Dans un contexte marqué par de profondes transformations économiques, sociales et culturelles, et par des changements de paradigmes au sein des politiques publiques qui sont devenues « actives », plus responsabilisantes et « capacitantes » (Astier, 2007; Cantelli et Genard, 2007; Groulx, 2009; Genard, 2013), mais également plus gestionnaires (Bellot et al., 2013), le travail social a évolué dans ses formes d’organisation comme dans ses finalités et ses modalités d’intervention. Les situations sociales auxquelles il doit répondre aujourd’hui se sont complexifiées, marquées par l’alourdissement des problématiques ou l’émergence de nouveaux besoins, mais aussi par différentes formes de fragmentation, de vulnérabilités et par l’augmentation des inégalités (Baillargeau, 2009). Les travailleuses sociales et les travailleurs sociaux sont souvent confrontés à nombre de défis et à des tensions normatives importantes (Bourgeault, 2004; Gonin, Grenier et Lapierre, 2013; Dierckx et Gonin, 2015) liés à la complexité et aux enjeux de la pratique tout autant qu’aux nouvelles configurations des cadres organisationnels d’intervention. Des logiques parfois contradictoires ou paradoxales guident ces réorientations et peuvent aller à l’encontre des valeurs personnelles et professionnelles prônées par les travailleuses sociales et les travailleurs sociaux ainsi que de leurs propres paradigmes d’intervention (Lambert, 2013). Pour répondre à ces défis, dans un contexte normatif où les repères universels ne vont plus de soi, un repositionnement peut être nécessaire, permettant l’expérimentation de réponses inédites. Certaines recherches et expérimentations sont ainsi porteuses de nouvelles façons d’agir et de penser au regard de ces défis.
C’est à partir de ces recherches et expérimentations qu’une réflexion plus globale sur les enjeux du travail social est abordée par l’adoption d’une perspective éthique. Les dernières années ont en effet vu apparaître un intérêt grandissant pour la sphère de l’éthique, et plusieurs ouvrages et articles ont présenté diverses approches des questions éthiques (Lamoureux, 2003; Bouquet, 2003; Bouchereau, 2012; Pullen-Sansfaçon et Cowden, 2012; Depenne, 2012; Gonin et Jouthe, 2012; Merlier, 2013; Farmer, Bouthiller et Roigt, 2013). C’est sous l’angle de la mobilisation d’une éthique réflexive que les différents défis et enjeux rattachés à la pratique complexe du travail social actuel sont mis en lumière. Le colloque est orienté vers la réflexion sur les potentialités de l’éthique dans une visée d’engagement et de conscience critique (Jacob, 2003). Ainsi, les questions suivantes guideront ce rassemblement : quels sont les nouveaux enjeux éthiques dans la transformation du social? Quels points d’appui et perspectives pour les aborder? Quels pouvoirs créatifs et transformateurs des pratiques du travail social par l’éthique? Sous quels angles aborder les questions éthiques dans la formation en travail social?