Informations générales
Événement : 91e Congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Section 400 - Sciences sociales
Description :Depuis quelques décennies, les techniques de procréation médicalement assistée (PMA) suscitent un intérêt soutenu de la part de chercheurs et de chercheuses d’horizons variés. Entre procédures médicales toujours plus poussées (comme la vitrification, le transfert de mitochondries, l’utilisation de l’intelligence artificielle…) et nouvelles pratiques sociales (la normalisation de la gestation pour autrui, la fin de l’anonymat des personnes donneuses, la reconnaissance de la diversité sexuelle et de genre, la parentalité à un âge avancé…), la PMA continue d’élargir le champ des possibles pour les personnes infertiles et celles dont la configuration familiale ou personnelle sort du modèle hétéronormatif. Devant cette créativité biosociale, de nouveaux acteurs se regroupent autour de projets familiaux qui (re)combinent du personnel soignant, des spécialistes de laboratoire, de futurs parents, des tiers de procréation et des membres d’organismes de soutien psychosocial. Parallèlement, la diffusion des techniques de PMA a entraîné une déterritorialisation des pratiques suivant les lignes de fractures d’un encadrement légal hétérogène et de marchés transnationaux de cellules et de services. Dans ce contexte, nous voyons apparaître un ensemble de pratiques hétérogènes aux marges de la PMA qui appelle à son tour à intégrer la pensée sociale sur la PMA. Ce colloque proposera une réflexion sur ces marges et les nouveaux enjeux qu’elles font émerger.
Format : Sur place et en ligne
Responsables :Programme
Première partie
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Communication orale
Entre cliniques de fertilité et réseaux sociaux : quelle marge de manœuvre pour les femmes lesbiennes, bisexuelles ou pansexuelles et les personnes queer, trans ou non-binaires ?Anna Aslett (Université Laval), Emma Boulet-Giroux (UQO - Université du Québec en Outaouais), Isabel Côté (Université du Québec en Outaouais), Claudia Fournier (Université Laval)
Pour fonder une famille, la plupart des femmes lesbiennes, bisexuelles, ou pansexuelles (LBP) ainsi que des personnes queer, trans ou non-binaires (QTNB) ont besoin de matériel génétique extérieur à leur couple. Alors que plusieurs d’entre elles suivent la voie de la procréation médicalement assistée (PMA), elles sont de plus en plus nombreuses à se tourner vers les réseaux socio-numériques pour chercher un don de sperme, et réaliser une insémination en-dehors du réseau médical. L'émergence de cette pratique met en lumière les enjeux d'accessibilité auxquels sont confrontées les femmes LBP et les personnes QTNB pour devenir parents. Elle soulève également des questions sur les normes et les limites des pratiques médicales traditionnelles, ainsi que sur le rôle et les risques des réseaux socio-numériques dans la redéfinition des modes de procréation. Cette présentation expose l’expérience de 15 personnes et couples de femmes LBP et personnes QTNB ayant eu recours à la PMA, à la recherche de don de sperme en ligne, ou aux deux, et qui ont livré leurs témoignages dans le cadre d’une étude qualitative menée dans plusieurs régions du Québec. Les implications de ces deux pratiques sont également discutées en termes d’accessibilité, de fiabilité et de sécurité pour les femmes LBP et les personnes QTNB. Enfin, des pistes de réflexion sont proposées pour une meilleure prise en compte de leurs besoins spécifiques dans les politiques et pratiques de santé reproductive.
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Communication orale
Cis-hétéronormativité du droit de l’AMP en France : les forces procréatives des personnes LGBT+ laissées pour compte ?Marie Mesnil (Université Paris Saclay)
En France, la loi du 2 août 2021 relative à la bioéthique a ouvert l’assistance médicale à la procréation (AMP) aux couples de femmes et aux femmes seules. Mais derrière la « PMA pour toutes » se cachent de nombreux angles morts, concernant aussi bien l’usage des gamètes au sein du couple lorsqu’il ne s’agit pas d’un couple cis- hétérosexuel que le refus de permettre à un homme de mener la grossesse.
Ces situations renvoient à un usage des forces procréatives qui ne correspond pas au modèle cishtérosexuel, qui agit comme un carcan : la femme qui ne porte pas l’enfant au sein des couples lesbiens, tout comme l’homme trans, semblent ainsi devoir être cantonné à la place de l’homme infertile du couple hétérosexuel. Par conséquent, les ovocytes de la femme qui n’assure pas la gestation ne peuvent pas servir à constituer l’embryon; il en va de même pour toutes les forces procréatives d'un homme trans (aussi bien ses ovocytes que son utérus). Au contraire, les spermatozoïdes d’une femme trans peuvent être utilisées pour procréer, montrant l’asymétrie qui opère dans l’appréhension des forces procréatives.
En définitive, le modèle pseudo-procréatif reste très présent : ni le cadre juridique ni les pratiques médicales ne réussissent en France à s’extraire de la cishétéronormativité et à penser l’emploi des forces procréatrices des personnes LGBTQ+.
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Communication orale
La PMA, une alternative au pénis. L’exemple de quelques une FSFLydet Roland Adolphe Oulaye (Université Alassane Ouatara)
Le pénis est l’objet de l’infraction. Il ne faut pas l’avoir en soi. Telle est la représentation que s’en fait Amoa, une Femme qui a des rapports Sexuels avec d’autres Femmes (FSF). Toutefois, face aux injonctions familiales et au temps qui laisse peu de ressources au corps, procréer devient impérieux. La PMA peut alors être une alternative au pénis. Y recourir demeure cependant potentiel. Des frais trop onéreux la rendent quasi inaccessible pour plusieurs FSF. Dès lors, certaines choisissent d’autres voies, plus ou moins sécurisées du point de vue sanitaire, voire abandonnent le projet de faire un bébé, plutôt que de faire appel à un “enceinteur”, révélant un autre impératif, celui de garder une identité de genre.
Cette communication présente la situation de quelques FSF ivoiriennes face aux injonctions à la procréation. Elle se fonde sur des enquêtes par entretiens semi dirigés articulés autour des thématiques de la procréation, des voies de recours dont la PMA pour y arriver et des résultats effectifs de ce déploiement d’énergie. Les entretiens ont été menés pour une part importante d’entre eux en août 2018 à Adiaké, une ville du sud de la Côte d’Ivoire. La recherche étant en cours, des entretiens avec des FSF d’Abidjan et de Yamoussoukro, deux autres villes de Côte d’Ivoire, sont menés actuellement.
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Communication orale
Mères solo en France : nouveaux profils, trajectoires et motivations du recours à la procréation médicalement assistée (PMA)Hélène Malmanche (Université Toulouse Jean Jaurès), Virginie Rozée (Institut national d'études démographiques)
La dernière révision des lois bioéthiques en 2021 en France a ouvert l’accès aux dons de gamètes et aux techniques de PMA aux femmes non mariées et en couple de même sexe. En France, jusqu’à une date récente, très peu d’études de sciences sociales ont été consacrées aux « mères solo » (Rozée 2013 ; Mehl 2016). L’enquête AMP sans frontières vise notamment à actualiser les connaissances sur les maternités solo. Des entretiens semi-directifs ont été réalisés auprès de femmes ayant réalisé un parcours de maternité solo (n=26), majoritairement suite à un don de sperme dans un centre médical en France et/ou à l’étranger.
Cette étude permet de mettre en lumière l’émergence de nouveaux profils de mères solo par rapport aux enquêtes précédentes : des femmes plus jeunes entreprennent ce parcours de PMA ; d’autres affirment la maternité solo comme leur souhait premier ; des femmes sont en couple mais « en solo » pour leur projet parental. Un trait commun à l’ensemble des profils se dégage fortement : pour toutes les femmes interrogées, le projet parental est désigné comme l’axe principal de vie. Ne pouvant satisfaire à la double injonction de devenir mère et d’être en couple pour fonder une famille, ces femmes ont dû reconfigurer leur projet parental à l’aune de leur expérience conjugale (célibat, labilité conjugale), ou affirmer d’emblée une transgression des normes de genre et familiales pour celles qui ont rejeté le couple hétéroconjugal comme cadre familial désirable.
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Communication orale
Nouveaux dispositifs normatifs et procréation médicalement assistée au Cameroun : contexte, enjeux et perspectivesAboubakar Sidi Njutapwoui (Université de Maroua)
La procréation médicalement assistée se révèle comme une question sensible dans la gestion de la maternité au Cameroun, pays où l’environnement social est encore marqué par la stigmatisation de l’infertilité et une suspicion à l’égard des technologies de procréation artificielle. Avec la création d’un centre sanitaire spécialisé en 2011 et l’adoption d’une loi y afférente en 2022, la mise en œuvre de cette solution est encadrée par des dispositifs médicaux et normatifs. Dans cette dynamique, la population qui voit le jour grâce aux projets familiaux basés sur la PMA s’agrandit de plus en plus dans l’espace social. Dès lors, quelles sont les nouvelles normes juridiques, éthiques et sociales qui émergent autour de la PMA ? Que représente concrètement l’expérience de la PMA dans l’espace familial, social et politique ? Comme cadre d’analyse, le paradigme sociologique de la biopolitique (Foucault, 1976) a permis de penser conjointement les discours sur la sexualité, les dispositifs normatifs et les technologies de subjectivation. La collecte des données s’est opérée entre 2022 et 2023 par des entretiens avec le personnel administratif et médical, les universitaires, les patient.es, etc. Cette intervention se propose de montrer en quoi ces résultats éclairent de façon originale les perspectives nouvelles qui sous-tendent le recours à la PMA en Afrique.
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Communication orale
Perspectives éthiques sur l’acceptabilité de l’âge paternel avancé comme critère limitant l’accès à des services de procréation assistéeVincent Couture (Université Laval)
L’utilisation des services de procréation assistée par une population d’âge avancé est une réalité à laquelle font face les cliniques. Un âge parental avancé (autant chez les femmes que les hommes) affecte négativement la fertilité et les différentes techniques de procréation assistées deviennent des options envisageables pour mener à terme un projet familial. Toutefois, ce type de projet n’est pas sans risques et plusieurs États et organisations sanitaires ont proposé des limites d’âge pour accéder à ces services. Ces lois, règlements et recommandations sont bien connus pour l’âge maternel avancé, mais qu’en est-il pour les hommes ? Malgré la hausse de connaissances concernant l’effet de l’âge paternel sur différents paramètres (p. ex. baisse de la fertilité, hausse des risques de fausses-couches et risques pour la santé du futur enfant), les limites pour un âge paternel avancé demeurent un phénomène rare. Afin de contribuer à réfléchir cette réglementation émergente, nous nous poserons cette question : est-ce qu’un âge paternel avancé est un critère acceptable pour limiter l’accès à des services de procréation assistée ? Dans une perspective bioéthique, nous analyserons différents arguments en faveur ou en défaveur de ce type de limite : l’enjeu de l’autonomie procréative, l’absence de consensus sur une définition de l’âge paternel avancé, la nature ambigüe des torts potentiels causés par l’effet paternel, la responsabilité parentale et l’équité de genre.
Dîner libre
Deuxième partie
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Communication orale
Le premier bébé conçu suite au dépistage polygénique des embryons : Enjeux éthiques clés selon des experts et des journalistes scientifiquesHazar Haidar (UQAR - Université du Québec à Rimouski)
Des cliniques de fertilité privées ont récemment introduit des analyses évaluant le score de risque polygénique des embryons polygenic embryo screening, PES) destinés à être implantés dans le cadre de la fécondation in vitro. Ces scores visent à identifier le risque des dispositions de l’embryon à des pathologies tels que certains cancers et des traits physiques comme sa future taille. Cependant, d'importantes préoccupations ont été soulevées quant à la fiabilité douteuse du test notamment par la Société européenne de génétique humaine qui a exprimé son opposition à l’utilisation de ce dépistage.
Cette présentation explore le discours bioéthique émergent dans la littérature entourant le PES, abordant divers enjeux éthiques tels que la relation parent-enfant future, et l'absence de lignes directrices professionnelles pour l’utilisation de ces scores. De plus, nous rapportons les résultats d’une analyse de contenu des articles de presse publiés en 2021 en réaction à la naissance du premier bébé né suite à ce dépistage. Cette analyse révèle, entre autres, une prédominance d'opinions négatives de la part des bioéthiciens et d'autres experts concernant l'utilisation du PES, principalement en raison de deux facteurs: l'incertitude quant à sa précision prédictive dans le contexte reproductif et la crainte d'un avenir eugénique normalisant la discrimination basée sur le patrimoine génétique. Nous concluons en lançant un appel à un débat social approfondi sur l'utilisation de ce test. -
Communication orale
Considérer l’entité en utérus artificiel à titre de patient pour guider éthiquement son traitement médicalFrédérique Drouin (UdeM - Université de Montréal)
Actuellement, des prototypes d’utérus artificiel (UA) se développent dans le but d’améliorer la prise en charge médicale des grands prématurés (22-25 semaines d’âge gestationnel). L’UA rendrait possible une ectogenèse partielle, qui consiste à ce qu’un foetus transféré en UA – que nous appelons « entité en UA » – se développe en partie à l’extérieur du corps. Les premiers essais cliniques sur les êtres humains devraient débuter au cours de l’année 2024 au Children's Hospital of Philadelphia.
Malgré l’avènement imminent de l’ectogenèse partielle, les attitudes médicales à adopter envers l’entité en UA suscitent de vifs débats dans la littérature. Certains auteurs défendent que l’UA soutiendrait un processus ressemblant davantage à la poursuite d’une grossesse. Ce faisant, l’entité en UA pourrait être traitée de la même façon qu’un foetus. Au contraire, d’autres sont d’avis que l’UA est simplement un prolongement plus sophistiqué de l’incubateur. Pour cette raison, ces personnes défendent que l’entité en UA mériterait les mêmes protections juridiques que le nouveau-né en incubateur.
Afin de guider les décisions de prise en charge et d’arrêt de traitement pour l’entité en UA, nous recommandons de transposer la proposition du « fetus as patient » de Chervenak & McCullough à l’entité en UA. De cette façon, même si cette dernière est considérée comme un foetus par certains, les devoirs déontologiques et moraux du corps médical envers leurs patients s’appliqueront à l’entité en UA. -
Communication orale
Corps reproducteur, temporalité biologique et accélération socialeChristlord Foreste (Université de Montréal & Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (Cotutelle))
L'émergence des nouvelles technologies (NTR) de reproduction met en lumière l’interaction complexe entre le corps reproducteur, la temporalité biologique et les normes sociales de reproduction, reconfigurées dans le contexte de la procréation médicalement assistée. Ces NTR, censées offrir la liberté et l’autonomie, suscitent des débats au sein du féminisme, révélant des divergences quant à la conceptualisation de l'émancipation féminine. Autrefois axée sur la remise en question des contraintes reproductives, cette vision est aujourd’hui source de débats contrastés. Certains y voient une libération adaptée aux nouveaux modèles familiaux, tandis que d'autres la considèrent comme une reconfiguration du passé colonial. Nous explorons les enjeux de la
temporalité biologique en soulignant l'entrelacement des rythmes naturels du corps avec les exigences de l'accélération sociale contemporaine, intensifiée par l’utilisation des NTR. Notre communication se concentrera, d’une part, sur la façon dont les courants féministes abordent la PMA, et, d’autre part, sur le rapport des femmes au corps et à la temporalité biologique au prisme de la théorie de l’accélération sociale de Hartmut Rosa. -
Communication orale
"On est sans doute plusieurs centaines à avoir été conçus avec le même donneur" - Une étude qualitative sur la surutilisation du don de spermeMarie-Rose Lépine (UQO - Université du Québec en Outaouais), Sabrina Zeghiche (UQO - Université du Québec en Outaouais)
Contexte : La découverte de personnes issues du même donneur a fait l’objet de plusieurs études ces dernières années. Or, on sait peu de choses sur la façon dont le nombre de personnes issues du même donneur façonne cette expérience.
Objectif de recherche : Examiner les répercussions personnelles et relationnelles de la surutilisation des donneurs de sperme sur les personnes conçues par don.
Méthodologie : Une étude exploratoire qualitative a été menée en 2021-2022. Des entrevues en profondeur ont été réalisées auprès de 22 personnes (16 femmes, 7 hommes et une personne non-binaire).
Résultats : La découverte d'un nombre important de personnes issues du même donneur a provoqué des sentiments de choc et de surprise, combinés à de la curiosité. Bien que les liens tissés avec ces personnes soient généralement décrits comme enrichissants, leur nombre est perçu comme une atteinte à leur singularité et à leur individualité. En outre, la taille du groupe est souvent perçue soit comme une entrave à la formation de liens significatifs avec les membres de la « fratrie », soit comme un fardeau. Enfin, leur nombre peut également entraver leur relation avec le donneur. Pour certains, le fait que le donneur ait donné son sperme à une si grande échelle remet en question son intégrité et ses motivations et agit comme repoussoir. Pour d’autres, le fait qu'ils soient si nombreux à se disputer son attention minimise leurs chances d'établir un contact avec lui. -
Communication orale
Considérations juridiques pour les donneuses d’ovulesAlana Cattapan (University of Waterloo)
Les donneuses d’ovules, qui fournissent leurs ovules à des fins reproductives pour autrui, signent fréquemment des contrats juridiques qui spécifient les conditions de leur don. Ce document peut couvrir la filiation, les modalités de remboursement des dépenses, le sort des embryons non utilisés en conservation, et bien d'autres sujets.
Toutefois, il peut s'avérer complexe pour de nombreuses donneuses d'anticiper les sujets à inclure dans un tel contrat. Cette complexité résulte en partie de la difficulté à accéder à des informations sur les contrats existants, mais aussi parce que certaines donneuses se voient proposer les services d'avocats par les cliniques de fertilité ou les agences, lesquels peuvent privilégier les intérêts des parents receveurs. Certaines donneuses peuvent également se sentir pressées de signer rapidement le contrat pour que le don puisse se réaliser sans retard.
Cet article présente les résultats de 53 entretiens menés avec des donneuses ayant fourni des ovules à une clinique canadienne depuis 2004. Ces entretiens ont abordé les expériences vécues avec leurs avocats et leurs avis sur ce qu'elles auraient pu demander dans leurs contrats juridiques. En s'inspirant de ces recommandations et d'une revue de la littérature pertinante, cet article propose une liste de points clés à considérer pour les donneuses dans la rédaction de leur contrat. Il avance également un cadre pour l'élaboration de contrats types pour le don d'ovules au Canada.
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Communication orale
Des "relations mystérieuses" : qualifier les contacts entre les donneurs et donneuses de gamètes et les personnes issues de leur donIsabel Côté (Université du Québec en Outaouais), Anaïs Martin (UQO - Université du Québec en Outaouais)
Larry a donné anonymement son sperme dans les années 1970 aux États-Unis. Quarante ans plus tard, une lettre lui apprend qu’une personne issue de son don cherche à le contacter. Se noue alors un lien qui reste difficile à définir aujourd’hui : "Le seul mot qui me vient, c’est ‘mystérieux’. Ce n’est pas définissable dans la langue que je connais."
A travers le monde, d’autres donneurs et donneuses de gamètes font des expériences semblables : depuis le début des années 2000, un certain nombre de personnes conçues par don ont entrepris d’identifier leur géniteur ou génitrice. Si les études empiriques donnent un aperçu du vécu des personnes conçues par don, on en sait encore peu sur la manière dont les donneurs et donneuses vivent ces contacts. Comment considèrent-iels les relations qui peuvent en découler ?
Cette intervention présente les résultats d'une étude exploratoire qualitative menée auprès de 13 hommes et 12 femmes ayant donné des gamètes aux États-Unis, en Australie et au Canada entre les années 1970 et 2010, et ayant été contactés par une personne issue de leur don. Elle décrit les diverses réactions que ces prises de contact ont suscité de la part de leurs destinataires, entre surprise, curiosité ou encore prudence, illustrant autant d’enjeux liés à l’organisation du don de gamètes. La nature des relations entre donneurs ou donneuses et personnes issues de leur don sera ensuite interrogée à partir des normes et qualificatifs que les participant·es y associent.