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Informations générales

Événement : 84e Congrès de l'Acfas

Type : Colloque

Section : Section 400 - Sciences sociales

Description :

Ce colloque est organisé par le Collectif de recherche interdisciplinaire sur la contestation (CRIC), nouvelle équipe de recherche interuniversitaire et collégiale financée par le FRQSC (Fonds de recherche Société et culture Québec) depuis juin 2015. Dans ce contexte, plusieurs recherches sur les dynamiques actuelles des mouvements de contestation sont en pleine émergence, et ce colloque permettra d’en présenter les résultats.

En plus de porter une attention aux mouvements de contestation actuels, ce colloque sera l’occasion d’analyser les réactions relatives à cette contestation (répression policière, « backlash » antiféministe), ainsi que ses effets dans la vie privée et dans les dynamiques internes. Même si c’en est un élément important, la contestation ne se réduit pas à la rue : des expériences militantes se multiplient en marge des institutions et dans la vie privée de manière à répondre de façon autonome aux besoins et aspirations des communautés marginalisées, phénomène que Scott (1990) a appelé l’« infrapolitique » des groupes subalternes et Mansbridge (2013), le « militantisme au quotidien », que l’on peut distinguer de la dimension visible des actions médiatisées dans l’espace public.

Par conséquent, ce colloque se penchera sur deux thématiques en lien avec la contestation. Premièrement, les réactions policières envers les mouvements sociaux et la judiciarisation de ces derniers exercent une influence de plus en plus importante sur les mobilisations en Occident, en particulier au Québec, ce qui mérite une attention particulière. Ainsi, la première table ronde regroupe des présentations portant sur la normalisation du profilage politique, la marginalisation politique et la criminalisation de certains groupes spécifiques à travers le projet GAMMA du SPVM (Service de police de la Ville de Montréal) et la création d’espaces de résistances juridiques. La seconde table ronde s’intéresse aux effets structurants sur les mobilisations des dynamiques internes à la lisière privé-public, abordant l’influence des affects dans la (dé)mobilisation des luttes, les rapports sociaux de sexe à l’intérieur d’organismes militant sur des enjeux étudiants et de droit au logement, et les relations entre chercheure et personnes militantes.

Date :
Responsables :

Programme

Communications orales

Marginalité politique et judiciarisation : quelles agentivités?

  • Le droit de manifester? Retour sur le profilage politique dans l'action policière
    Pascale Dufour (UdeM - Université de Montréal)

    Un sondage récent portant sur le rapport à la diversité au Québec présente des résultats surprenants au regard du profilage policier vis-à-vis des manifestants. Outre le contexte particulier dans lequel ce sondage a été réalisé, ces données posent question : comment assurer une égalité de traitement en pratique vis-à-vis de certains droits politiques, comme le droit à la liberté d'expression? Où se situe le droit de manifester dans la législation et les pratiques policières au Québec? Le Québec, en particulier la ville de Montréal, s'est distingué ces dernières années par une gestion répressive des manifestations (2012 à 2015). La Ligue des droits et libertés et l'Observatoire sur les profilages tentent de faire accepter la notion de « profilage politique » pour dénoncer le caractère discriminant de la gestion policière des manifestations. On peut également se demander, au regard des résultats du sondage, si ces pratiques ne conduisent pas à une normalisation du profilage politique au sein de la population. À partir des différentes données disponibles, nous tenterons de faire le point sur le profilage dans l'action policière et de réfléchir aux conséquences à moyen terme de ces pratiques.

  • La problématisation de la marginalité politique au cœur du projet GAMMA du SPVM
    Pascal Dominique-Legault (Université Laval)

    Alors que la mise en place du controversé projet GAMMA (Guet des activités et des mouvements marginaux et anarchistes) du Service de police de la ville de Montréal (SPVM) avait été justifiée en 2010 par des évènements criminalisables, cette communication affirme que la raison d'être de ce projet repose également sur une problématisation de la marginalité politique de groupes sociaux montréalais. Nous présentons les résultats préliminaires d'une étude en cours sur la construction et la circulation des savoirs policiers relatifs à l'implantation du projet GAMMA. Notre analyse de contenu thématique, de documents internes obtenus auprès de la Commission de l'accès à l'information du Québec, révèle comment fut problématisée la marginalité politique des groupes. Notre analyse interroge les effets de pouvoir de ces constructions et démontre comment les mouvements marginaux ont été opérationnalisés en indicateurs visibles et amalgamés à un potentiel criminel. Nous verrons que ces constructions enjoignent une suspicion des policiers de GAMMA qui glisse des comportements criminalisables à des éléments extérieurs au cadre strict des manifestations, s'infiltrant dans la quotidienneté des mouvements jusqu'au cœur de leur identité. Nous concluons que la problématisation de la marginalité politique et de convictions politiques précises vise principalement à légitimer l'institutionnalisation d'une réponse policière supplémentaire ciblant de façon différentielle ces mouvements marginaux.

  • S'adapter au droit : aux origines de la constitution d'un espace de résistance judiciaire
    Charles Carrier-Plante (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    De 2011 à 2015, le Québec a été marqué par près de 7000 arrestations à caractère politique en contexte de manifestations. Considérant que « l'institution d'un “espace judiciaire” implique l'imposition d'une frontière entre ceux qui sont préparés à entrer dans le jeu et ceux qui, lorsqu'ils s'y trouvent jetés, en restent en fait exclus » (Bourdieu 1986 : 9), il convient tout de même de comprendre comment l'entrée d'une masse critique de contestataires dans cet « espace judiciaire » a contribué à transformer les dynamiques de la communauté militante montréalaise par la consolidation d'un espace de résistance judiciaire. De quelle manière cette communauté a-t-elle négocié les frontières constitutives de l'espace judiciaire, par des pratiques supposant la maîtrise d'un ensemble de savoir-faires différenciés? Cette judiciarisation de l'action contestataire a eu pour conséquence un développement organisationnel au sein de l'espace militant, avec la constitution de différentes formes organisationnelles plus ou moins formelles, articulées entre elles de façon souple. Grâce à un travail préliminaire d'observation participante, il est possible de montrer que le développement d'un répertoire d'actions juridiques est lié à la consolidation d'un sous-espace militant voué à l'investissement stratégique de l'espace judiciaire.


Communications orales

Luttes politiques à la lisière privé-public

Présidence : Francis Dupuis-Déri (UQAM - Université du Québec à Montréal)
  • Affects et émotions dans l'opposition hétéroclite au pipeline au Massachussetts
    Sophie L. Van Neste (UdeM - Université de Montréal)

    Face à un projet de gazoduc en périphérie du Massachusetts, 77 résolutions d'opposition ont été adoptées dans des « town meetings », suite à une mobilisation des citoyens et élus locaux. Pour affirmer les droits des communautés contre l'emprise d'une multinationale sur leurs territoires, ces résolutions sont publicisées comme démonstrations de refus face au projet, et parfois comme actes de résistance. La pluralité des motivations amène toutefois des tensions souvent liées à des affects différents vis-à-vis du territoire, et de la légitimité de l'engagement politique. Cette situation soulève plusieurs questions quant à aux territoires touchés, dont celles de la propriété privée et des terres publiques protégées. Un discours public conciliateur exprime des sentiments de dépossession et d'insécurité, constitutifs d'une grande coalition « anti-pipeline ». Or, dans les espaces semi-privés de délibération, des tensions assez vives ont été observées, dans des dynamiques de déplacement des arènes de militantisme ou de démobilisation. S'inspirant des travaux sur les émotions et la géographie des affects, cette présentation cherche à comparer l'appel mobilisateur aux émotions, dans les arènes publiques, à l'ambiguïté des affects en tension chez les différents activistes, dans les espaces privés et semi-privés. L'analyse s'appuie sur de l'observation directe, quinze entretiens semi-dirigés, une analyse documentaire et une revue de presse.

  • La contestation, est-ce seulement pour les hommes? Les rapports sociaux de sexe dans deux organisations prônant l'action sociale
    Katherine Ruault (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    Alors que les politiques néolibérales renforcent les inégalités de sexe, il existe peu de recherche à ce sujet au Québec, les principaux écrits recensés portant sur les organisations de femmes. Or, l'intégration des féministes aux organismes mixtes demeure difficile, en raison de diverses problématiques : rapports de pouvoir, secondarisation des luttes féministes, langage de domination, etc. Cette communication propose d'exposer des résultats d'une recherche (entrevues, observations, analyse de la documentation grise) sur l'intégration du féminisme dans deux organisations mixtes prônant l'action sociale et ayant des principes féministes; l'Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSÉ) et le Front d'action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU). Il s'agit de comprendre en quoi le militantisme mixte peut contribuer aux luttes féministes et à la transformation des rapports sociaux et leur consubstantialité (Kergoat). Seront discutés les enjeux tels que la division sexuelle du travail militant, les rapports de pouvoir et de dominations ainsi que leur influence dans l'orientation de ces organisations. Les résultats portent sur les répercussions des rapports sociaux de sexe au sein de ces deux organisations, tant dans leurs discours que dans leurs pratiques organisationnelles. Il sera finalement question des conséquences de ces phénomènes pour ces espaces de contestation, et pour les luttes féministes.

  • Aller-retour Montréal-Derry : penser la recherche à travers le militantisme
    Marie-Lise Drapeau-Bisson (UQAM - Université du Québec à Montréal)

    Dans cette présentation, il s'agit de réfléchir de manière critique à l'intersection du militantisme et de la recherche du point de vue d'une étudiante en sociologie des mouvements sociaux. Plus précisément, il s'agit de discuter ce qu'implique être une « participante par conviction » (Ross 2013) à travers notre expérience de recherche ethnographique avec le groupe Alliance for Choice, un groupe féministe pro-choix à Derry en Irlande du Nord. En termes méthodologiques, nous avons mené une recherche terrain de type ethnographique (entretiens semi-dirigés et observation participante), mais cette communication s'inscrit plutôt dans une approche réflexive sur la démarche de recherche dans le cadre d'un mémoire en sociologie. En nous inspirant de Juris (2007) et Gordon (2007), nous discuterons de la manière dont se vit (avantages, difficultés et limites) la relation collaborative entre chercheure et militantes, et ce, de l'élaboration du projet de recherche à la dissémination des résultats, en passant par la collecte de données. Nous souhaitons éclairer, dans un premier temps, la relation entre le militantisme et le milieu académique, et la manière dont les universitaires peuvent contribuer aux luttes en travaillant dans le milieu académique, ainsi qu'en fournissant des outils à celles et ceux qui luttent à l'extérieur de celui-ci.