Informations générales
Événement : 90e Congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Section 400 - Sciences sociales
Description :Ce colloque porte autant sur la notion d’autochtonie (comme catégorie juridique et levier politique de reconnaissance) que sur la manière dont elle se décline et se discute en Afrique. Autrement dit, si le continent africain servira de repère, c’est pour mieux permettre le dialogue avec les nombreux travaux abordant plus généralement l’autochtonéité, en particulier en Amérique du Nord.
De la sorte, les communications apporteront des éclairages quant à une diversité de terrains, et ce, dans la mesure où les multiples configurations étudiées offrent des occasions de discussion avec les réalités africaines, mais la réciproque n’en sera pas moins vraie.
Ainsi, ce qui rassemble ces peuples tient dans les déclarations les reconnaissant en tant que cultures spécifiques au sein de la modernité avancée. Pour autant, au-delà du terme unificateur, ces spécificités se déclinent de bien des manières.
Pour exemple, si foncièrement la qualification des populations autochtones se révèle relativement clairement établie en Amérique du Nord, il n’en va pas de même pour le continent africain, dont l’histoire coloniale est profondément différente et où se trouve interrogée la distinction des peuples selon une continuité historique.
L’intention de cette rencontre s’inscrit bien dans le contexte francophone, en ce sens que l’ancienne puissance coloniale a contribué à produire des configurations extrêmement hétérogènes. En effet, entre l’autochtonie à l’ouest de l’Atlantique, où la définition du primo-arrivant peut faire sens, face à des Européens restés sur place pour faire souche, au contraire c’est une autochtonie controversée qui se présente en Afrique, où le colonisateur n’a pas laissé derrière lui de semblables communautés, durablement installées. De plus, dans nombre de pays africains, les ethnies majoritaires revendiquent l’ancienneté séculaire de leur présence, reprochant à l’autochtonisation la saveur amère d’une injonction conceptuelle produite par des instances internationales éloignées.
Au-delà d’un comparatisme hasardeux, devant la diversité des contextes, les sessions proposées viseront davantage à alimenter les réflexions qui, en Amérique du Nord notamment, cherchent à concilier justice environnementale et équité sociale, et ce, en apportant des regards quant à d’autres contextes, que nous pensons utiles à l’objectivation. Que nous disent les travaux africanistes quant au traitement politique de l’autochtonie, mêlant plusieurs échelles d’analyse qui s’entrecoupent : internationale, nationale et locale ? Qui en sont les acteurs et quels groupes s’y trouvent impliqués ? Qu’est-ce que la notion d’autochtonie exprime vis-à-vis de la modernité réflexive ? En quoi ces démarches répondent-elles au souci d’éthique qu’elles avancent ?
Enfin, il paraîtra central d’insister sur la dimension de vulnérabilité qui est associée à l’idée de peuple autochtone. Dans ce cadre, les spécialistes des Amériques apporteront leurs expertises, étayées par plusieurs décennies critiques.
Remerciements :Les organisateurs tiennent à remercier tout particulièrement l'Association Française d'Ethnologie et d'Anthropologie (AFEA) pour son soutien, comme nos institutions (Cirad & AMU), ainsi que les conférenciers, notamment Irène Bellier (anthropologue, directrice de recherches au CNRS, EHESS, Paris) et Philippe Karpe (juriste, directeur de recherches, Cirad, Montpellier) pour leurs contributions.
Dates :Format : Sur place et en ligne
Responsables : Partenaire :Programme
Introduction
-
Communication orale
Peuples autochtones d’Afrique : que disent les demandes de reconnaissance en droit de leurs situations face aux projets de développement ?Irène Bellier (CNRS)
Cet exposé introductif au colloque sur les ambigüités de l’Afrique autochtone vise à préciser les situations de groupes qui se qualifient comme peuples autochtones au regard des dispositifs du droit international, de leur traitement au plan national, des manières de les nommer ou de les évacuer. Le survol nécessairement rapide permettra d’évoquer la particularité de l’Afrique par rapport aux Amériques et aux Caraïbes, et à d’autres régions du monde où l’on voit des évolutions dans les discours politiques, parfois transformateurs. Au-delà des legs coloniaux qui pèsent sur la place réservée à ces populations minoritaires au plan démographique et considérées comme vulnérables, plusieurs enjeux traversent les luttes autochtones en Afrique ; en matière de droits linguistiques et culturels, de reconnaissance des institutions politiques, d’inclusion dans les politiques de conservation de la nature, les projets de développement, le tourisme. Au cœur d’une certaine conflictualité, la présence d’investisseurs qui ne semblent guère concernés par le recueil du consentement libre, préalablement et informé des collectifs et individus autochtones atteints par des projets, par ex. dans le domaine extractif, est probablement un point des plus problématiques.
Irène Bellier, directrice de recherches au CNRS, LAIOS/LAP
Session 1 — Autochtones, arts, nature
-
Communication orale
Une littérature dite autochtone. Fabrique d’une catégorie (Amériques – XXe-XXIe siècles) et thème de la nature : enjeux et identitésAline Verneau (EHESS)
Ce travail de thèse se consacre aux productions littéraires contemporaines d’écrivains autochtones des Amériques, du Nord comme du Sud. Il a pour objet principal l’ensemble de la chaîne de création et de production de la littérature autochtone. Alliée à une approche nécessairement sociologique et anthropologique, l’étude par les outils littéraires de cet objet se veut un apport tant au champ littéraire qu’au champ d’études américanistes selon une approche continentale inédite.
L'étude se concentre particulièrement sur deux pôles importants de la littérature autochtone des Amérique : le Canada et le Mexique. Il s’agit de deux pays qui concentrent un grand nombre d’écrivains autochtones mais aussi un réseau d’institutions, de prix et de publications étendu. La comparaison entre ses deux contextes éclaire et nuance nos réflexions par leurs différences majeures. Le thème de la nature, qui est au centre de la thématique du colloque de l’ACFAS, est repris dans ces deux contextes comme un élément tant de confrontation avec les conséquences de la colonisation pour les communautés autochtones que dans une logique de légitimation de ces dernières.
Dans le cas du Mexique, le thème de la nature s’inscrit dans une conception conçue et présentée à travers le prisme de croyances pour en faire un thème propre aux communautés autochtones. Dans le cas du Canada, celui-ci passe par l’évocation d’un mode de vie nomade précédant le processus de colonisation et contrastant avec une vie sédentaire.
-
Communication orale
Construction autochtone et art rupestre en Afrique du SudLeila Baracchini (San Research Centre, University of Botswana)
Cette contribution propose de revenir sur le développement du site patrimonial d’art rupestre de Wildebeest Kuil en Afrique du Sud en regard des questions autochtones qui agitent le pays depuis la fin de l’apartheid. En effet, si durant l’Apartheid l’art rupestre n’a pas suscité d’intérêt politique particulier, il devient au cours des années 1990 un élément central du mouvement de reconstruction nationale en Afrique du Sud.
A partir d’un projet postdoctoral sur la relation des communautés locales à Wildbeest Kuil initié en début 2022 dans le cadre de l’ANR Cosmo-art, cette contribution propose d’explorer les ambiguïtés qui jalonnent le rapport au patrimoine rupestre et au territoire dans un contexte marqué par des enjeux de relocalisation, d'autochtonie et de fortes inégalités sociales et économiques. A partir de ce cas, il s’agira notamment de réfléchir à ce que les usages actuels de l’art rupestre font à l’autochtonie. Dans quelle mesure et en quels termes, cela favorise-t-il la construction d’un sentiment d’appartenance et d’un lien à la terre susceptible d’être mobilisés pour assoir une légitimité et des droits dans la société sud-africaine ? Mais en quoi les intérêts concurrents autour du site peuvent également être source d’illégitimité, de marginalisation et de rejet ? Et en quoi cela nous informe-t-il sur les dynamiques actuelles autour de la question autochtone en Afrique du Sud ?
-
Communication orale
Développement durable et patrimonialisation de la forêt au Cameroun : le patrimoine des Malimba, la culture contre l’économieYannick Zo'obo (Faculté des lettres et sciences humaines)
Le patrimoine est une expression utilisée dans différents contextes. Très souvent, sa définition fait la part belle aux objets d’art, aux bâtiments, etc. Omettant que l’environnement dans un sens large et la forêt dans un sens plus précis constituent ce qu’il est convenu d’appeler le patrimoine végétal. D’ailleurs, une observation attentive du milieu forestier permet de comprendre qu’il constitue un « tout » pour les communautés autochtones. Elles en tirent l’essentiel de leurs ressources. Ces espaces constituent pour les autochtones des lieux mémoriels de pratiques culturelles et cultuelles léguables aux générations futures. Cependant, pour l’administration coloniale et à partir de 1960, les dirigeants du Cameroun indépendant, avides de richesses ligneuses, au-delà des considérations conservatrices des espaces boisés évoquées par de nombreux textes de lois, la part belle est subtilement accordée à l’exploitation du bois à des fins économiques.
A l’aide des témoignages oraux, des documents d’archives et des ouvrages bibliographiques, cette proposition essaie d’analyser le fondement de la forêt comme patrimoine pour les populations autochtones du Cameroun forestier, dans un contexte dominé par l’attribution tous azimuts des concessions forestières aux exploitants forestiers à des fins économiques. Elle tente finalement de montrer que la gestion durable des forêts pourrait passer par l’intégration des autochtones dans les politiques de gestion des forêts.
Session 2 – Enjeux fonciers et aires protégées
-
Communication orale
Peuples autochtones d’Afrique centrale et gestion des ressources forestières : le cas des Baka du Sud-est CamerounJean Pierre Nguede Ngono (Université de Maroua)
Les peuples autochtones, dits "Pygmées", d'Afrique centrale, font face à de nombreux défis et à une discrimination généralisée. Ils ont souvent été marginalisés par les gouvernements et la société majoritairement bantoue de la région, ce qui a entraîné une pauvreté extrême, une absence d'accès à l'éducation, à la santé et à d'autres services de base. Ils ont également été victimes de discrimination et d'exploitation. De nombreux Pygmées ont été forcés de quitter leurs terres traditionnelles en raison de l'exploitation forestière, de la conversion de la forêt en terres agricoles et d'autres activités industrielles. Ces natifs de la forêt profonde sont souvent exclus des processus de décision concernant l'utilisation de leurs terres et sont souvent victimes d'expropriation et de déplacement forcé sans compensation adéquate. Ils ont également des taux de mortalité infantile et de morbidité plus élevés que le reste de la population. Ils luttent pour faire valoir leurs droits et pour obtenir une reconnaissance en tant que peuples autochtones.
Les résultats de notre recherche montrent que les Baka ont souvent été exclus des efforts de conservation. Néanmoins, au fil des années, ils ont pris une part active dans la conservation des ressources forestières et travaillent en étroite collaboration avec des organisations de conservation et des gouvernements pour élaborer des plans de gestion des ressources naturelles qui respectent leur culture et leurs modes de vie.
-
Communication orale
Politiques identitaires de la conservation en Côte d’Ivoire forestière au XXIe siècle : les aires protégées comme catalyseurs d’autochtonieVincent Leblan (Institut de recherche pour le développement)
Cette communication restitue une recherche concernant les politiques de conservation des aires protégées en Côte d’Ivoire dans les années postérieures à la « crise post-électorale » de 2011 et au conflit commencé dix ans plus tôt, qui reposent prioritairement sur des instrumentalisations politiques de l’autochtonie. Je propose ici de réexaminer les pratiques et politiques patrimoniales de la nature en rapport avec les modalités d’appropriation des aires protégés des autochtones tout comme des allochtones durant cette période caractérisée par un net affaiblissement de l’institution du tutorat.
En mobilisant des sources écrites et filmiques en plus de mes enquêtes ethnographiques, j’ai détecté ce rapport autochtonie/allochtonie à propos de 7 aires protégées distribuées dans des régions très différentes du pays. Ces aires protégées apparaissent finalement comme un lieu d’expression et un révélateur particulièrement efficace des tensions sociales et identitaires qui animent la scène politique ivoirienne depuis un quart de siècle. Etant donné la profonde division politique entre autochtones et allochtones à l’échelle du pays, et ce jusqu’à nos jours, aucun des acteurs ne peut ne peut invoquer la nation pour galvaniser un sentiment d’appartenance et d’identification aux aires protégées : seules les valeurs attachées à l’autochtonie sont actuellement susceptibles de jouer ce rôle, phénomène contribuant sans doute à stabiliser la division auto-/allochtonie.
-
Communication orale
Saisir les trajectoires d’un État pouvoir. Repérer la criminalité foncière et les tensions État-élites-autochtones autour du foncier dans le village AKAK au CamerounJean Emmanuel Minko À Bitegni (Université de Maroua)
Le présent papier entend décrypter les rapports d’inimitié et les tensions foncières de la biodiversité entre État-élite-autochtones dans le village AKAK au Cameroun, dans un contexte où l’État s’est lancé dans sa politique d’émergence en 2035. Une situation qui a favorisé la sollicitation des vastes terres dans le champ rural par une certaine élite autochtone et allogène, appelée les néo-seigneurs fonciers. Ces derniers sont constitués des hommes politiques, financiers, coutumiers et des cadres de diverses institutions étatiques et privées pour des activités agropastorales et agro-industrielles. Une réalité qui a contribué à paupériser les populations autochtones et entraîner leurs frustrations. Cette désappropriation foncière de ces élites politiques, financières et coutumières vis-à-vis des populations autochtones a été déterminante dans la fabrique de la criminalité foncière, entendue ici comme l’ensemble d’activités, d’actions et de comportements illicites, illégitimes et illégaux dans l’acquisition foncière, l’exploitation foncière. Une réalité qui s’assimile à la considération mbembeienne de la souveraineté comme « le pouvoir et la capacité de dire qui pourra vivre et qui doit mourir ». Une situation qui conduirait à une forme émergente de violence.
Faire le décryptage de la violence souveraine sous le prisme des rapports d’inimitié émergents entre les pouvoirs publics, la classe élitiste et les autochtones à Akak, est la pleine raison de ce papier.
-
Communication orale
La crise écologique, une crise culturelle et économique pour le SénégalAdja Aichatou Dièye (Université Cheikh Anta Diop de Dakar)
Depuis quarante ans, la problématique environnementale fait son retour dans le champ de la pensée à cause des préoccupations écologiques auxquelles l’homme est confronté. De nos jours, sont apparues plusieurs menaces liées au changement climatique ou à la dégradation du milieu de vie donnant l’impression, pour certains, de vivre dans « le temps des catastrophes », pour reprendre l’expression d’Isabelle Stengers. La possibilité d’un bouleversement total du climat est devenue une réalité.
En effet, le monde actuel est marqué par des catastrophes naturelles. Il est devenu habituel de voir l’érosion des côtes favorisant l’avancée de la mer et la disparition de certains lieux d’habitats surtout ceux des animaux. Face à ce fléau international, le Sénégal aussi ne fait pas l’exception. Cela fait plusieurs années que les côtes sénégalaises connaissent une ruée des bateaux venant de l’extérieur. Avec la surpêche, beaucoup d’espèces aquatiques ont disparu. Cette disparition a plusieurs conséquences d’ordre économique, culturel, écologique, etc., sur la population côtière autochtone comme celle de Guét-Ndar à Saint-Louis du Sénégal. Pour assurer la sécurité alimentaire mondiale, des multinationales viennent au Sénégal. Les espaces qu’elles occupent se situent pour la plus part dans les campagnes où vivent les peuples autochtones.
Dans cette présente communication, nous allons démontrer que la crise environnementale est aussi une crise culturelle au Sénégal.
Repas collation
Café Collation
Session 3 – Autochtonie en Afrique : élites et domination, droit et politique
-
Communication orale
Le doute comme principe actuel de protection des personnes dites autochtones en AfriquePhilippe Karpe (CIRAD)
Figure (peut-être) imposée, l’autochtone se voit pourtant progressivement doté d’une reconnaissance et d’un statut juridiques propres et sous ce nom en Afrique. Paradoxalement, grâce aux incertitudes qui caractérisent ceux-ci (à tout le moins au niveau régional), des opportunités de protection, et de son approfondissement, semblent s’ouvrir. En fait, pour le moment, il s’agit moins de dire ce que sont ou ce que devraient être les termes du régime juridique protecteur des autochtones africains que de suggérer une relecture des travaux en cours, d’en éclairer et d’en enrichir les différentes possibilités, dans l’intérêt de tous.
Philippe Karpe, juriste, directeur de recherche au Cirad, UMR SENS
-
Communication orale
Les renouveaux autochtones : un défi pour l’ordre mondial ? Perspectives et prospectives à partir et par-delà le continent africainAnne-Sophie Lambert (Université de Bourgogne-Franche Comté)
Dans un temps où la crise multiple et globale de la Terre confronte l’humanité à des défis majeurs et urgents, notre contribution - portant sur nos travaux de recherche et de thèse - vise à interroger les relations entre les dits « peuples autochtones », à partir et par-delà le continent africain, et l’ordre mondial actuel, tel qu’il se développe et se transforme depuis au moins le XVe siècle.
Pour autant, la situation variable de ces peuples, selon leurs diveres trajectoires historiques et selon les continents ou États où ils vivent, entre avancées et reculs, est loin d’être idyllique. Et la « ré-émergence » relativement plus récente de « peuples autochtones » africains a révélé de manière particulière sur le continent la complexité des enjeux et des défis autour de l’« autochtonie ».
1 Du point de vue terminologique, la notion d’autochtonie, du fait de son caractère polysémique, interactionnel et changeant sur le continent, y fait aujourd’hui l’objet de débats voire de controverses, mais aussi de nuances et d’intérêts grandissants, en fonction des enjeux politiques et économiques sous-jacents.
2 Dans ce contexte complexe du continent, force est de constater que, pour de nombreuses raisons, la recherche concernant les problématiques des peuples autochtones d’Afrique, éclairée par une mise en perspective historique sur le long terme de leurs dynamiques, et prenant en compte les dimensions à la fois locale, nationale et globale de leurs interactions, est beaucoup moins avancée.
-
Communication orale
Repérer la contribution de l’élite autochtone dans l’action publique climatique au Cameroun : Cas de l’atelier de préparation de la délégation camerounaise pour la COP26Michel Romain Awono Mballa (Université de Douala)
Cette contribution entend décrypter l’action publique climatique par le bas au Cameroun en abordant les dessous, le caché de la participation d’une « élite autochtone » dans l’action publique climatique au Cameroun dans un contexte où circulent des pratiques de « corruption matrice » - entendue comme des pratiques illicites, illégales et illégitimes et répréhensibles.
De manière spécifique, il sied de faire une socio-anthropologie de la participation des élites autochtones dans l’action publique climatique au Cameroun. Cette contribution s’interroge donc sur la question de savoir comment participe l’élite autochtone dans l’action publique climatique au Cameroun ? En d’autres termes, de quelle élite s’agit-elle ? Participe-elle au débat national relatif à la question climatique ? Appartient-elle à une ethnie particulière ? Comment est-elle sélectionnée ? Voilà une pluralité de questions que nous tenterons de répondre dans cette contribution. En puisant sur la socio-anthropologie et des données empiriques basées des entretiens semi-directifs, nous prévoyons nous entretenir avec des agents de l’administration climatique du Cameroun, les acteurs de la société civile dans le but de mettre la main sur cette « élite autochtone climatique » au Cameroun et enfin se rapprocher d’elle afin d’acquérir leur récit.
-
Communication orale
Se (dé) légitimer par l’autochtonie : appropriation et rejet d’une ressource dans la champ politique rural camerounaisThéodore Ambassa Akoa (Université de Lille (CERAPS, UMR 8026))
L’émergence d’un champ politique rural au Cameroun prend racine à partir des premières élections municipales de 1962. A cette période, le local comme centre d’expression politique est moins attrayant que le national. Cependant la libéralisation qui survient dans les années 1990 replace le local et le rural au centre du jeu politique partisan. Tout d’abord, il consacre la décentralisation comme principe constitutionnel. La constitution reconnait également le droit des autochtones et enfin, il y a l’organisation des toutes premières élections municipales libres et transparentes. De nouveaux partis politiques s’intéressent au local, à tel point que pour cette première élection de l’ère multi-partisane, ils parviennent à obtenir 117 communes sur les 336 existantes à cette période. Dans les communes rurales, les phénomènes des « élites urbaines » s’intensifient avec pour corollaire des élus de moins de moins ancrés dans la vie de leur commune. L’identité ethno-tribale influence pour partie, à la fois la sélection des candidats, le déroulé de la campagne et la redistribution des postes à la fin du processus.
Ainsi, la question principale demeure celle de savoir comment l’autochtonie structure t-elle l’ossature du champ politique rural au Cameroun ? Comment s’articulent les différentes identités mobilisées par les acteurs de ce champ ? Comment le rapport de force entre ethnies définit l’orientation politique, se sortant finalement de l’emprise du parti politique ?
-
Communication orale
Regards croisés sur l'histoire et la condition actuelle des peuples autochtones du Nord-CamerounRichard Atimniraye Nyelade (Université d’Ottawa)
Cette étude se concentre sur la condition des populations autochtones du Nord-Cameroun qui subissent diverses formes de contrôle, d'exclusion et de discrimination, que ce soit au niveau national ou territorial. Elle met en lumière les processus et les dispositifs historiques et socio-politiques qui ont contribué à leur assujettissement culturel. Dans cette région, les peuples autochtones sont confrontés à une dynamique de dégradation culturelle marquée par une logique d'homogénéisation imposée par les groupes sociaux dominants. Le rapport social témoigne de la prédominance des valeurs culturelles des sociétés islamiques conquérantes par rapport aux valeurs culturelles autochtones. Pour les peuples autochtones, la reconnaissance des droits culturels est une lutte quotidienne.
Le mouvement culturel autochtone, qui a vu le jour ces dernières années, a pour objectif la réappropriation de l'identité culturelle, tout en révélant la volonté des populations autochtones de vivre et de subsister selon leurs propres valeurs culturelles. Les droits culturels représentent un enjeu crucial de développement pour les communautés humaines du Nord-Cameroun. Cette étude s'oppose au discours officiel qui ne reconnaît que les "pygmées" (Baka, Bakola et Bagieli) et les Bororos comme les seuls peuples autochtones du Cameroun.
Elle vise à mettre en lumière la diversité des peuples autochtones, dont certains sont présents dans le Nord-Cameroun depuis plusieurs millénaires.
Session 4 – Autochtonie et politique par le bas
-
Communication orale
Les ambigüités narratives et politiques de l’autochtonie à Yaoundé (Cameroun)Patrick Dieudonne Belinga Ondoua (Université de Genève)
Suivant une tradition bien connue de « l’invention » du phénomène ethnique et identitaire en Afrique, la présente communication relève que l’identité autochtone n’est jamais fixe. Elle change en fonction des politiques et des contextes. Il s’agira alors de relever les dynamiques narratives et politiques de la fabrique de la conscience autochtone dans la longue durée en précisant notamment le rôle joué par la mémoire et celui des politiques foncières, territoriales et électorales depuis l’époque coloniale dans la formation, la cristallisation et le renforcement de cette conscience autochtone. L’objectif de cette communication est de saisir l’autochtonie à partir de son « énonciation politique » dans la ville de Yaoundé et dans le quartier d’Elig Effa plus particulièrement et de comprendre en quoi il est une construction politique plutôt qu’un phénomène naturel.
C’est dans le sens de cette perspective spatio-temporelle que la présente section analysera la construction des catégories identitaires en partant d’une recherche de plusieurs mois effectuée en 2021 à Elig Effa (Yaoundé) pour en préciser les singularités, mais aussi les flexibilités, les changements et les contradictions.
-
Communication orale
Autochtonie et Ethnie dans le métier de «clandoman» à Oyem . «Mong-nam » comme un argument commercialFrederick Mba Missang (Faculté de droit, de sciences juridiques et politiques Universié Omar Bongo)
Comment et en quoi l’autochtonie et l’ethnie font entravent à la mise en place d’un modèle économique socio-communautaire dispositif de la modernité urbaine ? L’étude envisager d’analyser leur emprise sur le modèle de transport anarchique dit « clando » dans la ville d’Oyem (Gabon), et les conséquences socioéconomiques-sécuritaires qui en découlent. A partir des concepts d’autochtonie, d’ethnie et de clandoman, en s’appuyant sur une approche socioculturelle et comparative des représentations anthropologiques symboliques, et l’historiographie de la nation, l’analyse insiste sur la prépondérance des clandoman autochtones dits « Mong-nam » sur les clandoman « immigrés » dans le modèle de transport anarchique qu’est le clando. L’expression « Mong-nam » polarise tant de réalités endogènes qu’elle devient pour ainsi dire, un label commercial. La prégnance de cette expression dans le domaine commercial invite à découvrir finalement, que la persistance des représentations anthropologiques véhiculées par les éléments de langages et les discours dans les micros-activités économiques des villes d’Afrique subsaharienne, entrave au développement d’un modèle socio-économique communautaire, dispositif de la modernité urbaine. Toute chose à l’origine de l’insécurité urbaine.
-
Communication orale
Les savoirs endogènes et locaux au service de l’adaptation aux changements climatiquesFélicité Arindo (Université Ngaoundéré, Cameroun), Elisabeth Arsenault (Université Laval, Québec), Claire Depardieu (Université Laval), Valentina Donati (Université Laval, Québec)
Comment les populations africaines et haïtiennes, notamment en milieu rural, vivent-elles les changements climatiques qui affectent leur milieu de vie ? Comment identifient-elles et expliquent-elles ces changements ? Qu’ont-elles fait pour y résister, pour les atténuer ou pour s’y adapter ? Quelles stratégies de résilience ont-elles imaginées et quels savoirs ont-elles produits au fil du temps à propos de leur environnement naturel, de ses transformations et de la nécessité de continuer à en tirer des ressources nécessaires à la vie ? Ces questions qualitatives complexes ont mobilisé dix boutiques des sciences réparties dans huit pays francophones des Suds. Pour tenter d’y répondre en considérant leurs contextes de recherche parfois difficiles et l’urgence inséparable de l’Objectif de Développement Durable 13, une recherche-action multi-située, décentralisée et simultanée employant l’approche des récits de vie et la technologie numérique libre et gratuite a été mise en place. Une centaine d’étudiant-e-s en sciences sociales et humaines affilié-e-s aux boutiques des sciences sont ainsi parti-e-s dans les zones rurales de leur pays respectif pour collecter les récits de savoirs locaux d’hommes et de femmes aîné-e-s, gardien-ne-s de la mémoire collective, sur les changements climatiques et les stratégies de résilience développées. Ces récits ont ensuite été archivés sur une base de données ouvertes et réutilisables sur l’application. Nous présenterons ce projet Yanayi.
Café collation
Café - Collation