Parmi les différents domaines de connaissance, le droit a comme caractéristique importante de participer à la création et à l’institutionnalisation de catégories, de concepts et d’une terminologie qui a force de loi. Ces concepts prennent donc un sens très précis au sein du discours juridique, qui peut correspondre à l’usage qui en est effectué dans d’autres disciplines ou dans le langage ordinaire, mais qui peut aussi s’en éloigner. Cette polysémie pose dès lors des questions fondamentales, d’une part, pour les chercheur.e.s en sciences sociales qui ont recours à des concepts ou à des catégories dont le sens peut varier quand ils passent du champ juridique au champ de la recherche dans une discipline comme la sociologie, d’autre part, lorsqu’ils sont mobilisés par des acteurs de la société civile qui les comprennent ou les définissent autrement. Les concepts et catégories « d’accommodements raisonnables », de « communs », de « communautés » ou de « droits ancestraux » sont particulièrement démonstratifs à cet effet. Cet enjeu au cœur des épistémologies comparées conduit à deux séries de questions qui seront au cœur de ce colloque. Premièrement, le champ juridique peut-il et doit-il tenir compte des développements de la recherche en sciences sociales? Inversement, comment les chercheur.e.s en sciences sociales peuvent-ils se positionner par rapport aux catégories du champ juridique, et doivent-ils se positionner? Quelles pourraient être les incidences des réponses données à ces questions sur les possibilités d’un véritable dialogue interdisciplinaire? Deuxièmement, comment les juristes et les chercheur.e.s en sciences sociales doivent-ils se positionner par rapport à l’autocompréhension qu’ont les acteur.rice.s de la société civile de ces catégories ou concepts? Quels sont les effets structurants des concepts et catégories juridiques sur ces acteur.rice.s de la société civile? Comment, à leur tour, ces derniers façonnent-ils les catégories juridiques?
Le lundi 3 mai 2021