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Informations générales

Événement : 89e Congrès de l'Acfas

Type : Colloque

Section : Section 400 - Sciences sociales

Description :

La réinsertion sociale est, depuis longtemps, au cœur des préoccupations des politiques publiques. Quels que soient les indicateurs, la forme ou le vocabulaire utilisé, l’idée de ne pas retourner en prison à la suite d’une condamnation pénale est souvent une des priorités avancées des gouvernements. En 1969, la Loi sur la probation et le système correctionnel du Québec estime que la réinsertion sociale est un des moyens à prioriser pour assurer la sécurité du public. Or, si les recherches en criminologie et en justice pénale font souvent référence à la notion de réinsertion sociale comme mesure de « réussite » ou d’« échec » des interventions pénales, cette notion n’est que rarement définie de façon unanime. Conséquemment, les chercheurs utilisent plusieurs indicateurs pouvant montrer qu’une personne est réinsérée ou non : ne pas récidiver dans un délai donné, terminer un programme avec succès ou se sentir comme partie intégrante de la société. En parallèle, on assiste à des transformations des systèmes pénaux et correctionnels depuis quelques années. Sur le plan de la prise en charge, de nouveaux modes de gestion des populations contrevenantes se développent, tels que des tribunaux ou des procédures spécialisés. Sur le plan de l’intervention, on assiste aussi au développement d’outils ciblant des problématiques ou des besoins de plus en plus précis. On note également une plus grande hétérogénéité au sein des populations prises en charge et l’apparition de groupes plus vulnérables, soit parce qu’ils sont plus fragilisés par leur passage dans le système pénal, soit parce que les interventions actuelles n’ont pas été réfléchies en fonction de leurs besoins particuliers (femmes, autochtones, aînés, jeunes, etc.). Le présent colloque a pour objectif de réfléchir à la manière dont la notion de réinsertion sociale est mobilisée dans les recherches contemporaines afin de mieux comprendre ses contours, ses enjeux et ses réalités. À travers les différentes présentations, le colloque vise ainsi à souligner la diversité des besoins, des concepts et des réflexions associés à la réinsertion sociale et, donc, à la multiplicité des formes d’intervention possibles. Il permet de repousser les frontières de la définition de la réinsertion sociale au-delà de la sortie de la peine, et au-delà d’une population strictement homogène.

Date :
Responsables :
  • Amélie Couvrette (UQO - Université du Québec en Outaouais)
  • Elsa Euvrard (Université Laval)

Programme

Communications orales

Favoriser la réinsertion sociale : savoirs et interventions soutenant le processus de sortie

Présidence : Amélie Couvrette (UQO - Université du Québec en Outaouais)
  • Communication orale
    La réinsertion sociale sous le prisme du soutien à la transition vers l’âge adulte. Perspectives des jeunes suivis dans le système de justice des mineurs au Québec
    Marie Dumollard (Université Laval)

    Cette communication propose d’analyser le soutien à la transition vers l’âge adulte des jeunes suivis en vertu de la loi sur le système de justice pénale pour les adolescents (LSJPA) en vue de leur réinsertion sociale. Selon le guide d’application de la loi, la réinsertion sociale est en effet directement associée au processus de transition entre l’adolescence et l’âge adulte. Pour comprendre les modalités de soutien offerts par le système de justice des mineurs pendant cette période de la vie, cette communication s’appuie sur une quinzaine de récits de vie et d’entrevues semi-dirigées réalisés auprès de jeunes suivis sous la LSJPA dans la communauté lorsqu’ils étaient âgés de 17 à 20 ans. À partir de l’analyse de leur « réception de l’action publique » sociopénale, les résultats montrent que trois éléments font l’objet d’un traitement paradoxal au moment de la transition vers l’âge adulte : l’autonomisation des jeunes, à la fois soutenue et encadrée ; leur insertion socioprofessionnelle, à la fois mise en action et ralentie par l’enfermement ; leur responsabilisation comportementale, à la fois facilitée et mise à l’épreuve par le suivi pénal. Cette communication souligne finalement les effets ambivalents des interventions sociopénales à un moment clé des parcours individuels et démontre tout l’intérêt de rapprocher les réflexions en matière de réinsertion sociale de celles sur la transition vers l’âge adulte des jeunes suivis au pénal.

  • Communication orale
    La visite à domicile comme levier d’intervention : pratiques des agents de surveillance communautaire
    Emma Bêty (Université Laval), Elsa Euvrard (Université Laval)

    La gestion de la peine d’emprisonnement avec sursis au Québec, surveillance dans la collectivité, est depuis 2007 confiée à des organismes communautaires, habituellement connus pour des interventions plutôt centrées sur l’aide et l’accompagnement. Dans le cadre d’une surveillance communautaire, le soutien à la réinsertion sociale des personnes contrevenantes fait partie de leur mandat. A partir d’entrevues réalisées auprès de 32 intervenants communautaires, cette présentation a pour objectif de comprendre comment ils façonnent leurs pratiques d’accompagnement dans un contexte d’intervention pénale, et quelles sont les stratégies déployées afin de favoriser la réinsertion sociale en prenant l’exemple de la visite à domicile des personnes contrevenantes. Les résultats montrent que ces pratiques illustrent les tensions entre les principes d’aide et de contrôle découlant de la surveillance communautaire : si, d’une part, la visite à domicile est principalement adoptée par les agents dans une visée de réinsertion sociale, les principes de gestion des risques infiltrent cet outil, ce qui peut contribuer à un élargissement de la surveillance, à la fois dans les cibles et dans le contenu du contrôle pénal. La conférence propose alors de réfléchir aux stratégies d’intervention et de (re)définition de la réinsertion sociale des intervenants dans ce contexte.

  • Communication orale
    Penser la (ré)insertion sociale des travailleuses du sexe. Prendre en compte les besoins des femmes, un impératif conceptuel et pratique
    Véronique Chadillon-Farinacci (Université de Moncton), Madeline Lamboley (Université de Moncton), Marie-Pier Rivest (Université de Moncton)

    Cette présentation aborde la (ré)insertion des travailleuses du sexe suivant le point de vue des femmes elles-mêmes et celui d’intervenantes. En s’appuyant sur les théories de l’intersectionnalité (Crenshaw, 1991) et des sois possibles (Markus et Nurius, 1986), nous arrimons les relations entre différents aspects de l’identité des femmes au sens donné aux aspirations et aux peurs exprimées, aux moyens mis en action et aux ressources disponibles quant à la (ré)insertion sociale des femmes. L’objectif est d’apporter une compréhension des besoins des femmes travailleuses du sexe en comparant leurs propres perceptions à celles d’intervenantes appelées à les accompagner. À partir de 36 entrevues semi-dirigées, réalisées au Nouveau-Brunswick auprès de femmes francophones travailleuses du sexe et d’intervenantes de divers milieux de pratique, cette communication exposera l’analyse des résultats qui en sont ressortis. En effet, trois dimensions de la (ré)insertion sociale seront présentées : matérielle, systémique et de valorisation. Nos résultats révèlent que les femmes expriment des besoins plus abstraits et les intervenantes des besoins plus concrets. Enfin, cette présentation proposera des pistes de réflexion pratiques et conceptuelles quant aux avenues de (ré)insertion sociale des femmes francophones travailleuses du sexe au Nouveau-Brunswick.

  • Communication orale
    La réinsertion sociale au féminin : les contrecoups d’une absence injustifiée
    Marie-Pier Tessier-Juneau (Université Laval)

    Peu de distinctions au sein des écrits existent entre le retour en collectivité des hommes et des femmes marginalisés. Pourtant, divers enjeux structuraux tels que les inégalités des genre ou l’exposition à la violence entravent spécifiquement la réinsertion sociale des femmes. L’un des objectifs de ce projet était donc de mieux appréhender la réalité de ces femmes en tenant compte de la singularité de chacune d’elles, des expériences de violence et d’oppression selon leurs perspectives et compréhensions. Les discours de douze usagères et quatre intervenantes du Centre Femmes aux 3A à Québec ont été approfondis lors d’entrevues semi-structurées afin de mieux illustrer comment s’opère le processus de réinsertion sociale chez les femmes marginalisées par la délinquance. Cumulée à des expériences de victimisation et d’isolement social, la dévalorisation de leurs rôles sociaux fait émerger trois mécanismes qui limitent les femmes dans leur capacité à se définir en dehors des sphères de vulnérabilités et d’arborer un statut de citoyenne active : la dévalorisation d’elles-mêmes, la dévalorisation des conditions de vie et l’invisibilité sociale des femmes. Ces aspects sont peu reconnus à l’heure actuelle et comportent un risque important pour cette population. Toutefois, cette recherche permettra sans doute de reconsidérer la façon d’entrevoir ce processus fort complexe et ainsi, offrir des interventions répondant de manière plus holistique aux besoins des femmes.

  • Communication orale
    Les projections identitaires de mères en processus de réinsertion sociale
    Amélie Couvrette (Université du Québec en Outaouais), Frédérique Hervieux (UQO - Université du Québec en Outaouais)

    Les mères en processus de réinsertion sociale doivent répondre aux demandes propres d’une libération, en plus de jongler avec la relation avec leurs enfants et de (re)négocier leur identité maternelle. Ce processus identitaire, bien qu’amorcé en détention (Couvrette et al., 2016; Enos, 2001; Opsal, 2011), se complique en transition, alors que leur identité maternelle est confrontée à une identité criminelle stigmatisée (Opsal, 2011). Puisqu’il est suggéré que l’identité maternelle pourrait être une source de motivation importante dans une démarche de réinsertion (Brown et Bloom, 2009), il semble important de s’intéresser aux projections identitaires de ces femmes. Le processus de réinsertion sociale de mères judiciarisées a été examiné à partir de la théorie des «Possibles Selves» (Markus et Nurius, 1986), misant sur des représentations qu’un individu se crée quant à la personne qu’il souhaite devenir, qu’il pourrait devenir ou encore, qu’il craint de devenir. La présentation vise ainsi l’exploration des projections identitaires de mères en processus de réinsertion sociale à partir d’entretiens qualitatifs menés auprès d’une vingtaine de femmes résidant en maison de transition à Montréal et Québec. Les résultats préliminaires permettent d’approfondir le sens que prennent ces projections identitaires pour ces mères, de questionner les obstacles qu’elles envisagent dans leur processus et enfin, de cerner les besoins à combler pour les aider dans celui-ci.

  • Communication orale
    La maternité des femmes en réinsertion sociale
    Amélie Couvrette (UQO - Université du Québec en Outaouais)

    Être mère représente une identité sociale valorisée, une identité « conventionnelle » sur laquelle il est généralement attendu qu’une femme appuie ses démarches de changement et de réinsertion. En raison des responsabilités que la maternité incombe, ces mères y trouveraient une motivation qui les inciterait à ne pas être incarcérées à nouveau et à changer des patrons de comportements néfastes. Or, la littérature suggère que même si elles ont tendance à idéaliser la relation qu’elle entretenait avec leurs enfants avant leur détention, plusieurs mères rapportent ressentir une certaine pression sociale à reprendre promptement leur rôle auprès de leurs enfants. Plusieurs ne s’y sentent pas prêtes, ce qui génère de l’anxiété. De plus, rétablir ou réparer une relation qui a été endommagée par différents conflits, enjeux et ruptures apparait, bien souvent, comme accablant pour ces mères. Ceux-ci compliquent alors la possibilité pour ces mères de reprendre la garde de leurs enfants.

    L’objectif de la présentation est de réfléchir à la maternité de femmes judiciarisées, à son rôle et son importance dans leur processus de réinsertion sociale et aux attentes qu’elles entretiennent à l’égard de celle-ci. Une vingtaine d’entretiens menés auprès de femmes séjournant en maison de transition ou recevant des services d’organismes dédiés à la réinsertion sociale des femmes permettront d’étayer cette réflexion.