106 - Le trouble de traitement auditif : du dépistage à l’intervention

Actuellement au Québec, des enfants ayant des difficultés scolaires sont référés en audiologie par les professionnels de la santé ou de l’éducation pour une évaluation des habiletés auditives centrales parce qu’on soupçonne un TTA. Toutefois, ces enfants se retrouvent sur la liste d’attente des services d’audiologie sans les avoir préalablement soumis à un test de dépistage du TTA puisque cet outil n’existe pas encore en français. L’objectif du projet de recherche était de créer un tel test et de le valider auprès d’enfants à risque de présenter un TTA. Plus d’une quarantaine d’enfants ont été soumis au test de dépistage comprenant trois tests auditifs, dont l’administration durait moins de 15 minutes, avant de poursuivre l’intervention avec une évaluation complète des habiletés auditives centrales. De plus, les parents et les enseignants remplissaient un questionnaire sur, entre autres, les comportements auditifs de l’enfant. Les résultats préliminaires montrent que le test de dépistage est assez sensible pour identifier les enfants ayant une hypothèse de TTA et assez spécifique pour reconnaître ceux n’ayant pas ce trouble. Il s’agit maintenant d’augmenter le nombre de participants afin de vérifier si les résultats obtenus seront reproduits à plus grande échelle.

La pertinence de mesurer la capacité de reconnaissance de la parole dans le bruit est déjà bien établie lorsqu’on évalue la présence d’un trouble de traitement auditif (TTA). Il peut être difficile de choisir l’outil clinique le plus approprié pour cette mesure vue la disponibilité de nombreux tests de reconnaissance de la parole dans le bruit. Dans un premier temps, les propriétés métriques des tests cliniques seront présentées, ainsi que les forces et les limites de chacun. En seconde partie, la présentation portera sur les bonnes pratiques en ce qui concerne l’évaluation de la reconnaissance de la parole dans le bruit chez les personnes bi- ou multilingues. Il est documenté qu’une grande part des francophones du pays parlent en effet plus d’une langue. Cette vue d’ensemble a pour but d’aider les audiologistes à choisir les tests qui conviennent le mieux à leur clientèle, que ce soit des enfants ou des adultes.

Le trouble de traitement auditif (TTA) et les troubles d’apprentissage de la lecture et de l’orthographe comme la dyslexie-dysorthographie (DD) sont souvent en comorbidité. Des études ont montré que certains enfants ayant un TTA présentaient des difficultés en lecture. De plus, l'origine de la DD phonologique proviendrait d’un trouble de conscience phonologique nuisant au développement des représentations phonologiques, lesquelles dépendraient également du traitement auditif. Cette étude explore les compétences en lecture et en orthographe d'enfants ayant un TTA. Considérant leur déficit de traitement auditif, il est attendu que leurs difficultés en langage écrit se situent sur le plan phonologique. Jusqu'à présent, 11 enfants âgés entre 8 et 13 ans présentant un TTA ont été évalués. Ceux-ci ont été soumis à des tâches pour évaluer leur audition périphérique et centrale, certaines de leurs capacités cognitives (p. ex. : attention) et leurs compétences en lecture et en orthographe. Les résultats préliminaires de l’étude montrent que la majorité des participants présentent de faibles compétences en langage écrit. Toutefois, le profil de DD varie selon les participants; ils peuvent présenter une DD phonologique, mnésique ou mixte. Ainsi, un déficit de traitement auditif n’est pas nécessairement accompagné de difficultés touchant l’aspect phonologique du langage écrit.

Les impacts d'un traumatisme craniocérébral  (TCC) sont multiples. Les difficultés sensorielles - spécifiquement les sensibilités auditives ainsi que les problèmes de traitement de l'information auditive - en font partie. Toutefois, peu de données existent sur ces difficultés. Une étude rétrospective a été menée à partir de 26 dossiers de personnes ayant un TCC et rapportant des difficultés auditives (âgées entre 9 et 59 ans). Les données compilées ont été extraites des évaluations audiologiques, médicales, psychologiques et d'un dépistage visuel. Les résultats révèlent que 42% de ces personnes ont échoué au test d'intégration binaurale, soit la capacité des deux oreilles à combiner différents stimuli présentés simultanément. Dans plus de la moitié des dossiers, on note également des résultats anormaux aux tests de reconnaissance de signaux sonores dont les caractéristiques acoustiques ont été altérées. Une analyse statistique plus poussée sera effectuée pour mesurer de possibles corrélations entre les plaintes rapportées par ces personnes et leurs résultats aux tests de traitement auditif central. Cette étude contribue à une meilleure connaissance de l'impact d'un TCC sur les fonctions auditives centrales. 

La surdité professionnelle est l’un des problèmes de santé les plus répandus au monde. Des études animales récentes montrent que l’exposition au bruit affecte les voies auditives rétrocochléaires. La dégénérescence toucherait plus spécifiquement les neurones à seuil de déclenchement élevé, perturbant à long terme le traitement de l’information auditive présentée à niveau supra liminaire. Cette étude exploratoire s’est intéressée à l’impact d’une exposition chronique au bruit sur les habiletés de traitement auditif de 25 adultes francophones d’âge moyen. La batterie de tests incluait les tests de détection de silence (RGDT), d'écoute dichotique, de patron de durée (DPT) et d’écoute de phrases dans le bruit (HINT) en plus des mesures des seuils auditifs, des potentiels évoqués du tronc cérébral (PEATC) par clics et du démasquage binaural (MLD). Tous les participants présentaient une hypoacousie bilatérale en hautes fréquences. Leur performance moyenne se situait sous la norme pour les tests de traitement de l’information verbale, mais demeurait dans les normes pour le traitement des stimuli non-verbaux. Les pauvres résultats obtenus au test d’écoute dichotique sont corrélés à une faible amplitude de l’onde I et III aux PÉATC (coefficient de corrélation de rang ≥ 0,4), suggérant une moins bonne synchronie nerveuse. Ces résultats devraient inciter les audiologistes à documenter les habiletés de traitement auditif chez la clientèle présentant une surdité professionnelle.