Les vingt dernières années ont été le théâtre de nombreuses réflexions sur les modalités de cette « nouvelle » méthodologie, de cette « discipline » fuyante et insaisissable qu’est la recherche-création, et aucun consensus ne se dégage de ces décennies d’intelligence collective sinon que la recherche-création échappe à toute tentative de cristallisation définitive. Il semble alors de moins en moins utile de tenter de la définir et de la concrétiser avec une typologie unanime. Les organismes subventionnaires et les universités en signalent la dualité dans leurs définitions officielles – la recherche-création engendre à la fois production de connaissances (recherche) et innovation artistique (création) –, mais n’imposent ni forme ni extrant.
En parallèle, un corpus important de travaux et d’œuvres artistiques, dans le contexte post-humain et de la crise écologique, cherche à décentrer l’être humain pour considérer le non-humain depuis une posture d’altérité redéfinie. La recherche-création contribue, ne serait-ce qu’en bouleversant les paradigmes statiques de production et de mobilisation du savoir, au développement de ces postures que les études post-décoloniales et situées ont rendu possibles. Pensons à Peter Sloterdijk et à sa distinction entre l’allotechnique et l’homéotechnique (voir Domestication de l’Être, 2000), par exemple, ou encore à Marielle Macé, qui appelle à envisager une « biophilie » au lieu d’une « biologie » (voir Nos cabanes, 2019).
Ce colloque ne cherche pas à enfoncer des portes ouvertes; les interventions qu’il suscite s’attardent à penser les divers chemins de la recherche-création d’une manière attentive aux enjeux sociaux, culturels et politiques qui découlent d’une telle démarche.