Informations générales
Événement : 90e Congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Section 300 - Lettres, arts et sciences humaines
Description :L’objectif de ce colloque est de rassembler les chercheur·se·s s’intéressant au français montréalais, à ses variétés et à son évolution. Notre colloque met l’accent sur la spécificité et la pluralité des variétés de français parlées à Montréal. Une meilleure compréhension de cette richesse culturelle permettra de mieux comprendre les multiples facettes des pratiques langagières montréalaises ainsi que le développement des espaces identitaires.
Alors que le français parlé traditionnel est très bien documenté (voir les bibliographies dans Thibault et Vincent, 1990; Daveluy, 1994; Blondeau, 2014), il existe très peu de données sur les pratiques langagières des francophones issu·e·s des communautés culturelles et sur l’impact de ces pratiques sur le français montréalais. Pourtant, les pratiques langagières des Montréalais ont évolué et la sociolinguistique montréalaise aborde de plus en plus les problématiques liées au plurilinguisme des locuteur·trice·s (Blondeau, 2014, 2020; Blondeau et Friesner, 2011, 2014; Blondeau et Tremblay, 2016; Lamarre, 2013), un thème de recherche aussi d’actualité dans d’autres grandes métropoles multiculturelles comme Toronto (Denis, 2020, 2022; Hoffman et Walker, 2010; Nagy et al., 2013), Paris (Fagyal, 2010, soumis; Cheshire et Gadet, 2011) et Londres (Cheshire, 2020; Cheshire et al., 2011; Cheshire et Gadet, 2011; Sharma, 2011). De plus, peu d’études se sont intéressées à l’acquisition des traits du dialecte local par des francophones originaires d’autres pays de la francophonie et à l’impact des changements sociétaux sur la langue, particulièrement en ce qui a trait à la question des identités de genre.
Conférences
Hélène Blondeau, University of Florida
Isabelle Leblanc, Université de Moncton
Wim Remysen, Université de Sherbrooke
Anne-José Villeneuve, University of Alberta, campus Saint-Jean
Remerciements :L'organisation du colloque a reçu l'appui financier du Centre de recherches interdisciplinaires en études montréalaises (CRIEM) et du Département de linguistique et de traduction de l'Université de Montréal, que nous remercions chaleureusement.
Dates :Format : Sur place et en ligne
Responsables :Programme
Conférence plénière de Wim Remysen
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Communication orale
Le français montréalais dans la mire de la sociolinguistique perceptuelle : questions de recherche, méthodes et perspectivesWim Remysen (UdeS - Université de Sherbrooke)
Depuis l’essor de la sociolinguistique variationniste, le français parlé de Montréal est devenu une des variétés de français les mieux étudiées suivant les principes de ce courant. Les sociolinguistes montréalais ont par ailleurs grandement contribué au renouvellement du champ, notamment dans le domaine du changement linguistique (Blondeau 2020). Parallèlement aux études variationnistes, les représentations linguistiques des francophones de Montréal ont fait l’objet de plusieurs travaux, certains inspirés de la technique du locuteur masqué, d’autres tournés vers les discours métalinguistiques.
Dans cette conférence, nous plaiderons pour une approche qui permet de faire le pont entre les pratiques linguistiques et les valeurs symboliques et identitaires associées à certaines d’entre elles. Il s’agit de la sociolinguistique perceptuelle, un courant déjà bien établi dans certaines communautés, mais encore peu exploré dans la francophonie. Cette approche, inspirée e.a. des travaux de Preston (2011) et Krefeld/Pustka (2010), s’intéresse aux effets de catégorisation associés à certains phénomènes linguistiques, dans une perspective étique. Cette approche nous paraît particulièrement intéressante dans le contexte actuel, marqué par une volonté de plus en plus affirmée de se pencher sur des problématiques traditionnellement moins étudiées, comme le plurilinguisme, la diversité culturelle du fait français ou encore les contacts entre variétés de français dans l’espace montréalais.
Session 1
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Communication orale
De nouvelles données sur l’expression de la conséquence en français montréalaisDavy Bigot (Université Concordia)
L'alternance de (ça) fait que vs donc vs alors vs so en français laurentien est un phénomène qui a fait l’objet de nombreuses études. Citons, entre autres, celle de Dessureault-Dober (1974) sur le français québécois, celle de Mougeon et Beniak (1991) sur le français de l'Ontario, mais aussi celle de Mougeon et al. (2009) sur le français langue seconde. Plus récemment, Blondeau et al. (2019) ont effectué une comparaison de données recueillies dans deux corpus d’entrevues réalisées entre 2011 et 2015, auprès de locuteurs natifs de Welland (en Ontario) et de Montréal (dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve).
Dans le cadre de cette communication, nous présenterons de nouvelles données tirées du corpus Montréal Ahuntsic-Cartierville, corpus d’entrevues sociolinguistiques également collecté en 2015. L’intérêt de cette recherche est double : 1) approfondir les connaissances sur l’usage des marqueurs de conséquence en français montréalais, et 2) identifier les pratiques linguistiques contemporaines exclusives ou non aux locuteurs appartenant à deux communautés locales de Montréal.
Tout d’abord, nous décrirons brièvement l'histoire de l’arrondissement Ahuntsic-Cartierville, ses caractéristiques démolinguistiques actuelles et la méthodologie de notre recherche. Ensuite, nous exposerons les résultats de notre analyse sociolinguistique variationniste. Enfin, nous conclurons sur les différents points de convergence et de divergence entre nos résultats et ceux des recherches antérieures.
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Communication orale
Une description des facteurs sociodémographiques de l’état des sacres dans le français québécois parlé à MontréalMarc-Antoine Paul (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Les dernières études sur les sacres du français québécois (FQ) ont proposé d’observer ces termes sous deux composantes lexicales. Plus précisément, un sacre est composé d’une dimension vulgaire et son utilisation ne sert plus à référer à son sens étymologique (Dostie 2015a, Dostie 2015b). Cette perspective offre un regard synchronique quant à l’étiquette lexicale du sacre, mais n'expose pas de mesure fréquentielle quant leur emploi et ne permet pas d’apprécier les facteurs sociolinguistiques qui sous-tendent leur usage. Dans cette communication, on se demandera si les caractéristiques sociales des locuteurs.rices du FQ à Montréal ont un effet sur la fréquence d’emploi des sacres, la perception du caractère vulgaire des sacres et l’emploi des sacres vis-à-vis leur sens d’origine. Pour ce faire, des jugements sur ces trois composantes ont été recueillis auprès de 209 locuteurs.rices du FQ vivant à Montréal. Les résultats montrent une absence d’effet du genre, de l’âge, ainsi que du fait d’avoir grandi à Montréal ou non. Plutôt le fait d’être aux études ou sur le marché du travail a un effet significatif, mais uniquement sur la perception du caractère vulgaire des sacres. Les étudiant.e.s surévaluent le niveau de vulgarité des termes présentés. Si ces résultats suggèrent qu’il y a peu de variation sociolinguistique, les données recueillies illustrent que le statut social a un effet sur ce qui est considéré comme offensant.
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Communication orale
L'essor des pronoms simples en français montréalais revisitéMireille Tremblay (UdeM - Université de Montréal)
Le français québécois présente un double paradigme de pronoms forts : les pronoms simples nous, vous, elles, eux - variantes conformes au français standard - alternent avec leurs contreparties vernaculaires complexes nous autres, vous autres, eux autres. Dans cette communication, nous revisitons la montée des pronoms simples documentée par Blondeau (2011) et montrons le rôle déclencheur de la gradation de l'âge dans ce changement communautaire : les locuteurs d'âge moyen fournissent un apport accru de formes simples du français standard aux locuteurs plus jeunes, provoquant l'intégration des formes simples dans la langue vernaculaire. Notre analyse s'appuie sur des données en temps réel et apparent issues de deux corpus : Montréal 1971 et FRAN-HOMA 2012.
Dans l'approche diglossique (Zribi-Hertz, 2011), deux grammaires coexistent dans l'esprit des francophones: le français familier vernaculaire (innovant, acquis jeune), et le français standard (conservateur, transmis par l'école). Alors que les locuteurs plus âgés participent au changement en faisant appel à leur grammaire du français standard (étape 1), les jeunes générations le font en faisant appel à la nouvelle grammaire (étape 2). Cette analyse est étayée par la rapidité du changement (8% --> 48%), le taux élevé de pronoms simples chez les jeunes locuteurs (70%) et le fait que les jeunes locuteurs ne montrent plus de stratification sociale dans leur utilisation des pronoms simples.
Dîner
Session 2
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Communication orale
Les Français⸱es à Montréal : étude préliminaire de marqueurs discursifsNadège Fournier (UdeM - Université de Montréal)
À l’instar des grandes villes nord-américaines, Montréal présente une importante diversité ethnique, culturelle et linguistique. Chaque année, la métropole accueille des milliers d’immigrant⸱e⸱s provenant d’horizons différents qui modifient considérablement sa dynamique linguistique. Si le nombre de francophones, d’anglophones et d’allophones est régulièrement estimé, il convient également d’accorder de l’attention à la variation en ce qui concerne le français de Montréal. Qu'il s'agisse du français parlé en tant que langue seconde ou langue première, ces variétés enrichissent le français montréalais chacune à sa façon.
Dans ce contexte, il importe de documenter l’ensemble de ces variétés de français en contact. De études ont porté sur le parler de Montréalais⸱es anglophones (Nagy, Moisset et Sankoff 1996 ; Nagy, Blondeau et Auger 2003), hispanophones (Friesner et al. 2008; Blondeau et Friesner 2014) et francophones (Ben Hamouda 2019).
Mon projet se penche sur les pratiques langagières de Français⸱es qui se sont installé⸱e⸱s à Montréal à l’âge adulte. Immergé⸱e⸱s dans un nouvel environnement linguistique, certain⸱e⸱s membres de cette communauté se laissent imprégner de la variété locale. Dans quelle mesure maintiennent-iels les marqueurs de discours associés à leur dialecte natif et adoptent-iels ceux du français québécois ? Cette étude analyse les productions orales de 8 Français⸱es : 4 personnes résidant à Montréal depuis plus de 8 ans et 4 personnes fraîchement débarquées.
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Communication orale
La variation morphosyntaxique en français montréalais : quelques pistes à explorerJulie Auger (UdeM - Université de Montréal)
Les corpus sociolinguistiques de français montréalais et les analyses variationnistes auxquelles ils ont donné lieu font de cette variété de français l’une des mieux décrites. Les nouvelles technologies qui automatisent la collecte et l’exploitation des données permettent d’analyser des quantités de données considérables. Ces avancées sont importantes et ces recherches doivent se poursuivre.
Dans cette communication, j’exprimerai ma crainte que cet attrait pour la mécanisation et l’automatisation ne nous amène à favoriser les variables linguistiques pour lesquelles une recherche automatique est possible et à négliger les autres (par exemple, le redoublement des sujets). Je parlerai du danger de perdre de vue les données linguistiques elles-mêmes et les caractéristiques individuelles des locutaires qui les ont produites quand les quantités d’occurrences se chiffrent à des milliers. Je mettrai de l’avant l’importance de placer l’étude de la variation entre futur simple et périphrastique dans un contexte plus global qui prend en compte tous les types d’emploi de ces deux temps. Et je soulignerai les limites des corpus sociolinguistiques quand les formes requises pour établir la productivité de certaines formes se font trop rares pour faire l’objet d’analyses quantitatives et l’importance de développer des instruments de collecte de données qui permettent de combler ces lacunes, notamment en faisant appel au savoir de nos collègues experts en linguistique expérimentale.
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Communication orale
L’omission du pronom impersonnel : Une étude longitudinale du français parlé à MontréalClaire Djuikui Dountsop (UdeM - Université de Montréal)
Introduction : Des études longitudinales faites sur le français montréalais (p.ex : Sankoff et Blondeau, 2007) ont montré que les individus ne participent pas toujours aux changements en cours dans la communauté. Le il impersonnel employé avec falloir, dont l’omission est en régression à Montréal, n’a pas encore fait l’objet d’une telle étude.
Objectif : Notre objectif est de combler ce vide en proposant une étude axée sur le suivi des individus enregistrés en 1971 (Sankoff et al. 1976), en 1984 (Thibault & Vincent 1990) et en 1995 (Vincent & Laforest & Martel 1995).
Méthodologie : Nous suivons deux cohortes d’individus : 60 enregistrés en 1971 et en 1984, avec un total de 2382 occurrences et 12 enregistrés en 1971, en 1984 et en 1995, avec un total de 1338 occurrences. Chaque occurrence a été codifiée pour la présence/absence de il et pour des facteurs sociaux (âge, sexe et classe socioéconomique).
Résultats : L’analyse nous montre que chaque cohorte, indépendamment de l’âge et du sexe, suit la tendance communautaire. Cependant, le suivi individuel montre que tous les individus ne participent pas au changement au même moment. Certains locuteurs s’opposent à leurs pairs en adoptant le changement mené par le sexe opposé.
Conclusion : Tout comme dans les études antérieures, nous montrons que la tendance observée chez les individus peut être différente de celle de la cohorte ou de la communauté. Ces derniers modulent leurs choix linguistiques selon leur trajectoire sociale.
Conférence plénière d’Hélène Blondeau
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Communication orale
Parcours sociolinguistiques montréalais : l’étude longitudinale de l’individu dans sa communautéHélène Blondeau (University of Florida)
Cocktail
Conférence plénière d’Isabelle Leblanc
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Communication orale
Moncton à Montréal : l’évolution du récit queer de Xavier B. GouldIsabelle Leblanc (Université de Moncton)
Session 3
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Communication orale
Blonde, chum et compagnie: la dénomination des membres du couple au Québec entre 1971 et 2012Guillaume Beauchamp (UdeM - Université de Montréal), Nadège Fournier (Université de Montréal)
Différentes études suggèrent que les changements sociaux et politiques qu’a engendrés la Révolution tranquille ont mené à une évolution considérable du vocabulaire des relations humaines au cours de la seconde moitié du XXe siècle au Québec (Mercier, 2002 ; Vincent et Lambert, 2010).
Cette étude se concentre sur les termes pour désigner un ou une membre d’un couple en français québécois. Une grande variété de dénominations ont été mentionnées dans des travaux antérieurs (Vincent et Lambert, 2010 ; Belleau, 2011). Certaines sont ambiguës en ce sens qu’elles peuvent faire allusion à une personne impliquée dans une relation amicale, telles que ami et amie ou encore copain et copine, tandis que d’autres ne sont pas usitées dans l’ensemble de la francophonie, telles que chum et blonde.
Par le biais de l’approche variationniste, nous observons le changement dans l’usage de ces termes à Montréal. Pour ce faire, nous étudions des données issues de deux corpus recueillis à différentes époques (1971 et 2012) qui contiennent des enregistrements de personnes montréalaises d’origine québécoise. Premièrement, nous comparons la distribution des variantes dans les deux corpus. Nous constatons par exemple que la paire époux/épouse n’apparait qu’en 1971. Deuxièmement, nous procédons à une analyse multivariée afin de déterminer si l’usage des variantes à chaque époque s’explique par des facteurs linguistiques (déterminant, nombre, temporalité) et sociaux (âge, sexe, classe socioéconomique).
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Communication orale
Appropriation de l'espace et toponymie: étude sociolinguistique du quartier Hochelaga-Maisonneuve à MontréalClaire Bourély (UdeM - Université de Montréal)
Tout acte de nomination est en même temps un acte de localisation qui permet de s’approprier l’espace (Dugas, 1987). Boyer (2008) parle d’un acte « glottopolitique », visant à « revendiquer l’inscription du toponyme dans une communauté linguistique et/ou culturelle ». De fait, nommer, c’est s’approprier. Mais à quoi correspond l’acte de de dé-nommer, de re-nommer ou d’abréger?
Cette étude analyse les toponymes utilisés par les journaux montréalais Le Devoir, Le Journal de Montréal et La Presse entre 2010 et 2012 pour désigner le quartier Hochelaga-Maisonneuve. Elle se concentre sur le toponyme HoMa, résultat d’une opération de troncation et soudure de Hochelaga et Maisonneuve, sur le modèle SoHo (New-York), SoMa (Sans Francisco) ou LoDo (Denver), et qui suscite des réactions contrastées chez les résidents du quartier.
L’analyse porte sur 1192 articles. En utilisant le logiciel QDA Miner (Miner, 4) dans une perspective descriptive, nous verrons que l’utilisation du nom HoMa augmente au fil des ans, que Le Devoir est le journal qui favorise le plus HoMa, qu’il est aussi le seul à utiliser le nom Hochelag dans ces trois années et que la probabilité d’utiliser le toponyme HoMa reste la même malgré le volume de mots.
En combinant QDA Miner et Hyperbase (Hyperbase), dans une perspective explicative, nous analyserons ces tendances afin de mieux comprendre les dynamiques linguistiques et géographiques qui sous-tendent la construction d’une identité de quartier.
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Communication orale
Au delà de la morphosyntaxe, la variation phonique en français québécois soutenuJeffrey Lamontagne (Université d'Indiana), Kaitlyn Owens (Indiana University), Dav Rosychuk (Université de l'Alberta), Anne-José Villeneuve (Université de l'Alberta)
Si plusieurs travaux ont porté sur le français québécois (FQ) familier, la variation stylistique en FQ soutenu reste relativement peu étudiée. Notre étude comble cette lacune en ajoutant aux rares études sur la morphosyntaxe (Bigot 2021, Villeneuve 2017) des variables phoniques, soit le relâchement et la diphtongaison des voyelles pré-rhotiques en syllabe finale. Si ces deux variables peuvent distinguer le familier du soutenu (Bigot et Papen 2013), leur emploi en contexte formel demeure méconnu. Des régressions à effets mixtes sur la parole spontanée de 14 Montréalais·es enregistré·es dans deux contextes d’entrevues télévisées confirment que les variables phoniques varient peu en FQ soutenu, contrairement aux variables morphosyntaxiques. Le relâchement des voyelles hautes (/piʁ/ [pɪʁ] pire) est associé à la formalité uniquement pour /u/, où il est renforcé par l’antériorisation dans les entrevues moins formelles. Le degré de diphtongaison ne témoigne que de faibles tendances, mais l’antériorité du noyau est associée au style pour plusieurs voyelles (surtout antérieures) et la hauteur du noyau l’est pour /ɔ y/. Nos résultats rejoignent ceux de Labov (2001) sur l’anglais, où la morphosyntaxe était plus sensible au style que les variables phoniques. Notre étude suggère que les individus exploitent les variables phoniques pour atténuer la distanciation sociale engendrée par le contexte et exprimée par les choix morphosyntaxiques.
Dîner
Session 4
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Communication orale
Street rap et français parlé de Montréal : perspectives artistiques sur l’album Fouette Jean- Baptiste de Tizzo et ShreezAmine Baouche (UdeM - Université de Montréal)
Figures de proue d’un second essor du street rap de la région de Montréal, les rappeurs Tizzo et Shreez publiaient en 2018 leur premier album, Fouette Jean-Baptiste. Moins adapté à la diffusion de masse parce que plus cru, tant par sa musicalité que par son traitement du langage et des thèmes évoqués, le street rap (dont de Tizzo et Shreez) intègre un parlé résolument montréalais où se côtoient des mots de créole, d’anglais, parfois d’arabe vernaculaire maghrébin, un niveau de langage particulièrement familier, voire grammaticalement incorrect, ainsi qu’une terminologie spécifique aux activités criminelles de la rue. Dans le but de réfléchir à une éventuelle spécificité artistique de l’œuvre, où du moins à son rapport à l’idée d’art, comment rendre compte du va-et-vient entre cette variété de français contemporain urbain et le langage artistique propre aux chansons?
Pour situer ma propre recherche, je commencerai par un bref état des lieux des études critiques sur le rap en français, et plus précisément des études linguistiques, « littéraires » et/ou « poétiques ». Il s’agira également de proposer une méthode pour aborder non seulement cet objet-ci, mais les œuvres de rap en général. Je décrirai ensuite les particularités de la langue de Fouette Jean-Baptiste, et mon exposé s’ouvrira ainsi sur les enjeux que peut soulever un tel corpus : lieux communs, subjectivité collective, langage et art « populaires » ou « de masse », etc.
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Communication orale
Rédaction d'un dictionnaire du français québécois familier chez les jeunes : lexicographie festive et décomplexéeJérôme Charette-Pépin
Il y a dans la tradition lexicographique québécoise une double tentative, celle de donner au peuple les outils nécessaires à la maitrise du « bon français » et celle de répertorier ses innovations, ses particularités, sa variation. Combien noble est la mission de De Villers ! Et combien courageuse celle de Dionne ! Devant le désintérêt généralisé et évident de la majorité des jeunes envers le conservatisme linguistique, il parait clair que l’ouverture au changement est la clé de la préservation du français au Québec. Entamée en 2019, la rédaction du Dictionnaire chilleur, un ouvrage lexicographique dressant le portait du français québécois familier parlé par les jeunes, a requis autant de discipline que d’indiscipline. Comment accéder aux néologismes, aux prononciations, aux sens nouveaux et aux expressions propres aux jeunes sinon qu’en les côtoyant dans la rue, les parcs, les bars et les appartements. Une méthode de recherche peu orthodoxe a permis de répertorier des milliers de bijoux linguistiques propres à la jeune génération, quête pour laquelle le droit chemin académique échoue visiblement.
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Communication orale
La perception et la solidarité des jeunes montréalais envers l’accent d’artistes rap québécois : un regard sociophonétique perceptuel sur la diversification du vernaculaireEmily Leavitt (UdeS - Université de Sherbrooke)
Si la pluralité et la mouvance du français montréalais contemporain représentent des enjeux à son étude, elles présentent une occasion de reconcevoir nos méthodologies pour mieux en tenir compte. Nous saisissons cette occasion en proposant une étude à la fois sociophonétique et perceptuelle qui nous permettra d’examiner la réindexicalisation des marqueurs dialectaux résultant de la diversification du français montréalais vernaculaire récemment mise en évidence (Blondeau, 2020; Blondeau, Mougeon et Tremblay, 2019; Blondeau et Tremblay, 2016, 2022a, 2022b; Giaufret, 2021; Leavitt, 2022).
Nous ciblons un terrain de culture populaire dynamique d’où surgissent des réinventions socioculturelles et linguistiques : le mouvement d’artistes rap québécois et leurs jeunes publics. Nous chercherons à répondre à trois questions. Comment des jeunes auditeurs montréalais perçoivent-ils l’accent des artistes rap québécois? Quels traits phonétiques influencent cette perception? Dans quelle mesure les jeunes ressentent-ils de la solidarité envers ces accents? Pour y parvenir, nous extrairons de la musique et des entretiens d’artistes des échantillons contenant des traits phonétiques typiques du français montréalais. Lors d’une expérience, des jeunes auditeurs les écouteront et rempliront un questionnaire sur leur identification et perception des accents. L’analyse des rapports sociophonétiques permettra de cerner le remodelage du paysage phonétique des français montréalais vernaculaires
Conférence plénière d’Anne-José Villeneuve
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Communication orale
Décrire des francophonies canadiennes en transformation: place aux voix issues de l'immigrationAnne-José Villeneuve (University of Alberta)
La francophonie canadienne est en profonde transformation: sa croissance repose de moins en moins sur les naissances et de plus en plus sur l’immigration, en grande partie du continent africain (Maghreb, Afrique subsaharienne). Hélas, peu de travaux se sont intéressés jusqu’ici à ces voix (et voies) du français au Canada.
Je présente ici les orientations du projet "Immigration et francophonies canadiennes en transformation", qui documente le français des gens issus de l’immigration francophone dans deux métropoles du domaine laurentien — Edmonton et Montréal — et teste l’hypothèse de l’émergence, chez les jeunes, d’un français populaire distinct tant du ‘joual’ que du français ‘standard’ (Blondeau et Tremblay 2016). Cette analyse portera sur des variables bien documentées (marqueurs de conséquence; pronoms en autres) et sur des traits de prononciation (quasi)catégoriques en français laurentien soutenu. La constitution du nouveau corpus permet de comparer la parole des personnes établies au Québec à celle des francophones vivant en situation minoritaire et d’étudier le rôle potentiel de l’ethnicité, par la comparaison des nouvelles données à des enregistrements recueillis en 2012 auprès de Montréalais ‘de souche’.
Je montrerai ainsi comment ce projet, par son objet d’étude et la composition de son équipe, tire profit d’expériences et expertises complémentaires tout en renforçant la collaboration, la diversité et l’inclusion dans la recherche en sociolinguistique au Canada.