Aller au contenu principal
Il y a présentement des items dans votre panier d'achat.

Informations générales

Événement : 90e Congrès de l'Acfas

Type : Colloque

Section : Enjeux de la recherche

Description :

Les vingt dernières années ont été le théâtre de nombreuses réflexions sur les modalités de cette « nouvelle » méthodologie, de cette « discipline » fuyante et insaisissable qu’est la recherche-création, et aucun consensus ne se dégage de ces décennies d’intelligence collective sinon que la recherche-création échappe à toute tentative de cristallisation définitive. Il semble alors de moins en moins utile de tenter de la définir et de la concrétiser avec une typologie unanime. Les organismes subventionnaires et les universités en signalent la dualité dans leurs définitions officielles – la recherche-création engendre à la fois production de connaissances (recherche) et innovation artistique (création) –, mais n’imposent ni forme ni extrant.

En parallèle, un corpus important de travaux et d’œuvres artistiques, dans le contexte post-humain et de la crise écologique, cherche à décentrer l’être humain pour considérer le non-humain depuis une posture d’altérité redéfinie. La recherche-création contribue, ne serait-ce qu’en bouleversant les paradigmes statiques de production et de mobilisation du savoir, au développement de ces postures que les études post-décoloniales et situées ont rendu possibles. Pensons à Peter Sloterdijk et à sa distinction entre l’allotechnique et l’homéotechnique (voir Domestication de l’Être, 2000), par exemple, ou encore à Marielle Macé, qui appelle à envisager une « biophilie » au lieu d’une « biologie » (voir Nos cabanes, 2019).

Ce colloque ne cherche pas à enfoncer des portes ouvertes; les interventions qu’il suscite s’attardent à penser les divers chemins de la recherche-création d’une manière attentive aux enjeux sociaux, culturels et politiques qui découlent d’une telle démarche.

Dates :

Format : Sur place et en ligne

Responsables :

Programme

Communications orales

Trajectoires des anti-discours et des hors-champs

Salle : B-3310 — Bâtiment : Université de Montréal - Jean-Brillant
  • Communication orale
    « Vous ne cessez de jouez avec les mots ! » Interrogations sur l’(in)tolérance des gardiens du temple académique aux formes d’écritures scientifiques ‘hors-champ’
    Vanessa Jérome (SFU - Simon Fraser University)

    Se peut-il que les spécialistes des enjeux sociaux, culturels et politiques s’envisagent comme des ‘chercheurs-créateurs’? Se peut-il qu’iels réfléchissent leurs pratiques et leurs productions d’une manière qui viendrait nourrir le dialogue fécond des disciplines, auquel chacun·e invite toujours sans jamais s’y risquer vraiment? Se peut-il qu’iels risquent leurs savoirs pour tenter quelque hybridation déroutante, monstrueuse peut-être? Sociologue du politique par discipline, ethnographe par méthode, militante par engagement, écrivaine de manuscrits de tiroirs, photographe opportuniste, c’est en répondant par l’affirmative à toutes ces questions que je me risquerai ici. Puisque «les cas limites sont toujours les cas les plus intéressants», affirmait Lynn Hugues, je propose de confronter ma pratique de chercheuse aux plis et replis d’une discipline - la recherche-création - qui m’est étrangère. Et pour cause. Elle m’est interdite. C’est cette interdiction que je propose de prendre pour objet. Partant d’un avis négatif de publication de l’un de mes textes dans une revue académique au motif que mon «style d’écriture, autoréférentiel, suggestif mais peu concret, et ne cessant de jouer avec les mots a paru contreproductif», je voudrais m’interroger sur les conditions de contention de l’écriture académique et sur leurs conséquences pour la recherche autant que pour la création.

  • Communication orale
    Anti-discours de la Méthode de la recherche-création littéraire. Où en sont les universités françaises ?
    Anne-Marie Petitjean (Cergy Paris Université)

    «Les savoirs de qualité sont indisciplinés», affirme Loty dans un article qui impose en France la notion d’indisciplinarité. Mais indiscipline veut-il dire non-méthode? Pour le champ encore récent en France de la recherche-création littéraire, la reconnaissance de savoirs non disciplinarisés représente un enjeu majeur de son déploiement dans les universités. L’idée que l’enquête littéraire puisse déplier par la praxis créative des savoirs nouveaux, difficiles à atteindre par la documentation d’un objet «littérature» externalisé, confère à la r-c une légitimité qui dépasse la simple acceptation des artistes dans les communautés académiques et bouscule «les paradigmes statiques de production et de mobilisation du savoir». Elle se distingue comme «poursuite d’une voie», au sens premier du mot «méthode»—μέθοδος. Je propose ici un anti-discours de la méthode, pastichant Descartes pour interroger la transformation de la rationalité en r-c littéraire. Et parce que «la diversité de nos opinions ne vient pas de ce que les uns sont plus raisonnables que les autres, mais seulement de ce que nous conduisons nos pensées par diverses voies, et ne considérons pas les mêmes choses», il permettra de prendre la mesure du milieu biophiliste et performatif qui s’est constitué en France, en dialogue avec la r-c canadienne, déplaçant l’auto-considération de la pensée agissante à la considération de l’environnement. L’anti-discours explore des formes alternatives à la rationalité distanciée.


Dîner

Dîner libre

Salle : B-3310 — Bâtiment : Université de Montréal - Jean-Brillant

Communications orales

Sentiers de la biophilia et du post-humain

Salle : B-3310 — Bâtiment : Université de Montréal - Jean-Brillant
  • Communication orale
    Le discours des algues
    Émile Fromet De Rosnay (University of Victoria)

    Dans le contexte de l’île Maurice, nous explorerons le parallèle entre nature et langage, entre hybridité culturelle, une créolité menacée par l’homogénéisation mondiale, et une biogéographie insulaire qui fait face à l’effondrement climatique. Comment concevoir théoriquement et poétiquement l'intersection de la nature et de la culture, surtout où le langage pose des problèmes onto-épistémologiques dans le contexte du posthumanisme ? Une poétique qui entame un dialogue avec la nature, qui s'écarte d'une logique instrumentale, vers une logique ouverte et participative du langage. Comment générer une relation avec la nature qui ne s'appuie plus sur les modèles de communication traditionnels. Une multimodalité improvisée qui « écoute » les algues : d’abord, enregistrer avec des hydrophones et transformer le code numérique en poésie numérique composée de mots et de phrases du parler mauricien; ensuite, créer des paysages et cartes sonores de l'île en écho à la biologie et à la géographie ; filmer ce processus à travers des méthodes de vidéo gestuelle; enfin, créer un dialogue entre les volets recherche et créatifs. Comme recherche-création, l’objectif est alors double, où le volet création s’avère « théorique » à part entière (Manning), en correspondance avec la recherche, qui à son tour informe le travail de création. Cette communication parlera aussi des défis poétiques, méthodologiques et éthiques du projet.

  • Communication orale
    L’imaginaire du lichen pour interroger les processus de création en contexte de neurodiversité : émergence d’un appareillage de recherche-création
    Annyck Martin (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    C’est le parti pris de l’approche indisciplinée de l’essai, du fonctionnement symbiotique du lichen : brasser joyeusement les disciplines et en exprimer des sucs (Zonca, 2021).

    Au départ, il y avait la couleur verte et une envie de marcher en forêt. Je savais que je recherchais quelque chose, sans savoir quoi précisément. Une fois dans les sentiers, je me suis retrouvée face à une multitude d’éléments. Devant l’étendue infinie des possibles, je me suis mise à l’écoute de mon ressenti, précieux guide pour mener une recherche-création (Rappaport, 2013), afin d’accueillir ce qui allait entrer en résonnance. C’est ainsi que j’ai fait la rencontre d’Evernia mesomorpha, un lichen en forme de buisson échevelé. Depuis, dans mon atelier, le lichen, au sens pluriel, est devenu un partenaire de pensée, un fil conducteur qui m’accompagne le long du trajet.

    Par le biais de cette communication, je souhaite présenter l’appareillage de départ avec lequel je travaille dans le cadre de mon projet doctoral. Dans ma recherche-création, mes explorations artistiques m’informent et m’apprennent. Ces dernières participent à l’élaboration d’une thèse-essai multimodale envisagée comme une métaoeuvre ou un holobionte. L’essai devant être entendu ici comme un verbe, dans le sens « d’essayer », d’œuvrer dans l’esprit de l’essai et considéré comme une méthode se rapprochant du sens donné par Emily Huurdeman dans son article intitulé « Essaying art: An unmethodological method for artistic research » (2020).

  • Communication orale
    Tisser une nouvelle relation avec le vivant à travers la création littéraire : l’apport d’une mission intersectorielle sur le Saint-Laurent
    Marina De Seta (UQAR - Université du Québec à Rimouski)

    Ma recherche doctorale porte sur la possibilité de générer de l’empathie à travers la création littéraire et sur la portée éthique de cette avenue, en vue d’un idéal de justice sociale. Dans son essai intitulé « Nos Cabanes », Marielle Macé débute ses réflexions autour d’une formule qu’elle reprend d’un livre d’Emmanuelle Pagano: Nouons-nous. Elle nous incite à se lier aux autres, non pas dans le sens de s’associer à ceux et celles qui nous ressemblent, mais plutôt dans le sens de réfléchir à partir d’un Nous. Avec le mot « cabane » elle veut indiquer des lieux nouveaux, non nécessairement matériels, où l’on invente des façons autres d’entrer en relation, avec le vivant et avec autrui. L’écriture peut être un de ces lieux. À travers une recherche qui adopte une méthode phénoménologique pour regarder aux pratiques d’écriture, j’explore la possibilité de nourrir un imaginaire où le vivant et l’humain sont part de la même communauté. Dans ma présentation, je vais connecter, par un fil encore en train d’être cardé, les résultats de ma première année de recherche, en nourrissant les réflexions grâce à l’apport d’expériences variées. Je parlerai notamment de la Mission Sauvé, une mission intersectorielle sur le Saint-Laurent où la littérature et la science se sont accompagnées afin de faire parler l’état automnal du fleuve Saint-Laurent dans l’estuaire moyen.

Communications orales

Parcours et passages des praxis visuelles

Salle : B-3310 — Bâtiment : Université de Montréal - Jean-Brillant
  • Communication orale
    Comment le dessin désigne une méthode visuelle pour mener une recherche en architecture : Theo Deutinger, Design Earth, Terra Forma, Carole Lévesque
    Eric Le Coguiec (UNIVERSITÉ DE LIÈGE, BELGIQUE)

    Ma proposition vise à pointer des liens entre la production récente de dessins de Design Earth (Etas-Unis), ceux rassemblés dans le livre Terra Forma (France), ceux de Theo Deutinger (Pays-Bas) et enfin ceux de Carole Levesque (Canada).

    Ces dessins liés au champ de l'architecture, bien que présentant des régimes graphiques différents, détiennent une fonction critique et politique qui remet en question la pensée rationnelle moderne et sont traversés par des concepts issus de la philosophie féministe, notamment ceux développés par Donna Haraway, Anna Tsing et Vinciane Despret. Qu'il s'agisse de dessins en apparence techniques (Deutinger, Terra Forma) ou plus narratifs et sensibles (Carole Levesque, Design Earth), ces représentations graphiques qui traitent des crises écologiques liées à l’extraction des ressources par exemple ou qui pointent les conflits sociopolitiques, résonnent avec les épistémologies du point de vue et la notion de « savoir situé » dans leur manière de fabriquer de nouveaux récits et de révéler un impensé. A partir de ces exemples, j’expliquerai que ces réalisations graphiques rendent compte d’un nouveau type d’enquêtes visuelles qui déstabilisent certaines conceptions de la recherche en architecture.

  • Communication orale
    L’art contemporain et la recherche-création : pratiques culturelles de la théorie
    Benoit Jodoin (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    ans les discours critiques en arts visuels, la recherche-création fait souvent l’objet de tirs croisés. Elle y est parfois simplement ignorée, décrite à mots couverts comme scolaire, associée à la période de formation de l’artiste, ou dominée par des impératifs extra-esthétiques (Bruneau, Villeneuve et Burns 2007). Il est toutefois marquant de constater à quel point ce qu’elle mobilise définit l’art contemporain. Du process art à l’art conceptuel, de la performance à l’art communautaire, ses grands principes trouvent écho dans la manière dont la recherche-création est aujourd’hui théorisée en Amérique du Nord et en Europe (Loveless 2012 ; Knowles et Cole 2008 ; Nelson 2006 ; Sullivan 2006). Prenant comme point de réflexion la pratique artistique de Kader Attia, il s’agira dans cette communication d’identifier les points de croisement entre certains principes de la recherche-création et les grands motifs de l’art contemporain tels qu’identifiés par la critique (méthodes processuelles de création, centralité des préoccupations éthiques, infinitude des formes, traitement expérientiel, pluriel et fragmentaire de la vérité,hybridation des genres et des registres, etc.) tout en mettant l’accent sur un point derencontre. L’artiste se voit attribuer le rôle de mettre la théorie en pratique, de la faire passer dans la culture, reprenant à de nouveaux frais le vieux rêve de Marx, réinventé à une autre époque par Antonio Gramsci : transformer le monde par la théorie.


Dîner

Dîner libre

Salle : B-3310 — Bâtiment : Université de Montréal - Jean-Brillant

Communications orales

Itinéraires croisés de la pensée queer

Salle : B-3310 — Bâtiment : Université de Montréal - Jean-Brillant
  • Communication orale
    Potentiels contre-hégémoniques de la recherche-création collective en contexte d'intervention: l'exemple du séminaire sur les violences dans les relations LGBTQIA2S+
    Pierre-Luc Landry (University of Victoria), Cédric Trahan (University of Victoria)

    Le projet Médiations par la littérature des violences dans les relations intimes et amoureuses LGBTQIA2S+ : séminaire de recherche-création-intervention (CRSH 2022-2023) émerge de plusieurs années de recherche financée en travail social qui ont permis de développer une vaste documentation sur les expériences de violence vécue (subie ou exercée) dans les relations intimes et amoureuses chez les populations LGBTQIA2S+. De mai à août 2022, nous avons tenu un séminaire pour mobiliser ces connaissances à travers leur médiation par la littérature. Il s'agit donc d’une recherche-création-intervention dont l’audace et le dynamisme réside dans le fait de mettre en relation plusieurs acteur·trices concerné·es par les enjeux sexologiques soulevés. Si la recherche-création est une pratique établie dans les universités canadiennes, l’intervention est un concept particulièrement polysémique et polymorphe que l’on rattache davantage aux activités professionnelles issues du travail social, de la psychoéducation ou des sciences de la santé qu’au domaine des études littéraires. Or, l’intervention est une pratique relationnelle qui cherche la transformation d’une situation et l’empowerment d’individus ou de communautés qui peut s’incarner dans la création littéraire . Cette communication réfléchira de manière critique à l'expérience du séminaire et au travail éditorial en cours visant à publier un ouvrage polymorphe qui, à son tour, fera acte de recherche-création-intervention.

  • Communication orale
    Penser les limites de l’autoethnographie queer comme moteur de recherche-création indisciplinable
    Joelle Rouleau (UdeM - Université de Montréal)

    Inspirée par les travaux de Jones et Adams publié dans Queer Methods and Methodologies (Browne et Nash 2016), j’ai développé une pratique de recherche-création autoethnographique queer. Suite à l’échec (momentané?) de mon plus récent projet créatif, je me questionne sur les limites de l’autoethnographie comme méthodologie queer dans sa mobilisation scientifique. D’une part, la possibilité de se mobiliser émotivement dans un contexte professionnel où la notion du statut artistique n’équivaut pas au statut de chercheure est limitée, et me semble nourrir le paradoxe de l’artiste-activiste-chercheure-professeure d’université que je suis. Plusieurs questions émergentalors: qui peut (se) raconter? Qui peut (s’)institutionnaliser quels savoirs, et comment? D’autre part, tout comme la recherche-création a réussi à échapper aux définitions formelles, la théorie queer se nourrit du paradoxe qu’elle incarne en refusant d’être en elle-même une théorie (De Lauretis 1991). Une ambiguïté émane du paradoxe de tenter de fixer l’indéfinissable et de tenter d’institutionnaliser l’indisciplinable. La recherche-création possède un potentiel queer dans cette façon de sortir du cadre de la recherche et surtout de le repenser. Ma présentation portera sur la manière par laquelle l’échec de marecherche-création a permis de glisser à travers les barreaux de la structure universitaire qui l’a rendue possible, afin d’y provoquer un lieu propice à la réflexion queer et indisciplinée.

  • Communication orale
    Inventivités « kuir » aux extrémités de l’Amérique : repenser les territoires de la recherche-création depuis les pratiques artistiques queer du Chili
    Nicholas Dawson (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    La recherche-création et les théories queer sont, en Amérique latine, souvent perçues avec méfiance, car elles reconduisent des formes épistémologiques d’impérialisme rappelant l’implication des pays du nord dans les dictatures. Plusieurs chercheur·es, artistes et militant·es investissent le potentiel émancipateur de ces modèles de pensée, tout en inventant des stratégies créatives pour identifier les tensions géopolitiques qui se jouent dans cette circulation d’idées souvent inadaptées aux réalités du sud du continent. Au Chili, certain·es artistes décentrent les théories queer grâce à des changements lexicaux et orthographiques – on parle plutôt de « disidencia sexual » (Godoy Vega et Rivas San Martín, 2018; Rivas San Martín, 2020) ou du « kuir » (Díaz et Mijail, 2016; Mijail 2018) –, mais on peine encore à trouver des manières aussi critiques que locales de nommer les pratiques apparentées à la recherche-création. Je propose donc d’étudier les œuvres performatives de Felipe Rivas San Martín (2010) et les ouvrages littéraires de Jorge Díaz (2016; 2021), deux artistes-chercheur·es chilien·nes qui inventent des formes indisciplinées et « kuir » permettant, depuis cette extrémité de l’Amérique, d’habiter autrement le territoire que tente de circonscrire, parfois de manière malhabile, l’expression « recherche-création » au Canada (Loveless, 2019), et de penser cette approche non pas dans une perspective nationale, mais dans une dynamique critique de la circulation des idées.