Informations générales
Événement : 88e Congrès de l'Acfas
Type : Colloque
Section : Section 600 - Colloques multisectoriels
Description :Le corps est une notion transversale, reprise par de nombreuses disciplines au sein de différentes épistémologies. Au cœur même de la psychologie, le corps convoque de nombreuses significations ainsi que des représentations singulières et multiples. Que ce soit comme lieu premier de l’identité, comme marqueur culturel, comme objet de revendication ou encore comme voie d’expression de ce qui ne saurait se penser, le corps vient dire quelque chose de l’individu, de son monde interne, de son appartenance socioculturelle. Au-delà de ces différentes mises en sens, le corps est sur le devant de la scène dans nos sociétés contemporaines. Qu’il soit agi ou subi, il semble être le lieu de l’expression de la subjectivité, de l’appartenance familiale et culturelle. Que ce soit un corps investi, un corps objet de violence ou encore un corps en « désa-corps », il reste au cœur des objets d’étude de la psychologie. Cependant, dans un au-delà du lien inéluctable qui unit l’individu à son corps, ce dernier vient aussi et surtout révéler la société dans laquelle il évolue. De nombreuses problématiques contemporaines témoignent de cette dimension sociétale, que ce soit dans sa valence créative ou destructrice. Du corps sexuel au corps médicalisé — ou non — de l’enfantement, en passant par les violences — auto ou hétéroagressives — qui lui sont infligées, du corps porteur de la vie à celui porteur de l’histoire, il vient, en filigrane, nous parler d’un « jamais su », d’un impensé. Ainsi, ce que la psychologie apporte sur cette question, c’est ce regard clinique, cette possibilité de mise en sens, à l’entrecroisée des représentations sociales, culturelles et subjectives, dans la double inscription de l’individu dans sa singularité et dans la société.
Date :Format : Uniquement en ligne
Responsables :- Yann Zoldan (UQAC - Université du Québec à Chicoutimi)
- Delphine Collin (Université Paris Descartes France)
Programme
À corps perdu
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Communication orale
"Du corps berceau au corps tombeau" : récit psychique et créativité lors d'un deuil périnatalDelphine Collin (Université Paris Descartes France)
Expérience unique de rencontre intime avec soi, la survenue d’une grossesse désirée, parfois longtemps attendue, engage la future mère vers des remaniements psychiques importants: de la transparence psychique à la préoccupation maternelle primaire, dans un continuum entre l’ante et le postnatal, la relation d’objet virtuelle vient actualiser l’interface entre le devenir parents et le naître humain (Missonnier, 2009). Le décès en fin de grossesse qui survient en moyenne dans 9 naissances sur 1000 en France représente pour les devenants-parents un traumatisme innommable, constitue un insupportable télescopage entre vie et mort, survenant dans ce contexte de fragilité psychique et venant bousculer l’ordre des choses et des générations. Lors d’une mort fœtale, la confrontation à un enfant né sans vie, la difficulté à constituer des souvenirs et le poids du regard social souvent évitant, banalisant, participent à la difficulté d’élaboration parentale de l’existence dans la réalité externe de ce bébé. Néanmoins, l’inscription de cet enfant dans l’histoire du couple paraît indispensable. Le passage à cette parentalité si singulière va devoir s’élaborer afin non seulement de préserver les liens conjugaux mais aussi dans l’éventualité d’une future grossesse.
À partir d’une relecture du concept winnicottien de la créativité, nous proposons de penser l’accompagnement des parents endeuillés afin que l’ombre mélancoliforme de l’enfant né sans vie ne vienne se poser sur un éventuel puîné.
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Communication orale
Grossesses en exil : représentations du vécu corporel et psychique de mères subsahariennes en FranceSylvie Bordet-Loubère (Université Toulouse Jean Jaurès), Julia De Freitas Girardi (Université de Toulouse), Gesine Sturm (Université Toulouse Jean Jaurès)
Le moment de la grossesse est marqué par l’interaction entre un vécu psychique et un vécu corporel, où plusieurs changements s’opèrent, et qui constitue la vulnérabilité associée à ce moment. En contexte migratoire la grossesse s’inscrit dans l’histoire subjective et intime de la mère-à-venir, mais aussi dans une histoire collective et culturelle bouleversée par l’expérience de l’exil. En effet, plusieurs difficultés se présentent : la solitude marquée par l’absence de leurs propres mères, et de leur groupe d’appartenance ; la difficulté de mettre en œuvre des pratiques culturelles ; la différence entre les logiques d’origine et celles du pays d’accueil ; le contact avec les instances et les pratiques de soins occidentales. Ces femmes exilées, qui ont un parcours déjà marquée par des expériences pré-migratoires potentiellement traumatiques, se retrouvent en France dans des conditions précaires et dans une situation de quasi-non-droit. Dans ce contexte le corps de la mère enceinte vient témoigner de sa légitimité. En effet, c’est par le biais de cette grossesse que ces mères-à-venir pourront accéder à des droits et avoir une place dans la société d’accueil. Ces circonstances et problématiques aggravent le vécu de ce moment et peuvent perturber, voire mettre en échec, cette grossesse. Dans cette communication, ces propos seront illustrés par des vignettes cliniques issues d’une recherche doctorale avec des mères subsahariennes exilées en France.
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Communication orale
Violence subie/violence agie chez l'adolescent : du corps-à-corps à la symbolisation des traumatismes familiauxKathleen Beuvelet (Université Toulouse 2 Jean-Jaurès), Sonia Harrati (Université Toulouse Jean-Jaurès)
La violence chez l’adolescent est un phénomène sociétal plutôt actuel qui alimente les débats politiques mais aussi scientifiques. Elle s’inscrit au cœur d’enjeux complexes entre le soi et l’autre et déborde le seul champ des bouleversements psychiques, inhérents à la crise d’adolescence. Dans notre recherche, nous avons souhaité l’appréhender selon une perspective intra mais aussi intersubjective puisque une particulière attention est accordée à la dynamique familiale. En effet, l’adolescence, période emprunte d’importants remaniements, est un moment privilégié où les aléas et avatars de l’histoire familiale font irruption. Par conséquent, cette période complexe où se conjugue passé, présent et futur, est un moment propice à l’apparition de traces traumatiques héritées du passé. La violence actuelle de l’adolescent ne serait-elle pas alors une tentative de symboliser une violence familiale passée ? Autrement dit, à travers ce corps-à-corps violent, l’adolescent ne tenterait-il pas d’exprimer les expériences traumatiques familiales non élaborées ?
Tantôt réceptacle d’une violence subie, tantôt instrument d’une violence agie, le corps adolescent serait le théâtre de problématiques et conflits familiaux jamais résolus. Ainsi, il serait à envisager comme une voie d’expression de ce qui ne saurait se penser, de quelque chose de l’indicible, « d’un jamais su »…
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Communication orale
Conjuguons la violence au masculin : regard des hommes immigrantsOmaira Naweed (UQAM - Université du Québec à Montréal)
L’intérêt pour des dimensions culturelles de la souffrance en clinique nous amène à orienter notre attention sur un groupe en particulier : les hommes immigrants du Sud-Asiatique vivant à Toronto. L’immigration soulève des enjeux liés à la diversité culturelle et à travers elle s’amplifie parfois les différences liées aux différents systèmes de croyances et de valeurs, ainsi que les facteurs de risque, mais aussi de résilience face aux exigences de l’intégration dans une nouvelle société.
La conceptualisation de la souffrance, du pathologique est un des enjeux modulés par la culture de l’immigré. Qu’est-ce qui constitue une source de souffrance ? Quel est le rôle de l’immigration dans la conceptualisation culturelle des phénomènes sociaux ? Comment la rencontre des cultures s’opère-t-elle et change-t-elle les conceptualisations initiales ? C’est à partir de ces questionnements que nous avons eu le désir de comprendre la violence conjugale comme phénomène double; à la fois culturel et psychologique.
Ce projet est l’opportunité de parler des représentations culturelles de la violence conjugale et de donner la parole aux hommes immigrants Sud-Asiatiques de la région du Grand Toronto. En abordant la violence conjugale sous un angle masculin, nous souhaitons apporter un éclairage différent sur les enjeux de la violence conjugale chez la population immigrante et proposer des pistes de préventions et d’intervention plus sensibles culturellement.
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Communication orale
Le corps sexué face au cancer : heuristique d’une clinique déconstructivisteMaria Do Céu Alves (Université Jean-Jaurès)
Si la sexuation en tant que processus intrapsychique et interpersonnel dessine les corps de marqueurs identitaires, les « chocs biographiques », tels que la maladie à pronostic réservé, bien que douloureux et, parfois, souvent même, traumatisants, y compris sur le plan identitaire, donc violents, comportent, potentiellement, une expérience de soi en devenir.
La possibilité d’entrevoir les logiques, dont les sociales, de la fabrique des corps, permettrait l’avènement de cette créativité inhérente à la subjectivité qu’une clinique déconstructiviste, dont il s’agira de définir les caractéristiques, serait à même d’accompagner et de soutenir.
Repas
Corps et frontières
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Communication orale
Nourrir, habiller et soigner l’enfant d’autrui : le corps de l’enfant confié comme marqueur d’appartenance en milieu bambara (Mali)Paola Porcelli (Jeunesse J'écoute)
En Afrique de l’Ouest, de nombreuses familles continuent à faire recours à une ancienne tradition qui consiste à « donner » ses enfants ou à « recevoir » les enfants d’autrui. Cette coutume donne lieu à des configurations très variées dont le seul élément de comparaison pour un regard occidental est l’adoption ou l’accueil d’enfants dans les dispositifs de protection de la jeunesse.
Célébrées par les mythes fondateurs des sociétés africaines, ces pratiques font en même temps l’objet de campagnes de sensibilisation de la part de certaines ONG intervenant dans des contextes de protection des droits des enfants. En effet, elles peuvent donner lieu à des dérives, y compris des formes d’abus et de maltraitance, en raison de la position fragile des enfants d’autrui au sein du foyer d’accueil.
Cette présentation s’appuie sur un corpus de données qualitatives recueillies entre 2005 et 2007 en milieu bambara (Mali) auprès de familles ayant donné et/ou reçu des enfants. Les résultats ont mis en évidence l’inscription du phénomène de l’adoption traditionnelle dans le corps de l’enfant à travers les rituels de la nutrition, de l’habillement et des soins dispensés par les tuteurs.
À partir de ces métaphores et à la lumière de présentations émergées dans le travail clinique avec les familles africaines, nous proposons une réflexion sur le devenir des pratiques d’adoption traditionnelle au regard des enjeux contemporains et des dynamiques migratoires et transnationales.
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Communication orale
Que peut nous apprendre la clinique de l'autisme sur la dimension sociale du corps ?Maeva Lacassagne (Université PARIS VII Denis DIDEROT)
Au premier abord, la notion du corps tend aisément à résonner dans sa dimension somatique, biologique ; mais nos sociétés nous font également remarquer combien le corps est aussi et surtout un lieu qui « parle » de l'individu, de ses héritages culturels et de son histoire. La psychologie clinique nous permet d'en apporter une lecture en tant qu'il est inhérent à la spécificité du sujet, soit de l’être social, parlant. Nous proposons de nous pencher depuis notre référentiel psychanalytique sur les états autistiques qui viendraient particulièrement mettre en évidence la part sociale du fait du corps. En effet, le corps dans l'autisme est investi d’une façon tout à fait singulière ; le monde se voudrait bidimensionnel (Haag, 2018), c'est-à-dire en difficulté de représentation de profondeur. Cette profondeur s’appliquant également au corps chez le sujet, si non défaillante, conduit à une contenance, creuse le nid d’une identité, d’un lieu soutenant une vie psychique. Nous allons de ce constat clinique étudier les modalités de cet investissement de l'espace et du corporel dans les états autistiques afin de tenter de comprendre ce qu’elles peuvent nous enseigner plus généralement de la dimension sociale du corps. A travers l’observation de manifestations autistiques qui se proposeraient comme des témoins d’un corps symboliquement « non-né », nous verrons comment cette question ne peut que difficilement s’élaborer sans celle de l’intersubjectivité.
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Communication orale
sexualité et objet regard : que nous révèle la pornographie?Solène Hiton (Université Paris Diderot, France)
Aujourd’hui, il est admis dans l’opinion commune que la pornographie filmée est omniprésente sur internet, de plus en plus violente et consommée par des sujets extrêmement jeunes. Mais ce qu’il ne faut pas perdre de vue c’est que le sexuel travaille, de structure, le sujet et la culture au corps. Celui-ci impose un traitement et mène à la création de dispositifs. La pornographie en est-elle un ? Si le rapport sexuel, dans sa réalité, est montré au plus près dans le film pornographique, le réel sexuel, réel de la jouissance et des corps est toujours raté par l’image qui n’en propose qu’une virtualisation limitée. La pornographie est donc un trompe l’œil qui met parfaitement en scène ce ratage fondamental. L'effet du film, côté acteur ou consommateur, apparaît là où il est investi pulsionnellement par le sujet, là où il se mêle au fantasme, là où il y loge une jouissance et ce notamment au travers du regard et de ses enjeux pulsionnels. La pornographie met ainsi en évidence le polymorphisme sexuel, l'absence de norme naturelle en matière de sexualité et les enjeux de la pulsion scopique. De ce fait, l’association causale « pornographie-violence » doit être remise en question. Aussi, nous verrons que la pornographie se pare des accoutrements à la mode du champ social. Elle prend donc des formes relatives à ses époques, discours et cultures. La pornographie nous propose-t-elle donc un récit contemporain du corps ?
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Communication orale
Un désert d'opportunités: les ressources développementales des jeunes des minorités roms et égyptiennes en Albanie pendant la pandémie de la COVID-19Diana Miconi (Université McGill)
Les jeunes des minorités rom et égyptienne en Albanie sont confrontés à de multiples défis, tels que les obstacles à l'éducation, la discrimination, la marginalisation et la pauvreté. Leur situation s'est indéniablement aggravée pendant la pandémie de la COVID-19, qui a exacerbé les disparités sociales et sanitaires préexistantes. Cependant, les expériences des adolescents des minorités rom et égyptienne au cours de la pandémie restent largement non documentées. Cette étude qualitative collaborative et communautaire explore les ressources personnelles et contextuelles des jeunes des minorités rom et égyptienne en Albanie et l'impact de la pandémie sur leur vie pour éclairer les programmes de prévention et intervention. Six groupes de discussion ont été organisés avec 31 adolescents roms et égyptiens âgés de 14 à 20 en Albanie. Une approche thématique a été utilisée pour l'analyse des données. Les résultats ont mis en évidence des acquis développementaux étonnamment faibles pour les jeunes ainsi que d’importants obstacles à l'intégration, à l'emploi et à l'éducation. La famille, certains traits de personnalité et une vision positive du futur étaient considérés comme des facteurs de protection. Cependant, la pandémie a fragilisé la solidarité familiale et communautaire, augmentant l'isolement et les problèmes de santé mentale chez les jeunes. Des interventions communautaires intersectorielles et bottom-up sont nécessaires d’urgence pour soutenir et autonomiser les jeunes.
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Communication orale
Une étincelle de fierté : réflexion sur les minorités culturelles et sexuelles en contexte de violenceYann Zoldan (Université McGill)
La clinique des altérités multiples nous enseigne sur les expériences minoritaires des oublié·e·s des romans nationaux. Ces expériences de diversités culturelles, raciales, sexuelles ou encore d’être-au-monde, impactent le psychisme des sujets et la psychologie des communautés. Par conséquence, leurs histoires de vie se tissent dans les marges. Les sujets doivent réinviter leur propre façon d’être pour redevenir des sujets narratifs; des apprentis historiens porteurs de paroles singulières et collectives.
Ces récits de résistance sont souvent écrits dans des histoires de violence. Violences qui s’inscrivent dans les corps, contre les corps ou encore violences des corps. Si les violences contre les minorités sont souvent oubliées, la violence des minorités fait l’objet de nombreux stéréotypes criminologiques ou encore de constructions fantasmatiques notamment de la radicalisation violente.
La clinique d’orientation psychanalytique se doit pour penser ces multiples altérités d’avoir un regard écologique à l’intersection du social, du psychique et du culturel. Dans une perspective critique à l’aide d’une approche transculturelle et affirmative, nous discuterons les intérêts et limites de ces perspectives pour une clinique du narratif contemporain des identités multiples et pourtant singulières.
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Communication orale
les nouveaux monologues du vagin : Miscellanées épistémologiques autour des violences obstétricalesAnne Pezet
A l’heure actuelle, la femme dans le devenir mère est l’objet de toutes les attentions, essentiellement sur un plan somatique. Les progrès médicaux et les modalités actuelles de prise en charge semblent lisser, à tout le moins pour le grand public, les risques somatiques et surtout psychiques liés à la grossesse et à l’accouchement, plaçant la mise au monde, de façon illusoire, dans « un contexte social et culturel encore attaché à la vision newtonienne du monde, qui considère celui-ci comme une grande machine qui obéit à des lois universelles ». Régulations biomédicales et avancées technologiques et médicales (échographies, analgésie péridurale) nourrissent aussi l’idéal d’un accouchement qui ne convoquerait plus la question de la douleur, sans pour autant pouvoir proposer une réflexion authentique sur la question de la souffrance (psychique) résiduelle qui peut émerger au-delà du substrat somatique. Cette dernière question laissée en suspens dans les discours actuels ne saurait faire dès lors l’économie d’une réflexion sur un terme qui aujourd’hui tient la première place sur la scène médiatique lorsque cette thématique est abordée : la question des violences obstétricales.
Episiotomie, expression abdominale, déclenchements, absence de consentement, ou d’informations, nombreux sont les pratiques et actes médicaux potentiellement concernés par cette dénomination juridique venue d’Amérique du Sud et portée par les mouvances féministes. Le premier défi sera de questionner quelle