Informations générales
Événement : 84e Congrès de l'Acfas
Type : Domaine
Section : Section 400 - Sciences sociales
Description :Sous ce large vocable touchant tour à tour les questions environnementales, sociétales, éthiques, juridiques, historiques et plus généralement les politiques, le domaine de recherche « Nature, transformation et gouvernance de la société et des institutions » regroupe en fait une grande variété de sujets, de questions, de territoires et d’approches méthodologiques.
Fidèles à l’esprit des congrès de l’Acfas, les approches méthodologiques les plus diverses y sont mises en évidence, avec une prédilection pour les présentations comparatives, interdisciplinaires, voire transdisciplinaires, c’est-à-dire celles qui osent s’aventurer au-delà des cadres stricts des disciplines. En ce sens, les regroupements thématiques à l’intérieur des séances sont plutôt nominatifs et ne se veulent en aucune manière un frein aux avancées théoriques innovatrices en sciences humaines et sociales.
Dates :- Andrée De Serres (École des Sciences de la Gestion (ESG) - UQAM)
- Yves Laberge (Université d’Ottawa)
Programme
Droit et procédures
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« Les jurés ont déclaré que c’était vous qui l’aviez commis » : crimes et justice à Montréal durant l’après-guerreNathalie Ricard (UQTR - Université du Québec à Trois-Rivières)
Les travaux en histoire de la justice criminelle au Québec concernent pour la plupart la période antérieure au milieu du 20e siècle, de même que les juridictions inférieures. Notre étude met à contribution les archives de la Cour du banc du Roi (CBR). À l’époque, cette appellation recouvre deux réalités institutionnelles. Ce tribunal avait pour mandat, en première instance, de juger les crimes les plus graves du Code criminel (meurtres, viols, etc.). Il siégeait aussi en appel, tant en matières civiles que criminelles. Certes, l’histoire de certains crimes majeurs est maintenant mieux connue. Or, l’éventail des procès criminels d’envergure doit être pris en compte. La présente communication, basée sur des méthodes quantitatives et qualitatives, a pour objectif de brosser un tableau des affaires criminelles instruites en première instance par la CBR du district de Montréal entre 1945 et 1960. En quoi ces archives traduisent-elles les conflits et déviances qui marquent la période d'après-guerre? D’abord, nous analyserons la nature et l'évolution des causes entendues par la CBR. Les circonstances de ces crimes seront aussi examinées. Ensuite, nous établirons le profil des accusés. Enfin, il sera question des différents parcours que peuvent emprunter les affaires. Nous ferons état, entre autres, de l’importance croissante des crimes contre la propriété, de la montée du phénomène de récidive et du recours plus fréquent aux plaidoyers de culpabilité.
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La désuétude en droit constitutionnel canadienAmélie Binette (Université Laval)
En 1867, l’attachement du Canada à l’Empire exerçait encore beaucoup d’influence auprès des Pères de la Confédération, loyauté historique d’ailleurs cristallisée par l’A.A.N.B. Le statut politique du Canada ayant évolué vers l’acquisition progressive de son indépendance, sans rupture brutale avec le Royaume-Uni, il en résulte plusieurs dispositions en décalage avec les pratiques politiques actuelles. L’intangibilité des dispositions rigides de la Constitution, amplifiée par l’adoption de la Partie V de la LC1982, conduit à un fossé entre le droit formel et écrit et le droit constitutionnel au sens large, et ce, pour des pans entiers des institutions canadiennes. Se produit alors une « désuétude » des règles écrites de la Constitution. Cette communication vise donc à partager les résultats préliminaires sur la définition de ce phénomène singulier dans l’évolution du droit constitutionnel canadien. Il s’agit plus particulièrement d’en cerner sa nature, ses conditions d’application et ses effets. À travers la théorie de la force normative, cette présentation s’efforcera d’identifier les conditions d’existence de la désuétude (valeur normative), sa reconnaissance par les acteurs politiques (portée normative), et son évaluation par le pouvoir judiciaire (garantie normative). Elle confrontera, du même coup, les conclusions obtenues à celles fournies par l’interprétation évolutive plus classique des normes constitutionnelles, imagée, au Canada, par la métaphore de l’« arbre vivant ».
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Le concept d’« intérêt supérieur de l’enfant »? : usages et non-usages dans la jurisprudence québécoise relative à l’incarcération d’un parentSophie De Saussure (Université d’Ottawa)
La perspective traditionnellement privilégiée en droit criminel moderne est centrée sur la personne reconnue coupable d’une violation du Code criminel. Or, lorsqu’unjuge opte pour une peine d’incarcération au moment du choix de la sentence, cette décision peut indirectement produire des effets sur d’autres acteurs, notamment sur les enfants de la personne incarcérée, qui se voient entre autres confrontés à des problèmes psychologiques, sociaux et économiques. Notre proposition vise à engager une réflexion sur la manière dont le concept d’« intérêt supérieur de l’enfant », consacré par l’article 3 de la Convention internationale des droits de l’enfant, pourrait servir de point d’ancrage afin de décentrer la perspective traditionnelle et de penser autrement le droit criminel, droit construit autour des théories classiques de la peine qui sont centrées sur l’affliction et l’exclusion sociale. Pour ce faire, nous proposons de rendre compte des usages et non-usages de ce concept dans la jurisprudence québécoise récente en matière criminelle. Nous explorerons si et comment ce concept est employé par les magistrats lors de la détermination de la peine, présenterons les jugements les plus pertinents en la matière et proposerons une réflexion sur la manière dont ce concept pénètre ou non cette étape du processus judiciaire. Cette analyse permettra de discuter du potentiel représenté par le concept d’« intérêt supérieur de l’enfant » en tant qu’innovation pénale.
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L’obligation de tests sur les animaux pour les produits cosmétiques importés en Chine et le protectionnisme au sein de l’Organisation mondiale du commerce : une incompatibilité?Sabrina Tremblay-Huet (UdeS - Université de Sherbrooke)
L’Organe d’appel de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) confirma en mai 2014 la décision du Groupe spécial d’accepter l’argument de l’Union européenne selon lequel la prohibition des produits dérivés du phoque est nécessaire à la protection de la moralité publique. Le vent tournerait-il en la faveur d’un traitement éthique des animaux en matière de commerce international? Les manufacturiers de produits cosmétiques importés en Chine sont tenus de procéder à des tests sur les animaux afin d’accéder à ce marché. Le fardeau de la preuve concernant l’accusation de mesures protectionnistes devrait-il être inversé au bénéfice des États ne requérant pas que les produits cosmétiques soient testés sur les animaux, en cette conjoncture sociohistorique dans laquelle les consommateurs sont de plus en plus sensibles à la question, et les États de plus en plus nombreux à bannir de tels tests? La position chinoise d’obligation de tels tests constituera le sujet d’analyse de cette communication, à la lumière du concept de protectionnisme. Cette réflexion sera enrichie par les théories du constructivisme et du pluralisme juridique. Nous proposons que ces normes de consommation se cristallisant de plus en plus sont potentiellement en telle compétition avec les normes de l’OMC en matière de hiérarchie des impératifs du commerce par rapport aux considérations d’éthique animale, qu’il faudra nécessairement arrimer ces courants normatifs parallèles.
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Le non-verbal des témoins lors de procès : quand la forme l’emporte sur le fondVincent Denault (UdeM - Université de Montréal)
L’évaluation de la crédibilité est « une question omniprésente dans la plupart des procès » (R. c. Handy, 2002). Toutefois, lorsque les témoignages sont contradictoires, cette évaluation repose notamment sur des interprétations, nuances et impressions résultant de l’observation du « comportement du témoin et [de] sa façon de répondre aux questions » (R. c. D.A.I., 2012). Cette présentation orale est le résultat d’une analyse qualitative (méthodologie de la théorisation enracinée) des jugements de tribunaux administratifs québécois (Commission des lésions professionnelles, Tribunal administratif du Québec, etc.), de 2002 à 2015, où les décideurs ont décrit leur appréciation du comportement non-verbal de témoins afin d’évaluer leur crédibilité. L’objectif étant de comprendre le poids accordé à la forme (plutôt qu’au fond) des témoignages, l’analyse de ces jugements permet de conclure que l’appréciation du comportement non-verbal de témoins peut affecter l’issue d’un procès, même si cette interprétation n’a peu ou pas de lien apparent avec les connaissances validées et reconnues scientifiquement. Dans un premier temps, les conséquences potentiellement désastreuses de cette appréciation seront discutées, dont celles sur les individus qui se représentent seuls devant les tribunaux. Dans un deuxième temps, vu la popularité de certaines fausses croyances sur le non-verbal, des pistes de solution conformes à la littérature scientifique seront proposées (Vrij, 2008).
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Le nouveau Code de procédure civile et l’accès à la justice : réflexions sur l’élaboration d’une règle québécoise d’interprétation des lois bilinguesÉric Poirier (UdeS - Université de Sherbrooke)
Les difficultés que peut engendrer la traduction des lois du français vers l’anglais et ses conséquences sur l’accessibilité à la justice sont bien connues. Les traductions sont notamment susceptibles de provoquer une multiplication des litiges et de réduire l’intelligibilité du texte de la loi. Or, avec l’adoption du nouveau Code de procédure civile (qui entre en vigueur en 2016), dont l’un des objectifs est d’améliorer l’accès à la justice, le législateur a décidé d’abroger l’article 3 de l’ancien Code et de se retirer du droit de l’interprétation bilingue. Celui-ci s’en remet donc aux règles d’interprétation développées par les tribunaux. L’auteur constate (à la lumière d’une étude de la jurisprudence de la Cour suprême du Canada) que ces règles ont été construites au gré des litiges provenant de plusieurs juridictions canadiennes, sans égard au processus québécois d’adoption des lois. Il observe également (au terme d’une revue de la littérature) que les règles d’interprétation en question reposent sur une théorie (celle de la valeur égale des deux textes) dont l’objectif n’est pas de favoriser une justice accessible. Dans les circonstances, d’autant plus que le législateur reconnaît la relation entre l’accès à la justice et la rédaction des lois, l’auteur se questionne sur l’opportunité d’élaborer une règle québécoise d’interprétation des lois bilingues. La proposition originale se veut respectueuse des objectifs du bilinguisme législatif et de la tradition québécoise.
Sociologie
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Quelle légitimité pour les experts? Luttes pour le cadrage de la controverse sur le gaz de schiste en France et au QuébecSébastien Chailleux (Université Laval)
La communication interroge le processus de recours à l'expertise scientifique et technique en France et au Québec à propos de la controverse sur le gaz de schiste. En reprenant la question de la limitation de la participation publique au forum scientifique posée par Collins et Evans (2002; 2007), je démontre que la tentative de poser une frontière entre forum scientifique et politique est vaine et génère un risque de décision technocratique favorable aux intérêts des porteurs de projet. Plutôt que de soutenir le danger d'un populisme technologique, je montre que la focale doit être faite sur le processus de cadrage sociopolitique d'une controverse. L'exemple du gaz de schiste est mobilisé afin d'illustrer un cadrage sur la gouvernance au Québec et un recours à une expertise interdisciplinaire favorisé par la participation publique issue du BAPE. A l'inverse, le cas français montre un cadrage sur la technologie de fracturation hydraulique qui conduit à un confinement de l'expertise aux seules géosciences dans les rapports officiels. Les tentatives d'imposition d'experts ex ante valident la tendance des gouvernements à soutenir les porteurs de projets tandis que la détermination d'une expertise pertinente n'apparait qu'ex post. La communication se base sur une série d'entretiens, un corpus de presse écrite et l'analyse de divers rapports officiels.
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La nécessaire quête des « raisons communes » : liberté et participation politique dans l’oeuvre sociologique de Fernand DumontNicolas Gauvin (Université d’Ottawa)
Dans l'oeuvre sociologique de Fernand Dumont,on peut retrouver de nombreuses interrogations concernant le devenir de l'homme au sein de la modernité. La modernité, chez Fernand Dumont, se caractérise par la domination d’une rationalité située en dehors de toute culture vécue et commune. Elle se traduit plus précisément par une autonomisation des processus socio-économiques de la volonté humaine ( le marché en est l'exemple le plus clair ). L'homme, à défaut d'avoir une véritable prise sur le devenir de la société, va se réfugier dans la confortable sphère privée de son existence dans laquelle il pourra faire ce que bon lui semble. Dans cette communication, nous proposon l’hypothèse suivante: cette critique de la liberté moderne de Dumont l'amène à suggèrer une liberté alternative particulière qu'il définit comme étant une forme de participation. Nous allons démontrer que la participation, telle que l’entend Dumont, renvoie à l'inscription du sujet au sein de la Cité. C'est à partir de cette inscription qu'il peut élaborer avec autrui des "raisons communes", c'est-à-dire des finalités collectives qui orientent le devenir d'une société.
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Penser la religion en diaspora : une étude de cas sur la Diyanet à MontréalZehra Sahin (UdeM - Université de Montréal)
Dans cette communication, je propose de penser la religion en diaspora selon le postulat d’un modèle de champ religieux "transplanté" (Bastenier & Dassetto 1984). Il s’agit, dans cette optique, de mettre à jour la présence de communautés musulmanes en diaspora (Saint-Blancat 2004), et en particulier en Occident (Cesari 2004 ; Haddad & Smith 2015). Sur la base d’une recherche sociologique sur l’islam institutionnel en diaspora, je me penche sur l’étude du cas des fonctionnaires de la Diyanet (Direction des affaires religieuses en Turquie) à Montréal. Il y a certes la question migratoire, mais il faut aussi considérer celle de l’impact de la gouvernance du religieux par l’État dans une dimension transnationale. Dans mon analyse, la réflexion sur le champ religieux en diaspora fait appel aussi bien à la question du monopole de l’État (Bourdieu, Weber) qu’aux activités des ONGs religieuses transnationales en contexte migratoire. Enfin, dans une perspective de sociologie politique, je propose de penser la religion en diaspora dans le cadre d’une réflexion théorique sur le thème, toujours d’actualité, du « Vivre ensemble ».
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L’évolution de la représentation de la vice-présidence américaine dans les séries téléviséesGabriel Thériault (UQAM - Université du Québec à Montréal)
La culture populaire est un lieu intéressant afin d’étudier la question politique. Les produits de la culture populaire comme les séries télévisées et les films sont de plus en plus consommés et deviennent pour plusieurs des sources d’information politique. Il est important de s’informer sur leur façon de représenter le politique.
Nous proposons d’étudier l’évolution de la représentation de la vice-présidence américaine, fonction politique souvent délaissée et sous-estimée, à travers les séries télévisées américaines.
Nous utilisons la théorie du cadrage afin de voir comment la fonction fut cadrée dans la culture populaire. La vice-présidence Cheney nous sert de point de référence pour y tracer une évolution. Celle-ci marqua l’imaginaire quant aux pouvoirs de cette instruction souvent décrite comme impotente. Pour effectuer cette analyse, nous présenterons les traits associés à l’origine de la vice-présidence de Cheney selon Joel K. Goldstein.
Nous étudions les vice-présidents dans les séries suivantes :The West Wing, Homeland, Veep et House of Cards.La recherche se développe autour de l’analyse de quelques épisodes de ces séries.
Nous concluons que la vice-présidence Cheney eut une influence sur l’évolution de la représentation de la vice-présidence en la dépeignant comme de plus en plus puissante et influente. Néanmoins, il faut apporter certaines nuances alors que des préjugés historiques à l’égard de la vice-présidence sont toujours présents à travers ces séries.
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La collaboration interorganisationnelle : étude du cas de l’Alliance sherbrookoise pour les jeunes en santéKyanne Ste-Marie (UdeS - Université de Sherbrooke)
La proposition présente les résultats d’une analyse qualitative des enjeux de la collaboration inter-organisationnelle basée sur une étude empirique (22 entrevues semi-dirigées à travers le prisme des cinq dimensions du modèle conceptuel de Thomson, 2009) des mécanismes de collaboration mis en place par l’Alliance sherbrookoise pour les jeunes en santé. L’Alliance est composée de grandes organisations publiques sherbrookoises, soit le CIUSSS, la Commission scolaire de la région de Sherbrooke, la Ville de Sherbrooke et le Réseau des centres de la petite enfance.
La recherche a comme objectif de comprendre comment les processus collaboratifs au sein de l’Alliance affectent son fonctionnement. L’étude du fonctionnement de l’Alliance permet de saisir la complexité des enjeux entourant les collaborations inter-organisationnelles, une compréhension essentielle pour éventuellement outiller et accompagner les organisations sujettes à ce type de pratiques collaboratives.
Les résultats générés par cette étude ont permis de dresser un portrait des processus entourant la collaboration inter-organisationnelle à l’Alliance, ce qui mène à une compréhension plus fine de son fonctionnement actuel, de ses forces, de ses limites et, surtout, des leviers de changements efficaces pour l’organisation. Dans un spectre plus large, la recherche contribue à nourrir les discussions entourant le développement de modèles de gouvernance plus ouverts et collaboratifs.
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Le design communautique : démarche transdisciplinaire et d’intelligence collaborative pour pallier les pénuries de médicaments au QuébecJessica Roland (UQAM - Université du Québec à Montréal)
En 2012, une pénurie de médicaments frappe les hôpitaux canadiens lorsque Sandoz, fournisseur de la moitié du marché des injectables, se trouve dans l’impossibilité d’approvisionner le réseau hospitalier. Le Comité directeur multilatéral sur les pénuries de médicaments au Canada mandaté par le gouvernement fédéral voit le jour cette même année pour une meilleure compréhension de cet écosystème. En juin 2015, le Comité fait la lumière sur la fragilité du système ainsi que du besoin de collaboration quant aux pratiques de gestion de la chaîne d’approvisionnement. Considérant les rationalités de profit et politico-économique de l’industrie pharmaceutique (Nahon-Serfaty, 2009), il est contre-intuitif de collaborer dans cette économie de marché.
Dans cet ordre d’idée, un regard vis-à-vis les discours véhiculés est essentiel pour comprendre ce manque de collaboration. Pour ainsi agir sur la fragmentation du discours en relation avec les pénuries de médicaments, nous mettrons à profit la transdisciplinarité (Jahn, 2012) à partir des 7 espaces du design communautique. (Harvey, 2014) Cette méthodologie créera un espace de réflexion et un cadre pour les participants à la recherche. Elle encouragerait l’émergence d’intelligence collaborative afin de mobiliser les attributs nécessaires pour favoriser la transparence et la collaboration sur une plateforme numérique traitant de ce sujet et ainsi prolonger le débat et les questions relatives aux transformations de cette industrie.
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Le rapport à la recherche des chargées et chargés de cours universitaires : Étude du cas de l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC)Christian Bélanger (UQAC - Université du Québec à Chicoutimi)
Les chargées et chargés de cours constituent l’un des corps de métier contribuant, de manière significative, au fonctionnement des différentes universités québécoises. Bien que leur contribution prenne forme dans le cadre des activités d’enseignements dispensées aux étudiantes et étudiants des 1ier, 2ième et 3ième cycle, elle ne s’y limite toutefois pas. Les activités de recherche constituent également l’un des champs d’action investi par ce corps de métier. L’étude d’un certain nombre d’informations nous permet la mise en exergue de l’existence d’une contribution des chargées et chargés de cours en matière de recherche universitaires. Quelles sont les formes que prend cette contribution ? Quels sont les facteurs amenant les chargées et chargés de cours à contribuer à la recherche ? L’étude de cas de la situation des chargées et chargés de cours de l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC) permettra la formulation de ces réponses, de même que la formulation de recommandations en ce qui a trait au soutien de ces dernières et derniers dans le cadre de leur contribution en matière de recherche universitaire.
Approches transdisciplinaires
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Hydrocarbures non classiques au Québec : un processus de coproduction de connaissances et de gouvernance de la fracturation hydrauliqueSébastien Chailleux (Université Laval)
La communication se propose de mettre en lumière le processus de coproduction de savoirs concernant la fracturation hydraulique mais aussi plus largement la filière des hydrocarbures non conventionnels au Québec. La fabrication des choix politiques est en effet passée à travers différents instruments institutionnels participatifs, scientifiques et législatifs. Ce processus d’influences réciproques a généré une zone de transaction entre les différents acteurs et leurs discours. En se basant sur la sociologie de la coproduction de S. Jasanoff (2004), cette communication démontre comment les opposants aux projets d’exploitation de gaz de schiste sont parvenus à renverser le soutien gouvernemental à cette industrie à travers des mobilisations sociales, la construction d’une contre-expertise, sa publicisation dans des audiences publiques et sa validation partielle lors de l’évaluation environnementale stratégique. Elle montre aussi la réplique gouvernementale qui parvient à reconstruire un régime de gouvernance prenant en compte les nouveaux savoirs mais autorisant la technologie controversée malgré tout. Basée sur une série d’entretiens, un corpus d’articles de presse, les rapports du BAPE (2011 ; 2014) et de l’EES (2014), mon analyse montre la coproduction d’un ordre sociocognitif et sociopolitique autour de la technologie de fracturation hydraulique et d’extraction des hydrocarbures non conventionnels.
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La gestion intégrée des documents et des archives dans les services publics québécois : le cas du constat d’infraction électroniqueMarie DEMOULIN, Cécile Gaiffe (UdeM - Université de Montréal)
Le projet HECTOR est un projet fédéral belge interdisciplinaire qui vise à une analyse des processus d’affaires dans les administrations en vue de l’amélioration de la gestion documentaire et de la fiabilité des services publics. L’objectif est la proposition de recommandations en faveur de l’implantation de la gestion intégrée des documents (GID) : soit une gestion unique des documents produits ou reçus en version papier et électronique. Ce type de gestion est encadré par différentes lois et se situe au croisement de plusieurs domaines tels que l’archivistique, l’informatique et le droit. Considérant la maturité de la GID au Québec, l'UdeM est partenaire du projet et est responsable d'une étude de cas concernant la gestion intégrée du constat d’infraction électronique à la ville de Québec. La ville de Québec est pionnière en la matière, car elle gère les constats électroniques depuis les années 80 grâce à différents acteurs : le Service de police, la Cour municipale et les Archives de la ville. Une analyse préliminaire, basée sur des entretiens et une série de modélisations, a été effectuée mettant en valeur les outils et les étapes de ce processus de travail. Des constats de succès et des points d’amélioration ont également été soulevés. Ces résultats intermédiaires doivent encore faire l'objet d'une analyse comparative avec les études de cas réalisées en Belgique afin de tirer des conclusions globales qui s'inscriront dans une optique de bonne gouvernance informationnelle.
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La défense territoriale du Québec : étude sur les travaux et la carrière du capitaine Joseph-René-Marcel SauvéBenoit Girouard-Sauvé (UdeM - Université de Montréal)
Ma réflexion part d’un constat tragique: les Québécois ne connaissent pratiquement rien des questions militaires et encore moins celles relatives au Québec spécifiquement, ce que j’ai pu amplement constater lorsque j’ai réalisé ma maîtrise en philosophie de la guerre. Afin de contribuer à vaincre cette ignorance, j’ai approché l’un des seuls Québécois qui aient traité avec compétence des questions militaires du Québec, particulièrement celle de la défense nationale. Cet homme est le capitaine René-Marcel Sauvé, qui a complété des études en Angleterre, Allemagne et Autriche, spécialiste en géopolitique et en logistique de guerre, en plus de ses 28 années de carrière dans l’armée canadienne, au cours desquelles il a notamment fondé le Collège militaire de Teshi au Ghana et conduit des troupes à Chypre. Il a passé toute sa vie à étudier la question de la défense du territoire québécois. Nous sommes en face d’un homme de grande expérience qui a suffisamment de bagage intellectuel pour donner une dimension théorique et conceptuelle à ses recherches. Il s’agit donc pour moi de faire ressortir ce que ses travaux nous révèlent sur notre histoire militaire, sur notre capacité à nous défendre et sur les savoirs militaires que nous ignorons et qui pourtant sont à notre portée. Il s’agit aussi d’étudier ses recommandations pour une armée québécoise non pas par le regard du militant, mais bien par celui de l’intellectuel qui doit évaluer la valeur objective de ses travaux.
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Capacité d’action et nouvelles modalités de gouvernance alimentaire à Montréal (Québec)Hugo Martorell (Université Concordia)
Les approches multi-partenariales et intersectorielles sont privilégiées pour décloisonner les différents espaces de prise décision. Ce type d’approche mise sur l’action collective en mobilisant des acteurs dans des domaines d’intervention administrativement isolé, tels que la santé, l’aménagement, le développement économique et social. La densité et la cohésion du réseau sociotechnique sont des facteurs permettant de qualifier la capacité d’agir collectivement sur des enjeux complexes. Suite à plusieurs essais et erreurs qui ont tenté d’occuper un espace institutionnel vacant durant la période 1990-2015, une initiative para-municipale à adopter une approche multi-partenariale et intersectorielle pour ‘mieux gouverner’ le système alimentaire montréalais. Cette recherche se base sur une pluralité méthodologique, considérant une année et demi d’observation participante, un sondage en ligne et des entrevues ciblées. Nous présenterons les résultats préliminaires d’une démarche d’évaluation qui tente notamment, via l’analyse des réseaux sociaux, de visualiser la dynamique partenariale. Par ce biais, cette communication espère contribuer au dialogue sur l’institutionnalisation de nouvelles modalités des gouvernances de l’alimentation, l’agriculture et la santé publique au Québec.
Droit et approches interdisciplinaires
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Les défis de l’??éthicisation du droit : validité conceptuelle des lois éthiques en contexte québécoisEmmanuelle Marceau (Unité de soutien SRAP du Québec)
Le droit contemporain tend à intégrer de plus en plus de composantes éthiques, phénomène désigné par l’expression « éthicisation du droit ». À partir des résultats obtenus dans le cadre de ma thèse de doctorat en philosophie pratique, je me concentrerai sur les conditions de validité des lois éthiques, du point de vue de l’éthique, en contexte québécois. Afin d’explorer ces conditions de validité, je cernerai d’abord les principaux cadres conceptuels permettant d’assurer l’ancrage conceptuel du nouveau discours juridique. Par la suite, je présenterai une grille d’analyse permettant d’éclairer deux orientations philosophiques des lois éthiques, soit l’approche principiste et l’approche réflexive. À terme, mon analyse permettra d’exposer les conditions de validité conceptuelle des lois éthiques, tout autant que ses limites. De plus, je serai en mesure de discuter succinctement des multiples rapports existant entre le droit et l’éthique, afin de dégager quelques pistes de réflexions.
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Organisation légale des modes privés de règlement des différends en droit civil québécois : concordance avec la théorie psychosociologique de l’engagementMani Allamehzadeh (UdeM - Université de Montréal)
À défaut d’obliger les justiciables à recourir aux modes privés de règlement des différends (médiation, arbitrage, etc.) avant de s’adresser aux tribunaux, le premier article du nouveau Code de procédure civile oblige les parties à préalablement considérer ces procédures extrajudiciaires.
D’ailleurs, peut-on obliger les justiciables à recourir à des modes de règlement des différends qui sont par essence construits autour des principes du volontarisme et de l’auto-détermination, si oui, comment ? Si l’on prend l’exemple de la médiation, comment passer outre le paradoxe apparent de l’obligation légale de recourir à la médiation ou la conception qui perçoit la médiation imposée par un juge comme un oxymoron?
La théorie de l’engagement qui nous provient de la psychologie sociale offre de réconcilier ces principes qui à premières vues sembles irréconciliables : la soumission et la liberté. L’observation par Kurt Lewin du phénomène qu’il appela « effet de gel » a été le premier pas vers l’articulation de cette théorie. Certaines conditions particulières favorisent l’engagement dont le sentiment de liberté perçue qui devient ainsi un facteur de soumission.
Appliquée au premier article du Code de procédure civile via une grille analytique interdisciplinaire, cette théorie nous permet d’approfondir la réflexion juridique classique sur le sujet, nous permettant ainsi de développer des pistes de réflexion et d’action.
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Théorie et pratique de la disposition dérogatoire au Québec : quand la langue, l’identité ou le social priment l’individuelGuillaume Rousseau (UdeS - Université de Sherbrooke)
Problématique de référence :La disposition dérogatoire prévue à l’article 33 de la Charte canadienne des droits et libertés est plus souvent utilisée au Québec que dans le reste du Canada (sans parler de la disposition dérogatoire de la Charte québécoise des droits). Malgré cela, la théorie concernant cette disposition est plus développée dans le reste du Canada, entre autres grâce aux travaux de Tsvi Kahana. Existe-t-il tout de même une théorie de la disposition dérogatoire distinctement québécoise? Le cas échant, cette théorie est-elle est adéquation avec la pratique relative à l’emploi de cette disposition par le Québec?
Conclusions générales :Dans la réflexion des auteurs québécois autour de la disposition dérogatoire se dégage une vision cohérente: l’utilisation de la disposition dérogatoire peut être justifiée, notamment au nom de la démocratie et de la souveraineté parlementaires. Cela est vrai surtout si cette utilisation vise à protéger la langue et l’identité québécoise ou à permettre un progrès social et qu’elle n’enfreint pas les droits de la personne prévus par le droit international.Nous dénombrons 41 lois adoptées par l’Assemblée nationale qui comprenaient au moins une invocation d’une disposition dérogatoire, dont pas moins de 11 sont toujours en vigueur. Les archives parlementaires révèlent que la grande majorité de ces cas d’utilisation d’une disposition dérogatoire sont justifiés au nom d’un enjeu linguistique, identitaire ou social.
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Les liens entre punition et faute en droit comparé France-QuébecTiphaine Dourges (UdeS - Université de Sherbrooke)
L'étude du droit pénal canadien et du droit répressif français montre une différence des rapports entre droit pénal, punition et faute.
En droit pénal canadien, il existe des infractions criminelles, des infractions de responsabilité stricte et des infractions de responsabilité absolue. Les premières sont une réponse punitive aux atteintes aux valeurs sociales fondamentales ; celles de responsabilité stricte sont préventives et visent le respect des règles organisant des activités légales. Une faute est exigée dans les deux cas, mens rea subjective pour le premier et généralement objective dans le second. Cette dernière répond à l'exigence du principe de justice fondamentale selon lequel un innocent ne peut pas être puni, impliquant l'impossibilité d'une peine d'emprisonnement sans qu'une faute ne puisse être reprochée. Pourtant, la différence de nature, répressive et préventive, entre les deux types d'infractions, sert à justifier l'inapplication du principe ne bis in idem en cas de double poursuite.
En droit français, la faute a un lien plus étroit avec la punition. Des qualifications administratives sont parfois dites répressives et leurs sanctions punitives bien que l’emprisonnement ne soit pas encouru, notamment en raison de la faute exigée.
La compréhension de la nature des liens entre droit pénal, faute et punition se fera par une méthode comparative basée sur l'étude des ressemblances et différences des systèmes mais il ne s'agit pas de chercher à les harmoniser.
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L’influence des blogues juridiques sur les transformations du droitEdith Guilhermont (UdeS - Université de Sherbrooke)
La blogosphère juridique québécoise est depuis plusieurs mois en plein développement: de nombreux blogues ont été créés par des juristes favorisant ansi la circulation du savoir juridique au sein de la communauté des experts et bien au-delà dans l'ensemble de la société. Cette blogosphère fait preuve d'une assez grande vitalité: plusieurs blogues sont très actifs et proposent des contenus substantiels analysant l'actualité juridique de manière approfondie et critique. Ce constat étant fait, une question se pose pour les juristes : les blogues juridiques ont-ils une influence sur les transformations du droit ? Pour y répondre, la communication traitera tout d'abord du potentiel critique des blogues juridiques à travers, notamment,des exemples concrets observés dans la blogosphère québécoise. Il s'agira ensuite de discuter des raisons pour lesquelles au Québec, plus qu'aux Etats-Unis ou en France, on a une tendance à se méfier de ce nouveau support de la littérature juridique et à sous-exploiter son potentiel. On raisonnera alors essentiellement sur le cas des tribunaux québécois qui, tout en n'ignorant pas complètement ce type de contenu, n'ont encore jamais franchi le pas de citer un blogue juridique québécois à l'appui de leur raisonnement dans leurs jugements.
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L’accessibilité à la justice pour les travailleurs locaux, temporaires ou expatriés : réflexion autour de la violence du droit en contexte globaliséCamille Thomas (UdeM - Université de Montréal)
Le thème de la conférence s’articulera autour de la violence du droit en ce qui concerne le changement biopolitique du statut d’un individu dans un contexte de migration temporaire de travail. Après un terrain de trois mois à Trinidad et Tobago (Caraïbes) en janvier 2016 où j’effectuerais des observations et des entrevues avec des travailleurs trinidadiens, des expatriés, des travailleurs temporaires (philippins) ainsi qu’avec des membres des syndicats locaux, je délivrerais mes résultats préliminaires lors de cette présentation. En effet, je souhaite mettre en exergue la violence du droit concernant l’accessibilité à la justice d’un individu, qui passe du statut de citoyen lambda à celui de travailleur temporaire ou expatrié lors d’une migration temporaire de travail. L’accessibilité à la justice doit être envisagée comme les moyens qu’un travailleur temporaire/expatrié possède pour résoudre un conflit de travail. On parle ici, de médiation interne à l’entreprise ou d’un recours à l’appareil juridique trinidadien. De plus, nous comparons et analyserons l’accessibilité à la justice de ces travailleurs temporaires/expatriés avec celle des travailleurs trinidadiens, et ce, pour rendre compte du rôle joué par les syndicats locaux. L’objectif de cette présentation sera de soulever des pistes de réflexion au croisement de l’anthropologie politique, juridique et des Human Rights quant aux effets pervers de la globalisation sur le droit des travailleurs migrants temporaires.
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Les centres de justice de proximité comme solution de l’accès à la justiceKamel Khiari (Université Sainte-Anne)
Depuis quelques années, le système de justice canadien connait une véritable crise, confirmée en 2011 par une analyse de World Justice Project qui a classé le Canada au 9e rang sur 12 pays européens et nord-américains dans ce domaine. Ces pays ont été évalués en fonction de différents facteurs dont le dénominateur commun est celui de l’accès : accès à de l’information juridique, accès à une représentation, accès aux tribunaux civils, accès à une justice indépendante, etc.
Depuis quelque temps une formule assez originale est en train de connaitre beaucoup de succès au Canada, celle de la mise en place de ce qui a été dénommé, selon les provinces et la langue utilisée : Centres de justice de proximité, Law Information Centers, Legal Information Centres, Justice Access Centres, Accès Justice Access, etc.
Offrant des services gratuits (information juridique, soutien et orientation, accès à de la documentation et à des séances de formation, notamment), ce type d’institution est en train d’essaimer à travers le Canada (Alberta, Québec, Ontario, Colombie-Britannique, Nouvelle-Écosse).
La présente communication porte sur les résultats d’une recherche de terrain qui analyse les particularités de ce type de centre (historique, fonctionnement, financement, efficacité, contribution au désengagement des tribunaux, etc.), mais également leur capacité à offrir leurs services en langue française et ce, à travers l’exemple plus précis du centre de Montréal.
Droit comparé
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Réflexions sur le vol d’information : approche de droit comparé franco-canadienJeanne Huber (UdeS - Université de Sherbrooke)
L'avènement d'Internet et des nouvelles technologies a ouvert le champ à la création de valeurs dématérialisées. A ce titre, l'information tient une place à part : elle a acquis une valeur inédite, surtout lorsqu'elle est rare, et susceptible de représenter un gain ou une économie.
Pourtant, la protection juridique de l'information, en dehors du droit de la propriété intellectuelle, est faible, surtout au regard de la masse considérable de données méritant également une protection, du fait de leur valeur. L'infraction de vol est un exemple typique de cette absence de prise en charge, du moins par le droit criminel. La Cour Suprême du Canada, tout comme la Cour de Cassation en France, ont refusé d'élargir la compréhension du terme "chose", employé dans les textes légaux français et canadien du vol, aux biens incorporels.
De telles solutions concordantes sont l'occasion d'apporter un nouvel éclairage sur ce qu'elles révèlent de chaque droit national et des philosophies qui les sous-tendent. Les solutions sont peut-être identiques, mais les motifs qui les fondent ne le sont pas nécessairement. Ces solutions interrogent surtout sur le rôle que le droit criminel souhaite se donner à l'avenir face aux évolutions sociétales : si l'information a acquis une valeur importante, cela signife-t-il qu'elle soit désormais aussi l'objet d'une protection pénale à part entière ? Le droit criminel est censé défendre les valeurs fondamentales de la société. L'information en est-elle devenue une ?
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Le droit linguistique en France et au Québec : de l’intention républicaine à l’interprétation libérale?Éric Poirier, Guillaume Rousseau (UdeS - Université de Sherbrooke)
Problématique de référence :Les législations linguistiques québécoise et française visent toutes deux la consécration d’une seule langue officielle. Mais une fois devant le juge, font-elles pour autant l’objet d’interprétations similaires? Pour répondre à cette question, nous posons l’hypothèse que ces lois ont été inspirées par une intention républicaine, mais qu’elles ont fait l’objet d’interprétations libérales.
Conclusions générales : À la lumière des archives parlementaires et des textes des lois, nous concluons que les législations linguistiques québécoise et française ont été inspirées par une intention républicaine « à la française » (importance de l’État-nation, de la langue commune, de la démocratie, etc.).En France, sept des huit décisions pertinentes de la Cour de cassation ont opté pour une interprétation large du principe du français et ont donc respecté l’intention républicaine du législateur. Au Québec, six des sept décisions pertinentes de la Cour d’appel ont opté pour une interprétation stricte du principe du français et ont donc préféré une interprétation libérale (favorable aux droits individuels).
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Dix années de lutte contre la violence conjugale en France : une évaluation critique des dispositifs de protection légale des femmes victimesJean-Laurent Rosenstrauch (ÉCOLE DES HAUTES ÉTUDES EN SCIENCES SOCIALES)
Depuis dix ans, les pouvoirs publics ont développé en France une politique de lutte contre les violences conjugales, particulièrement sur le plan législatif. L’objet de cette communication s’inscrit dans le cadre d’une sociologie législative et judiciaire portant sur l’étude critique des dispositifs de protection légale des femmes victimes de violence.
Ainsi, nous pouvons présenter un bilan chiffré et qualitatif de l’application de la loi du 9 juillet 2010, réaliser une analyse interne et externe des documents législatifs ou des rapports associatifs et syndicaux. À ce propos, la loi du 9 juillet 2010 sur les violences faites spécifiquement aux femmes, inspirée par la loi espagnole sur la violence de genre, instaure une nouvelle garantie pour les femmes subissant des violences conjugales : l’ordonnance de protection, alors que déjà auparavant, la loi du 26 mai 2004 visait à mieux les protéger en favorisant l’éviction du conjoint violent du domicile conjugal. Nous devons souligner ici le maintien d’un faible nombre de faits déclarés de violence auprès des autorités policières et judiciaires en raison du phénomène d’underdisclosure (sous-divulgation d’un secret en raison de la honte pesant sur la victime). Enfin, les difficultés relevées dans l’application de l’ordonnance de protection s’expliquent aussi par un accès inégal des femmes victimes à la justice, dû aux inégalités de classe et géographiques.
Géographie, immigration et ethnicité
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Le migrant, menace ou sujet de droits? Une analyse de discours des débats parlementaires relatifs à la détention des migrants dans le cadre du projet de loi C-31Louis-Philippe Jannard (UQAM - Université du Québec à Montréal)
Deux discours s'opposent au sujet des migrants. D'un côté, un discours universaliste affirme que les migrants sont protégés par les droits fondamentaux. De l'autre, un discours sécuritaire mobilise des politiques spécifiques dont certaines relèvent du droit pénal. Cette convergence du droit administratif et du droit pénal dans le domaine de l'immigration est décrite par une abondante littérature comme la criminalisation des migrations.
Au Canada, la gouvernance de l'immigration suit une tendance mondiale marquée par un resserrement important des politiques migratoires. Notamment, la détention des migrants fait l'objet d'un usage croissant depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés en 2002. La réforme de 2012 a davantage durci ce régime.
Nous cherchons à savoir de quelles façons les discours universaliste et sécuritaire s'intègrent dans la loi canadienne d'immigration. À cette fin, nous procéderons à une analyse de discours des débats parlementaires et des interventions ministérielles relatives au durcissement du régime de détention des migrants dans le cadre du projet de loi C-31 adopté en 2012.
Nous espérons contribuer à une meilleure compréhension de la criminalisation des migrations au Canada et à une réflexion plus générale sur la manière dont la construction d’un « indésirable » se concrétise dans la gestion de groupes marginalisés par une société où dominent des impératifs sécuritaires.
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Immigration et présence de minorités racialisées dans les discours nationalistes sous-étatiques : une comparaison entre les cas québécois, basque, catalan, écossais et flamandMathieu Forcier (UdeM - Université de Montréal)
Si le rapport entre immigration issue du Sud global et nationalisme en Occident fait l’objet d’une abondante littérature, encore relativement peu d’études comparent des nationalismes sous-étatiques à cet égard. Or, l’immigration est devenue un enjeu de luttes de pouvoirs avec l’État central et il importe de saisir comment l’immigration et la présence de minorités racialisées sont discursivement intégrées dans ces nationalismes. Nous proposons donc d’établir les bases de comparaison entre les situations québécoise, basque, catalan, écossais et flamand. Refusant le biais de l’opposition entre nationalismes central/civique et sous-étatique/ethnique, un éclairage analytique serait fait sur les discours inclusifs comme les articulations spécifiques entre nationalisme et racisme. Présentant des résultats préliminaires issues d’une analyse de contenu mobilisant une approche comparative et critique des discours nationalistes, nous montrerons comment les questions relatives à l’altérité immigrante racialisée complexifient le marquage des frontières nationales au sein des États multinationaux. Un ensemble de facteurs explicatifs seront dégagés et nous mettrons l’accent de façon originale sur la compétition avec les discours nationalistes centraux, sur la dissonance entre discours officiels et sociaux, de même que sur la complexité et l’historicité des rapports de pouvoirs et des mémoires nationalistes structurant les représentations de l’altérité immigrante/racialisée.
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Les paysages de la phronesis : une approche méthodologique de la matérialité de l’éthique dans les territoiresMarie-Noëlle Carré (UdeM - Université de Montréal)
Les infrastructures lourdes, comme les dépôts de déchets, les autoroutes, les chemins de fer, les espaces industriels sont associés avec la marginalisation sociale, les coûts environnementaux, la dévaluation économique, l’abandon urbain. Cependant lorsqu’elles sont revalorisées, elles deviennent parfois des hauts lieux de la revitalisation urbaine, de l’investissement, de l’attraction touristique et de l’accroissement de la biodiversité... L’urbanisme a repéré et accueilli favorablement ces transformations comme signe du recyclage urbain et de la soutenabilité. Mais peu de travaux ont examiné la transformation des espaces dégradés en ressources territoriales sous un angle critique éthique. Or les choix qui l’inspirent supposent aussi une mutation profonde des principes normatifs à l’œuvre dans la gestion des territoires urbains et métropolitains. Aussi, ce projet propose d’associer la notion de paysage, comme système complexe et dynamique, et la phronosis, ou sagesse pratique et informée. Cette lecture méthodologique, à la croisée de la géographie et de l’éthique, mettra en lumière la nature des engagements qui guident le façonnement des infrastructures urbaines et métropolitaines. La réflexion montrera notamment comment l’attente et l’urgence sont utilisées comme stratégies de mise en valeur des territoires. On s’appuiera sur des exemples situés dans les Amériques, une région où la surreprésentation des espaces dégradés est propice à cette interrogation.
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La diaspora syrienne de Montréal face au conflit en cours en Syrie : grilles de lecture et prises de position politiquesJean-Sébastien Marsolais (UdeS - Université de Sherbrooke)
Constatant l’implication de membres de la communauté d’origine syrienne de Montréal autour du conflit syrien en cours, on peut s’interroger sur les différentes grilles de lecture qui guident le positionnement politique de ces individus. À cet égard, trois approches principales semblent émerger dans les médias ou la littérature scientifique: la dynamique révolutionnaire des Printemps arabes, l’ingérence de puissances étrangères impérialistes sur le sol syrien depuis les premiers soulèvements et les loyautés communautaires (ou ethnoconfessionnelles). Comment ces grilles de lectures influencent-elles le positionnement politique de membres de la diaspora syrienne par rapport au conflit en cours? Autrement dit, comment s’articulent ces différentes approches? Peut-on distinguer certains discours qui seraient dominants? Il est difficile de répondre à ces questions puisque l’on a encore très peu travaillé sur les diasporas arabes au Canada et leurs liens politiques avec le pays d’origine. Aussi, peu de recherches ont été réalisées ailleurs dans le monde sur les perceptions et les prises de positions politiques que l’on trouve à l’intérieur des différentes diasporas syriennes par rapport à la situation actuelle en Syrie. C’est donc à l’aide d’entrevues semi-dirigées que nous tenterons de dégager certaines tendances. Cette communication présentera des résultats obtenus dans le cadre de la réalisation d’un mémoire de maitrise en science politique.
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Proposition d’une grille de lecture de la conflictualité et instruments de gestion intégrée des zones côtièresAnne Fauré (ÉNAP - École nationale d'administration publique)
Les instruments d’action publique dits de concertation et de participation du public tel que ceux qui répondent à l’appellation Gestion intégrée des zones côtières (GIZC) sont souvent présentés comme des dispositifs neutres. Pourtant, ces dispositifs informationnels et participatifs ont des effets, ne serait-ce que dans leur prise en charge ou non de la conflictualité qui les entoure. Il est donc intéressant de s’interroger sur la capacité de ces instruments à se laisser pénétrer ou non par des idées conflictuelles et un discours plus polémique, notamment pour promouvoir un bien commun territorialisé.Dans ce travail, la conflictualité est considérée comme unélément essentiel à l’unité de la vie sociale (Simmel, 1908) et participe aux processus de développement local (Torre, 2006). Nous proposons d’exposer une grille d’analyse dynamique nous permettant d’expliquer le comportement et les trajectoires des acteurs d’un instrument à l’autre. Cette grille a été construire de façon inductive en revisitant le modèle théorique « exit-voice-loyalty » deHirschman (1970). Notre cadre théorique basé sur l’instrumentation de l’action publique nous a permis de décoder les effets inattendus de ces instruments. C’est l’étude de cas du territoire insulaire des Iles-de-la-Madeleine, soumis à l’arrivée potentielle de la filière gazière et pétrolière, qui nous a permis de construire de façon inductive une lecture de la conflictualité.
Science politique, gouvernance et démocratie
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Changement de paradigme dans les méthodes de négociation collective des employés du secteur public : le cas de la SuèdeJean-Patrick Brady (ÉNAP - École nationale d'administration publique)
Durant les années 1980, les employés du secteur public suédois ont vu leurs conditions de travail changer radicalement. D’un système de négociation centralisé où les salaires étaient fixés à partir de caractéristiques comme l’ancienneté, le modèle s’est décentralisé et les salaires sont maintenant individualisés, différenciés et possédant des primes à la performance. Comment expliquer un tel changement et l’appui des puissantes centrales syndicales, alors que cette réforme affaiblit pourtant le rapport de force des puissantes centrales syndicales suédoises suite à la décentralisation des négociations et à l’individualisation des conditions de travail? À l’aide du cadre d’analyse de Peter Hall sur les changements de paradigmes, nous expliquons dans cet article les transformations du paysage syndical suédois entre 1960 et 1980, alors que les syndicats de cols blancs prennent une place de plus en plus importante dans la société. Les syndicats suédois avaient des intérêts divergents et la perte progressive d’influence du syndicat des cols bleus, LO, au profit de syndicats de cols blancs comme TCO et SACO expliquent pourquoi une réforme de cette ampleur a été possible dans le contexte plus global de réforme de l’État. De plus, cette communication se terminera avec une ouverture face aux possibilités d’application de cette réforme au Québec.
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Bureaucratisation ou démocratisation du système de soins québécois : le cas des CLSC (1970-1980)Anne Plourde (UQAM - Université du Québec à Montréal)
À partir de l’analyse d’une réforme particulière, celle de la création des centres locaux de services communautaires (CLSC), ma recherche doctorale vise à contribuer à l’analyse de l’État-providence et du système de soins québécois ainsi qu’aux débats théoriques concernant la nature de l’État démocratique dans la société capitaliste. Je souhaite présenter les résultats préliminaires obtenus à la suite de recherches documentaires dans des sources de première main (mémoires, rapports, lois, documents et communications ministériels, archives syndicales et du milieu des affaires, etc.) ainsi que d’entretiens semi-dirigés avec des actrices et acteurs de l’époque. Ces résultats permettent d’éclairer un point aveugle de la plupart des analyses du système de soins québécois et de l’État-providence en général : dans ces analyses, le processus de bureaucratisation des institutions publiques est soit ignoré, soit non problématisé. Il apparaît alors comme le résultat quasi-automatique, voire inévitable, du développement des politiques sociales. Or, mes recherches suggèrent que la bureaucratisation qui a accompagné l’implantation des CLSC est le fruit d’un processus politique, c’est-à-dire de rapports de force et de luttes politiques entre actrices et acteurs sociaux, et qu’elle a été imposée contre une alternative qui se présentait à l’époque non seulement comme une possibilité réelle, mais aussi comme un des objectifs principaux de la réforme : la démocratisation du système de soins.
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« Il n’est pas du tout certain que l’intérêt public commande pareille extrémité » : bien public, protection de la biodiversité et tensions légales en conservation volontaire au QuébecOlivier Craig-Dupont (UdeM - Université de Montréal)
Depuis la fin des années 1980, la province de Québec est témoin d’une prolifération de statuts de protection écologique sur terres privées. Réserves naturelles en milieu privé, dons écologiques, servitudes de conservation et « fiducies foncières » se multiplient maintenant dans certaines régions du Québec méridional. Vu la nature privée des transactions foncières qui composent ce mouvement, ce dernier demeure largement méconnu. Il a pourtant un impact substantiel sur le façonnement de certaines politiques contemporaines relatives la conservation du patrimoine naturel au Québec. À travers une recherche détaillée de fonds d’archives ministériels, notre recherche retrace la genèse de ce mouvement de conservation volontaire au Québec. Nous montrerons comment les gouvernements canadien et québécois ont facilité la mise en place d’un réseau d’aires protégées privées largement financées par le trésor public, notamment par l’entremise d’avantages fiscaux. Cette décentralisation de l’intendance écologique vers le privé ne se fit pas sans débat. Les définitions du bien commun environnemental et de la propriété privée se sont en effet rencontrées dans un débat singulier à l’Assemblée nationale autour du projet de loi 149 sur les réserves naturelles en milieu privé. La reconstruction de ce débat révèle comment l’État fut un agent actif dans la décentralisation, la privatisation et la fiscalisation progressive de la conservation du patrimoine écologique au Québec.
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La question constitutionnelle chez les responsables politiques québécois de 1985 à 1991 : un long désenchantementJessica Riggi (UQAM - Université du Québec à Montréal)
En septembre 1990, quelques mois après l’échec de l’entente du lac Meech, le gouvernement libéral de Robert Bourassa met sur pied la Commission sur l’avenir politique et constitutionnel du Québec (Bélanger-Campeau). Plus encore, suivant les recommandations formulées dans les rapports Allaire et Bélanger-Campeau, ce gouvernement fait adopter, en juin 1991, le projet de loi 150 qui prévoit la tenue d’un référendum sur la souveraineté en automne 1992. Que s’est-il passé au Québec entre le 2 décembre 1985, date qui marque l’arrivée au pouvoir du nouveau gouvernement libéral enthousiaste de procéder au renouvellement du fédéralisme, et le 20 juin 1991, date à laquelle ce même gouvernement fait adopter par l’Assemblée nationale un projet de loi qui prévoit la tenue d’un référendum sur la souveraineté? Comment les responsables politiques se représentent-ils le Canada et, par le fait même, son système politique, le fédéralisme? Et qu’en est-il des représentations du Québec, de la souveraineté et du projet de loi 150? Comment ces représentations évoluent-elles dans le temps? C’est par l’adoption d’une perspective d’étude de la culture politique que nous répondrons à cette problématique, perspective qui nous permettra d’ailleurs de mettre à jour l’importance des représentations dans les luttes que se sont livrés les responsables politiques des différents partis politiques québécois (PLQ, PQ, Parti Equality) pour influencer l’issue du débat entourant l’avenir constitutionnel du Québec.
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La délibération démocratique comme problème herméneutiqueMaxime Huot Couture (UdeM - Université de Montréal)
Un véritable « tournant délibératif » a eu lieu au sein de la science politique depuis trente ans, produisait diverses théories de l’action politique et de la participation citoyenne. L’idéal délibératif s’est alors constitué dans une nouvelle quête de légitimité des institutions.
Alors que la littérature sur la délibération politique s’est penchée principalement sur les conditions de mise en œuvre de cet idéal, peu a été écrit sur la relation qu’entretient la délibération avec l’action politique prise largement. Autrement dit, quelle est la nature de l’ordre normatif sur lequel se base nécessairement la délibération et quelle est la nature de l'agent politique?
La première conclusion de cette recherche est que tout corps d’acteurs appelé à délibérer est confronté à un problème herméneutique, celui d’interpréter préalablement le bien commun et les fins de l’État. Cela pose alors deux problématiques subséquentes propres au régime démocratique : 1) l’indétermination de l’agent politique 2) le pluralisme culturel qui multiplie les fins de l’État.
En utilisant les outils théoriques de l’herméneutique philosophique et de la science politique pour traiter ces problématiques, il apparaît de façon préliminaire que l’intégration d’éléments plus délibératifs dans le régime démocratique doit se faire de façon fragmentée, au sein d’institutions particulières pouvant fournir un cadre normatif précis aux acteurs chargés de délibérer.
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Données ouvertes et enjeux de proximité : une contrainte à la libération des données? Le cas des municipalités québécoisesChristian BOUDREAU, Daniel J. Caron (ÉNAP - École nationale d'administration publique)
Dans la foulée du Gouvernement ouvert, les municipalités québécoises ont emboîté le pas et entrepris de mettre certains jeux de données à la disposition de leurs citoyens. Diverses initiatives ont vu le jour dans quelques municipalités au tournant de 2010. Ces initiatives visaient à permettre aux populations locales et aux développeurs intéressés d’avoir un accès direct aux données et permettre une meilleure exploitation de celles-ci en développant, par exemple, des applications qui facilitent la vie municipale. Or, après quelques bons coups, cette libération des données a connu un ralenti important. Les municipalités regorgent de données ayant souvent une incidence immédiate sur la vie quotidienne. Il suffit de penser aux services des travaux publics, à la circulation ou aux services policiers pour imaginer l’ampleur et la richesse de ces données. En même temps, ce qui caractérise l’administration municipale est sa proximité avec ceux qu’elle dessert. La nature des données en est directement affectée et fait en sorte que leur libération peut possiblement poser des défis singuliers quant à la sécurité et la confidentialité. Cette communication vise à faire connaître ces défis, les risques, opportunités et facteurs inhibiteurs ou facilitateurs autour de la libération des données en contexte municipal. La présentation est le résultat d’une enquête de près de trente entrevues dans cinq grandes municipalités québécoises et de certains de leurs services municipaux.
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La lente mais inexorable libération des données par les organismes publics provinciaux du QuébecChristian Boudreau (ÉNAP - École nationale d'administration publique), Danielj CARON
De plus en plus d’administrations publiques libèrent des données gouvernementales, communément appelées données ouvertes, pour combattre la corruption, pour favoriser l’innovation et pour diversifier la prestation électronique de leurs services. Ainsi, l’État devient une plateforme d’information que peuvent consulter ou exploiter les citoyens, la société civile et les entreprises. Dans cette mouvance vers une plus grande transparence de l’État, le gouvernement du Québec a créé en 2012 un portail de données ouvertes dans lequel des ministères et organismes publics ont été conviés à déposer des données d’intérêt public. Or, peu de données ouvertes ont été rajoutées dans ce portail depusi l’année de sa création. À partir d’une vingtaine d’entrevues réalisées auprès de gestionnaires et d’experts, la présente recherche met en lumière les conditions organisationnelles et informationnelles qui freinent les organismes publics provinciaux du Québec à libérer leurs données. Parmi les raisons invoquées, soulignons l’absence d’une stratégie gouvernementale ou ministérielle claire, la faible qualité de certaines données, la protection des renseignements personnels, la perte de revenus liés à la vente de données et la difficulté de repérer des données pertinentes au regard de leur réutilisation. L’étude aborde aussi des leviers pour faciliter la libération des données publiques par les ministères et autres organismes provinciaux.