie allait subir une crise majeure, car son « objet d’étude principal », l’indigène, échappait à son emprise. Non seulement parce que les mouvements d’émancipation remettaient en question la légitimité du pouvoir colonial, mais aussi parce que les membres des peuples dominés commençaient à réfuter les discours qui justifiaient le colonialisme. Quinze ans plus tard, Saïd publiait L’orientalisme, un ouvrage dans lequel il dénonçait la « domination textuelle » de l’Occident sur l’Orient. Pour Saïd, la littérature et les narrations européennes qui dépeignaient l’Orient ainsi que les analyses universitaires qui soutenaient que la « Raison » devaient être imposées aux Orientaux servaient de justification au projet colonial.

Cette domination textuelle a longtemps minimisé les productions littéraires, artistiques, intellectuelles ainsi que les connaissances des peuples colonisés. Avec la montée des mouvements de décolonisation, les intellectuels des pays dominés ont entrepris une contestation de cette textualité. Celle-ci a pris plusieurs formes, la première consistant à déconstruire les discours eurocentristes en contestant l’universalisme des valeurs et de la science occidentale. La seconde permit aux peuples colonisés d’actualiser et de valoriser leurs propres narrations, leurs propres discours, leurs propres textes littéraires, traditions esthétiques et religions.

Saïd a été l’un des premiers à théoriser et à déconstruire la colonisation textuelle effectuée par les institutions occidentales. Récemment, s’est développé au sein des peuples autochtones ce même processus de décolonisation textuelle. ­L’objectif de cet atelier est d’examiner les différentes composantes de ce processus : réécriture critique de l’histoire; décolonisation de la recherche, de l’éthique et des méthodologies; productions littéraires, cinématographiques et artistiques destinées à rendre aux autochtones le contrôle de leur propre textualité.

Dates :
Responsables :

Programme

Communications orales

Conférence d'ouverture de Denys Delâge, Université Laval

  • Mot de bienvenue
    Helga BORIES-SAWALA (Bremer Institut für Kanada- und Québec-Studien), Thibault Martin (UQO - Université du Québec en Outaouais)
  • Du mythe cosmique autochtone du castor au mythe profane et colonialiste blanc : histoire d'un transfert culturel
    Denys Delâge (Université Laval)

    Héros originel, épouse primordiale de la genèse, libérateur du soleil permettant l'alternance du jour et de la nuit, pourvoyeur du feu et des ustensiles de cuisine, responsable du déluge, être hermaphrodite, terrestre, aquatique et aérien quasi humain et facteur principal de la multiplication de la vie par la création d'étangs et de terres humides, le castor vint tout près d'être complétement éradiqué, condamné qu'il fut de livrer son pelage à la confection, avec du mercure, de feutre à chapeaux rendant fous les chapeliers : Lewis Carroll, Mad Hatter, Alice in Wonderlands. Les Européens ont retenu du mythe : la société de plus de 100 castors avec ses corps de métiers, ingénieurs-architectes, scieurs, transporteurs, maçons, contremaîtres, ouvriers paresseux et itinérants, etc. François-Marc Gagnon a écrit de magnifiques pages là-dessus. Voilà réunis dans le mythe blanc : une société, une langue de communication, la division et l'éthique du travail, un débat de société (système autoritaire monarchique ou bien république). Buffon retient du mythe amérindien, la société quasi humaine des castors protégée par la sauvagerie des peuples d'Amérique, tous deux appelés à disparaître devant le progrès dont la civilisation européenne est porteuse.


Communications orales

Littérature et décolonisation 

  • Littérature : postures ou impostures de l'écrivain-chercheur francophone en contexte amérindien
    Nathalène Armand-Gouzi (Université Laval)

    La recherche-création soulève habituellement les enjeux créatifs et réflexifs dans le cadre d'une démarche personnelle soutenue par la littérature comme mode de connaissance. Mais qu'advient-il de cette démarche lorsque cette littérature est méconnue?

    Cette communication aborde les différentes postures incontournables à l'écrivain-chercheur francophone en relation avec la littérature amérindienne, soit la nécessité d'apprivoiser l'imaginaire amérindien, de décoloniser la narration, d'écouter et d'être juste. Puis, lorsque l'écrivain-chercheur endosse le rôle du lecteur, il doit considérer les postures qui l'amènent à assumer l'émotion, accepter l'incompétence et repositionner les choses au lieu d'imposer sa vision. Pour terminer, en lien avec cette problématique, j'aimerais tenter de répondre à une question déterminante, à savoir : En quoi la littérature amérindienne « réinvente-t-elle » la relation écrivain-lecteur, notamment en matière d'éthique de recherche et de narration? Au final, j'espère pouvoir démontrer qu'en littérature, les nouvelles postures de l'écrivain-chercheur francophone peuvent aussi être le moyen d'expression d'une décolonisation… À condition de sortir des sentiers battus.

  • Littérature amérindienne et décolonisation : regards latino-américains sur le Québec
    Nicolas Beauclair (UdeS - Université de Sherbrooke)

    Il ne fait nul doute que le phénomène littéraire amérindien au Québec est de plus en plus à l'ordre de jour pour la critique. Comme en témoignent les ouvrages et séminaires parus depuis le début des années 90 (Boudreau 1993 ; Gatti 2006, 2009, 2010 ; Études en littérature canadienne 2010, Henzi et St-Amand 2013 et 2014), ce champ d'études est en plein essor. Si certains spécialistes de la littérature autochtone, comme ceux ayant écrit dans le numéro spécial d'Études en littérature canadienne (2010), admettent qu'une collaboration entre les écrivains et critiques littéraires provenant des aires linguistiques francophone et anglophone nord-américaines est souhaitable afin de brosser un portrait plus complet de ce tableau, une telle collaboration avec les autres aires linguistiques américaines ne semble pas être envisagée.

    Ainsi, cette présentation tentera de remédier en partie à cette lacune en jetant un regard sur le discours amérindien québécois depuis les études coloniales et « décoloniales » latino-américaines. Nous aborderons plus spécifiquement les notions de « sémiosis » et de « pensée frontalière » dérivées des propositions de Walter Mignolo (1993, 1995, 2004, 2013) afin de comprendre comment la textualité amérindienne transcende les cantonnements disciplinaires qu'on tente souvent de lui apposer et pourquoi la « littérature amérindienne », exemples à l'appui, peut être considérée comme une pratique décoloniale.

  • Qu'appelle-t-on un texte autochtone? Les conceptions et les exclusions de la parole autochtonedans son institution littéraire au Québec
    Richard Lefebvre (Cégep de l'Abitibi-Témiscamingue)

    Au cours des dernières décennies, des publications collectives ont, sous l'impulsion de la théorie
    post-coloniale, analysé et commenté les représentations de l'Indien dans les littératures
    canadienne-française et québécoise. Ces représentations de l'Indien comme Autre forment
    maintenant un aspect bien connu de ce que nous pouvons appeler la domination textuelle des
    autochtones. Parallèlement à cette critique, le discours autochtone proprement dit a connu une
    réception plus large que les seules collectivités locales, et il a fait – suivant une démarche critique
    visant à le légitimer et à constituer le domaine de la littérature autochtone – l'objet d'anthologies
    et d'histoires littéraires. L'Histoire de la littérature amérindienne au Québec (1993) de Diane
    Boudreau et La littérature amérindienne au Québec (2003) de Maurizio Gatti sont de bons
    exemples de ces entreprises d'institutionnalisation. Toutefois, il y a lieu de questionner une série
    de présupposés qui sous-tendent ces entreprises. La parole autochtone, pour être reçue comme un
    texte, doit correspondre à des formes, des modes et des lieux d'inscription déterminés a priori par
    une conception réductrice de la littérature. Dans la communication que je propose de livrer, je
    poserai un regard critique sur les aspects intangibles de la domination textuelle qui se sont
    insinués dans ces entreprises d'institutionnalisation, lesquels n'ont pas reçu encore, je pense,
    toute l'attention voulue.
    Richard

  • Pause

Communications orales

Libérer la textualité autochtone

  • Désamorcer nos catégories d'analyse des mondes autochtones andins
    Jorge Legoas (Université Laval)

    Faisant face à une anthropologie dont les origines peuvent être placées dans la suite du projet colonial européen, aujourd'hui, la question de la différence ontologique se trouve au cœur des enjeux de la recherche sur les groupes paysans-autochtones des Amériques.

    Cette question implique que les catégories d'analyse que nous employons ne sont pas toujours pertinentes pour nous rapprocher adéquatement des pratiques et cosmologies autochtones. Précisément, dans ses « Remarques sur le Rameau d'Or », Wittgenstein avançait avec raison que l'anthropologue risque plus de projeter inconsciemment ses propres priorités ontologiques sur les sujets qu'il ou elle étudie, que de vraiment saisir les significations que ces derniers donnent à leurs pratiques et cosmologies.

    Pour être capables de comprendre la textualité que ces pratiques et cosmologies autochtones soulèvent, nous devons donc nous demander sur les limitations des outils dont nous disposons pour les étudier. Cette communication présente quelques enjeux que relève la recherche sur les mondes autochtones, lorsque l'on prend en compte la différence ontologique et la multiplicité de formes d'existence qu'elle soulève. Pour ce faire, nous allons montrer la façon dont notre recherche sur le rapport à l'environnement en milieu andin a remis en question les catégories de « rituel » et d'« esprit », afin de mieux comprendre la textualité locale du point de vue d'un chercheur conscient d'occuper une place difficile entre mondes.

  • De la parole dérobée aux autochtones à l'aura de la pensée eurocentrée
    Otilia Del Carmen Puiggros (UQO - Université du Québec en Outaouais)

    Les dernières décennies ont vu la centralité de la vision occidentale du monde déconstruite par différents mouvements, le mouvement afro-américain, le féminisme et plus récemment, l'autochtonie. L'objectif de cette contribution est de présenter le courant critique latino-américaine appelé Modernité/Colonialité. Il s'agit d'un courant qui se veut post-occidental, critique des théories postcoloniales et s'inscrivant dans les théories décoloniales. Dans cette perspective, la colonialité du pouvoir s'accompagne d'une colonialité du savoir et d'une colonialité de l'être. Bien que cette perspective théorique s'articule autour des expériences de la décolonisation de l'Amérique latine, elle emprunte aux autres théories postcoloniales. Elle permet aussi de réfléchir de manière novatrice à plusieurs réalités historiques qui ont été ignorées, niées ou marginalisées par la centralité du pouvoir et du savoir occidental. Le courant Modernité/Colonialité propose une production épistémique alternative. Dans cette communication vous analyserons les discours des intellectuels d'Amérique latine qui s'impliquent dans la déconstruction de la colonisation textuelle et cherchent à rompre avec l'aura inventée de la centralité de la pensée européenne.

  • Le panafricanisme, un véhicule d'émancipation identitaire textuelle : d'Edward Wilmot Blyden et Anténor Firmin aux Amériques à Kwame Nkrumah en Afrique
    Papa Oumar Badji (UQO - Université du Québec en Outaouais)

    Le panafricanisme, une idée politique et un mouvement, est à la fois une vision sociale, culturelle et politique d'émancipation de noirs et un mouvement qui vise à unifier les africains ducontinentet de la diaspora africaine en une communauté africaine globale. Il préconise une histoire partagée et une destinée commune des peuples d'Afrique et de la diaspora et que leur progrès social, économique et politique est lié à leur unité.

    Apparu à la fin du XIXe siècle lors de la préparation de la Conférence panafricaine de 1900, le mot « panafricain » arrive en réaction aux conséquences du démantèlement progressif de l'esclavage en Amérique. Les 1er pas de cette lutte contre l'Esclavage, début XIXe siècle, sont premièrement textuels : un acte du 25 mars 1807 interdit latraite négrièresur tous territoires et côtes d'Afrique. De textuel, cet engagement devient réel, et militaire en Europe et aux Amériques de 1800 à 1870.

    Nous allons tenter, par cette présentation, d'analyser l'impact du panafricanisme dans la l'émergence d'une identité commune noire et d'une solidarité transfrontalière et transcontinentale, plus précisément d'analyser la portée émancipatoire des textes de Edward Wilmot Blyden en Amérique, Anténor Firmin à Haïti et des discours de Kwamé Nkrumah en Afrique dans la libération culturelle des noirs.


Communications orales

Séance plénière

  • La Baie James et le lieu du chasseur : norientalisme et changements discursifs en territoire cri
    Caroline Desbiens (Université Laval)

    Les formations discursives ont des impacts matériels concrets. Dans Orientalisme (1978) et Culture et impérialisme (1994), Edward Said insiste sur le fait que la culture n'est pas une simple réflexion du monde, mais plutôt une série de représentations, de pratiques et de performances. Cette approche permet de jeter un regard novateur sur le développement industriel du Nord. Nous examinons dans cette présentation comment la réorganisation physique de la Baie James via les grands barrages a entraîné sa réorganisation narrative, c'est peut-être là l'impact le plus significatif pour la société crie. En apportant de nouvelles technologies, les Québécois du Sud ont apporté de nouvelles histoires en terre crie. Pourtant, les Eeyouch continuent d'avoir une compréhension narrative détaillée de leurs terres, leurs rapports avec les gouvernements ne furent pas simplement une joute pour défendre leurs droits, mais aussi une lutte ontologique concernant la compréhension de ce territoire et les termes de sa gouvernance. Une partie de cette lutte ontologique s'est jouée autour du discours « norientaliste » qui a donné naissance à la Baie James à laquelle s'identifient aujourd'hui les Québécois du Sud. Notre objectif est d'examiner comment l'expansion du norientalisme contribue à la réduction de la place du chasseur dans les discours qui dominent désormais les grilles de compréhension du nord du Québec, de même que les actions et politiques qui en découlent.

Communications orales

Narrativité, mémoire et décolonisation 

  • La mémoire victimaire des pensionnats peut-elle permettre de sortir de la violence coloniale?
    Brieg Capitaine (Université McGill)

    L'affirmation de la mémoire victimaire comme vérité historique suscite un certain nombre de controverses en particulier dues à l'usage du terme génocide pour qualifier la conquête des Amériques ou plus récemment les pensionnats indiens. Pour certains intellectuels, attachés à l'universalisme et à la représentation des Autochtones comme acteur historique, cette mémoire porteuse de souffrances nuirait au processus de réconciliation et renfermerait en elle la potentialité d'un « abus de mémoire » (Trudel 2014).

    Contre cette tendance, nous envisageons cette mémoire victimaire comme un effort pour rompre avec la violence coloniale. Elle agit ainsi à plusieurs niveaux sur la société et ses acteurs. D'une part, en étendant le traumatisme vécu individuellement à l'ensemble de la collectivité, cette mémoire révèle la créativité d'un sujet collectif et sa capacité à reconstruire une identité collective détruite par les entreprises assimilationnistes successives. D'autre part, alors que les pensionnats ont déshumanisé des générations d'autochtones en niant leur individualité au profit de leur race, cette mémoire victimaire, directement portée par l'expérience des individus, contribue à la restauration de leur subjectivité. En somme, si la mémoire des survivants jaillit d'une manière qui paraître brutale, c'est parce qu'elle est à la hauteur de la violence coloniale qu'elle combat.

  • La narration comme moyen d'affirmation d'une pratique d'intervention sociale originale
    Christiane Guay (UQO - Université du Québec en Outaouais)

    Le renouvellement des pratiques d'intervention sociales au sein des communautés autochtones est un défi de taille pour cette discipline, et suppose, d'abord et avant tout, de se questionner sur la place à donner aux savoirs autochtones et aux nouvelles avenues possibles pour le développement de la connaissance.

    Or, les principales perspectives théoriques sur lesquelles se fondent les stratégies d'institutionnalisation du savoir autochtone en travail social ont plutôt tendance à occulter les capacités intrinsèques des intervenants autochtones à innover ou à aménager, au quotidien, des pratiques d'intervention sociales qui sont plus compatibles avec leur mode de vie et leur vision du monde. Pourtant, l'action de ces intervenants s'inscrit dans une volonté de participer activement aux transformations sociales qui s'opèrent dans leur société. Pour saisir toute la complexité qui se donne à voir au sein des communautés autochtones un basculement théorique et épistémologique s'impose.

    En rendant compte d'une recherche réalisée auprès d'intervenants sociaux innus de la communauté d'Uashat mak Mani-Utenam notre contribution à cette conférence illustrera en quoi un tel basculement peut, non seulement mettre en dialogue les discours produit par la recherche, mais également accéder à une meilleure compréhension des formes contemporaines que prend la pratique d'intervention sociale lorsque cette dernière est portée par des Autochtones dans un milieu autochtone.

  • Renommer pour mieux se retrouver, décolonisation textuelle d'un site sacré anisnabe : le cas de « L'île Indien du lac Commandant » (Papineau), dans la région de l'Outaouais
    Karine Desjardins (UQO - Université du Québec en Outaouais)

    Depuis quelques décennies, le renouveau des pratiques autochtones de spiritualité a amorcé la volonté de décoloniser les différents sites sacrés ancestraux. Ce phénomène panaméricain démontre le désir des Autochtones à vouloir faire partie prenante des consultations lors de la désignation des aires à protéger tout en voulant partager leurs savoirs ancestraux liés aux lieux sacrés. Renommer ces endroits chargés de sens, de souvenirs et d'expériences contribue à réduire le fossé sémantique qui s'est creusé entre les générations du fait de la colonisation textuelle. Cela permet de garder vivante la mémoire des lieux et favorise la reconstruction du cercle de la transmission des savoirs. Mieux comprendre la représentation autochtone du territoire et la place que celui-ci occupe dans le processus de guérison semble nécessaire pour la réconciliation des nations. Néanmoins, ce processus n'est pas toujours compatible avec les schèmes d'entendement d'une pensée occidentale contre laquelle viennent se heurter les valeurs culturelles, les croyances spirituelles et l'esthétique autochtone.

    Le double débat autour de la dénomination de « L'île Indien du lac Commandant », un lieu sacré autochtone ancestral où demeuraient les ancêtres du leader spirituel William Commanda met en exergue cette dichotomie ontologique. Le débat tourne d'abord autour du vocable colonial et ensuite sur la substitution du nom du leader autochtone par celui d'« héros » canadien.

  • Pause

Communications orales

Histoire, éducation et autochtonie

  • Dans la plupart des manuels, les Indiens font partie du décor, attendant la venue de Jacques Cartier : est-ce toujours vrai?
    Helga Bories-Sawala (Universität Bremen)

    Cette constatation faite par Sylvie VINCENT et Bernard ARCAND dans leur analyse des manuels dans les années 1970 (L'image de l'Amérindien dans les manuels scolaires du Québec ou Comment les Québécois ne sont pas des sauvages, Montréal : Les Éditions Hurtubise 1979), est-elle encore valable de nos jours ?

    Pour tâcher d'y répondre, ont été analysés avant tout les manuels de 3° et 4° secondaire actuellement en cours au Québec ainsi des livres du primaire que la même cohorte d'élèves a pu étudier quelques années auparavant. Pour rendre compte de l'évolution, les manuels actuels seront comparés à ceux parus avant la réforme de l'enseignement et avant le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones de 1996.

    L'analyse de la représentation des peuples autochtones dans les manuels scolaires portera en particulier sur leur statut historique, le rôle qui leur est attribué dans l'histoire du Québec, la construction de l'opposition entre EUX et du NOUS à travers les comparaisons implicites et explicites, les influences mutuelles et l'interdépendance, les conflits historiques et actuels, les moments historiques particuliers (de la Croix de Gaspé à Oka en passant par la Grande paix de Montréal et Louis Riel), les personnalités identifiées par leur nom et enfin, les perceptions mutuelles entre Autochtones et non-Autochtones ainsi que l'importance du regard culturaliste voire folklorisant par rapport au regard socio-historique.

  • L'agentivité autochtone dans les manuels de l'élève en histoire : l'Amérindien protagoniste, adjuvant ou opposant?
    Stephanie DEMERS (UQO - Université du Québec en Outaouais), David Lefrançois (UQO - Université du Québec en Outaouais), Marc-André Éthier (UdeM - Université de Montréal)

    Martineau (1999) soulignait le caractère actif, réflexif et axé sur la résolution de problème des programmes québécois d'histoire des années 1980. Pourtant, les manuels qui leur étaient associés impliquaient une conception monocausale et linéaire de l'histoire, attribuant à une «cause externe modifiable» (tel ou tel «grand personnage») ou à une «cause externe stable» (telle «grande idée») la plupart des changements sociaux favorables à une «majoration démocratique», mais invoquant rarement l'influence de «causes internes modifiables» (l'action des «gouvernés») sur l'évolution de la démocratie (Ethier, 2006). Nous présenterons les conditions de production et la structure générale des manuels d'histoire québécois, utilisés au deuxième cycle du secondaire. L'organisation, les contenus et les activités proposés par ces manuels seront analysés, afin de voir comment les auteurs présentent certains groupes sociaux de la société québécoise et quels rôles sociaux et historiques ils leur attribuent. Cette analyse des manuels fera émerger certaines hypothèses quant au discours dominant concernant l'agentivité des membres des Premières Nations et aux construits sociohistoriques d'«adjuvants» ou d'«opposants» qu'il traduit. Grâce à l'analyse de contenu d'extraits portant sur les Premières Nations, l'on constatera que peu d'Autochtones «protagonistes» défendent collectivement leurs revendications contextualisées

  • L'adaptation culturelle des cursus scolaires et des services de soutien peut-elle favoriser la réussite scolaire des étudiants de Premières Nations au niveau postsecondaire?
    Emanuelle Dufour (UdeM - Université de Montréal)

    L'adaptation culturelle de cursus scolaires et de services postsecondaires peut-elle contribuer à la revitalisation identitaire et culturelle des étudiants de Premières Nations? L'ancrage identitaire peut-il contribuer à favoriser la réussite scolaire et donc, ultimement, à l'amélioration des conditions socioéconomiques des peuples autochtones du Québec? À travers les notions de sécurité culturelle et d'enracinement identitaire, je tenterai de démontrer que l'aménagement d'espaces physiques et idéologiques à l'intérieur du système scolaire contribue effectivement à la rétention et à la réussite des étudiants de Premières Nations. Pour ce faire, je m'appuierai sur les conclusions d'une enquête, menée auprès d'une centaine d'étudiants de Premières Nations et une vingtaine de travailleurs du milieu, rendue possible grâce à la collaboration de différentes instances éducatives incluant notamment le volet Jeunes autochtones du Projet SEUR de l'Université de Montréal, le CEPN et l'Institution collégiale Kiuna, l'Aboriginal Resource Center du Cégep John-Abbott, la First Peoples' House et le Indigenous Student Alliance (ISA)de l'Université McGill, le Aboriginal Student Resource Center de Concordia et le CDFM de Wendake entre 2013 et 2015. Les entrevues ont été partiellement réalisées en collaboration avec Léa Lefevre Radelli, étudiante en cotutelle en Sciences des religions à l'Univer

  • Dîner

Communications orales

Méthodologie

  • La gestion des forêts entre esthétisation de la nature et naturalisation de la culture

    Les grands peintres romantiques du XIXe siècle ont contribué à l'émergence, dans les pays du Nord, d'une vision esthétique de la nature, restée pure, et vierge. Ces représentations du naturalisme scientifique, ont donné lieu à la création des premiers grands parcs naturels dédiés à la conservation de la nature sauvage. Cet esthétique procède à la fois du vocabulaire et des méthodes inspirés de l'histoire de l'art : collecte, inventaire, conservation. Face à cette construction systématique et muséale de la nature et de sa biodiversité, les crises environnementales nous renvoient, quant à elles, à une nature humanisée, transformée, dégradée. Un parallèle apparaît entre la qualification esthétique de la nature et la vision culturaliste des peuples autochtones souvent considérés comme les garants de la durabilité. Nous voulons par cette communication à partir d'une analyse bibliographique sur les thèmes de la conservation de la nature et de la mise en patrimoine des espaces forestiers à travers la création d'aires protégées ou de parcs naturels, établir un parallèle avec un corpus de vocabulaire propre à l'histoire de l'art, notamment dans la mise en perspective des paysages du Canada et du Québec. Nous voudrions tester, au niveau narratif, l'usage de concepts tel que le caractère exceptionnel, la rareté ou la tradition, dans leur capacité à produire une sorte de schème métaphorique entre la conservation de la nature et la valorisation culturelle des populations autochtones.

  • Territoire, culture et créativité : une cartographie culturelle afin de positionner la textualité autochtone
    Alain A. Viau (Université Laval)

    Les liens entre le récit, les éléments du récit, la photographie, les œuvres d'art associés à la représentation géographique des lieux et leur reproduction sont considérés ici comme base de réflexion à la représentation de l'immatériel des paysages. La cartographie culturelle est un des outils de mise en valeur des paysages et un moteur d'innovation culturelle. En considérant les propos de Florida (2002) qui propose : « que les aménités culturelles sont devenues dans les pays industrialisés un élément majeur d'attractivité territoriale », notre communication cherche à présenter comment nous pouvons valoriser les dimensions géoculturelles et géo historiques des territoires à l'aide de la cartographie . Nous allons donc tenter de répondre à certaines questions soulevées par ce colloque notamment qui est : « de pouvoir rendre aux Autochtones à travers l'art le contrôle de leur propre textualité ». Nous allons ainsi tenter de répondre aux questions suivantes: a) comment pouvons-nous via la cartographie en apprendre davantage sur le plan culturel des territoires et de leurs communautés? b) comment pouvons-nous appréhender les dimensions culturelles autochtones? c) comment la cartographie culturelle peut-elle permettre de favoriser le développement des collectivités d'artistes autochtones et favoriser la rencontre entre les artistes autochtones et ceux du reste de la société afin qu'ils puissent mieux positionner leur propre textualité?

  • Une image vaut mille mots : analyse du regard porté, à travers la caméra, par les jeunes autochtones sur la spoliation de leur territoire
    Roxanne Dupont (UQO - Université du Québec en Outaouais)

    Les Occidentaux ont longtemps dominés l'espace médiatique et cinématographique au Québec, ceci a fait en sorte d'insérer dans l'esprit des Québécois une image ethnocentrique, folkorique et surtout stéréotypée des Autochtones. Contrairement à ce que croient les tenants des théories postcoloniales, qui estiment que les Autochtones ne sont pas en mesure de créer leurs sociétés, plusieurs jeunes autochtones agissent comme acteurs de changement en s'emparant des outils technologiques issus de la culture occidentale pour exprimer leurs préoccupations.. L'art et les médias agissent depuis les dernières décennies, en tant que vecteurs d'autodétermination, de résistance et d'affirmation identitaire pour les Autochtones en procurant un espace d'expression unique. Aujourd'hui, c'est à l'aide de projets créatifs comme le Wapikoni Mobile qui offre la possibilité à de nombreux jeunes autochtones de créer des courts-métrages sur le sujet de leur choix, que ces jeunes participent à la construction d'un futur collectif. Les 400 courts-métrages observés dans le cadre de ce mémoire ont démontré que les jeunes sont particulièrement préoccupés par la spoliation de leur territoire qui signifie pour eux la destruction de leur culture et de leur identité. Ceci étant dit, les nouveaux médias ont pour avantage, en favorisant l'échange et la mobilisation, de leur permettre de participer activement à la préservation de leur culture en retissant les liens tant avec le territoire qu'avec les Aînés.

  • Pause

Communications orales

Affirmation identitaire

  • Vers une éthique de la réciprocité : création d'un partenariat pour l'étude des chants traditionnels eeyoush de Chisasibi
    Roxane Campeau (UdeM - Université de Montréal)

    La création de partenariats avec les Premières Nations est un élément essentiel de toute
    enquête de terrain située dans le Nord du Québec. Toutefois, ces partenariats ont pu
    alimenter un mouvement d'intégration des savoirs autochtones, triés par les chercheures
    «du
    sud», annexés au savoir scientifique occidental (Martin 2004). Dans l'étude
    ethnomusicologique qui nous préoccupe, nous tentons d'évoluer dans un cadre théorique de
    la reconnaissance des peuples (Seymour 2008). Pour ce faire, nous identifions deux volets
    vers une éthique de la réciprocité: d'abord, les caractéristiques de la culture Crie de Chisasibi
    sont étudiées, Ensuite, la valorisation du rôle des structures de cette communauté d'Eeyou
    Istchee est effectuée. Conséquemment, notre communication présente les points de vue de
    trois actrices rassemblées autour des chants dits «de chasse» et «de parenté»: une
    chercheure extérieure à la communauté, une chercheure travaillant sur les rites de passage
    au sein d'un département du Conseil Cri de la Santé, puis la fondatrice de l'Institut Culturel
    Cri de Chisasibi. Nos voix sont antagonistes au paradigme de cogestion,
    où les savoirs
    traditionnels écologiques sont perçus comme des ressources supplémentaires à extraire du
    Nord. La recherche sur ces chants de Chisasibi poursuit plutôt le double but suivant:
    s'inscrire dans une démarche de décolonisation de la recherche et valoriser les
    enseignements chantés et leur articulation avec le milieu de vie d'Eeyou Istchee.

  • L'artisanat comme instrument de l'identité ethnique : le cas de Kinikinau au Mato Grosso do Sul, Brésil
    Karolinne Sotomayor Azambuja Canazilles (UQO - Université du Québec en Outaouais)

    Cette étude vise à expliquer comment et pourquoi l'artisanat contribue à l'affirmation de l'identité d'un groupe autochtone et le rôle de la vente de cet artisanat. Le cas de l'ethnicité Kinikinau est unique car elle a été déclarée "disparue" par les chercheurs, a été soumise à une période d'invisibilité dans les documents officiels et a été considerée comme un sous-groupe Terena. La résistance Kinikinau et leur “volonté à la différence” ont influencé la recherche de traditions oubliées, ce qui a abouti à la “réinvention” de l'artisanat. À fin siècle XX et au début du XXI , le groupe ethnique utilise cet artisanat, couplé avec le marché, comme instrument de reconnaissance et visibilité. Nous montrerons comment un groupe ethnique utilise la production et la vente d'art pour affirmer son identité et pour se différencier des autres groupes autochtones. Nous explorerons les limites du marché capitaliste dans la vente de l'artisanat pour donner de la visibilité à ce groupe ethnique. La collecte des données empiriques a été menée à travers des visites aux centres de vente d'artisanat à Bonito et des visites au village São João, la réserve indigene Kadiwéu à Porto Murtinho au Brésil. Des entretiens semi-structurés avec des commerçants et artisans ont été effectués et des sources secondaires ont été consultées.

  • Les réfugiés Karen : réappropriation des rapports de genre relativement à la colonisation textuelle des organismes de coopération internationaux
    Zoé Dontigny-Charette (UQO - Université du Québec en Outaouais)

    Cette communication porte sur les transformations des rapports de genre provoquées par la colonisation, puis la décolonisation du Peuple premier Karen de Birmanie. Les résultats présentés ici sont issus d'une recherche effectuée au printemps 2012 dans des villages et dans des camps de réfugiés Karen en Thaïlande.

    La conquête britannique a conduit à une redéfinition des rapports de genre au sein de la société Karen, notamment en important des nouvelles formes de travail et en dévalorisaient le rôle traditionnel des femmes. Malgré la décolonisation, les rapports de genres issus de la période britannique ont continué à prévaloir, si bien que les femmes occupent toujours une place de subordonnée au sein de la société. L'arrivée des ONG venues « aider » les Karen victimes de la guerre et forcés de vivre dans les camps de réfugiés a induit une nouvelle forme de domination textuelle. En effet, les agences internationales font, au nom de l'universalisme des valeurs occidentales, la promotion, au sein des camps de réfugiés, de l'égalité et de l'identité des rôles entre les hommes et les femmes.

    Nos entrevues attestent d'un malaise au sein de la population Karen qui ne se reconnait pas dans ces valeurs occidentales. Tant les hommes que les femmes se sentent dépossédés de leur manière de définir les rapports sociaux. Face à cette domination textuelle, des femmes se sont mobilisées pour se réapproprier le droit de redéfinir par elles-mêmes les relations au sein de la famille et de la communauté.

  • Mot de clôture
    Christiane Guay (UQO - Université du Québec en Outaouais)