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Informations générales

Événement : 88e Congrès de l'Acfas

Type : Colloque

Section : Section 400 - Sciences sociales

Description :

Le monitoring des dégradations de l’environnement dans nos sociétés connaît un tournant depuis une trentaine d’années avec la montée d’une expertise citoyenne. Dans le domaine de l’hydrologie, de la pollution de l’air ou encore de l’érosion de la biodiversité, on constate la réunion de conditions, sociales et techniques, pour que des citoyens s’engagent dans l’action militante par la collecte de données et le suivi cognitif de l’évolution de leur environnement.

Au congrès de l’Acfas 2017, un colloque sur les sciences à l’ère numérique avait réuni des travaux sur la question des sciences participatives dans le contexte de connaissance de la biodiversité. En avril 2018 à Paris, un autre colloque intitulé « Capteurs et sciences participatives » traitait plus particulièrement de la mesure citoyenne des pollutions. Le présent colloque vise, sous le terme générique de « monitoring citoyen », à développer les enjeux sociopolitiques et épistémiques communs à ces nouvelles formes d’implication populaire dans l’observation de la nature et dans le suivi des pollutions. Quels sont les effets de la participation élargie sur l’expertise? La pratique citoyenne répond-elle aux promesses de transparence et d’empowerment définies dans le cadre de la « société de la connaissance »?

Sous-thèmes :

  • Analyse de l’impact local du monitoring citoyen relatif aux dégradations environnementales
  • Nouvelles technologies et démocratisation de la mesure de l’environnement et de la nature
  • Controverses autour des données citoyennes sur les scènes scientifiques et médiatiques
  • Observatoires de l’environnement et implications citoyennes : conflits et complémentarités
  • Rapprochement entre sciences participatives naturalistes et monitoring des pollutions
Dates :

Format : Uniquement en ligne

Responsables :

Programme

Communications orales

Sciences participatives de la biodiversité

Salle : En ligne — Bâtiment : En ligne
Discutant·e·s : Florian Charvolin (CNRS)
  • Communication orale
    De la production d’indicateurs à l’éducation à l’environnement : contribution d’un programme de sciences participatives français à la conservation de la biodiversité
    Anne Dozieres (Muséum National d'Histoire Naturelle, Paris)

    Les sciences participatives représentent une opportunité d'évaluer les réponses de la biodiversité aux changements globaux actuels, de mesurer l'efficacité des mesures de protection, et d'inciter les citoyens à changer de comportement. Vigie-Nature est un programme de sciences participatives développé par le Muséum national d’Histoire naturelle français, regroupant plusieurs observatoires de la biodiversité. Ces observatoires proposent à chacun de collecter des informations standardisées sur la biodiversité. Vigie-Nature s’est progressivement ouvert à d’autres publics que les seuls amateurs : citoyens non-experts, professionnels de la nature, agriculteurs et scolaires. Chaque année, près de 15 000 bénévoles participent ainsi à cette collecte des données.

    À l'aide de plusieurs études de cas illustrant des réussites et des échecs, nous montrerons comment ce programme contribue à la conservation de la biodiversité, alimentant des recherches en écologie, démontrant l’impact du réchauffement climatique, l’efficacité de zone de protections d’espaces naturels ou encore l’effet des pratiques agricoles sur la biodiversité. Ces données participent également à rendre publique la crise de la biodiversité par la production d’indicateurs d’état et de scénarios d’évolution fournis aux décideurs politiques. Nous verrons enfin comment cette participation peut avoir des conséquences sur les pratiques et les connaissances des participants eux-mêmes.

  • Communication orale
    La production de données naturalistes par les amateurs associatifs en France : un moyen ou une fin en soi ?
    Agnes Fortier (Université Paris Saclay INRAE)

    Considérés comme les principaux pourvoyeurs de données sur la nature en France, les associations naturalistes ont largement contribué à la préservation du patrimoine naturel. Cependant, la globalisation des enjeux de biodiversité marque un tournant dans la manière de gouverner le vivant. Celle-ci est désormais fondée sur la production et l’accumulation de données à grande échelle et la mise en place d’infrastructures de la connaissance (Edwards, 2013). Afin de rendre compte de ces changements et de leurs conséquences pour les associations nous examinerons le processus de production des données au sein du monde associatif d’une part et la mise en œuvre d’un dispositif baptisé système d’information sur la nature et les paysages (SINP) d’autre part. Ce dernier destiné à standardiser les données doit faciliter leur accès et contribuer à favoriser la participation des citoyens à la décision publique (convention d’Aarhus). À partir d’une approche socio-anthropologique, nous montrerons tout d’abord que ce dispositif conduit à mettre en lumière deux conceptions de la donnée qui disposent chacune de leur légitimité mais témoignent de formes différentes de rapports à la nature et questionne les fondements de la production des données. Nous examinerons ensuite en quoi ce dispositif technoscientifique recourt à une expertise complexe qui reconfigure les savoirs et les formes de pouvoir entre les institutions concernées.

  • Communication orale
    Des insectes et des humains : Les sciences participatives comme outil de suivi du patrimoine entomologique
    Sonya Charest (Insectariium de Montréal), Alessandro Dieni (Institut de recherche en biologie végétale, Université de Montréal), André-Philippe Drapeau Picard (Insectarium de Montréal), Marjolaine Giroux (Insectarium de Montréal), Maxim Larrivée (Insectarium de Montréal), Michel Saint-Germain (Insectarium de Montréal)

    Les sciences participatives, ou sciences citoyennes, présentent un potentiel énorme pour l’avancement des sciences, notamment en écologie. C’est pourquoi le nombre de projets qui utilisent cette approche a explosé au cours des dernières années. Les sciences participatives fournissent non seulement des données indispensables à moindre coût, elles représentent aussi une occasion pour le citoyen de s’engager directement dans la recherche scientifique et, de ce fait, contribuer à la conservation de l’environnement.

    L’Insectarium de Montréal a développé une expertise dans le domaine des sciences participatives avec, notamment, les programmes eButterfly et Mission monarque. Les milliers de participants, répartis à travers l’Amérique du Nord, forment une communauté qui partage une passion pour les papillons et une volonté de les protéger. Certains participants sont des observateurs avertis qui génèrent beaucoup de données et partagent leur expertise, d’autres n’aiment pas particulièrement les insectes, mais souhaitent quand même partager leur observation fortuite de monarque. Les sciences participatives sont donc un moyen de s’impliquer pour la conservation de l’environnement pour une diversité de profils. L’Insectarium les utilise pour faire le suivi des populations d’insectes tout en démocratisant l’entomologie auprès du public et, ultimement, cultiver l’«entomophilie», c’est-à-dire contribuer à la valorisation sociétale du patrimoine entomologique.


Communications orales

La rencontre des sciences participatives et de la métrologie

Salle : En ligne — Bâtiment : En ligne
Présidence : Florian Charvolin (CNRS)
Discutant·e·s : Agnes Fortier (Université Paris Saclay INRAE)
  • Communication orale
    Le monitoring participatif comme outil de légitimation de politiques publiques locales
    Anne Atlan (Université de Rennes 2), Marcel Calvez (Université de Rennes 2), Laurent Longuevergne (Université de Rennes 2), Véronique Van Tilbeurgh (Université Rennes 2)

    L’objectif de cette communication est d’interroger le lien entre des dispositifs de monitoring participatif et les politiques publiques. Ces dispositifs seront analysés comme des processus d’hybridation des connaissances, articulant différents types d’expertise et une division du travail scientifique au sein duquel se jouent des relations de subordination entre les savoirs. Questionnée sous l’angle de l’hybridation des savoirs, cette communication suggère que le monitoring participatif est un outil de légitimation des politiques publiques répondant à une situation incertaine. Ce monitoring rend visible ces dommages environnementaux et permet de légitimer et d’ancrer dans les pratiques quotidiennes des participants le récit de la réparation de la nature. La communication compare 3 dispositifs :

    - l’un s’adresse aux botanistes amateurs de La Réunion invités à repérer les plantes envahissantes en vue de leur éradication,

    - le second concerne l’expérimentation Ambassad’Air de la ville de Rennes,

    - le troisième est porté par des scientifiques qui amplifient la collecte des données sur la qualité de l’eau en Bretagne.

    Cette comparaison montrera qu’à La Réunion et à Rennes, les données issues de cette mobilisation d’acteurs sont peu exploitables en raison des modalités de collecte et du contexte institutionnel strictement contrôlé par des experts scientifiques. Dans le dernier cas, la fiabilité des données repose sur une forme spécifique d’hybridation des connaissances.

  • Communication orale
    Lichens GO ! co-construction et vie d’une métrologie citoyenne de l’air faisant appel au vivant
    Vincent Abensour (Université Lyon 2), Florian Charvolin (Centre Max-Weber de Lyon et Saint-Étienne), Plattner Gilles (Paris 8), Laure Turcati (Sorbonne Université)

    Lichen Go est un programme de science participative visant à mesurer la qualité de l’air par le suivi des lichens en milieu urbain. À son lancement en 2016, des expérimentations ont été mis en œuvre pour faciliter l’implication des citadin-es à toutes les étapes de construction de la connaissance. La qualité de l’air et la nature en ville ont été choisi comme les deux thématiques les plus susceptibles de susciter l’intérêt et l’implication. En parallèle, l’équipe porteuse du projet a été sollicitée par un enseignant qui anime, en région Nord-Pas-de-Calais, un réseau d’observations des lichens par des lycéen-nes et leurs enseignants et proposait son extension à l’échelle nationale. Les lichens étant des bio-indicateurs de la qualité de l’air, la mise en place d’un tel observatoire permettait de faire le lien entre la qualité de l’air et la nature en ville. Nous présentons la méthode utilisée pour la co-construction du protocole de collecte de données. Nous discutons des échanges et tensions entre citadin-es, lichenologues et l’équipe de PartiCitaE qui ont abouti au protocole actuel, et de l’étude sociologique qui a accompagné cette co-construction. Enfin, nous discutons des conséquences de la co-construction sur le projet. En effet, il semble qu’une grande liberté soit possible pour les personnes souhaitant s’impliquer au-delà de la classique collecte de données, dans la production de nouveaux outils ou même dans la gouvernance du projet.

Communications orales

Les mesures citoyennes de la pollution

Salle : En ligne — Bâtiment : En ligne
Présidence : Agnes Fortier (Université Paris Saclay INRAE)
  • Communication orale
    Folksonomies de la qualité de l'air : codage citoyens et changements de points de vue sur la pollution par particule lors d’une expérimentation de mesure par microcapteurs
    Florian Charvolin (CNRS)

    Les folksonomies sont rendues possibles par l'internet et son caractère interactif. Elles consistent à ce que des particuliers usent des interfaces du net pour confectionner leur propre codification des données soit qu'ils trouvent sur la toile soit qu'ils génèrent eux-mêmes. C'est à ce processus citoyen de codage qu'a amené une expérimentation de distribution de microcapteurs de mesure particulaire dans l'air, réalisée dans l'agglomération de Grenoble et d'Annonay, de 2019 à 2021 appelée Checkbox et financée par l'ADEME. L'objectif de Checkbox était d'explorer des perceptions et représentations de l'air dans le cadre de cette expérimentation, plus spécifiquement sur la question du chauffage au bois. La communication abordera l'analyse des "tags" que les contributeurs et contributrices ont attachés à leur séance de mesure dans leur environnement, opération qui dénote des intentions de mesure au moment de la mesure et donc comme première mise en sens de la pratique, bien en amont d'une possible remobilisation de ce sens dans un entretien sociologique a posteriori. Les folksonomies élaborées ici sont donc à la fois des catégories vernaculaires anticipant l'inscription sur le net de sa mesure par le citoyen, mais aussi des guides présélectionnant le choix de mesure à faire. On se demandera en quoi cette restauration du citoyen comme auteur de la mesure de la pollution dont il est par ailleurs victime potentielle, change le point de vue des personnes sur la pollution de l’air.

  • Communication orale
    Faire des mesures sans faire de science ?
    Gwendoline L'her (ENSA Nantes)

    À partir d’un travail ethnographique sur l’initiative Ambassad’air de la Ville de Rennes initiée en 2016, nous proposons de rendre compte d’un usage des microcapteurs de la qualité de l’air dans l’action publique urbaine. L’opération consiste à confier des capteurs mobiles de particules fines à des habitants afin de les sensibiliser à la problématique de la pollution atmosphérique et à les encourager à réfléchir, ainsi que leur entourage, sur les comportements favorables à la qualité de l’air qu’ils pourraient adopter. Le projet se caractérise par la présence de non-professionnels des sciences et par la rencontre de milieux à la marge des institutions productrices de savoirs (monde académique, expertise, etc.). La visée pédagogique et normative de l’expérimentation ainsi que les asymétries entre les acteurs ont progressivement éloigné la métrologie d’une perspective de production d’un savoir sur l’environnement telle que le pratiqueraient les sciences participatives et les observatoires citoyens. Sur le terrain, les personnes en charge d’Ambassad’air revendiquent cette posture non scientifique de la métrologie déployée par le projet. Nous proposons d’interroger cette revendication et nous reviendrons sur les frictions entre les milieux présents dans la démarche Ambassad’air. Pour cela, nous nous intéresserons aux répertoires de participations qui cadrent l’expérience des habitants, déplacent les rôles des acteurs institutionnels et affectent les pratiques de métrologie.

  • Communication orale
    Observation de la pollution avec des espèces sentinelles à Fos-sur-Mer (France). La biosurveillance participative peut-elle devenir une expérience cosmopolite ?
    Christelle Gramaglia (INRAE), François Mélard (Université Liège)

    Suite aux controverses suscitées par l’implantation d'un incinérateur de déchets dans la zone industrialo-portuaire de Fos, près de Marseille (France), les populations locales ont dénoncé le manque de connaissances concernant les impacts cumulés des pollutions sur leur environnement et leur santé. La pression exercée sur les élus a conduit à la création de l'IECP (ou Institut éco-citoyen pour la connaissance de la pollution). Cette communication aborde une expérience de biosurveillance participative visant à documenter la pollution marine à l’aide d'une espèce sentinelle. En nous appuyant sur la théorie de l'acteur-réseau, nous discutons des capacités d'autres espèces auparavant "insignifiantes", par exemple les congres, à devenir des espèces compagnes qui comptent, à mesure que leurs compétences en matière de cartographie des dégâts environnementaux sont confirmées. En outre, nous soutenons que les expérimentations participatives de l'IECP avec les congres et d’autres espèces sentinelles, telles que les lichens sont des expériences cosmopolitiques. La façon dont les connaissances sont élaborées avec les pêcheurs et les habitants change, contribuant à une compréhension écologique des enjeux. Au-delà des données quantitatives, des relations sociales et multispécifiques sont activées, fournissant des pistes de récupération et de survie collaborative.

  • Communication orale
    S'équiper de capteurs de la radioactivité : pour quoi faire ?
    Dominique Dolisy (EHESS et AGROPARISTECH)

    Si nous écoutons certains propos émanant d'experts de la société civile, nous sommes enclins à croire qu'un accident nucléaire n'est finalement pas grand-chose et que les impacts sur l'environnement sont "négligeables". La confiance dans la technologie et dans les installations vieillissantes continue à se faire avec un chèque en blanc. Mais quelle est la réalité vécue des gens ? de l'état de nos milieux ? On sait que des habitants de Fukushima se sont équipés d'appareils de mesure.

    L'homme ainsi équipé pourra-t-il répondre et s'adapter à une situation post-accidentelle ? Le projet français pluraliste OpenRadiation de recherche participative, né dans le contexte post-Fukushima, est la mesure de la radioactivité dans l'environnement, par les citoyens. Monter son propre boitier capteur, ou se le procurer prêt à l'emploi, enrichir des mesures de la radioactivité ambiante "ne va pas forcément de soi" a fait remarquer un partenaire du projet.

    Nous voulons dans cette communication à partir de l'exemple de OpenRadiation mettre l'accent sur le fait que la radioactivité qui ne se voit pas, mais qui peut se rendre lisible à travers des objets plus ou moins connectés, est plus qu'un simple exercice lié à de la gestion de crise, et qu'elle ouvre la boite noire de la connaissance de notre milieu au sens mésologique, de manière non utilitariste, "sans quête d'application immédiate", mais sans naïveté, "capable de révéler nos modes de domination".