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Informations générales

Événement : 89e Congrès de l'Acfas

Type : Colloque

Section : Section 600 - Colloques multisectoriels

Description :

L’effet rebond environnemental, aussi dénommé paradoxe de Jevons, constitue l’un des obstacles les plus redoutables pour la reconstruction écologique de nos sociétés. Par cet effet, une meilleure performance environnementale relative des biens et des services peut conduire à une augmentation plus que proportionnelle de leurs usages. Ainsi, conjointement à la généralisation des démarches d’écoconception des produits et des services, la taille des voitures et des écrans augmente, le rythme de renouvellement des appareils électroniques s’accélère, le confort thermique tend à s’accroître et on parcourt de plus grandes distances en voiture ou en avion. Et il en résulte globalement une plus grande pression sur les ressources et l’environnement.

L’effet rebond peut en effet être associé à un paradoxe au cœur de l’Anthropocène : on n’a jamais réalisé autant d’analyses de cycle de vie (ACV) et déployé de démarches d’écoconception dans les organisations, alors que, cependant, les émissions de GES continuent d’augmenter et les ressources et la biodiversité de s’épuiser. En suivant l’analyse thématisée par le sociologue Michel Callon sur les cadrages-débordements (Callon, 1999), on pourrait dire que le cadrage opéré par le mythe rationnel de l’écoconception dans le paradigme de la croissance verte est sans cesse menacé de débordement par l’effet rebond.

Dès lors, une hypothèse que nous souhaitons aborder de manière interdisciplinaire dans ce colloque est que ce paradoxe ne peut être surmonté dans le paradigme de la croissance verte, mais qu’il appelle une rupture paradigmatique, une logique nouvelle de post-croissance, ou de « prospérité sans croissance », et que la maîtrise des effets rebonds environnementaux constituerait une politique innovante de sobriété et de décroissance.

Date :
Responsables :

Programme

Communications orales

Conférence introductive

  • Communication orale
    Le rationnement : gouverner la décroissance des consommations d’énergie face à l’effet rebond
    Mathilde Szuba (Institut d'Etudes Politiques de Lille)

Communications orales

1- Enquête sur les modes d’existence de l’effet rebond

Enquête sur les modes d’existence de l’effet rebond : quel diagnostic transversal peut-on faire sur l'effet rebond et ses paradoxes, ses dimensions psychologiques, les jeux de débordement de l’écoconception dans des secteurs spécifiques (mobilité et transports, manières d’habiter, équipements électroniques, alimentation, loisirs etc.), notamment dans le cadre de la croissance verte et de l’économie circulaire ? Cette enquête pourra également mobiliser une généalogie critique des grandeurs de « sur-qualité » des produits et services contemporains (ex. la vitesse, le confort, la connexion, la disponibilité, la sécurité).

  • Communication orale
    L’effet rebond : facteurs individuels et psychologiques
    Paquito Bernard (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    La présentation aura pour objectif de présenter l’état des connaissances sur les facteurs individuels et psychologiques qui expliquent (en partie) la présence ou l’absence d’un effet rebond à l’échelle d’un foyer ou d’une organisation. Plusieurs variables spécifiques comme le niveau de revenu, le ‘permis moral’, les croyances compensatoires semblent émerger de la littérature. Cette proposition de communication s’inscrit dans le thème Enquête sur les modes d’existence de l’effet rebond. Les questions suivantes seront abordées : Si bien souvent, les attitudes environnementales expliquent la décision d’achat de panneaux solaires, qu’est ce qui explique que celles-ci soient décorrélées de la consommation énergétique à moyen terme ? La perception de gain de temps ou d’argent est-elle associée à un effet rebond énergétique au sein d’un foyer ? Aussi, est-ce que la facilité perçue à modifier un comportement ‘vert’ explique l’amplitude de l’effet rebond à court terme ? Peut-on identifier un effet rebond lors de l’adoption d’un régime alimentaire pauvre en protéines carnées ? Cette présentation fournira les bases d’un échange ouvert entre disciplines, et une meilleure compréhension des rôles de la psychologie pour un mode de vie sobre.

  • Communication orale
    Sous la (nouvelle) menace des effets rebonds circulaires
    Geoffrey Lonca (Capgemini Engineering)

    Si le mécanisme d’effet rebond dans le domaine de l’énergie peut être retracé jusqu’aux travaux de de Stanley Jevons en 1865, ce n’est que très récemment que nous parvenons à en transposer les principales caractéristiques et mécanismes dans un contexte de transition vers une économie circulaire. Depuis l’optimisme aveugle envers la technologie (nous évoquerons le cas de l’IoT) jusqu’à l’alarmisme décroissanciste, des répercussions négatives à différents égards sont à craindre partout. Comment les identifier et surtout comment les atténuer ? Nous observerons ces rebonds circulaires par le prisme de l’approche systémique traditionnellement utilisée pour faire la promotion du concept d’économie circulaire. Devant l’inexorabilité de son existence, l’effet rebond (circulaire) ne peut être abordé comme une simple question de sophistication de la technologie et des appareils législatifs, mais plutôt comme une frontière de connaissance toujours en retrait.


Communications orales

2- Prospective d’une société sans effet rebond 

Prospective d'une société sans effet rebond : à quel scénario de post- croissance en 2030 ou 2050 conduirait un véritable contrôle de l'effet rebond ? Quelle mise en récit locale, sectorielle ou nationale de ce futur possible pourrait-on imaginer en prospective ou en design-fiction ? Quels médiums pourrait-on mobiliser pour raconter ou schématiser cette société sans effet rebond (ex. la nouvelle littéraire, la BD, le sketch, le prototype en design critique, l’installation en art actuel, le plan d’usage, le théâtre forum) ?

  • Communication orale
    Surplus de sobriété versus effet rebond : prospective d'une controverse urbaine en 2034
    Christophe Abrassart (UdeM - Université de Montréal)

    Comment aborder l'effet rebond de manière prospective ? Dans cette intervention je présenterai deux récits de fiction sur la gouvernance des effets rebonds à Montréal sur la période 2022-2050. Le premier récit se situera à l'horizon le plus éloigné. En 2050, pour maîtriser les effets rebonds, la Ville de Montréal expérimente un dispositif de gouvernementalité algorithmique des comportements. Mais en réaction, des territoires d'autonomie collective s'organisent dans plusieurs arrondissements, où les citoyen.ne.s abordent l'effet rebond par la gouvernance des "communs de sobriété".

    Pour construire une chronologie prospective d'ici 2050, le second récit se situera à un moment intermédiaire, en 2034. Il présentera une controverse autour de la répartition des "surplus de sobriété" (ex. générés par l'adoption d'une mobilité plus légère et plus active) pour piloter la décroissance. Cette notion renvoie à celle de "surplus de productivité globale" (CERC) qui offrait, pour la fin de la croissance fordiste au début des années 1970, un outil permettant aux partenaires sociaux de négocier la juste répartition des gains de productivité. Ce récit montrera comment les membres de la "classe écologique" (Latour et Shultz) tentent en 2034 d'institutionnaliser à Montréal une "gouvernance du vide" s'appuyant sur des "comptes de surplus de sobriété" spatiale, matérielle et énergétique afin d'empêcher l'aliénation de ces surplus par l'effet rebond croisé de la classe hédoniste-matérialiste.

  • Communication orale
    Installation participative : concevoir l'émancipation écologique par la pratique.
    Daphné Hamilton-Jones (Ecole Normale Supérieure Paris Saclay), Émile Roch (Telecom Paris Institut Polytechnique)

    Le fleurissement des démarches d'éco conception qu'a fait naître la prise de conscience de la crise climatique n'a pas permis la réduction radicale des impacts de celle-ci. Les usagers appliquent des modes de consommation typiques d'une société ultra-consumériste à ces dispositifs éco-conçus. Des modes de vie différents peinent à se mettre en place si les usagers ne sont pas acteurs de leurs changements.

    Il est aujourd'hui évident que les manières de faire écoconception qui s'inscrivent dans une optique de croissance verte appartiennent au néolibéralisme contemporain qui déconnecte les dispositifs de leurs objectifs et de leurs usagers.C'est dans ce contexte que certains chercheurs, créateurs et usagers ont pensé de nouvelles façons d'éco-concevoir en travaillant sur le paradigme de la capacité de changer.

    Dans le but de pousser et promouvoir ces idées et projets un design-fiction permettrait d'envisager une société sans effet de rebond. Celui-ci s'accompagnerait d'une pratique de fabrication, émancipatrice de par son contexte fictif, pour l'usager. Cette société pourra être présentée à travers une installation se développant au fur et à mesure de la participation des visiteurs, immergés dans un story-telling, suivant les codes du théâtre participatif.


Dîner

Dîner


Communications orales

3- Action collective et dispositifs de gouvernement de l’effet rebond 

Action collective et dispositifs de gouvernement de l'effet rebond : quels seraient des dispositifs concrets d'encadrement des effets rebonds pour les neutraliser ? Sur quels savoirs empiriques (ex. mesures, indicateurs, enquêtes qualitatives), types d’organisations (ex. publiques, communs ou partenariats publics-communs) et formes d’engagement (ex. participation citoyenne, co-construction, communautés de pratiques), ces dispositifs pourraient-ils s’appuyer ? Y a-t-il des précédents historiques ou des initiatives actuelles de sobriété allant dans ce sens ? Pourrait-on analyser ces initiatives comme des politiques publiques de décroissance ?

  • Communication orale
    Reconnaître la complexité fractale des rebonds: quelles pistes pour les politiques?
    Stéphanie Leclerc (Université McGill)

    On commence à peine à identifier la nature et l’ampleur de certains effets rebonds générés par les stratégies d’efficacité énergétique ou les stratégies de circularité visant à réduire, ralentir et boucler les flux de matière et d’énergie. Des chercheurs s’efforcent à développer des typologies de rebonds, découvrant par le fait même des outils pour mieux saisir leurs mécanismes de fonctionnement. Les rebonds seraient modulés, notamment, par les effets de marché et les comportements humains. Mais avons-nous sous-estimé la complexité réelle des rebonds en omettant de tenir compte d’autres flux inhérents à l’anthropocène, dont, entre autres, les flux d’information et de légitimité (ou de pouvoir) qui s’y rattachent? Les rebonds ne sont-ils pas également modulés par le lieu, la culture, la technologie, et les politiques qui existent là où les stratégies d’efficacité et de circularité sont mis en place ainsi que tout au long de la chaîne de valeur? Quelle part(s) du casse-tête nous échappe(nt) lorsque les rebonds sont analysés « par secteur industriel», et non pas par « produit » ou même par « flux », ou par «stratégie»? La discussion apportera des exemples et questions concrètes en lien avec l’approvisionnement responsable.

  • Communication orale
    La redirection écologique comme proposition d’atténuation de l’effet rebond
    Philippe Gauthier (HEC Montréal)

    L’effet rebond est associé aux gains d’efficacité, qui augmentent la demande pour le bien ou service concerné (effet direct) ou pour d’autres (effet indirect). La transition écologique, qui mise beaucoup sur l’efficacité, présente donc un important potentiel d’effets rebond. Deux stratégies s’offrent pour les contenir : limiter les gains d’efficacité ou limiter la production découlant de cette demande accrue.

    La littérature sur la décroissance en appelle à une limitation délibérée de la demande. Mais sa mise en œuvre n’est pas évidente. Des travaux réalisés par des chercheurs de ESC Clermont (France) ont fait émerger une nouvelle pratique, la redirection écologique, qui propose une forme de décroissance adaptée aux organisations.

    En collaboration avec ces chercheurs et avec Coboom, un consultant québécois, j’élabore depuis septembre une méthode d’intervention pour aider les organisations à réduire leur empreinte écologique, notamment en renonçant aux activités non soutenables. Le renoncement à la croissance est l’une des stratégies proposées.

    Le cadre d’intervention n’est pas encore finalisé (une première phase d’essais doit avoir lieu en mars et avril), une douzaine de PME québécoises ont déjà souscrit à la croissance zéro depuis septembre. Nos observations montrent que les organisations sont disposées à renoncer à la croissance à tout prix. Nous croyons que cette limitation délibérée l’offre pourra limiter l’effet rebond découlant de la transition écologique.

  • Communication orale
    L’effet rebond : une opportunité de bifurquer dans notre relation au temps
    Nicolas Merveille (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    L’effet rebond est une formidable opportunité de faire bifurquer la trajectoire de notre rapport au temps. En effet, il nous oblige à questionner le Présentisme qui a invisibilisé l’effet du temps. Cette présentation est une invitation à un voyage dans les univers de Bergson, Einstein, Bohr et Mendès-France afin de qualifier le mal qui ronge notre époque : l’impossibilité de qualifier l’instant.

  • Communication orale
    L'effet rebond comme paradoxe englobant : un gouvernement impossible ?
    Marie-Luc Arpin (UdeS - Université de Sherbrooke)

    L’effet rebond inquiète de plus en plus – et a fortiori son cas extrême : le paradoxe de Jevons. À travers lui, une politique d’efficacité énergétique, de lutte au changement climatique, ou de gestion des matières résiduelles peut se retourner contre elle-même en engendrant l’augmentation de l’impact environnemental qu’elle était censée réduire. Ainsi, pour quiconque intervient dans la prise de décisions et/ou l'élaboration de politiques publiques, l’effet rebond apparaît comme un paramètre qu’il faut nécessairement apprendre à intégrer au plus tôt. En outre, le phénomène fait l’objet d’une attention interdisciplinaire et médiatique croissante. La question de savoir comment « gérer » l’effet rebond semble donc couler de source. Et pourtant, du fait de sa structure fondamentalement paradoxale, la possibilité de concevoir l’effet rebond comme un problème-à-résoudre ne va pas de soi. Alors, comment prendre au sérieux sa dimension paradoxale? Ou comment le gouverner en tant que paradoxe, c’est-à-dire sans l’assimiler au modèle du problème-à-résoudre? En misant sur un retour aux racines de la gestion de l’extraordinaire, cette communication explore l’idée selon laquelle c’est le geste qui instruit au mieux la décision dans une telle circonstance, et qui dote ce faisant l’action managériale (ou le gouvernement) d’une capacité à innover de manière à la fois décisive et imprévisible. Ainsi, la lutte aux effets rebonds y est envisagée surtout comme un art de l’improvisation.


Panel / Atelier

Synthèse et discussion collective

Cette session de discussion collective reprendra la question initiale posée dans le titre du colloque, à la lumière des présentations de la journée : "Gouverner l'effet rebond environnemental en Anthropocène, une politique innovante de décroissance ?"