Informations générales
Événement : 90e Congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Section 500 - Éducation
Description :Dans le cadre du congrès de l’Acfas, la revue Genre Éducation Formation et le GT13 « Éducation et diversité » de l’AISLF, associé au RIED (Réseau international éducation et diversité), organisent un colloque transatlantique, qui propose de traiter la question du genre en éducation.
« On ne naît pas femme, on le devient » : l’importance de la question du genre en éducation est au cœur de la citation féministe la plus célèbre du monde francophone. À partir du moment où il est affirmé qu’aucune nature, qu’aucune biologie, qu’aucun destin préécrit ne permet d’expliquer (et de justifier) le monde social, à l’instant où on admet que « l’intervention d’autrui dans la vie de l’enfant est presque originelle et que dès ses premières années sa vocation lui est impérieusement insufflée » (de Beauvoir, 1949, p. 286), alors la question du genre en éducation et en formation devient centrale pour comprendre l’organisation sexuée de la société.
Comme l’ont souligné les auteures féministes des années 1970-1980, la sociologie française de l’éducation des années 1960-1970 s’est essentiellement préoccupée des inégalités de classes, reportant la « variable sexe » à un niveau secondaire. Après le texte pionnier de Liliane Kandel (1975), qui pointait le fait que le système éducatif français – malgré les principes d’égalité qui l’animent – discrimine les filles et les femmes, des ouvrages fondateurs de ce champ paraissent dans les années 1990. Nicole Mosconi (1989) interroge les effets de la mixité scolaire et crée peu à peu le concept de « rapport sociosexué au savoir » : si tous les individus ont le droit d’acquérir tous les types de savoirs, dans les faits, certains savoirs sont considérés comme tabous ou infamants, naturels ou transgressifs selon sa classe sociale et sa catégorie de sexe. De son côté, Marie Duru-Bellat (1990) rend compte de la façon dont l’école prépare les filles et les garçons à des rôles sociaux distincts. In fine, que l’on parle de didactique ou de pédagogie, qu’on l’aborde de manière transversale ou disciplinaire, qu’il s’agisse d’éducation des enfants ou de formation des adultes, que l’on se situe dans des institutions de formation ou dans des contextes non formels, il s’agit toujours de venir à bout de la hiérarchie inhérente au genre, soit en formant les individus de manière égalitaire, soit en débarrassant l’éducation des inégalités qui la traversent.
Nous vous proposons quatre thématiques :
- Genre et didactiques;
- Intersectionnalité en éducation;
- Conversation critique entre l’école et l’éducation à la citoyenneté numérique autour des principes de justice sociale, d’égalité de genre et d’émancipation;
- Mise en œuvre des politiques éducatives en faveur de l’égalité des sexes et des sexualités.
Ce colloque est ouvert aux chercheur·ses de toutes les disciplines des sciences humaines et sociales en lien avec l’éducation. Dans le but d’avoir un dialogue transatlantique, nous nous efforçons d’équilibrer les pays communicants. La jeune recherche est bienvenue.
Dates :Format : Sur place et en ligne
Responsables :- Isabelle Collet (Université de Genève)
- Giorgia Magni (Université de Genève)
- Ania Tadlaoui-Brahmi (Haute Ecole Pédagogique de Fribourg)
Programme
Pédagogie féministe universitaire
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Communication orale
Conférence d'introductionGeneviève Pagé (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Analyses de pratiques didactiques en classe et évaluation
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Communication orale
Enseigner Bel Ami (1885) en classe de seconde : (dé)naturaliser le genre ? Effets de la contextualisation et de l’actualisation sur l’élève sujet-lecteur.Marie Valin (Université Montpellier)
Œuvre patrimoniale, le roman Bel Ami de Guy de Maupassant (1885) est fréquemment lu dans les classes du secondaire français, en particulier parce que la peinture des milieux de la bourgeoisie et de la presse parisiennes du XIXème siècle amène à l’enseignement du Réalisme, esthétique majeure de l’histoire littéraire scolarisée. Mais parce que la diégèse se concentre sur la figure d’un héros ambitieux, séducteur sans scrupule, dont toutes les relations avec les personnages féminins sont marquées par la contrainte et la violence, elle interroge le genre et incite l’enseignant à s’en saisir comme outil didactique, qui institue l’élève comme sujet-lecteur. Mon enseignement de ce roman en classe de seconde générale s’envisage dans une double dimension : matérialiste (conditions de production, réception) et internaliste (étude des personnages, de leurs relations, du milieu de la presse et du rapport sexué au pouvoir et à l’écriture représentés). Comment la lecture littéraire, dans sa dialectique entre actualisation et contextualisation, amène-t-elle chez les élèves des gestes de lecture axiologiques susceptibles de conscientiser le genre, et pour quels effets ? Le recueil des données comprend productions subjectives multimodales d’élèves, textes scolaires (commentaire, dissertation), verbatims d’entretien. Plusieurs orientations d’analyse sont abordées : analyse sémiolinguistique des productions, effets de la communauté interprétative sur l’interprétation individuelle.
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Communication orale
Les représentations sociales liées aux stéréotypes de genre dans les pratiques enseignantes et les curriculums de mathématiques au secondairePauline Champagne (UdeS - Université de Sherbrooke)
L’objectif de la recherche doctorale est d’étudier les représentations sociales liées aux stéréotypes de genre dans les pratiques enseignantes en mathématiques au regard de la sociologie du curriculum de Forquin (2008). Malgré l’idée plutôt répandue que l’égalité entre les genres serait déjà atteinte à l’école (Charron et al., 2016), la manière dont les contenus scolaires sont présentés serait empreinte de stéréotypes, notamment en mathématiques. Or, le choix des contenus revient, en grande partie, aux enseignant.e.s qui les présentent en accord avec leur représentation, construisant ainsi une réalité commune et influençant ainsi le développement de stéréotypes de genre à l’école.
Inscrite dans l’axe 1 du colloque (genre et didactiques), l’étude propose de réfléchir à la façon dont les pratiques enseignantes en mathématiques permettent d’entretenir des représentations sociales liées aux stéréotypes de genre.
Dans un premier temps, la communication vise à présenter le contexte dans lequel s'inscrit la recherche, c’est-à-dire la persistance d’inégalités de genre en sciences et en mathématiques. Ensuite, le cadre de référence sera présenté. Il permettra d’expliquer le concept de représentations sociales (Gilly, 2003), sur lequel repose l’étude, ainsi que de caractériser l’approche de la sociologie du curriculum de Forquin (2008). Enfin, les choix liés à la méthodologie seront précisés afin de présenter la méthode de collecte de données envisagée et le type d’analyse prévue.
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Communication orale
Comparaison de directions d’étude de deux enseignantes et ses effets sur l’activation du positionnement de genre épistémique des élèves dans le cadre d’une recherche collaborativeStéphanie Cano (Université Jean Jaurès), Ingrid Verscheure (UMR EFTS – Université de Toulouse Jean Jaurès)
Nous présentons un extrait d’une recherche collaborative (RC) (Verscheure, 2020) dans laquelle enseignant.es et chercheur.es s’attellent à la construction de contenus spécifiques (ici autour de la littérature jeunesse) pour prendre en charge la question des inégalités filles-garçons. Inscrites dans le cadre de l’action didactique conjointe, nous mobilisons le concept de direction d’étude du professeur (Chevallard, 1997) et celui de positionnement de genre épistémique (Verscheure et al., 2020) pour décrire les actions des participant·es. Nous nous intéressons à la direction d’étude de deux enseignantes avec leur classe en maternelle (4-5 ans). au regard de leur ancienneté dans la recherche collaborative et ses effets sur l’activation du positionnement de genre épistémiques des élèves.
Le recueil des données articule des prises de notes, des entretiens et des enregistrements vidéo des séances de lecture et débats autour d’ouvrages de littérature jeunesse. Le traitement des données mobilise les descripteurs de l’action conjointe pour décrire l’activité didactique conjointe in situ du professeur et des élèves.
Nos résultats mettent en évidence des directions d’étude différentielles au regard des positionnements de genre des élèves et de l’ancienneté dans la RC de l’enseignante. Nous pointons quelques changements dans les pratiques didactiques des enseignantes qui conduisent à créer les conditions pour favoriser l’étude de la majorité des élèves, filles et garçons.
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Communication orale
Co-construction des inégalités selon le sexe : effets de l’épistémologie pratique du professeur sur l’étude des élèves filles et garçons dans un dispositif de hand à 4Laurine Decramer (UMR EFTS - Université Toulouse II Jean Jaurès), Ingrid Verscheure (UMR EFTS / Université Toulouse 2 Jean Jaurès)
Cette recherche en didactique de l’EPS s’intéresse à la mise en œuvre d’une séquence d’enseignement-apprentissage du hand à 4, en cycle 3 (âge 10-11ans). La maîtrise polyvalente des savoirs didactiques est une difficulté en primaire (Pontais, 2015) et des inégalités d’apprentissage peuvent émerger, aussi en lien avec le sexe des élèves. Pour mieux comprendre l’origine de ces inégalités, nous nous intéressons aux effets des épistémologies pratiques du professeur (Amade-Escot, 2014) sur sa direction d’étude (Chevallard, 1997) et sa visibilité didactique (Chopin, 2008) et par conséquent, sur l’étude des élèves, filles et garçons.
Le recueil de données se fonde sur l’élaboration et la transmission d’un dispositif-ressource de séances de hand à 4 qu’un enseignant s’approprie, notamment en termes d’enchaînement des séances. Le corpus des données s’appuie sur des entretiens et des enregistrements vidéo et audio de 11 séances. Le traitement des données mobilise les descripteurs de l’action conjointe pour décrire l’activité didactique conjointe in situ du professeur et des élèves.
Les résultats attendus montreront des difficultés pour l’enseignant de s’approprier un dispositif conçu sans sa participation, étant aux prises avec ses propres épistémologies pratiques et freinant ainsi sa visibilité didactique. Ils pointent aussi l’imbrication de la direction d’étude et de l’étude des élèves pour que filles et garçons, faibles et forts puissent tirer profit du dispositif de hand à 4.
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Communication orale
Comment expliquer le décrochage des filles en mathématiques au CP (Grade 1), en France ?Nathalie Sayac (Université Rouen Normandie)
En France, depuis 2018 sont proposées, à l’échelle nationale, des évaluations visant à apprécier les acquis des élèves de Cours préparatoire (grade 1, élèves âgés de 6 - 7ans) et de CE1 (grade 2, élèves âgés de 7 à 8 ans) en Français et en Mathématiques, à trois moments : à l’entrée au CP (temps 1), à la mi-parcours du CP (temps 2), à l’entrée au CE1 (temps 3). Les résultats de ces évaluations sont comparés, d’une année à l’autre, pour étudier les évolutions des acquis des élèves débutant leur cursus scolaire à l’école élémentaire. Un résultat témoigne d’une rupture d’égalité fort surprenante entre les performances des filles et celles des garçons en Mathématiques dès le temps 2. Alors que les résultats des filles et des garçons en mathématiques ne présentent pas de différence à l’entrée au CP, ceux des filles se détachent négativement de ceux des garçons à partir de l’évaluation de mi-parcours au CP et se prolongent en CE1.
Parce qu’il est indispensable de comprendre ce phénomène et de tenter d’y remédier, nous avons conçu une étude s’appuyant sur plusieurs hypothèses que nous souhaitons éprouver simultanément à travers un protocole pluridimensionnel : observation de passations d’épreuves en mathématiques, entretiens d’enseignant·es et d’élèves de CP, mais aussi analyse didactique des tâches mathématiques proposées aux deux différentes évaluations. Une présentation des premiers résultats de cette étude sera faite au colloque.
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Communication orale
Pratiques enseignantes, enseignement du genre? Le cas des élèves au début de la scolarité obligatoireLaure Minassian (Université de Shanghai)
En s’attachant aux processus qui produisent la sexuation du corps dès le début de l’école obligatoire, c’est-à-dire là où les apprentissages sont considérés comme le socle de la scolarité future, la communication proposée vise à comprendre comment commence et se poursuit la sexuation du corps depuis l’enfance.
Dans la continuité des travaux de Martin (1998), l’objectif ici fixé consiste à montrer en quoi au travers de dispositifs pédagogiques (Bonnéry, 2015) s’actualisent des normes sociales au sein d’un curriculum caché. Ce dernier à une fonction de contrôle social qui s’étend au-delà du seuil de la scolarité (Bowles and Gintis 1976). Bien qu’une partie de celui-ci ne soit pas complètement invisible aux enseignants (Perrenoud, 1995), en ce qui concerne le genre, la question de l’opacité est probablement plus intense puisqu’à la lisière des modes et pratiques qui garantissent l’ordre ou l’obéissance ou encore la docilité dans la classe se joue l'incarnation du genre dans l'enfance.
L’observation intensive d’une classe de CP-CE1 permet de proposer des hypothèses sur l’interdépendance des pratiques corporelles, langagières et cognitives qui contribuent à la bi-catégorisation du genre. Un des constats que cette observation soulève est qu’il existe un contrôle social invisible, mais très structuré, des élèves en les formant à occuper des places hiérarchiques différentes dans la société.
Dîner libre
Investigation des contenus et connotations sexuées
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Communication orale
Analyse de trois héroïnes en littérature de jeunesse : des modèles positifs de la féminité sous le signe de la diversitéAnne-Marie Dionne (Université d’Ottawa)
Des études montrent que la littérature de jeunesse véhicule des représentations stéréotypées concernant les genres (Dafflon Novelle, 2006 ; Detrez, 2010). En outre, on y retrouve en abondance des personnages féminins conformes à une vision sexiste de la féminité (Dionne, 2009). Pourtant, il existe des livres qui bousculent de tels clichés et dans lesquels des personnages féminins se démarquent de l’image traditionnelle ayant préséance en littérature de jeunesse. Mais alors, qu’est-ce qui caractérise ces protagonistes d’avant-garde ? Nous avons mis sous la loupe trois héroïnes évoluant dans des séries de livres pour la jeunesse. En tout, quinze livres ont été analysés. Un premier constat découlant de cette analyse est que les héroïnes de ces livres défient les configurations sexistes habituelles. Un deuxième constat est que par les traits distinctifs qui les caractérisent, elles projettent des représentations diversifiées de la féminité. Ainsi, chacune contribue à sa façon à multiplier les modèles de référence positifs tout en laissant transparaitre une expression personnalisée de leur féminité. Des extraits provenant des livres analysés seront présentés pour mettre en exergue les nuances entre trois modèles non traditionnels de la féminité. Ceci nous mènera à parler de l’importance de proposer aux enfants des personnages diversifiés concernant les genres, de même que leur influence sur le développement de leur propre identité sexuée.
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Communication orale
Nommer le consentement, c’est bien; le comprendre, c’est mieux : une analyse du programme-cadre d’éducation à la sexualité ontarienMarie-Hélène Brunet (Université d’Ottawa), Béatrice De Montigny (Université d’Ottawa)
Les discussions entourant les agressions sexuelles et le consentement se sont multipliées dans la société suite à divers événements, par exemple l’affaire Ghomeshi et le mouvement #MeToo. Selon plusieurs chercheuses, chercheurs et activistes, l’école a un rôle à jouer dans la prévention des violences sexuelles en abordant entre autres la question du consentement. La présente communication se base sur une recherche ayant pour sujet la place accordée au consentement dans le programme-cadre ontarien au niveau primaire, dans le but de mieux distinguer le type d’éducation au consentement qu’on y trouve. Une analyse de fréquence, combiné à une analyse critique de discours, ont permis de constater que bien que le concept soit présent, il est rarement défini ou expliqué. De plus, le discours entourant la notion de consentement se centre sur les risques sexuels, négligeant les aspects positifs de la sexualité, du consentement et du plaisir. À partir de ces considérations, les autrices explorent le potentiel des pédagogies antioppressives dans une démarche d’apprentissage graduel du consentement global dès le préscolaire tout en fournissant des pistes de réflexions et d’intervention. Cette communication s’insère dans la thématique proposée puisqu’elle réfléchit aux contenus d’enseignement et leurs connotations sexuées dans les curriculums tout en s’interrogeant sur les contextes éducatifs et leur rôle dans la (re)production et la déconstruction des relations inégalitaires.
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Communication orale
Enseigner le sexe au lycée : analyse des corporéïtés dans les programmes de Sciences de la Vie et de la TerreMaïa Petoton (Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis)
En investiguant la construction historique du discours programmatique des Sciences de la Vie et de la Terre (SVT), cette communication interrogera le rôle de cette discipline dans l’élaboration de corporéïtés hégémoniques. L’originalité de cette communication réside dans le fait que, si le rôle de l’école dans la (re)production des stéréotypes de sexe est largement documenté et que le Ministère de l’Éducation nationale réaffirme sa lutte contre les inégalités liées au sexe1, la question de la production de ce sexe, par sa didactisation, demeure impensée. L’analyse discursive du sexe dans les SVT - issue du dépouillement systématique des programmes de lycée produits depuis l’institutionnalisation des SVT (1902) jusqu’aujourd’hui - révèle des processus de production institutionnelle des limites corporelles. Cette communication s’attachera ainsi à montrer comment le discours des SVT sur le sexe, par un jeu de légitimation/disqualification, participe de l’insertion des corps adolescents dans des « schémas régulateurs » (Butler, 2009/1993, p. 13) tant du genre que de la race, de la classe, du handicap ou de la sexualité. Fondée sur l’analyse discursive des programmes des SVT, cette communication s’intégrera idéalement à l’axe 1.
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Communication orale
La fabrique des activités de l’éducation sexuelle au Maroc sous le prisme de l’égalité entre les sexesZouhair Gassim (École Normale supérieure, Université moulay Ismail)
Bien que la définition de l’éducation sexuelle soit identique dans divers contextes, l’élaboration d’un contenu consensuel reste un exercice ardu, puisqu’il s’agit d’une discipline qui ne se limite certainement pas à un corps de connaissances et d’informations, mais qui engage également des normes et pratiques sociales. L’analyse sociohistorique de l’éducation sexuelle dans le système éducatif marocain a révélé que les délais de la fabrique des savoirs scolaires sont différents. D’un côté, l’école a rapidement interagi avec les discours relatifs à la planification familiale et à l’apparition du SIDA. D’un autre côté, elle est très lente au niveau des connaissances et droits relatifs à la sexualité fondés sur l’émancipation et l’autonomisation des filles/femmes. La réduction de l’éducation sexuelle en informations biomédicales, la marginalisation des dimensions psychoaffectives et sociales de la sexualité et le passage sous silence des rapports de pouvoir entre les sexes ne peuvent que contribuer à la (re)production des inégalités entre les sexes, et donc à une fabrique hiérarchisée des citoyen-ne-s. Il y a donc bien conjonction entre des dimensions sociales sous-tendues par des considérations démographiques, préventives, politiques et religieuses pour tenter de peser sur le contenu scientifique de ce qui est enseigné en éducation sexuelle.
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Communication orale
Les inégalités de genre dans les manuels scolaires : où en est le Luxembourg?Sylvie Kerger (Université du Luxembourg), Enrica Pianaro (Université du Luxembourg), Claire Schadeck (Université du Luxembourg)
Au Luxembourg, les premières revendications pour une éducation égalitaire entre filles et garçons furent émises à la fin des années ‘70. Le Cercle luxembourgeois des enseignants critiques (CLEC) proposa, dès 1978, de combattre le sexisme dans l’institution scolaire en relevant les stéréotypes de genre à l’école et plus particulièrement dans les manuels scolaires. Qu’en est-il 45 ans plus tard ?
Nous basant sur une recherche quantitative et qualitative, seront présentés les résultats d’une étude menée entre 2021 et 2023. Celle-ci révèle la construction des inégalités de genre à travers une cinquantaine de manuels de l’enseignement secondaire (élèves de 12 à 15 ans) au Luxembourg. L'objectif de notre recherche est de montrer la prévalence et la persistance des stéréotypes de genre dans les représentations visuelles et écrites à travers (1) le comptage des personnages féminins, masculins et non-binaires, ainsi que le comptage des auteur·ices ; (2) la description des activités professionnelles, de loisirs et domestiques classées comme "féminines" et "masculines" ; (3) l'utilisation d'un langage inclusif du genre ; et (4) l'identification de personnages non-blancs, en situation de handicap et non-hétérosexuels.
Par le biais de notre analyse, nous formulerons des recommandations à destination des responsables en charge de l’élaboration des manuels scolaires et des politiques éducatives qui permettront d’appliquer un regard critique et d’élaborer du matériel non-discriminatoire.
Formation didactique des enseignantes et enseignants
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Communication orale
Analyse des pratiques didactiques d’enseignantes dans des activités de bien-être à l’université : quels effets de genre?Geraldine Gaillard (Université Toulouse Jean Jaurès), Ingrid Verscheure (UMR EFTS / Université Toulouse 2 Jean Jaurès)
Nous présentons une recherche exploratoire de Master 2 en Sciences de l’Education (Gaillard, 2022). Le contexte investigué est celui de l’enseignement supérieur français et plus particulièrement son service des activités physiques et sportives (SUAPS).
Inscrites dans le cadre de l’action didactique conjointe (Sensevy, 2011), nous nous sommes appuyées sur le concept de transposition didactique (Verret, 1975 ; Chevallard, 1989) et plus particulièrement sur l’analyse ascendante de celle-ci (Schubauer-Leoni et Leutenegger, 2005).
La problématique de notre recherche s’intéresse à la différenciation sexuée des interactions didactiques effectuées par les enseignantes, dans le cadre des activités de bien-être.
Nous avons mené une recherche auprès de deux enseignantes d’activités de bien-être (Sébire, & Pierotti, 2013) à l’université, afin d’identifier les processus didactiques à l’œuvre dans ces pratiques au regard du genre, en lien avec leur direction d’étude.
A partir d’une analyse à trois niveaux (macro, méso et microdidactique) des données récoltées, nos résultats pointent une différenciation des processus didactiques utilisés par les enseignantes selon la proxémie qu’elles engagent avec ses étudiant·es, et que les régulations didactiques mobilisées engendrent des apprentissages différenciés selon le genre.
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Communication orale
Enjeux didactiques du genre en histoire : apports et limites de deux séquences d’enseignement-apprentissageMarie-Hélène Brunet (Université d’Ottawa), Valérie Opériol (Université Genève)
Considéré comme une question socialement vive, voire un sujet tabou, le genre demeure souvent difficile d’approche en classe d’histoire, ce qui ne devrait pas pour autant occulter son importance au regard des finalités éducatives liées à l’égalité. Deux études de cas (des séquences d’enseignement-apprentissage en contextes suisse et canadien) permettent d’identifier certains enjeux didactiques propres à la réflexion sur le genre. Après la présentation des principaux obstacles qui surgissent en classe, selon les recherches, les séquences seront analysées afin d’évaluer leur potentiel à dépasser ces obstacles : dans quelle mesure le genre y est-il mobilisé en tant que catégorie d’analyse historique ? Pour ce faire, afin d’éviter les écueils victimiste et essentialiste, nous interrogerons tout d'abord le potentiel du concept d’agentivité. Ensuite nous examinerons si la compréhension du rôle actif des femmes permet de se distancier d’une périodisation et d’une chronologie fixes. Finalement, nous réfléchirons à la lecture critique des sources (modalité centrale recommandée par les programmes d’histoire), aussi bien celles émanant des expériences historiques des femmes que celles marquées par un regard masculin.
L’intention des séquences étant de brouiller les frontières des sphères publique et privée et de réfléchir en profondeur aux rapports de domination créés et recréés à travers le temps, la présente communication se penche sur la complexité et la faisabilité de cet objectif.
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Communication orale
40 ans de recherches féministes en formation à l’enseignement en éducation physique : (re)tracer les trajets d’un voyage consumé de langueurNicolas Gourde (Université d’Ottawa)
À l’échelle internationale, de plus en plus de recherches s’intéressent aux questions rattachées à l’(hétéro)sexisme et la 2SLGBTQIA+-phobie. En éducation, plusieurs de ces discussions gravitent autour du domaine de l’éducation physique (ÉP), où des conditions particulières établissent, délimitent et régulent ce qui est acceptable ou ce qui ne l’est pas. Plus précisément, les recherches témoignent que l’ÉP se caractérise par des idéologies aux assises binaires, essentialistes, et hétéronormatives contraignant l’expérience des filles, de certains garçons et, surtout, des élèves 2SLGBTQIA+. Contrairement à la littérature en contexte d’enseignement avec les jeunes, les recherches en formation à l’enseignement en ÉP faisant la lumière sur les mécanismes sociaux (re)producteurs et transformateurs d’une culture académico-sportive genrée sont peu volumineuses. Cela dit, une analyse documentaire (revue de la portée) m’a permis de retracer les différents chemins empruntés par les recherches féministes travaillant sur ces sujets. Avec près d’une quarantaine de manuscrits couvrant près de 40 ans de recherche, j’offrirai une cartographie de ce corpus en présentant le où, qui, quoi et comment de ce dernier. Plus précisément, je souhaite offrir une occasion de réfléchir critiquement sur les 40 dernières années de recherche en posant les questions suivantes: où sommes-nous allés? Qui avons-nous rencontré en chemin? Qu’avons-nous fait? Qui avions-nous oublié? Et où nous dirigeons-nous?
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Communication orale
L’intégration ou non du genre dans les pratiques d’enseignantes et enseignants de la formation professionnelle au QuébecPaula Brayner Souto Maior Lima (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Les impacts des rôles sociaux dictés par un ordre social patriarcal qui place les femmes dans une situation d'oppression se font sentir partout, y compris dans les espaces éducatifs. Cependant, malgré les constats réalisés et les recommandations qui ressortent des recherches, l'égalité de genre n'est pas une réalité mondiale, ni une réalité au Québec. La division sexuelle du travail et de l’orientation est d’ailleurs très prononcée dans le domaine de la formation professionnelle : les femmes choisissent un programme dans les secteurs de la santé, des soins esthétiques, alors que les hommes s'orientent vers les secteurs du bâtiments et travaux publics et d'entretien d'équipement motorisé. Ce phénomène est également constaté chez les enseignant-es. Or, malgré l’impact des rapports de genre liés aux pratiques d’enseignant-es en formation professionnelle sur l'éducation et sur la condition socioéconomique des femmes de la société québécoise, ces rapports semblent peu étudiés. C’est pourquoi nous souhaitons explorer l’intégration du genre dans les pratiques des personnes qui enseignent en formation professionnelle au Québec, à partir de récits de pratiques. Cette recherche pourra faire avancer les connaissances sur le genre en formation professionnelle afin de minimiser la reproduction des inégalités dans ce milieu, de même que de contribuer aux apprentissages des personnes enseignantes en matière de genre, pour les outiller dans la lutte contre les injustices faites aux femmes.
Lancement de l’ouvrage Didactique(s) et pratiques d’enseignement
Lutte contre les stéréotypes et les violences sexistes et sexuelles, éducation à la sexualité : quels paradigmes éducatifs? quelles réceptions?
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Communication orale
Vers de nouvelles politiques éducatives égalitaires : argumentaire pour l’étude d’utopies féministes en éducation afin de rompre avec le sexisme à l’école préscolaire-primaireCatherine Gagnon (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Au Québec, plusieurs instances de pouvoir montrent combien, à travers différentes politiques ministérielles, l’égalité entre les sexes (e.g., gouvernement du Québec, 2022). Pourtant, des inégalités sexuées persistent en milieu scolaire (Leaper et Brown, 2014). S’il faut très certainement mieux former les personnes enseignantes à l’égalité entre les sexes (Collet, 2018), cela ne suffit pas (Mozziconacci, 2017). C’est au cœur des institutions qu’il faut intervenir pour provoquer des changements (Mozziconacci, 2017). Pour cela, on peut voir les choses autrement et imaginer de nouveaux modèles éducatifs. Les utopies féministes permettent de « miner l’ordre établi, de fournir une alternative au pouvoir en place en explorant les possibilités latérales du réel [et d’offrir] une perspective et un point de vue pour observer, analyser, critiquer la réalité » (Gaussot, 2003. p. 298). Par exemple, l’éthique féministe du care, qui met au premier plan des pratiques souvent invisibilisé, comme l’importance de l’entraide et de la bienveillance, est une forme d’utopie féministe à considérer, car elle rompt avec les codes patriarcaux (Laugier, 2010) et favorise d’emblée l’égalité entre les sexes. Les personnes enseignantes féministes seraient dans une position idéale pour imaginer et partager des utopies. L’argumentaire théorique que je souhaite présenter au colloque montre comment les utopies féministes contribuent à insuffler un nouvel élan à la lutte au sexisme en éducation.
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Communication orale
Éducation sexuelle holistique basée sur les droits sexuels : vers une réduction des inégalités sociales et une augmentation de pouvoir d’agirMaya Machlout (Université de Genève)
En Suisse romande, les institutions et les écoles qui accueillent des enfants ayant des besoins éducatifs particuliers ont dans la plupart des cantons leurs propres stratégies d’intervention (Machlout, 2022). Pour cela, les offres en matière d’éducation sexuelle sont inégalement développées, voire inexistantes. Être enfant et en situation de handicap engendre une double discrimination, liée aux représentations de l’âge mineur (Berrewaerts et al., 2016) et du handicap (Vaginay, 2013). Un accès limité à une éducation sexuelle peut renforcer les injustices épistémiques, les inégalités sociales ainsi les discriminations et les violences vécues par ces enfants. Une éducation sexuelle holistique participe à l’émancipation et à la réduction des inégalités. Dans cette contribution, nous présentons, à travers d’une recherche participative en cours, comment promouvoir une éducation sexuelle holistique (OMS Europe & BZgA, 2010), à travers les politiques éducatives, notamment à partir des principes des droits humains. Nous portons l’attention sur les droits sexuels (IPPF, 2010) les plus mobilisables dans les pratiques des professionnel-les de l’éducation, pour défendre l’égalité des chances et pour que chaque enfant peut contribuer au développement de son pouvoir d’agir dans sa vie quotidienne vis-à-vis des situations de discrimination.
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Communication orale
Les stéréotypes liés au genre au prisme de la sémiotique sociale : retour sur une expérimentation menée auprès d’adolescents en contexte scolaireVirginie Piot (Université Paris 8 - Laboratoire CEMTI)
Dans cette contribution, nous nous proposons de sonder la sémiotique sociale comme instrument de conscientisation des stéréotypes de genre. Nous mobilisons une approche en sémiotique sociale (Saemmer, Tréhondart et Coquelin, 2022) en contexte scolaire auprès de cinquante adolescents de la 6è à la 3è. Dans la lignée de la sémiotique pragmatique, cette méthode consiste en une «introspection idéologique» (p.15) afin que «l’action des savoirs contextuels et culturels, habitudes de pensée et idéologies devienne sensible» (p.18) et que les «filtres interprétatifs» soient mis en lumière. Notre méthodologie repose sur des ateliers de co-interprétation, qui favorisent les confrontations de points de vue tout en impliquant les participants (professeur compris) à travers un questionnement réflexif. En créant un «espace de compréhension» (Gauléjac et al., 2012, p.121), nous utilisons ainsi les images pour sortir de la «pensée magique» (Collet, 2021, p.92) et développer l’esprit critique. Nous analyserons notre expérimentation sous deux angles complémentaires. Nous proposons d’expliciter comment nous déployons concrètement la sémiotique sociale dans un cadre scolaire par le biais d’activités non verbo-centrées, et comment celle-ci redéfinit la posture enseignante. Nous étudierons également comment la méthode permet aux adolescents de se saisir des enjeux liés aux stéréotypes de genre et d’interroger les différents espaces de socialisation, notamment les réseaux socio-numériques.
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Communication orale
Lutter contre les violences de genre en milieu universitaire : quelle intervention répond mieux aux besoins des étudiantes d’une université en Suisse romande?Giorgia Magni (Université de Genève)
Depuis les années 60-70, les groupes de chercheuses et d’étudiantes féministes se sont mobilisés pour lutter contre les violences de genre au sein des universités. En Suisse, comme ailleurs, ces combats ont su combler le manque d’action des institutions d’éducation supérieure et permettent enfin la promotion d’initiatives de sensibilisation. Différentes modalités sont apparues, telles que la mise en œuvre de campagnes de prévention ou d’interventions éducatives comprenant la création de cours obligatoires sur les questions de genre et de sexualité ou l’inclusion de ces thématiques dans des formations existantes. Actuellement, au sein des institutions d’éducation supérieure, nous nous trouvons face à une institutionnalisation de certaines de ces propositions issues des luttes féministes notamment émanant des étudiant-es. Mais comment sont-elles reçues et quel est leur impact véritable sur la prise de conscience des étudiant-es concernant les enjeux de genre et des violences de genre ? Nous essayerons de répondre à ces questions en analysant les entretiens qualitatifs menés auprès de 42 étudiant-es de l’Université de Genève collectés dans le cadre d’une thèse visant à comprendre les attitudes et les normes qui consolident les violences de genre vécues pendant les études universitaires. Comment la prise de conscience s’est-elle faite ? Quelle est la place de ces formations / sensibilisation institutionnelle ? Sont-elles jugées pertinentes par leur public cible ?
Interprétations et mises en œuvres des politiques éducatives d’égalité
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Communication orale
Interprétations et conflictualités interprofessionnelles autour des politiques d’égalitéRachel Colombe (UMR LEGS ; Université Paris 8)
Cette communication se propose de questionner les interprétations et traductions des politiques d’égalité des sexes et des sexualités dans des espaces de travail socio-éducatif, mobilisant des professionnel·les aux métiers variés, dont les mandats sociaux divergent. La chercheuse prendra appui sur des observations participantes menées au sein d’une Maison des Adolescents (dans le cadre d’une recherche doctorale) et sur des observations menées dans la mise en place de deux Cités éducatives (dans le cadre d’un processus d’accompagnement par la recherche). Il s’agira alors d’interroger ce que la multiplicité d’identités professionnelles et leurs crispations (Hilbold, 2019), produisent sur la possibilité de diagnostiquer des situations d’inégalité sur un territoire donné ou dans un établissement, mais aussi dans la mise en place d’actions concrètes. Il apparaît en effet que les questions de genre et d’égalité, outre qu’elles traversent les équipes et divisent le travail qu’on y fait (Kergoat, 2000), servent parfois, en tant qu’objet de travail et de discussion, à asseoir les allégeances et légitimité de chacun·e, au détriment, parfois, de l’intention première du collectif. Ces enjeux de conflictualité et d’interprétations des politiques et de leur mise en œuvre posent alors la question de la formation des acteurs·rices et de l’analyse de leurs pratiques sur ces enjeux.
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Communication orale
Mise en œuvre des politiques éducatives en faveur de l’égalité des sexes : le cas des chargés de mission académique égalité filles-garçonsDylan Racana (Université Lumière Lyon 2)
La thématique des inégalités entre les filles et les garçons dans le système éducatif a été abordée de nombreuses manières. Cependant, un acteur de l’éducation et de la formation qui occupe un rôle central dans le développement de ces politiques, le chargé de mission académique égalité filles-garçons, est très peu étudié dans la littérature scientifique. Cette proposition de communication s’intéresse à ces professionnels aux profils et conditions de travail très différents selon les académies. En effet, s’il est obligatoire pour chaque académie d’avoir un chargé de mission égalité filles-garçons et s’ils travaillent tous à partir des conventions interministérielles, rien ne précise le temps de travail ou encore le profil de ce chargé de mission. Dans quelles mesures les actions des chargés de missions académiques diffèrent-elles selon leur profil et le temps de travail alloué ? Nous avons mené des entretiens avec des chargés de mission académique égalité filles-garçons de dix-huit académies différentes (sur trente académies) ainsi qu’un entretien avec la cheffe du bureau de l’égalité. Les principaux résultats qui ressortent de cette enquête sont les suivants : selon l’académie, les conditions de travail et les profils des chargés de mission sont très différents. Les manières de développer et/ou percevoir la mission sont dépendantes avec ces conditions et profils différents mais aussi avec des éléments qui ne relèvent pas du champ professionnel (tel que le militantisme).
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Communication orale
« Égalité filles-garçons » : une politique et ses impasses. Le cas de l’administration scolaire françaiseAudrey Petit-Bessy (Université de Lille, France)
Le tournant des années 2000 marque, en France, l’institutionnalisation de la politique scolaire d’égalité des sexes. En l’espace de deux décennies, la politique d’«égalité fille-garçons» s’est dotée d’une organisation en apparence assidûment structurée, se prévalant désormais de plusieurs postes et relais, à différents niveaux de l’administration scolaire, dédiés à la promotion de l’égalité: la mise en œuvre de la politique se décline ainsi, selon une logique de ruissellement, de l’administration centrale aux établissements scolaires, en passant par les rectorats. Pourtant, ainsi que l’expérimentation surmédiatisée et tourmentée des «ABCD de l’égalité» en atteste, les résistances se révèlent nombreuses dans la mise en œuvre des leviers d’action identifiés. Cette communication entend mettre à jour les possibilités concrètes de mise en œuvre de la politique, au-delà des ambitions affichées. À partir d’entretiens et de l’étude des trajectoires professionnelles de référent-es égalité à l’échelle nationale et académique, il conviendra notamment de démontrer que, parmi celleux qui font la politique d’«égalité filles-garçons», la plupart accède à ces postes par hasard ou opportunité. À l’appui d’analyses d’archives et des textes qui encadrent la politique dans le système français, il s’agira en outre de dévoiler les mécanismes de priorisation à l’œuvre dans l’action publique scolaire, contribuant à reléguer la lutte contre les discriminations de genre à l’École au second plan.
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Communication orale
Inspectrices et inspecteurs de l’éducation Nationale et mises en œuvre des politiques éducatives en faveur de l’égalité des sexesGaël Pasquier (Université Paris Est Créteil - LIRTES)
En France, dans le rapport qu’elle a consacré à « L’égalité entre filles et garçons dans les écoles et les établissements [scolaires] » en 2013, l’Inspection Générale de l’Education nationale (IGEN) pointe les « progrès limités » d’une « action pour l’égalité engagée depuis trente ans ». Elle relève la « faiblesse du pilotage national », tout particulièrement dans le premier degré, et un « manque de relais » notamment de la part des cadre intermédiaires. Du côté des recherches, si plusieurs travaux analysent les textes institutionnels (Collet, 2021 ; Pasquier 2018, 2019, 2020), peu prennent pour objet les pratiques enseignantes et éducatives (Brauener 2019 ; Pasquier 2019 ; Gérin 2023), ou encore la mise en œuvre de ces politiques (Massei 2020), peu d’entre elles s’intéressent au rôle des corps intermédiaire comme cela a pu être le cas dans d’autres contextes nationaux (Fassa 2013 ; Fassa, Rolle & Storari 2014). C’est l’objectif de cette communication qui se centre sur les Inspecteurs et Inspectrices de l’Education nationale (IEN) chargé.es localement de la mise en œuvre des politiques éducatives dans le premier degré. A partir de 23 entretiens semi-directifs réalisés avec plusieurs d’entre-elles et eux, entre 2015 et 2020, dans 8 académies, il s’agit de mieux cerner la manière dont ces IEN perçoivent ces politiques en faveur de l’égalité des sexes, problématisent les enjeux qui leur sont associés et s’en saisissent (ou non) dans le cadre de leurs fonctions.
Pédagogie de l’égalité et numérique
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Communication orale
Appliquer une pédagogie de l'égalité dans l'enseignement du numériqueIsabelle Collet (Université de Genève)
15% : c'est à quelques unités près le pourcentage des femmes dans les études d'informatique dans les pays occidentaux. Alors que l’informatique joue un rôle croissant dans l’évolution de nos sociétés, les femmes sont largement sous-représentées dans ces métiers depuis des décennies. La grande homogénéité de la population des développeurs et des responsables d’entreprise (des hommes blancs issus des classes moyennes ou supérieures) tend à faire disparaître les besoins et caractéristiques des autres populations, en particulier des femmes.
Face à ce phénomène systémique, l’école a un rôle à jouer, d'autant plus pressant qu'en France comme en Suisse, l'enseignement du numérique (à la fois la science informatique, mais également les humanités numériques) fait son entrée dans tous les ordres d'enseignement. Or, nous savons qu'il ne suffit pas d'enseigner une discipline à tous et toutes pour la dégenrer. Comment enseigner l’informatique d’une manière égalitaire pour que filles et garçons développent non seulement des compétences, mais aussi un rapport au savoir numérique positif et finalement, soient en mesure de faire un choix d'orientation éclairé ? Je montrerai comment la toile de l'égalité peut s'appliquer dans l'enseignement des différents aspects de la culture numérique.
https://interstices.info/appliquer-une-pedagogie-de-legalite-dans-les-enseignements-dinformatique/
Dîner libre
Conversation critique entre l’école et l’éducation à la citoyenneté numérique autour des principes de justice sociale, d’égalité de genre et d’émancipation
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Communication orale
Genre et rapports au numérique : représentations et pratiques du numérique des filles et des garçons de 7 ans dans le contexte familialLisa Fericelli (Université de Bordeaux)
L’égalité filles-garçons est présentée comme un pilier de l’Education Nationale, néanmoins, dans certaines spécialités telles que la NSI (Numérique et Sciences informatiques), les filles représentent moins de 20% des élèves. Pourtant, les études sur le numérique à l’école prennent rarement en compte la dimension du genre, bien que les filles et les garçons vivent des expériences de socialisation différentes (Rouyer, 2007). Dans ce contexte, il est pertinent d’explorer comment se construisent ces rapports au numérique chez les filles et les garçons dans différents contextes, en particulier dans la famille.
L’objectif de cette communication est d’examiner les représentations des filles et des garçons de 7 ans sur les usages et les usager.ère.s du numérique ainsi que leurs pratiques.
Au plan méthodologique, une série d’entretiens semi-directifs a été menée auprès d’une douzaine d’enfants de CE1 (Classe Elémentaire 1). Les thèmes abordés concernaient les usages numériques dans le contexte familial : la présence et leur accès aux outils, leurs pratiques, celles de leur entourage ainsi que leurs représentations des usager.ère.s du numérique.
L’analyse de ces réponses permettra d’une part d’étudier si les représentations des usages et des pratiques numériques sont différentes chez les filles et les garçons ; d’autre part, de repérer le rôle des expériences de socialisation issues du contexte familial dans la construction de leurs représentations des usages genrés du numérique.
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Communication orale
Citoyenneté à l'ère du numérique : et l'école là-dedans ?Annie Turbide (RÉCIT)
Qu'elle nous touche à titre de citoyen·nes, de pédagogue ou d'élève, l’ère du numérique transforme nos habitudes, voire nos mœurs. Bien qu’elle ouvre la voie à de nouveaux possibles, elle soulève aussi des questions; le réseau scolaire québécois a su, au fil des dernières années, proposer des réponses concrètes. Est-ce que certaines actions pédagogiques permettent le développement d’une citoyenneté éthique à l’ère du numérique ? Le Réseau axé sur le développement des compétences des élèves par l’intégration des technologies, communément appelé le RÉCIT, œuvre quotidiennement à accompagner les milieux scolaires afin qu’ils mettent à profit la valeur ajoutée du numérique en tant que levier de réflexion et de développement. Cette communication est une occasion de réfléchir au potentiel et à l’impact de l’ère du numérique dans le cadre scolaire, mais surtout de matérialiser les opportunités de ce mouvement en actions pédagogiques.
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Communication orale
Les freins à l’éveil des jeunes filles aux disciplines et métiers scientifiques : Et si on recourrait à l’Empowerment ?Ndeye Faty Sarr (UQAC - Université du Québec à Chicoutimi)
Notre proposition de communication repose sur une réflexion théorique sur les freins à l’éveil des jeunes filles aux disciplines et métiers scientifiques. Plusieurs études ont révélé que les diplômées sont plus nombreuses comparativement aux diplômés notamment en France et dans les pays développés (Breda et al., 2018). Toutefois, les filles s’orientent plus dans les filières générales. En conséquence, elles restent peu visibles dans les métiers scientifiques comme les mathématiques, la physique et l’informatique (Breda et al., 2018). Les représentations genrées du métier de scientifique ainsi que les biais de genre expliqueraient cette disparité (Bergeron, 2019 ; Bosse et Guégnard, 2007). Parmi les mesures préconisées pour corriger ces disparités, il y a le « role models » qui repose sur l’intervention de femmes scientifiques dans les classes des lycées ce qui aurait pour effet de réduire les stéréotypes genrés sur le métier de scientifique tant chez les garçons que chez les filles (Institut des Politiques Publiques, 2019). Des campagnes de communication inclusives en amont de l’université permettraient aussi de réduire ces écarts. Toutefois, les mesures prises peinent à changement radicalement ce phénomène. C’est pour cette raison que nous théorisons le recours à L’Empowerment des jeunes filles pour des résultats probants. L’Empowerment, un concept central de la littérature féministe. Il suppose l’acquisition des femmes du pouvoir en, du pouvoir sur, du pouvoir avec.
Conversation critique entre l’école et l’éducation à la citoyenneté numérique autour des principes de justice sociale, d’égalité de genre et d’émancipation
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Communication orale
Penser la question sociale en éthique de l’IA : une composante essentielle de l’éducation à la citoyenneté numériqueFrédérick Bruneault (Université du Québec à Montréal), Andréane Sabourin Laflamme (Cégep André-Laurendeau)
Une des composantes essentielles de l’éducation à la citoyenneté numérique est le développement de la compétence en éthique du numérique et de l’intelligence artificielle (IA). D’ailleurs, le Cadre de référence de la compétence numérique (2019) fait de l’éthique la dimension centrale de cette compétence. Les approches classiques en enseignement de l’éthique, étant traditionnellement axées sur les actions individuelles, tendent à occulter le contexte social de ces actions. Nous pensons qu’il est donc nécessaire de repenser l’enseignement de la compétence éthique afin que l’éducation à la citoyenneté numérique puisse intégrer une perspective critique sur le contexte sociotechnique dans lequel émergent les enjeux éthiques liés au numérique et à l’IA. Partant du document former à l’éthique de l’IA en enseignement supérieur de l’éthique de l’IA : Référentiel de compétence (2022) que nous avons produit, nous monterons comment une formation à l’éthique de l’IA peut permettre de situer les enjeux éthiques de l’IA dans le contexte socio-économique dans lequel ils s’inscrivent, notamment en ce qui a trait aux questions liées à la diversité, l’inclusion et l’égalité, de les situer au sein des dynamiques politiques auxquelles ils participent et de dégager les enjeux éthiques spécifiques liés à leur impact environnemental. Nous présenterons également des activités pédagogiques permettant d’intégrer la question sociale à l’éducation à la citoyenneté numérique que nous avons développées.
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Communication orale
Enseignement à distance, genre et inclusion numériqueFatima Ez-Zahra Benkhallouq (Université Cadi Ayyad), Fatima-Zohra Iflahen (Université Cadi Ayyad)
L’effort de généralisation de l’enseignement à distance (EAD), en temps de crise de la covid 19, a pu garantir l’accès à un nombre non négligeable d’apprenant.es. Cependant, la disruption a induit de réels bouleversements. La crise a, en outre, dévoilé des vulnérabilités et des inégalités, certes connues, mais que la crise a autrement cristallisées et renforcées. En effet, dans un contexte universitaire marqué par la massification, la vulnérabilité et le décrochage - plus de 50% des étudiant.es de l’Université Cadi Ayyad (UCA) sont issu.es de milieux ruraux ou péri-urbains- ces inégalités deviennent un facteur supplémentaire de l’accroissement des taux d’abandon ou d’échec des étudiant.es en situation de vulnérabilité. Cette étude approfondit les conclusions en utilisant les outils de l’analyse du genre pour mettre la lumière sur les impacts ‘genrés’ de l’EAD à l’UCA. Cette deuxième enquête pointe le vécu et le ressenti de la population pendant la crise sanitaire. Les résultats de l’étude par le prisme du genre sont alarmants : Si 1 sur 2 étudiant.es interviewées atteste avoir développé une forme de dépendance pendant le confinement, l’impact sur les étudiantes semble avoir été bien plus sérieux: 70% des étudiantes affirment que leurs charges de travail domestique ont augmenté, avec des répercussions notables sur leur vie personnelle et leur engagement académique. 1 sur 2 étudiantes ont vécu cette période sous le signe d’angoisse et d’obsession.
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Communication orale
Critiques démocratiques ou critiques aristocratiques (et paternalistes) ?Camille Roelens (Université de Lausanne)
Notre approche – procédant de la philosophie politique et morale de l’éducation/formation et de l’histoire contemporaine des idées - sera théorique, conceptuelle et intertextuelle. Nous proposerons une lecture critique des travaux d’Hunyadi, un des opposants importants au transhumanisme et un critique acerbe de la numérisation des sociétés contemporaines. Il les identifie en effet comme une contribution majeure à ce qu’il nomme une tyrannie des modes de vie capitalistes et consommatoires sur les démocraties libérales contemporaines. Nous montrerons que ses critiques tiennent souvent à son attachement à un type de valeurs que l’on peut, avec Tocqueville, qualifier d’aristocratiques plutôt que de démocratiques. Nous arguerons ensuite qu’un appui sur des théories du triptyque démocratisation/individualisation/numérisation du monde telles que celles développées par Hunyadi pour penser la citoyenneté démocratique en éducation/formation risquerait davantage de nous égarer heuristiquement et pratiquement que de nous être secourable. Nous esquisserons enfin a contrario une voie différente que nous pensons plus cohérente en général, et si l’on intègre les enjeux de genre et les critiques féministes du paternalisme en particulier.
Intersectionnalité et éducation : balises pour un champ de recherche
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Communication orale
Quelle « intersectionnalité » pour les recherches en éducation?Simon Massei (Université Paris-Est Créteil)
L'acclimatation des recherches francophones en éducation au concept d'intersectionnalité est, par comparaison avec d'autres disciplines, à la fois tardive et inachevée. Près de trente ans séparent ainsi la théorisation de ce concept en 1989 du premier colloque francophone de sciences de l'éducation sur le sujet organisé en 2017. Cette importation tardive s'est en outre accompagnée, comme dans d'autres disciplines et d'autres champs académiques nationaux, d'une diversification des usages de ce concept. Plusieurs travaux proposent aujourd'hui d'ajouter au triptyque initial genre-race-classe d'autres catégories ou variables d'analyse, à l'instar de l'âge, du handicap, ou de la valeur scolaire. Néanmoins, à la différence de la sociologie ou de la science politique par exemple, où l'évolution des usages du concept d'intersectionnalité a fait l'objet de réflexions collectives et de publications critiques, les implications théoriques de cette évolution n'ont été que peu questionnées dans le cas des recherches en éducation.
Cette communication vise à la fois à proposer un panorama des usages du concept d'intersectionnalité dans ce domaine d'étude aujourd'hui et à défendre un point de vue théorique : réserver l'usage de ce concept à l'analyse de l'articulation des rapports sociaux de race aux autres rapports de domination dans le système éducatif, et renoncer à en faire un usage statistique ou catégoriel qui risque de confondre rapport social et variable démographique.
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Communication orale
Faire une place aux recherches sur les féminismes intersectionnels dans le champ de l’éducation? Le cas de l’afroféminismeFrancine Nyambek-Mebenga (INSPE/université Paris-Est-Créteil)
Si l’école et la cour de récréation sont le lieu où, pour la plupart des enfants racisés afrodescendants on fait l’expérience de sa condition noire (Ndiaye, 2008), souvent au détour d’une parole enfantine et innocente, mais politique (Lignier et Pagis, 2017), ce racisme incorpore dans bien des cas une dimension genrée, popularisée sous le terme « misogynoire», autrement dit, un racisme genré ou gendered racism (Essed, 1991), perpétré aussi bien par le patriarcat blanc que noir, envers les femmes noires.
La proposition souhaite ouvrir la discussion sur la légitimité et la place à accorder à ces savoirs issus de la pensée afroféministe dans le champ éducatif. L’école peut-elle et doit-elle prendre en charge ces questions ? Si oui, en quoi et comment les féminismes intersectionnels, en particulier les études afroféministes peuvent-elles contribuer à la lutte contre les inégalités et les discriminations à l’école ? La réflexion s’appuie sur diverses sources (littérature afroféministe et quelques données exploratoires – entretiens/récits d’expériences).
Intersectionnalité, normes et discipline
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Communication orale
L’exclusion de cours dans les territoires scolaires disqualifiés : intersection de rapports sociaux travestis dans l’application d’une pratique punitive banaliséeJulien Garric (INSPE)
Les études réalisées à propos de l’administration des sanctions et punitions scolaires réitèrent le même constat massif : les garçons sont punis beaucoup plus que les filles et ce quel que soit le niveau scolaire étudié (Grimault-Leprince 2008 ; Ayral 2009 ; Depoilly 2014). A l’origine du passage à l’acte punitif on retrouve la construction de la figure d’élèves déviant.e.s déterminée donc par le genre, mais aussi par l’ethnie (Debarbieux 1996 ; Farhat 2015) et la classe sociale (Testanière 1967 ; Millet & Thin 2004). A l’occasion d’une étude ethnographique, menée à propos de l’exclusion de cours dans trois collèges de la très grande pauvreté, j’ai été confronté à la complexité des représentations altérisantes qui constituent le registre de justification des exclusions pratiquées par les enseignant.e.s. Dans cette communication, je montrerai comment les rapports sociaux d’âge, de genre, de classe et de race peuvent prendre des formes complexes, se travestissent et ainsi se dérobent au regard des chercheur.e.s, en se présentant sous des formes euphémisées, naturalisées, métaphorisées et très fortement imbriquées. L’approche intersectionnelle permet alors d’aborder la complexité des rapports de domination à l’œuvre dans les relations d’interaction éducative.
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Communication orale
Analyse ethnographique de la disciplinarisation des élèves des écoles du réseau d’éducation prioritaire renforcée : la routinisation de la violence institutionnelle dans la gestionLaura Foy (AMU)
Aux rapports de pouvoir (Elias, 2014) statutaires inégalitaires qui surdéterminent les relations entre élèves et enseignants dans les écoles se superposent, dans les écoles REP+, des rapports sociaux de domination eux aussi inégalitaires : les élèves du REP+ appartiennent massivement à des groupes multiminorisés, tant d’un point de vue socio-économique que racial (Felouzis et al., 2005) et ils sont l’objet d’« effets d’étiquetage » se traduisant par la stigmatisation des établissements scolaires qu’ils fréquentent (Fouquet-Chauprade & Dutrévis, 2015). Dans ces écoles, un ensemble de théories implicites vient naturaliser le désordre scolaire et s’accompagnent de modes de gestion informels, et parfois inavouables de l’indiscipline. Nous nous proposons de mener une analyse ethnographique de la disciplinarisation des élèves des écoles REP+ afin de montrer, dans une perspective intersectionnelle (Crenshaw, 1991), comment l’articulation des rapports sociaux de classe et de race conduisent à une routinisation de l’exercice de la violence institutionnelle sur les élèves. La méthodologie utilisée sera celle d’une étude ethnographique, menée à partir d’observations dans des écoles REP+ de Marseille (N=29) et d’entretiens semi-directifs (N=67) avec des enseignants exerçant dans ces écoles.
Dîner libre
Intersectionnalité en éducation
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Communication orale
« L’intersectionnalité, la discrimination systémique et l’injustice épistémique : perspective québécoise. Trois concepts pour penser la (l’in)justice en éducationMaryse Potvin (UQAM - Université du Québec à Montréal)
La réflexion sur l’intersectionnalité des motifs de discrimination (genre, couleur, condition sociale, etc.), initiées par les sciences sociales et formulés en termes d’articulation des rapports sociaux ou des systèmes d’oppression depuis les années 1970, a pénétré depuis une quarantaine d’années la sphère du droit, où se développe une approche intersectionnelle très opérationnelle dans l’application et l’interprétation des législations sur les droits de la personne au Canada et aux États-Unis (Commission Ontarienne des droits de la personne, 2001 ; Crenshaw, 1989 ; Sheppard, 2001). Cette communication porte la réflexion sur trois concepts, sur leur articulation et leur pertinence pour penser la (l’in)justice en milieux éducatifs, notamment envers les jeunes Noirs-es au Canada : l’intersectionnalité, la discrimination systémique et l’injustice épistémique (Crenshaw, 1989; Collins et Bilge, 2016; Fricker, 2007). La combinaison de divers systèmes d’oppression, qui s’articulent, se renforcent mutuellement et produisent des expériences uniques (M. Eaton, 1994) pour certains jeunes, sera abordée ici sous des angles à la fois juridique et sociologique.
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Communication orale
La matérialisation des rapports de pouvoir en formation des professeur·e·s des écoles stagiairesOdile Maufrais (UPEC PARIS 12 LIRTES)
Les différentes crises du système scolaire notamment la crise « de la scolarisation de masse » (Laval, 2006, p.97) engendrent des problématiques d’égalité et force est de constater qu’aujourd’hui encore, l’école reproduit les inégalités sociales. Des recherches en sociologie,
en didactique de l’EPS ainsi qu’en formation des enseignant·e·s ont mis en évidence l’influence des rapports sociaux de sexe, classe sociale et « race » dans l’école. Ces rapports sociaux, présentés dans leurs développements théoriques français comme « consubstantiels et coextensifs » (Kergoat, 2009, p.112), imprègnent l’enseignant·e débutant·e. Elle/il est pétri·e de convictions, de représentations, de stéréotypes, de préjugés construits par son vécu ce qui l’engage à reproduire ces derniers sans s’en rendre compte. En ce sens, une formation à l’approche intersectionnelle en EPS a été mise en place avec des enseignant·e·s stagiaires du premier degré (N=65) pour favoriser l’accès de ces dernier·e·s à une prise en considération de ces rapports sociaux et de leurs effets sur l’ordre social dans un but de construction de compétences professionnelles.
Notre présentation portera sur les résultats des analyses de ce qu’il s’est joué dans les discours sur les rapports sociaux tels qu’envisagés par l’approche intersectionnelle. Les résultats mettront en évidence la matérialisation de rapports de pouvoir en formation, aussi bien lors des présentations de travaux que lors des débats.
Intersectionnalité en éducation
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Communication orale
L’expérience du racisme au travail et de sa gestion par les personnels scolaires : exploration d’une perspective intersectionnelleFabrice Dhume (UCLouvain)
L’institution scolaire est traversée et structurée par les divers rapports sociaux, de classe, de sexe, de race, d’âge, etc., et ceux-ci affectent tant les conditions d’étude des élèves que les conditions de travail des personnels. Cette communication s’intéresse aux tactiques mises en œuvre par ces dernier.e.s pour faire face au racisme vécu dans leur contexte de travail, dans une perspective intersectionnelle. Il s’agira d’explorer la manière dont la positionnalité sociale, au sens intersectionnel, influe non seulement sur les types d’expériences de racisme vécus au travail, mais plus encore sur les répertoires de ressources et d’attitudes personnelles pour se défendre et «gérer» les situations. L’appréhension de ces répertoires et tactiques mobilisées en situation implique de resituer l’expérience du racisme au travail dans la trajectoire sociale et personnelle des individu.e.s, et pour ainsi dire de mettre en rapport carrière socio-professionnelle et carrière de racisation. Cette communication s’appuie sur l’exploitation d’une enquête qualitative menée entre 2019 et 2023 en France auprès d’environ 75 professionnel.le.s scolaires de divers statuts et fonctions. Réalisée depuis ma position de chercheur situé du côté du pôle majoritaire sur la plupart des axes des rapports sociaux, ce travail constitue une mise à l’épreuve de mes capacités, à la fois d’entendement du point de vue minoritaire, et de restitution-resignification sociologique de la violence raciste de l’école.
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Communication orale
Observer les pratiques inclusives en classe ordinaire à l’école primaire : quelle empreinte du genre et du handicap sur les gestes enseignants?Elena Pont (Université de Genève)
L’inclusion scolaire vise à ce que les élèves à besoins éducatifs particuliers (BEP) puissent fréquenter la classe ordinaire moyennant des mesures bénéficiant à tous-tes les élèves. La littérature est abondante au sujet de ces aménagements et de l’adaptation des enseignant-es à une pédagogie inclusive (par exemple, Ebersold et al., 2021). Cependant, la recherche s’est peu intéressée aux effets des systèmes de discriminations sur les gestes enseignants inclusifs. Dans une enquête par observations non participantes menée actuellement au primaire à Genève, nous cherchons à savoir dans quelle mesure les systèmes combinés de genre et de handicap (Thomas, 2006) laissent une empreinte sur les gestes et discours enseignant-es lorsque ceux-ci sont dirigés vers les filles BEP, distinctement des garçons BEP. Sachant que le rapport au savoir est socio-sexué (Mosconi, 2003), nous examinons l’influence de ces gestes et discours sur les apprentissages des filles BEP et des garçons BEP en cours d’activité. L’objectif de notre communication est de présenter nos premiers résultats. D’ores et déjà, les entretiens préparatoires avec les intervenant-es en classe inclusive montrent leur évaluation de ce que pourrait être un terrain d’observation « suffisamment inclusif » pour nous, la chercheuse. Ce questionnement signale des représentations relativement normatives sur la pertinence de l’inclusion pour seules certaines catégories d’incapacités, estimées plus sévères que d’autres.
Intersectionnalité en éducation
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Communication orale
L’avantage scolaire relatif des descendantes d’immigrés nord-africains en France : recherche d’hypothèses explicativesFrançoise Lorcerie (CNRS)
Cette communication cherche à expliquer le biais ethno-genré, à l’avantage des filles, qui apparaît à l’analyse des parcours scolaires des enfants d’immigrés postcoloniaux en France. En effet, les filles issues de ces flux migratoires ont des parcours scolaires plus favorables que les filles de la population majoritaire, toutes choses égales par ailleurs (Brinbaum et al 2011, 2016), ce qui peut sembler paradoxal. La communication entend analyser ce paradoxe.
Felouzis et ses collègues (2015) ont proposé d’expliquer l’infériorité globale des résultats scolaires dans cette population par la « discrimination systémique ». Dans le cas particulier qui nous occupe, il faudra penser une discrimination systémique genrée jouant différemment selon qu’il s’agit des filles ou des garçons. S’agissant des filles, il faudra penser une discrimination positive sur fond de discrimination négative globale.
La littérature qualitative montre notamment des phénomènes d’alliance entre enseignantes majoritaires et descendantes de migrants post-coloniaux (Guénif-Souilamas 2000). A l’inverse, des travaux décrivent aussi la propension différentielle à la punition des garçons de cette population de la part des enseignantes (Ayral 2011). De quelles théories dispose-t-on pour expliquer ces tendances ? Les théories féministes de la domination sont utiles mais insuffisantes.
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Communication orale
Impact des politiques publiques post-2015 sur les vécus scolaires des élèves musulmans : étude de cas dans les quartiers nord de MarseilleLamia Mellal (KU Leuven)
En France, après les attentats de 2015, l’instauration de l’État d’urgence, du plan Vigipirate et du plan de « Grande mobilisation pour les valeurs de la République » a permis de légitimer et d’accélérer des politiques antérieures notamment en termes de promotion de la laïcité à l’école. Cette communication vise à présenter les premiers éléments de l’enquête de terrain que je mène actuellement au sein de deux lycées des quartiers nord de Marseille afin d’étudier l’impact du contexte post-attentat sur les vécus scolaires des élèves majoritairement musulmans, issu-es de l’immigration post-coloniale et vivant dans les quartiers défavorisés de Marseille. En proposant des ateliers de création sonore (podcast), l’objectif de cette recherche est de créer des espaces de parole permettant aux élèves de revenir sur leur expérience individuelle et collective de l’école. L’imbrication des rapports de classe, de race et de genre semble prégnante dans la manière dont les élèves rendent compte de leur expérience quotidienne. Dans cette communication, je propose de présenter le dispositif mis en place avec les élèves ainsi que les thématiques qui émergent de ces ateliers tels que les tensions concernant les restrictions vestimentaires et leur forte dimension genrée. Je reviendrai notamment sur la manière dont je mobilise le concept d’intersectionnalité pour analyser le discours des élèves.
Intersectionnalité en éducation
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Communication orale
« Toutes choses n’étant pas égales par ailleurs… Ce que l’approche intersectionnelle a à apporter à la thèse de la « dissolution » des inégalités ethnoraciales dans les inégalitésMarie Verhoeven (Université catholique de Louvain (UCLouvain))
En revisitant les travaux disponibles en Belgique francophone concernant les inégalités scolaires, cette communication s’attèle à déconstruire une thèse répandue au sein de cette communauté scientifique: le poids de l’origine migratoire tendrait à devenir non significatif une fois contrôlés les facteurs liés à l’origine sociale. Or, de nombreuses données mettent en lumière le rôle propre de l’origine ethno-raciale dans la production des inégalités scolaires (Van Praage et al 2017; Danhier et al 2014) : les inégalités expérimentées par les jeunes des groupes ethnoraciaux minorisés ne sont pas réductibles au cumul des désavantages socioéconomiques et linguistiques (OCDE 2007). Cette analyse est renforcée lorsqu’on descend à des échelles d’observation méso (bassins, formes) ou micro (options) où se donnent clairement à voir des inégalités intersectionnelles articulant position sociale, ethnoraciale, religion et genre (Delvaux et Serhadlioglu 2014; Verhoeven et al 2007). Cette communication entend questionner les impensés et présupposés épistémologiques des approches quantitatives souvent mobilisées dans ce débat et qui reposent sur une vision segmentée ou cumulative des facteurs d’inégalités, dont il conviendrait de démêler les effets propres. Nous défendrons la pertinence d’une approche intersectionnelle non pas moniste ou additive, mais holiste (Bilge 2010; Buscatto 2016) et «réencastrée» dans les fonctionnements à l’œuvre à différents échelons du système (Verhoeven 2011).
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Communication orale
Inégalités intersectionnelles dans les politiques éducatives en EuropeGéraldine André (UCLouvain), Laura Westerveen (Erasmus Universiteit Rotterdam)
Alors que la recherche parle de plus en plus d'inégalités intersectionnelles, peu de travaux ont étudié l'utilisation d’un cadre intersectionnel au sein des politiques éducatives. Dans notre contribution, nous étudions si et comment les inégalités intersectionnelles sont abordées au sein des politiques éducatives des deux principaux systèmes éducatifs en Belgique : le système néerlandophone du gouvernement flamand et le système francophone de la Fédération Wallonie-Bruxelles. En appliquant un cadre théorique intersectionnel et une méthodologie axée sur la complexité inter- et anti-catégorielle, nous analysons de manière comparative et contextualisée les catégories sociales et leurs relations dans les documents politiques. Il ressort de cette analyse que les politiques éducatives flamandes et francophones en Belgique accordent une attention limitée aux inégalités intersectionnelles. Cependant, les politiques éducatives francophones continuent de viser un système éducatif équitable et accordent donc de plus en plus d'attention à la dimension cumulative des inégalités scolaires. Dans les politiques éducatives flamandes, en revanche, l'accent n'est plus mis sur l'égalité des chances en matière d'éducation, mais sur la concurrence et l'excellence de l'éducation, conduisant à attribuer la responsabilité des inégalités éducatives presque entièrement aux familles de classes populaires et issues de l’immigration.
Dîner libre
Forme scolaire, discipline des corps et de l’intime au prisme de l’intersectionnalité
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Communication orale
Étudier la « forme scolaire » des vêtements lycéens au prisme des rapports sociauxCamille Lavoipierre (Université Paris-Est Créteil)
Le vêtement à l’école fait périodiquement débat en France ces trente dernières années, que ce soit au travers de questions concernant le port du voile ou « l’hypersexualisation » des filles, ou encore de propositions d’instaurer l’uniforme[1]. À rebours de ces propositions, n’existe-t-il pas déjà une « forme scolaire » (Vincent, 1980) du vêtement, c’est à dire une forme « spécifique » des vêtements tels qu’ils sont mis en relation avec « une forme socio-historique de transmission » (Vincent, 2008) ? Quelle place les rapports sociaux occupent-ils dans la reproduction de cette norme scolaire ? Une enquête de master a révélé qu’un contrôle différencié des corps des lycéen·nes s’exerce, notamment, à travers une « forme scolaire » du vêtement qui consiste à « ne pas se faire remarquer » (Lavoipierre, 2020). L’interprétation de cette règle s’est faite à partir de critères différenciés – d’âge, de classe, de race et de genre – et ce à travers la référence plus ou moins explicite aux figures repoussoirs de la « pute » et du « jeune de cité ». Ces résultats sont réinterrogés à partir d’un corpus élargi d’entretiens – menés avec vingt-huit lycéen·nes – et de notes ethnographiques issues d’une enquête de thèse menée dans trois autres lycées de région parisienne depuis 2020.
[1]Ces propositions sont soutenues tant par des ministres de l’éducation en poste – X. Darcos en 2003, J.-M. Blanquer en 2017 – que par des programmes d’opposition à droite et à l’extrême droite.
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Communication orale
« Tiens-toi bien », la gestion du corps et de la tenue vestimentaire des élèves dans les lycées professionnels en hôtellerie-restaurationDominique Alvarez (INSPE Université Toulouse Jean Jaurès), Sandra Cadiou (MCF UCO Niort), Patricia Mothes (ICT)
Les élèves en lycée professionnel (LP) sont considérés comme un public fragile dont l’orientation est souvent influencée par la reproduction sociale des milieux ouvriers dont ils sont issus (Jellab, 2005). Or, une partie des enseignements de la filière concerne les industries du luxe, et « le dressage des corps » (Pégourdie, 2022, p.78) fait partie intégrante de l’enseignement en LP hôtellerie-restauration. Il passe par une « domestication du corps afin de le rendre conforme aux exigences du service » (Pégourdie, 2022, p.78), sous-entendant que ces élèves ne possèdent pas les codes vestimentaire et corporel du domaine.
Le vêtement de travail, dans les métiers du service et de l'accueil, assume une fonction de représentation (Montargot, 2016) mais aussi de domestication du corps (Foucault, 1975). Quels savoirs sont donc ici enseignés dans cette filière professionnelle de l’hôtellerie restauration et dans quelles dynamiques genrées (Beal, 2020) ? En quoi ces injonctions programmatiques révèlent-elles des enjeux intersectionnels (Crenshaw, 1989) ?
Nous proposons d’investiguer ces questions à partir de l’analyse des programmes et manuels du baccalauréat professionnel « commercialisation et service en restauration ». En quoi ces documents participent-ils de la reproduction d’une domination de genre et de classe ? Nous prolongerons cette analyse de corpus par des pistes de discussion ancrées dans la didactique clinique (2013) et aussi l’intersectionnalité (Crenshaw, 1989).
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Communication orale
Travailler l’intime à l’école : éléments de comparaison des dispositifs d’éducation à la sexualité en lycée général et technologique et lycée professionnelLucie Cabanié (Aix Marseille Université)
La recherche portant sur l’éducation à la sexualité s’est attachée à montrer que les dispositifs d’éducation à la sexualité participent à produire et reproduire des rapports sociaux de genre hétéronormatifs (Devieilhe, 2013) qui s’articulent différemment en fonction du profil social des élèves (Le Mat, 2018). Notre perspective de recherche souhaite prolonger ces réflexions en comparant les dispositifs d’éducation à la sexualité dans des contextes éducatifs différents et socialement situés : l’enseignement général et technologique et l’enseignement professionnel.
La présente communication souhaite retracer la sociogenèse de cette politique éducative dans une perspective comparative entre l’enseignement général et technologique et l’enseignement professionnel. Nous appuyant sur les textes institutionnels ainsi que sur la littérature grise produite par le Ministère de l’Education Nationale, de la Jeunesse et des Sports, nous émettons l’hypothèse que la mise en place des dispositifs d’éducation à la sexualité repose sur une différenciation des cursus scolaires qui contredit l’exigence de neutralité et d’égalité portées par les textes institutionnels. L’ancrage de l’EAS dans les disciplines de SVT (sciences et vie de la terre) et de PSE (Prévention Santé Environnement) contribue à différencier les thématiques abordées en fonction des filières d’enseignement (BAC Pro, CAP, filières technologiques, BAC Général).