Notre communication sera organisée en deux mouvements : une réflexion théorique sur la diversité en contexte éducatif précèdera une proposition didactique pour prendre en compte, dans l’enseignement de la littérature, la diversité des lectures des élèves. 1. La diversité et l’école : La diversité peut d’abord être décrite comme un ensemble de phénomènes sociaux, accrus, entre autres, par l’intensification des migrations humaines, par la révolution des communications numériques, par la multiplication de processus d’appartenance, parfois contradictoires (nationaux, régionaux, linguistiques, ethniques, religieux, générationnels, liés au genre, à l’orientation sexuelle, etc.). La diversité est donc en premier lieu une réalité massive des sociétés mondialisées qui rend problématique le rapport de chaque sujet à lui-même et au monde (Fabre, 2015). La diversité peut ensuite être conçue comme une notion entretenant des relations complexes et parfois confuses avec les concepts d’identité et d’altérité. Les usages galvaudés de l’expression « diversité culturelle », relayés par les discours institutionnels et médiatiques, tendent à brouiller sa portée euristique. La diversité peut-elle être réduite à un patrimoine à conserver, à la description archiviste des formes culturelles spécifiques à des communautés « minorisées »? La diversité est-elle une « valeur à célébrer » (UNESCO, 2015), une valeur en soi s’énonçant dans une injonction normative à « vivre ensemble »? Contribue-t-elle au pluralisme des valeurs auxquels l’école a pour mission d’éduquer les élèves (Leroux, 2016)? Selon nous, clarifier les conceptions possibles de la diversité, dans le contexte d’une école inclusive, est l’une des tâches de la pensée éducative actuelle. Notre contribution théorique consistera à suspendre momentanément le dialogue entre des communautés définies par leurs différences pour envisager la diversité inhérente à chaque sujet. Plus précisément, la diversité sera redéfinie, non comme un décor bigarré extérieur à la situation didactique, mais comme un processus de subjectivation, soutenu, en particulier, par l’enseignement de la littérature. 2. La diversité et l’enseignement de la littérature : Si la littérature apparait comme un des moyens privilégiés de la compréhension de la diversité, c’est d’abord parce qu’elle constitue un réservoir, quasiment infini, de variations fictionnelles sur les rapports entre soi-même, autrui et le monde (Ricœur, 1985), c’est ensuite parce qu’elle permet à chaque lecteur de s’ouvrir à la possibilité de devenir autre que ce qu’il est (Ricœur, 1990). Dans les recherches en didactique de la littérature, l’étude de la diversité a été plus souvent rapportée aux formes, aux valeurs, aux visions du monde représentées dans les œuvres littéraires qu’à leurs réceptions par des élèves. Loin de s’exclure, ces deux approches sont complémentaires, mais méritent d’être distinguées, dans la mesure où la diversité des lectures proposées par les élèves est autant le résultat du choix d’un corpus aux thématiques spécifiques que l’effet d’un renouvèlement des pratiques de l’enseignement de la littérature. Ce renouvèlement repose sur des recherches en didactique de la lecture, centrées sur les « sujets lecteurs », selon lesquelles accueillir l’investissement subjectif de chaque élève (Rouxel et Langlade, 2004) est une condition du dialogue sur les textes en classe (Fourtanier et Langlade, 2007). Il en résulte une « diversité interprétative » grâce à laquelle les élèves peuvent élargir leur compréhension (réflexive et réciproque) de leur diversité subjective (Sauvaire, 2013). Nous clorons cette communication par la présentation de trois activités didactiques dont l’intégration est susceptible de favoriser la « diversité interprétative » dans les classes du primaire (cycle 3) et du secondaire.