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Informations générales

Événement : 87e Congrès de l'Acfas

Type : Colloque

Section : Section 400 - Sciences sociales

Description :

Le dispositif contemporain d’aide sociale prend racine dans une longue tradition d’assistance, dont les filiations sont multiples et hétérogènes (Labrie, 2016). Au Québec, aujourd’hui encore, des logiques distinctes continuent de façonner le système d’aide sociale, empruntant à la fois au registre séculaire de la charité, à celui plus récent de l’universalité des droits, et, de plus en plus, à la rationalité néolibérale, faisant de l’État un entremetteur du marché et faisant des individus des entrepreneurs d’eux-mêmes (Merrien, 2005). Ces univers de sens s’entrecroisent à différents niveaux, que ce soit celui des politiques et des discours publics, des institutions de régulation et de contrôle, des collectifs qui se forment en résistance aux injustices, ou encore celui des individus dont les trajectoires et les identités se construisent par et à travers ces référents.

Dans un contexte postfordiste et postprovidentialiste, comprendre la fonction des dispositifs d’assistance est une question qui s’impose aux sciences sociales. Dans les dernières décennies, les réformes qui se sont succédé au Québec ont érodé le caractère universel du droit à l’assistance, affirmé dans la loi fondatrice de 1969. Prenant un visage de plus en plus punitif, le dispositif de l’aide sociale est également de plus en plus conçu à travers le prisme des besoins du marché de l’emploi. La multiplication des programmes et des mesures d’employabilité, la division des prestataires en catégories et la coercition appliquée sur ceux-ci pour les amener à adopter certains comportements sont des indicateurs d’un virage dont nous devons encore mesurer les conséquences sur la société et les individus.

Dans ce contexte, ce colloque a pour objectifs de :

1) Faire un état des lieux des connaissances sur les dispositifs de l’aide sociale au Québec afin de faire la lumière sur les trajectoires individuelles, d’éclairer les mobilisations actuelles et de mettre en relation les diverses dimensions de ces dispositifs;

2) Ouvrir un dialogue entre chercheurs et chercheuses de différentes disciplines et différents ancrages théoriques autour d’un objet commun d’actualité.

Labrie, V. (2016). La hauteur de la barre à l’aide sociale : quelques jalons de 1969 à aujourd’hui. Institut de recherche et d’informations socioéconomiques. http://iris-recherche.qc.ca/publications/pl70-doc-de-reflexion.

Merrien, F.-X., R. Parchet et A. Kernen (2005). L’État social : une perspective internationale. Paris, Collin.

Date :
Responsables :

Programme

Communications orales

Représentations et pratiques de catégorisation : points de vue situés sur le dispositif de l’aide sociale

Salle : 2.023 — Bâtiment : Cégep G.-Roy
  • Communication orale
    Les représentations des personnes bénéficiaires de l’aide sociale dans les médias dans le contexte de la réforme du programme de l’aide sociale au Québec (2015-2016)
    Elisabeth Greissler (UdeM - Université de Montréal), Amélie Maugere (Travail social)

    Au Québec, la réforme de la politique de l’aide sociale, annoncée par le gouvernement libéral en janvier 2015 et adoptée définitivement par le parlement le 10 novembre 2016, a été très controversée. Entre ces deux dates, les acteurs de l’intervention sociale se sont largement mobilisés, ce qui a permis de médiatiser un certain nombre des enjeux sociaux et politiques de cette réforme auprès de l’opinion publique.

    Pour comprendre la manière dont s’est structurée cette controverse, nous avons collecté l’ensemble des articles d’opinion (tribunes politiques et militantes, tribunes d’éditorialistes, courrier des lecteurs) parus dans trois journaux de masse québécois durant le temps qu’ont duré les discussions politiques autour de cette réforme, soit entre 2015 et 2016, nous permettant de constituer un corpus de 146 articles.

    Dans cette communication, nous porterons le focus sur les représentations des personnes bénéficiaires d’une prestation d’aide sociale à partir des concepts de l’approche cognitive des politiques publiques (Muller, 2005). Ainsi, nous mettrons en valeur la manière dont des groupes d’acteurs s’autorisent ou non, dans leurs discours publics, à s’affranchir de certaines valeurs comme celles de la « responsabilité individuelle » et du « travail productif rémunéré » qui dominent les sociétés fondées sur un système de production capitaliste et une idéologie libérale (McAll, 2009 ; Esping-Andersen, 1999).

  • Communication orale
    « On se lève les manches pis on va aider le monde à s’en sortir, même ceux qui veulent pas » : contexte et paradoxes de l’activation à l’échelle de la « bureaucratie de guichet » au Québec
    Catherine Charron (UdeM - Université de Montréal)

    L’objectif de cette communication est de mettre en perspective la logique politique de l’activation dans le domaine de l’assistance sociale (notamment à travers la remise en question du droit à l’aide et l’injonction à l’emploi), avec les pratiques des agentes et agents qui non seulement sont le visage de l’État pour les populations précarisées qui recourent à l’aide sociale, mais qui fontsur le terrain les politiques publiques formulées en haut. Les politiques d’activation se sont déployées depuis les années 1990 au Québec dans un contexte administratif paradoxal, où le maintien (voire l’accroissement) du traditionnel pouvoir discrétionnaire des « street-level bureaucrats » (Lipsky, 1980) s’est accompagné de l’augmentation des contrôles gestionnaires et de leur charge de travail. Fortement attachés à une identité professionnelle « d’intervenant(es) », les agent(es) d’emploi sont pourtant de plus en plus confinés à des tâches administratives et disciplinaires. Exprimant le sentiment d’une perte de sens de leur travail, ils et elles critiquent fortement le cadre organisationnel de leurs pratiques sans pour autant remettre en question la légitimité des politiques d’activation. Les données présentées dans cette communication sont tirées d’une recherche portant sur le travail des agentes et agents de l’État dans la première année d’implantation d’un programme obligatoire d’insertion au Québec en 2018.

  • Communication orale
    À l’examen, au mérite ou à la preuve ? Les logiques discursives sous-tendant l’accès au programme de solidarité sociale
    Nadia Giguère (CIUSSS Centre-Sud-de-l'Île-de-Montréal), Stéphane Handfield (Centre de recherche de Montréal sur les inégalités sociales, les discriminations et les pratiques alternatives de citoyenneté (CREMIS))

    Au Québec, le programme de solidarité sociale est accessible aux personnes ayant une contrainte sévère à l’emploi reconnue par un médecin et par le Ministère du travail, de l’emploi et de la solidarité sociale (MTESS). Le processus médico-administratif d'accès à ce programme implique des démarches anxiogènes pour les requérants. Deux logiques justifient néanmoins leur persistance dans cette bataille: 1) une d’ayant-droit, basée sur la preuve médicale de la contrainte à l’emploi; et 2) une de justice sociale, basée sur la démonstration de l’incapacité à obtenir/conserver un emploi. En filigrane se dessinent des logiques de solidarisation/différenciation avec d’autres catégories de bénéficiaires. Ces logiques discursives se retrouvent également chez les professionnels de la santé et des services sociaux à qui on demande d’évaluer la contrainte à l’emploi et dans les énoncés de programmes du MTESS. L’appropriation différentielle de ces logiques, par les requérants comme par les professionnels régulant l’accès au programme, donne à voir la ténacité du débat opposant la responsabilisation individuelle –ou la responsabilisation vers l’emploi – au droit inconditionnel à l’aide sociale, mais révèle aussi quelques brèches, donnant à penser qu’on peut briser le paradigme interprétatif opposant les bénéficiaires « méritants » à ceux jugés « aptes au travail » et voir émerger une réelle logique de solidarité sociale, traversant les discours, les pratiques et les politiques sociales.


Communications orales

Histoire récente de l’aide sociale au Québec : renouveler la critique à partir des savoirs d’expérience

Salle : 2.023 — Bâtiment : Cégep G.-Roy
Présidence : Jérémi Leclerc (UQO - Université du Québec en Outaouais)
  • Communication orale
    Être puni.e sur l'aide sociale
    Catherine Chesnay (UQAM - Université du Québec à Montréal), Véronique Fortin (Université de Sherbrooke), Elisabeth Greissler (Université de Montréal)

    L’actuel mode de gouvernance néolibéral se traduit par tout un arsenal de techniques pénales qui réduisent les fonctions de protection et de solidarité sociale de l’État au profit de fonctions de sécurité et d’ordre public. Cette présentation s’inscrit dans les écrits sur les dispositifs punitifs en dehors du droit pénal, afin de montrer les tenants et les aboutissants de la logique punitive qui se déploie au sein du système d'aide sociale. Plus précisément, elle se penchera sur les expériences des personnes qui ont été assistées sociales et qui ont fait l’objet de sanctions. Dans un premier temps, elle présentera les contours des expériences de sanction vécues par les personnes concernées. Ainsi, il s'agira de démontrer comment, au-delà des sanctions strictement prévues dans la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles, diverses mesures administratives sont vécues comme des sanctions (par exemple, demandes répétées de documents). Dans un second temps, elle présentera les formes et les effets de ces sanctions sur un échantillon d’une trentaine de personnes interviewées entre mars et octobre 2018.

  • Communication orale
    Perspective historique sur les enquêtes québécoises du rapport au travail des personnes assistées sociales
    Marie-Pierre Boucher (UQO - Université du Québec en Outaouais), Anthony Desbiens (Université de Montréal)

    En 1993, l’ouvrage de Paul Grell et Anne Wery, Héros obscur de la précarité a introduit l’usage de la méthode des récits de vie pour saisir la « créativité » (économique et occupationnelle) des personnes en marge de l’emploi typique et de ses modalités d’intégration à la société.

    Dans le cadre de nos propres travaux, nous avons adopté une stratégie similaire de construction des connaissances. Cette communication est l’occasion pour nous de remettre en perspective notre démarche de recherche. Pour ce faire, nous allons remonter le fil des enquêtes québécoises qui ont repris la même stratégie de construction des connaissances auprès de la même population.

    Cette remontée historique sur les recherches se rapportant aux personnes assistées sociales se fera au travers du prisme du rapport au travail

    À ce matériau, nous voudrions poser deux questions : 1) alors que Grell et Wery n’inscrivaient clairement pas leur enquête au paradigme dominant de l’obligation de travail, cette posture critique s’est-elle maintenue dans le temps? 2) 30 ans plus tard, en regard de la reconfiguration du système d’emploi et de la mise en œuvre d’une politique d’activation de l’Aide sociale, pouvons-nous percevoir un changement dans le rapport au travail des personnes qui restent en marge de l’emploi?


Communications orales

Lutte à la pauvreté ou gestion de la pauvreté?

Salle : 2.023 — Bâtiment : Cégep G.-Roy
  • Communication orale
    La fiscalisation des mesures de lutte contre la pauvreté au Québec sonne-t-elle le glas des dispositifs d’aide de dernier recours ?
    Lucie Lamarche (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    Le régime québécois d’aide de dernier recours - fête cette année (2019) son demi-siècle d’existence. D’abord conçu comme un dispositif destiné à combler les besoins des ménages en situation de dénuement quasi-total, ce régime a évolué à travers les méandres de la catégorisation des ménages pauvres jusqu’à plus soif. Aujourd’hui, les gouvernements québécois et fédéral arrivent à maintenir au-dessus de la ligne dite de pauvreté la majorité des ménages québécois économiquement vulnérables. A gauche comme à droite, on est tenté de décrire cet état de fait comme le triomphe d’une stratégie de revenu minimum garanti.

    L’enjeu est bien plus fondamental. En effet, la fiscalisation du social fait du revenu du ménage – et non de la décence du travail dont est tiré un revenu – l’élément opérateur de la lutte contre la pauvreté. Ce subtil stratagème est par ailleurs dignifié au nom de la lutte contre la pauvreté des enfants, laissant ainsi en rade la dignité de leurs parents.

    La présente proposition souhaite appliquer aux faits une analyse issue du cadre de référence des droits humains, étant entendu qu’il reste peu à dire du régime québécois dit d’assistance sociale. Dans ce contexte, la pauvreté devient la cause et la conséquence des violations de ces droits et non plus l’objet de la lutte sociale.

  • Communication orale
    L’impossible équilibre de la lutte contre la pauvreté
    Olivier Ducharme (Collectif pour un Québec sans pauvreté)

    Le troisième Plan d’action gouvernemental de lutte contre la pauvreté s’ouvre par les paroles de l’ex-premier ministre Philippe Couillard qui souligne le principe qui oriente cette lutte : « L’atteinte de l’équilibre entre le développement économique et la justice sociale constitue un objectif prioritaire de notre gouvernement. C’est le principe qui guide cette politique et la rend possible ». En prenant au sérieux ces propos, il faut, si nous souhaitons comprendre les tenants et les aboutissants de la lutte contre la pauvreté du gouvernement, entreprendre une analyse de son principe. Comme le gouvernement ne se donne pas la peine de définir le principe même qui guide son action, nous devons nous tourner vers d’autres sources pour en tirer une signification.

    À partir de l’analyse du documentNe laisser personne de côté!, publié en 2001 comme « base de discussion » en vue de la Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l’exclusion, on tâchera de retracer le principe de la politique actuelle de lutte contre la pauvreté. On constatera au fil de l’analyse que depuis longtemps déjà le gouvernement du Québec fonde la lutte contre la pauvreté sur la recherche d’un « équilibre », d’une « conciliation » ou d’une « synergie » entre le développement économique et le développement social. Ce principe est à l’origine des politiques de contrepartie à l’aide sociale et du mode de gestion des personnes assistées sociales.